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98. (1886) Molière, l’homme et le comédien (Revue des deux mondes) pp. 796-834

On se plaint volontiers de la pénurie des renseignements à son sujet, mais, en remontant aux sources, on s’aperçoit vile que les contemporains du poète peuvent amplement satisfaire notre curiosité. […] Il avoit les yeux collés sur trois ou quatre personnes de qualité qui marchandoient des dentelles ; il paraissoit attentif à leurs discours, et il sembloit par le mouvement de ses yeux qu’il regardoit jusques au fond de leurs âmes pour y voir ce qu’elles ne disoient pas ; je crois même qu’il avoit des tablettes, et qu’à la faveur de son manteau, il a écrit, sans être aperçu, ce qu’elles ont dit de plus remarquable. — Peut-être, fait observer un des interlocuteurs, peut-être que c’étoit un crayon, et qu’il dessinoit leurs grimaces, pour les faire représenter au naturel sur son théâtre. — S’il ne les a dessinées sur ses tablettes, reprend l’autre, je ne doute point qu’il ne les ait imprimées dans son imagination.

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