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2. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXX, numéro 251, 1er décembre 1907 »

Mais les méchancetés de Casanova appellent quelques réflexions : toutes les critiques qu’il adresse à son compatriote, on pourrait les retourner contre lui et peut-être y a-t-il dans sa diatribe moins de jalousie ou de malice que d’aigreur et de rancune contre sa propre destinée. […] De sorte que Casanova fait son propre procès en condamnant Algarotti par un mouvement de dépit très amusant. […] Possesseur d’une grande fortune et d’une superbe villa à Zola, près de Bologne, il avait installé chez lui, tout comme « le vieux Suisse des Délices » et le patriarche de Ferney, un théâtre où il jouait avec ses amis ses propres pièces, des comédies de Goldoni, des traductions de Voltaire. […] Mais ce que pouvait ou voulait faire Auguste dépendait bien plus de l’état de Rome que de sa propre volonté. […] Comment admettre, dès lors, qu’Auguste, qui leur obéissait, et qui leur obéissait d’autant plus qu’elles correspondaient à ses propres idées, eût voulu reprendre, fût-ce avec toutes les précautions et toutes les adresses possibles, le plan de César, ce plan démagogique dans ses moyens, monarchique dans son but ?

3. (1915) Articles du Mercure de France, année 1915

Comme tout autre État, dit-on dans les milieux où l’on réfléchit, l’Italie a un seul devoir : celui de veiller à ses propres intérêts. […] L’idée de leur supériorité essentielle les rend incapables non seulement d’apprécier le caractère d’autrui, mais même de s’avouer leurs propres intentions. […] Étant incapable de pénétrer ce qui se passe dans l’âme d’autrui il ne connaît pas sa propre âme et refuse aux autres les vertus dont il se sent possesseur. […] Gargano prétendit que le devoir de Benedetto Croce, était d’éclairer ses concitoyens, sur les motifs de leur propre conduite. […] Gargano, tous ces gens qui partent en guerre ne savent pourquoi et demandent que le philosophe les justifie à leurs propres yeux et leur fournisse la conscience qui leur manque !

4. (1917) Articles du Mercure de France, année 1917

On s’en aperçut bien quand Verdi s’avisa d’en avoir, par une évolution volontaire plus admirable en soi sans doute que pour ses fruits propres. […] Les autres, au contraire, voudraient que l’Italie possédât en propre au moins la côte et un certain hinterland à l’est de l’Adriatique. […] Jusqu’à quel point les objets et les corps peuvent-ils influencer notre propre mouvement ? […] Cette hypothèse est absurde au point de vue artistique : car elle impliquerait un arrêt de notre propre mouvement. […] Mais l’Allemagne nouvelle, seule parmi les nations, méprise tout idéal qui n’est pas celui de sa propre race.

5. (1900) Articles du Mercure de France, année 1900

Jamais peintre n’eût plus ému, ne serait allé plus haut dans la divination et dans le Beau que Claude Gellée, s’il eût réalisé l’admirable union du champ natal, — et du ciel qui lui était propre. […] Il ne songe pas davantage à faire la clarté dans son propre esprit. […] Si l’on veut le classer d’après ses propres théories, c’est incontestablement un mattoïde. […] Seulement Lombroso propage ainsi ses propres idées. […] Son système est de n’en avoir aucun, de ne se fier qu’aux événements, de ne croire qu’aux chiffres, de ne se dévouer qu’à ses propres intérêts.

