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23. (1873) Le théâtre-femme : causerie à propos de L’École des femmes (Théâtre de la Gaîté, 26 janvier 1873) pp. 1-38

Le sujet qui paraît presque nu montre le seigneur Arnolphe, un brave homme, achetant à la campagne un sauvageon de fillette, l’apportant à. […] Autant le seigneur Arnolphe s’est donné de mal, autant cet étourneau d’Horace prend peu de peine ; il ne fait que paraître le long du mur, le nez au vent et le poing sur la hanche, entassant, Dieu merci, étourderies sur maladresses, et le pauvre petit espalier ensorcelé lui tend amoureusement toutes ses branches, secouant au-devant de la jeunesse qui passe le trésor de ses premiers fruits. […] Ce fut d’abord Ariste qu’il appela Chrysalde pour cette fois, un cousin germain de Philinte, un oncle imperturbablement paisible de notre provoquant Desgenais; ce fut ensuite Sganarelle vieux garçon, bien plus brave sous son pseudonyme d’Arnolphe, érigeant en système la férocité de ses pressentiments et cachant un rayon dans sa cave pour avoir le soleil à lui tout seul; puis Horace, un Cléanthe plus indiscret qui va criant à tue-tête la chanson de son bonheur; puis enfin, mais celle-là était une trouvaille : la perle dans sa nacre, l’ingénue à toute outrance, Agnès dont la naïveté fait feu au moindre choc, Agnès dont l’ignorance éclaire et qui a plus d’esprit dans le petit doigt de sa niaiserie que toutes les déniaisées du monde dans leur esprit. […] pourtant les déconvenues d’Horace vous donneront peut-être à penser qu’il n’est pas bon de conter ses petites affaires atout le monde, et quand vous verrez le seigneur Arnolphe lâcher sans façon le nom de son père, vous songerez à un de vos bons amis.

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