La scène ne doit point être prise pour une chaire de morale, ainsi que beaucoup de personnes se l’imaginent, croyant que sa devise doit être invariablement : Castigat ridende mores. […] L’intelligence proprement dite, la faculté de poursuivre les idées, de les associer, de raisonner, et les connaissances intellectuellement acquises et retenues par la mémoire, sont si peu les éléments créateurs de la raison en morale, du bon jugement, que des hommes d’une intelligence médiocre, d’une instruction nulle, peuvent, ainsi que le fait ressortir Molière, faire preuve de beaucoup de raison s’ils sont doués de bon sens, c’est-à-dire de sentiments moraux, d’instincts droits, équitables ; tandis que des hommes très intelligents et fort instruits, n’ayant que de mauvais sentiments et manquant de ceux qui inspirent la justice et les aperçus vrais, montrent par leurs paroles insensées et par leur conduite extravagante, immorale, lorsque leurs passions viennent les assaillir, qu’ils sont alors complètement dénués de raison. […] Beaucoup de savants ont marché sur les traces des grands physiciens et des grands naturalistes ; ils ont dépassé leurs devanciers par les progrès qu’ils ont accomplis et par des découvertes nouvelles. […] Molière a su rendre avec beaucoup de naturel ces différents effets, tous également vrais, des passions ; aucun d’eux ne lui a échappé. […] De Laprade suppose que l’idée de Molière à l’égard des femmes est réellement « … qu’une femme en sait toujours assez quand la capacité de son esprit se hausse à connaître un pourpoint avec un haut-de-chausse. » Bien que ces paroles soient mises dans la bouche de Chrysale, personnage qui fait prouve de beaucoup de bon sens lorsqu’il n’est pas sous l’empire de la colère que suscitent en lui les extravagances qui se commettent dans sa maison, il ne faut pas cependant prendre ces paroles au sérieux.