6. (1896) Articles du Mercure de France, année 1896

Les yeux inquiets et tremblants de ma propre révélation devant l’inconnu s’ouvrirent, tout d’abord, pour la Primavera de Botticelli, tableau aimé par la gravure, et dont la séduction hantait mes désirs d’œuvre vers la grâce maladive des âmes fragiles, sœurs captivantes des iris frêles, qu’une caresse des lèvres fait mourir. […] Rosso imagine de reproduire simplement certaine scène vue de ses propres yeux : une jeune fille ayant retiré ses zoccoli s’étend tout de son long sur un tertre et baise dévotieusement un médaillon fixé au chevet du tombeau. […] Voici sa genèse : Rosso étant monté dans un omnibus urbain se trouve seul sur la banquette de gauche, ayant pour vis-à-vis cinq personnes sur la banquette de droite : d’abord sa propre concierge, puis une marchande de légumes, un négociant, une jeune ouvrière et un ivrogne. […] Le maître Rodin offre spontanément l’échange de la Rieuse contre une de ses propres œuvres : Le célèbre collectionneur Rouart commande son portrait à Rosso. […] Il faut se concentrer, méditer, se bien connaître, prévenir les influences, garder son allure et ses conceptions propres avant de se risquer.

7. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVIII, numéro 241, 1er juillet 1907 »

Et de même, l’effort pour libérer la morale religieuse de toute trace d’eudémonisme a conduit, et ne peut pas ne pas conduire, aux conclusions des quiétistes qu’il faut vouloir sa propre damnation, et, à cet effet, haïr Dieu et faire le mal. […] Et la vive résistance que le Vatican oppose aux idées des abbés Murri, Loisy, Houtin, Tyrrell, etc., dit assez clairement que, aujourd’hui encore, la religion aperçoit comme sa propre dissolution l’évolution de l’esprit religieux.

8. (1894) Articles du Mercure de France, année 1894

Or, ces choses ne sont point en dehors de nous, mais en nous, car il n’y a pas, que je sache, de gens qui aillent demander aux autres leur colère propre, leur douleur propre ou leur joie propre ; ils n’obéissent en cela qu’à une impulsion naturelle ; que sera-ce donc pour le génie, qui est créateur !

9. (1909) Articles du Mercure de France, année 1909

Mais l’Empire des Habsbourg aujourd’hui sollicite beaucoup plus l’aide de l’Allemagne qu’il ne lui offre son propre concours. […] Amour rejette l’amant hors de son être propre, et il lui fait changer de couleur. […] Ils n’ont pas demandé quel est le livre que l’intellectuel cénobite voudrait avoir toujours avec lui, pour accroître ou fixer le patrimoine de sa culture, c’est-à-dire sa propre richesse qui l’aidera à trouver sa propre expression. […] Il sent qu’il a le même génie que ces artistes, il veut apprendre d’eux le mode d’expression le plus parfait, le plus réel, pour traduire sa propre vision. […] Maintenant la société, composée d’un nombre illimité de Petruccio, était-elle plus propre à Mantoue vers la fin du dix-huitième siècle qu’à Paris de nos jours ?

10. (1912) Articles du Mercure de France, année 1912

Née du regard de Béatrice, née des profondeurs de sa propre âme, une sublime destinée d’amour emporte et conduit Dante à travers et par-delà tous les orages de la vie. […] Mais qu’il me permette de lui dire que si Murri est un grand éducateur d’étudiants, il n’a guère réussi comme éducateur de ses propres enfants. […] Il n’était qu’un aventurier, il l’avoue en propres termes. […] Nous savons, par notre propre expérience, ce que durent ces guerres avec des populations fanatisées, initiées en plus par les Turcs à nos modes de combat. […] Ce nom commun, se perpétuant dans ces conditions exceptionnelles, a presque la valeur d’un nom propre inchangé.

