Je ne sais s’il faut attribuer ce changement à Louis XIV ; mais ce qui parait évident, c’est que chez les écrivains de la seconde génération l’inspiration est devenue moins originale et moins puissante, que la langue, plus délicate et plus souple, a perdu ce caractère de mâle vigueur qu’elle possédait chez Pascal et chez Corneille, qu’elle a conservé chez Bossuet et chez Molière, qu’elle a perdu avec Racine et Fénelon. […] Cet effacement des individus devant le roi ou la nation pouvait être un bien dans la société ; mais au théâtre il faut des caractères plus tranchés, des physionomies plus accentuées. […] Est-ce au spectacle de la cour, est-ce seulement à son organisation nerveuse, tour à tour passionnée et défaillante, que Racine doit ce caractère de son talent pendant sa jeunesse ? […] La Bruyère, qui écrivit ses Caractères vers la fin de la première moitié du règne (1687), peintre admirable de détails, n’est d’ailleurs mis par personne, je suppose, sur la même ligne que les grands moralistes qui l’ont précédé. […] Leur caractère est aussi original que leur intelligence et se reflète dans leurs écrits.