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78. (1867) La morale de Molière « CHAPITRE IX. De l’Adultère et des Amours faciles. » pp. 166-192

Oui, l’auteur du Tartuffe a fait Amphitryon 586 ; celui qui a soulevé contre le suborneur hypocrite une indignation telle, que le public n’eût pas été content si le roi même n’était venu frapper ce monstre par sa justice exceptionnelle et terrible587 ; celui qui, craignant qu’on ne lui attribuât une seule des paroles prononcées par son odieux personnage, mettait en note : « C’est un scélérat qui parle588 ; » ce même homme, pendant trois actes qui sont trois chefs-d’œuvre de comédie, de poésie et d’esprit, a fait rire du noble Amphitryon et de la touchante Alcmène, trompés dans leurs honnêtes amours par le don Juan de l’Olympe. C’est justement parce que ces trois actes sont des chefs-d’œuvre, parce que les farces de Mercure et les terreurs de Sosie forcent absolument à rire589 ; parce que la conduite, la langue même et la versification de la pièce sont des modèles inimitables ; parce que rien enfin n’interrompt le plaisir délicieux du spectateur, et que le génie comique de l’auteur enlève d’un bout à l’autre le rire et les applaudissements, c’est pour cela que cette pièce est très-immorale590.

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