11. (1902) Articles du Mercure de France, année 1902

Morrice a été troublé, influencé comme les vieux maîtres, et s’il a délaissé le souci légendaire aussi bien que le goût des somptuosités propre aux époques plus récentes, Venise lui a parlé d’une voix authentique et spontanée, Venise apparaît et se meut dans son œuvre. […] Et cet air de famille n’est pas défini par quelques traits ou contours habituels au maître, mais encore par sa manière d’interpréter avec ses propres sentiments l’expression de ceux des autres… » Les habitudes de style sont les manifestations du caractère individuel, des conséquences de la conformation spéciale et de l’agilité de la main, aussi bien que les méthodes d’enseignement. […] Il charge l’abbé de Blignac de la surveiller, de le renseigner sur les moyens propres à relever l’école. […] Hewlett préface pour la troisième fois son ouvrage qui fut à diverses reprises peu et mal compris et déclare éprouver, à son sujet, avec toutes ses anxiétés, un peu de l’orgueil de la poule qui conduit sa couvée de petits canards à l’eau, les voit s’embarquer sur les flots et doit les laisser à leurs jeux nautiques, craintive, mais sentant bien aussi qu’ils accomplissent un plus fameux exploit que ses propres mérites de poule n’auraient pu espérer leur gagner. […] Les peintres du Midi réduisent l’objectivité au sujet même4, et tout en empruntant pour l’exprimer les ressources naturelles ils les subjectivent, ils les imprègnent et les saturent de leur propre personnalité.

12. (1908) Articles du Mercure de France, année 1908

Cela n’a pas besoin de démonstration et lorsque dans ses conseils pratiques le maître du Saint Jean avertit son disciple d’examiner les défauts de son propre corps et lui affirme que, s’il n’y prend garde, il les reproduira dans ses figures, il dit vrai. […] « Il semble à l’âme de l’artiste que la meilleure façon de figurer un homme est de recommencer le travail qu’elle fit pendant sa propre gestation ; elle se plaît donc à répéter les formes qu’elle choisit alors, en modelant son propre habitacle. » L’homme qui écrit pour lui-même ou pour des disciples se trouve dans une condition fort différente du contemporain qui destine ses pages à tout le monde. […] Souvenirs d’études italiennes ou intuition de son propre fonds, Dante-Gabriel Rossetti adore, du même culte, celle en qui il situe toujours la plus haute signification d’incorruptible beauté, de tendresse et de candide savoir. […] Voilà donc la figure très complexe qu’Alfieri créa de la souvenance historique et de la souvenance littéraire de l’Occident, et du mouvement propre à son pathos toujours furieux. […] Aujourd’hui ils écoutent en parlant de leurs propres affaires, comme s’ils assistaient à une séance de musique de chambre.

13. (1906) Articles du Mercure de France, année 1906

Et toutes choses furent nouvellement exprimées par l’artiste qui n’admettait, en réalité, d’autre dogme que l’impératif de sa propre idiosyncrasie. […] L’auteur du meurtre, Tullio Murri, était le propre beau-frère de la victime. […] La classe ouvrière et la classe possédante se trouvaient face à face, et les crises, qui sont le propre du système contemporain, surexcitaient peu à peu les oppositions. […] Ferrero a montré comment Auguste a fini par sacrifier son propre foyer à cette idée. […] Auguste ne peut sacrifier ainsi sa propre fille.

14. (1914) Articles du Mercure de France, année 1914

Carré a monté Francesca da Rimini avec l’adresse et la sollicitude avisée qui lui sont propres et qui s’attestent si favorables à l’illusion. […] En effet, leur plus grand mérite consiste à promettre quelque chose et à ne rien donner, sinon quelque bourde propre à faire rire. […] L’amour est à lui-même sa propre musique et sa propre poésie : il est comme l’éternité dans l’instant ; il n’a point besoin de se souvenir. […] Il a complété ses propres observations en puisant dans les rapports officiels de l’état-major et en utilisant ce que lui racontèrent des témoins dignes de foi. […] Nous lui faisons honneur de nos propres dépouilles. » (Entretiens sur l’état actuel de l’Opéra de Paris, Amsterdam, 1779, p. 154-155.)

