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129. (1910) Rousseau contre Molière

A un certain degré de bouffonnerie, le comique n’a pas la même source qu’il avait auparavant ; il procède de l’imagination et non plus de l’observation et dès lors n’ayant plus la même valeur morale, ou plutôt n’en ayant plus aucune, il n’est ni moralisant ni démoralisant ; il est au point de vue moral neutre et inoffensif, et dans une étude sur Molière moraliste ou immoraliste, il ne faut pas faire entrer les Fourberies de Scapin. […] Former aux bonnes mœurs l’esprit de ses enfants, Faire aller son ménage, avoir l’œil sur ses gens, Et régler la dépense avec économie Doit être son étude et sa philosophie. […] Or les facultés intellectuelles de la femme ne supportent pas le savoir : « La recherche des vérités abstraites et spéculatives, des principes, des axiomes dans les sciences, tout ce qui tend à généraliser les idées n’est pas du ressort des femmes ; leurs études doivent se rapporter toutes à la pratique ; c’est à elles à faire l’application des principes que l’homme a trouvés et c’est à elles de faire les observations qui mènent l’homme à l’établissement des principes. Toutes les réflexions des femmes doivent tendre à l’étude des hommes… Car, quant aux ouvrages de génie, ils passent leur portée ; elles n’ont pas aussi assez de justesse et d’attention pour réussir aux sciences exactes, et quant aux connaissances physiques, c’est à celui des deux qui est le plus agissant, le plus allant… à juger des rapports sensibles et des lois de la nature… » La seconde raison pourquoi le savoir des femmes n’est pas utile à l’homme, n’est pas relatif à l’homme, c’est qu’il lui est affreusement désagréable. […] Mais pour que la jeune fille soit réservée à la culture de son mari, puisque, encore une fois, c’est uniquement pour lui qu’elle doit être élevée et que le vrai moyen de l’élever exclusivement pour lui est de la laisser intellectuellement nulle, de manière que, quelque ignorant que soit son mari, il le soit moins qu’elle et ait le plaisir d’abord de la supériorité et ensuite de l’instruire lui-même : « Elle a du goût sans étude ; des talents sans art, du jugement sans connaissances [toutes combinaisons qui semblent souffrir quelque difficulté] , son esprit ne sait pas ; mais il est cultivé pour apprendre ; c’est une terre bien préparée qui n’attend que le grain pour rapporter.

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