Son esprit est comique, il est vrai, mais sa morale est sérieuse et son âme profonde : aussi l’aborde-t-on souvent sans le saisir, et pour apprécier les traits de son génie, ce n’est pas trop que de s’y reprendre à deux fois. […] que rien ne troublât le repos de son âme ! […] Un pareil ouvrage, pour être complet, devait être suivi de l’histoire « de cette troupe accomplie de comédiens, formée de la main de Molière, dont il était l’âme, et qui ne peut avoir de pareille23. » J’ai emprunté une grande partie de ce travail à l’estimable ouvrage des frères Parfait, heureux de trouver cette occasion de rendre hommage à ces laborieux écrivains, dont le sort a été d’être sans cesse pillés et jamais cités, mais qui, après s’être vus dépouiller pendant soixante ans par tous les compilateurs d’anecdotes, de dictionnaires et de galeries, ont encore aujourd’hui le mérite d’avoir donné au public l’ouvrage le plus complet, le plus exact, et le plus judicieux sur l’histoire du théâtre français. […] Accablé des détails où l’engageait la direction d’une troupe dont il était l’âme ; en proie aux chagrins domestiques dont sa femme ne cessait de l’abreuver ; frappé par les indignes calomnies des ennemis de sa gloire et de son génie ; interrompu dans ses travaux par des infirmités qui augmentèrent jusqu’à sa mort, il est étonnant qu’il ait pu, dans le cours de vingt années, composer trente et une comédies, dont la moitié sont des chefs-d’œuvre auxquels rien ne peut être comparé, et dont l’autre moitié renferme des scènes que ses successeurs les plus illustres n’ont pu égaler. »(Extrait en partie de la Vie de Molière, écrite en 1724.) […] Ici les dates sont précieuses, et l’on peut dire que leur rapprochement est comme un trait de lumière qui nous montre la grande âme de Louis XIV.