15. (1901) Articles du Mercure de France, année 1901

Pour atteindre ce noble but, il a pris Venise-Anadyomène comme théâtre, Venise où toute grâce se double d’un reflet, où la beauté se dresse hors de son propre miroir, à la fois plus décevante et plus belle d’être multipliée pour le bonheur des yeux, et il a placé, comme entre deux infinis, la mer et le ciel, la mort et l’espoir, un couple d’amants qui, par hasard, savent jusqu’où peut aller la passion. […] Pourquoi cet étalage extraordinaire de phrases, d’images et de tableaux autour d’un poète aimant simplement une actrice, du créateur s’énamourant de ses propres créations ? […] Mais choisir un domaine aussi vaste que l’art italien en ses manifestations multiples durant quatre siècles, lorsque tant de villes ont été des centres de civilisation et les foyers distincts d’où rayonnèrent les arts dont notre civilisation occidentale est encore glorieuse ; acquérir une connaissance si certaine des artistes, de leur temps, de leurs œuvres, du mouvement qu’ils créèrent ou subirent, — qu’on mérite d’être consulté comme leur meilleur interprète, c’est plus que de la spécialisation ; c’est le travail d’un esprit étendu autant que lucide, heureux de comparer et de comprendre, — le propre d’une intelligence dont le commerce sera non seulement agréable toujours, mais susceptible encore de nous profiter. […] Il n’a suivi que la trace éclatante de son propre esprit. […] La mère de l’enfant tué survient, ivre de rancune : elle échange quelques mots avec Achille Lucchi, un de ces hommes qu’on lui a indiqués comme les plus résolus, et sans appuyer trop sur les détails, presque avec des sous-entendus, tout un complot se déroule à nos yeux, entrecoupé par la propre histoire d’Achille Lucchi, histoire navrante qu’il raconte lui-même, tableau fidèle de la vie du prolétariat et des malentendus qui règnent entre toutes les classes sociales.

16. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 »

S’il y eut bien de l’indécence, ce fut aussi une scène noblement tragique, que celle où l’ex-doge Ludovico Manini, le dernier doge de Venise, au moment de prêter serment d’obéissance entre les mains de Pesaro, son propre compatriote devenu commissaire autrichien, fut saisi d’une telle émotion qu’il tomba sans connaissance. […] La personnalité du premier Vivarini, Antonio, est un peu effacée par ses collaborations successives avec Jean d’Allemagne et son propre frère Bartolomeo.

17. (1904) Articles du Mercure de France, année 1904

La mélodie de ces airs y traduit musicalement des « étals d’âme » successifs mais abstraits, les variations d’une sensibilité humaine anonyme, et cela, précisément dans les situations où doit s’affirmer ou se trahir la personnalité propre de l’un ou l’autre des protagonistes. […] Les deux poètes, attirés par l’instinct de leur race vers ces « sentiers obscurs de la mer » dont parlait Pindare, ont souvent porté leur observation sur la vie des marins et des pêcheurs : ils y retrouvaient quelque chose de leurs propres émotions, de leur goût pour l’existence rude, saine et libre des flots. […] Plusieurs de ses nouvelles (Duchoux, l’Abandonné, Un Fils, le Champ d’oliviers) nous montrent directement un père ou une mère placés par la force des choses en face de l’enfant grandi, dont ils ignoraient l’existence, ou que leur intérêt les avait contraints d’écarter très loin de leur propre vie. […] Parmi les étrangers auxquels G. d’Annunzio a rendu l’hommage d’un souvenir trop fidèle, il n’en est pas dont les tendances, les visions et les habitudes d’artiste répondent mieux que celles de Maupassant à son propre tempérament. […] Entre ces deux extrêmes de l’inertie et de la force royale, il y a, pour les grands vassaux, une heure trouble, critique, et qui sonne précisément pour le connétable de Bourbon, dont la difficile destinée politique ne se trouve que trop étroitement doublée par sa propre destinée psychologique.

