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113. (1910) Rousseau contre Molière

Et de même qu’on pourrait se plaire aux actes du héros fantastique dont je parlais tout à l’heure, mais seulement d’un plaisir d’imagination amusée et sans songer ni à approuver ni à désapprouver, de même avec les Géronte et les Scapin on s’amuse par la partie fantaisiste de l’esprit, par le goût de l’imprévu drôle ou de l’énormité burlesque, sans songer qu’on ait affaire à des hommes, en dehors de toute appréciation, sans imaginer même qu’il puisse y avoir place à l’approbation ou au blâme. […] « D’autres auteurs, plus réservés dans leurs saillies, laissant les premiers amuser les femmes perdues, se chargèrent d’encourager les filous. […] Dans la seconde, en conséquence de la première, Don Juan s’amuse à montrer au pauvre qu’en péchant il gagnera, le cas échéant, plus qu’à prier ; et Sganarelle, représentant du bon sens populaire, non seulement ne proteste pas, mais appuie. […] Une sorte de coquetterie est permise aux filles à marier ; s’amuser est leur grande affaire. […] Cela dépasse un peu Sganarelle, dépasse un peu Arnolphe, dépasse même un peu, si l’on veut, Chrysale, mais de très peu et dans la mesure seulement où Rousseau souhaiterait, outre « être servi », être amusé.

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