Molière s’amusait beaucoup des discussions de ses aimables commensaux ; mais il y prenait rarement une part active, et se bornait presque toujours au rôle d’arbitre. […] Il s’amusait de ses contes et de ses bouffonneries ; et, quand il voulait égayer ses convives, il disait à cet excellent pantomime : « Baptiste, fais-nous rire. » Boileau, au contraire, jugeait Lulli avec une sévérité qui semble avoir dégénéré en la plus cruelle injustice, si, comme le prétend l’auteur du Bolæana, c’est lui qu’il voulut peindre dans ces vers de l’épître à M. de Seignelay : En vain, par sa grimace, un bouffon odieux À table nous fait rire et divertit nos yeux, Ses bons mots ont besoin de farine et de plâtre ; Prenez-le tête-à-tête, ôtez-lui son théâtre, Ce n’est plus qu’un cœur bas, un coquin ténébreux ; Son visage essuyé n’a plus rien que d’affreux. […] « Il a un lutin, disait-il, qui vient de temps en temps lui souffler d’excellents vers, et qui ensuite le laisse là en disant : “Voyons comme il s’en tirera quand il sera seul” ; et il ne fait rien qui vaille, et le lutin s’en amuse. » Chéri par des hommes dont les talents, dont le génie firent la gloire de leur siècle et sont l’admiration du nôtre, Molière ne fut pas recherché avec moins d’empressement par deux femmes qui se sont acquis une égale réputation : l’une, par son inconstance en amour ; l’autre, par sa fidélité envers ses amis ; toutes deux par leur grâce et leur esprit, Ninon de Lenclos et madame de La Sablière. […] Un auteur presque contemporain nous apprend que c’est en dînant avec elle et Ninon de Lenclos que Despréaux et Molière s’amusèrent à composer la cérémonie macaronique du Malade imaginaire. […] Jourdain, qu’il était de mauvais ton de s’amuser en entendant autre chose que des vers : « Molière est-il fou, disait le grand seigneur bel esprit, et nous prend-il pour des benêts de nous faire essuyer cinq actes de prose ?