18. (1918) Articles du Mercure de France, année 1918

De nombreux rameaux se détachent du chaînon principal et forment un enchevêtrement de vallées, dominées par des sommets dont l’altitude moyenne atteint 1.500 mètres, propre à faciliter une résistance désespérée, mais également favorable aux surprises et aux combinaisons tactiques de l’assaillant. […] Piérard qui, « après une enquête au front, à Rome, à Milan, à Gênes », prétend que les causes de la retraite italienne sont « d’ordre exclusivement moral et politique » n’a à opposer que des racontars provenant évidemment de gens qui font des efforts désespérés pour endosser à autrui la responsabilité de leurs propres fautes. […] Sur sa propre mort, Baratta fit une terrible épigramme. […] Diviser solennellement les faits sociaux en manifestations des instincts et non manifestations, et sous-diviser les premières en manifestations propres et conséquentes, et celles-ci en logiques et non logiques comme celles-là en verbales et non verbales en précisant que les verbales ne se trouvent pas chez les animaux, tout cela est vraiment d’intérêt faible. […] Nous devons donc, dans notre propre intérêt, nous lier étroitement aux Yougoslaves, nous souvenant que les Yougoslaves sont avec nous et forment un peuple assez mûr pour se gouverner lui-même.

19. (1905) Articles du Mercure de France, année 1905

Combien était préférable la vie du séminaire, un peu trop méthodique, mais propre et jolie. […] Il avait les cheveux noirs, brillants, relevés sur un front haut et pâle, les yeux châtain très clair, le regard doux, la bouche bien dessinée : il était grand, svelte, rose, propre : on aurait dit une belle fille en travesti. […] Quelle forme est, de fait, plus propre à transporter la foule que le vers, cette forme ailée qui rachète tous les prosaïsmes et force l’attention par son rythme cadencé ? […] La situation intolérable que lui firent ses ennemis de Rome dans les premiers temps de la guerre contre Mithridate ne le contraignit-elle point, pour son propre salut, à une audace, à une liberté d’allures, à une exploitation effrénée des pays traversés, qu’on ne surpassa guère ? […] Quand il en trouve une à son goût, il la note, il s’en empare, il l’enchâsse dans un texte qui lui est propre, et c’est à peine si, dans le flot de paroles harmonieuses où elle roule, celui à qui il l’a empruntée pourrait la reconnaître.

20. (1895) Articles du Mercure de France, année 1895

Ces vieux maîtres vivaient encore de traditions, ils détenaient des secrets ; c’étaient les formules des byzantins insensiblement naturalisées et peu à peu rendues terrestres par l’étude du modèle ; c’étaient aussi leurs propres recherches et la connaissance qu’ils avaient acquise des sciences naturelles, qui, plus tard, mal employées, « employées trop pour elles-mêmes », furent le signal de la déchéance. […] On lit le livre, on y trouve la satisfaction de ses propres tendances, puis on le ferme, et la société poursuit son existence régulière, sans que rien soit venu déranger sa marche normale vers l’avenir.

21. (1913) Articles du Mercure de France, année 1913

Or l’idée qu’un homme se peut faire de Dieu n’est que la projection extérieure de sa propre nature. […] Mais, à l’opposite, sa propre adhésion, — exagérée et mi-imaginative — à Machiavel semble perdre de sa valeur comme leçon d’historique véridicité à l’adresse de l’époque de 1830, si l’on se dit que, par cette adhésion, Stendhal, en somme, fait le jeu de ses propres paradoxes bien plus que celui de l’esprit de Machiavel. […] Du propre ! […] L’empire avait trop peu de navires pour protéger ses propres côtes. […] Le croiseur avait belle apparence, était propre et bien tenu.

