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56. (1819) Notices des œuvres de Molière (IV) : La Princesse d’Élide ; Le Festin de Pierre pp. 7-322

Molière, obligé de se conformer au caractère général de la fête dans le choix de son sujet, n’avait pas cru pouvoir mieux faire que de l’emprunter au théâtre espagnol, dont la plupart des productions offrent un mélange remarquable de fierté castillane et de galanterie moresque. […] Dans toutes, un amour mutuel, né subitement, et accéléré plutôt qu’arrêté dans sa marche par une suite de petits obstacles que suscite soit un préjugé, soit un malentendu, soit une bizarrerie de caractère, arrive à la conclusion désirée de part et d’autre, au moment où il en paraît le plus éloigné, et sans que les personnages intéressés aient eu autre chose à faire qu’à laisser enfin échapper de leur bouche un mot, un seul mot trop longtemps suspendu. […] En effet, la scène où dom Juan expose les avantages et les privilèges de l’hypocrisie, porte un caractère bien visible de ressentiment personnel et d’application particulière. […] Mais, si, dans Le Festin de Pierre, il n’y a point unité d’action, ni, par conséquent, unité d’intérêt, on peut dire que du moins il y a unité de caractère. […] Enfin, dom Juan, orné de mille qualités brillantes dont il s’est fait des instruments de vices, et capable de subjuguer ou de séduire tout ce qui l’entoure, soit par la vigueur de son caractère, soit par le charme de sa personne et de son langage, dom Juan est, si j’ose m’exprimer ainsi, un monstre sublime et le beau idéal de la scélératesse.

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