Ces représailles, ce retour offensif, cette habile diversion peuvent être loués comme fait de guerre et de stratégie, et au point de vue historique, c’est un trait curieux que ce renvoi réciproque d’une même injure ; mais il faut dire que cette tactique, quelque heureuse qu’elle soit en elle-même, enlève beaucoup de force au sermon : il n’y a plus unité d’action. […] Si vous n’aviez jamais eu cette pensée, votre Festin de Pierre ne serait pas si criminel… L’esprit de vengeance ne ferait pas chercher dans vos ouvrages des choses qui n’y sont pas. » Cette fois, Molière ne se soucia pas beaucoup de l’attaque ; il ne mit pas la plume à la main pour se défendre comme il l’avait fait pour L’École des femmes et pour Tartuffe lui-même : il laissa ce soin à des amis. […] Tout porte à supposer que, tout entier à l’administration de son théâtre et à la composition de ses pièces, il mit peu de temps de reste pour se livrer à la philosophie, qu’il n’en prenait que ce qui était conforme au bon sens ; qu’il ne s’occupait pas non plus beaucoup de religion, mais que l’impiété insolente, jointe aux mauvaises mœurs (ce qui était fréquemment le cas), lui était désagréable ; que la dévotion outrée, affectant l’horreur du théâtre, devait facilement se tourner pour lui en cagotisme et en hypocrisie ; qu’en un mot, sur toutes ces questions, il était placé au point de vue mondain et latitudinaire, sans aucune hostilité systématique et en tout cas sans dépasser le déisme14.