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16. (1835) Mémoire pour servir à l’histoire de la société polie en France « Chapitre XI » pp. 89-99

À l’époque de son mariage, Montausier avait à peine trente-cinq ans ; depuis l’âge de vingt ans, il était au service et engagé dans des guerres successives, en Italie, en Lorraine, en Alsace ; en 1638, parvenu au grade de maréchal de camp, bien qu’âgé seulement de vingt-huit ans, il fut nommé gouverneur de l’Alsace, province alors d’une soumission équivoque, où le roi avait besoin d’un homme qui réunit l’art et le courage du guerrier au tarent et à la sagesse de l’administrateur ; en 1638, il se signala au siège de Brissac ; revenu à Paris pendant l’hiver de 1641, il fut rappelé à l’ouverture de la campagne par Guébriant devenu général en chef de l’armée d’Allemagne et peu après maréchal de France ; le maréchal, qui avait une grande confiance en Montausier, ayant été tué en 1643, celui-ci fut fait prisonnier, peu de temps après, à la déroute de Dillingen ; il ne recouvra la liberté qu’en 1644 ; alors enfin il lui restait encore un obstacle à franchir pour se marier ; c’était sa religion. […] Le mariage de Julie de Rambouillet avec le duc de Montausier est un fait de si peu d’importance historique, qu’il ne mériterait pas qu’on en recherchât les circonstances, s’il ne concourait d’abord à marquer l’époque où la société de l’hôtel Rambouillet commença à se dissoudre, et ensuite à faire tomber les applications que nos biographes modernes lui ont faites, des traits lancés par Molière en 1650 contre Les Précieuses ridicules. […] La dissolution de la société de Rambouillet fut l’époque ou commencèrent des sociétés d’un autre ordre, et où s’introduisit dans la langue un mot nouveau, dont la naissance atteste celle de la chose ou de l’espèce de personnes qu’il désigne, le mot précieuse.

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