22. (1903) Articles du Mercure de France, année 1903

Il a nié la nécromancie et méprisé la hâblerie des spirites du xve  siècle, mais il a su mettre sa propre intelligence dans ses figures et y incarner sa pensée infiniment subtile pour l’admiration et l’éblouissement des siècles. […] Aventurier, fort instruit, sans doute cabbaliste, agitateur politique affairé, joueur, « né pour le beau sexe », comme il le dit lui-même, et né aussi pour être vagabond, cet homme, dont on ne se souvient maintenant que parce qu’il a écrit le récit de sa propre vie, était de cette rare espèce d’autobiographe qui ne vécut pas pour écrire, mais qui écrivit parce qu’il avait vécu et quand il ne put plus vivre. […] Si cet homme ne peut lui convenir par aucun rapport, quand même sa passion serait criminelle elle ne doit jamais s’en offenser, ni le maltraiter, elle doit être douce, le plaindre, si elle ne l’aime pas, et lui suffise de se tenir invinciblement attachée à son propre devoir. » À l’occasion, il touche aux sujets esthétiques, comme dans le fragment suivant qui commence par cette définition libérale de la beauté : « L’harmonie fait le beau, dit M. de S.  […] Je vois les deux innocentes qui ayant un bras étendu chacun sur leur propre ventre tenaient la main un peu courbée sur les marques de leur puberté, qui commençait à pousser. […] Le sien, le sien propre, pourtant, il faut le démêler, sous tant d’impressions diverses, et je le trouve dans l’harmonie de sa composition.

23. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXX, numéro 250, 15 novembre 1907 »

Il est absent des dictionnaires, le mot qui dirait la chose, le mot propre.

24. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 — Fin du tour d’Italie en 1811 — Dernière partie du « Journal » — Second séjour à Milan — Chapitre LXII »

Peut-être est-ce le propre d’une âme, source de grandes choses, de n’être pas gracieuse dans le moment de l’action où elle cherche de toutes ses forces.

25. (1916) Articles du Mercure de France, année 1916

Ce mouvement, que nous prêtons aux objets, et qui est notre propre mouvement, peut parcourir, sur les ondes hertziennes de notre sensibilité-intelligence, tout l’Univers. […] Aussi détonnons-nous d’ordinaire dans le mythe ou dans la légende et nous révélons-nous peu propres à incarner de frustes créatures. […] Ils n’ont pas agi, par droit propre ou par déférence d’autrui, comme médiateurs d’accords internationaux, pareils à ceux qui mirent un terme à la guerre de Trente Ans en 1668 et à ceux qui terminèrent le conflit germano-espagnol en 1885. […] Les opérettes seront données dans leur langue propre, conservant ainsi leur caractère et leur interprétation. […] Elle a produit aussi des œuvres tirées entièrement de son propre fonds.

26. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 — Fin du tour d’Italie en 1811 — [Premier extrait] — Chapitre LXX »

Les satires, pleines de mots propres que je ne comprends pas, m’ennuieraient également, je crois, quand je les comprendrais.

27. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVIII, numéro 242, 15 juillet 1907 »

Papini, qui l’attaqua dans la Stampa : c’est Prose ; une autre nous expose galamment le point de vue de l’occultisme : c’est Leonardo, la propre revue de M. 

28. (1911) Articles du Mercure de France, année 1911

« Et de faict, écrit-il, elle eut la hardiesse de mettre les mains sur celles-cy et de les publier mesme avec quelques œuvres, précédées d’un avertissement par lequel elle donnoit advis au lecteur qu’elle avoit heureusement trouvé un exemplaire de toutes les œuvres de Ronsard revues et corrigées par l’autheur et de sa main propre ; ce qui estoit absolument faux, comme elle me l’advoua elle-même, en me donnant cet échantillon d’œuvres corrigées. […] Jamais je n’atteindrai à une telle perfection… * De quel œil trop sévère regardait-il ses propres peintures, pour prononcer de pareilles phrases. […] J’entreprends, sur mon propre navire, une croisière.

29. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVI, numéro 234, 15 mars 1907 »

Parler de soi-même, c’est parler faux ou relativement à la chose dont on parle ou relativement à sa propre pensée. […] Ils rêvent de réaliser au dehors une beauté dont ils croient avoir l’image toute prête, dans leurs cœurs, et à peine ont-ils essayé de la réaliser, que l’image qu’ils en ont s’altère, se transforme sous l’influence de leur propre goût et de l’œuvre d’autrui.

30. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXX, numéro 249, 1er novembre 1907 »

Mais nous courons, ô Don Juan, nous courons plus vite qu’eux ; voici qu’ils rentrent sous la terre, couver leur économique bonheur… » Mais Don Juan n’écoutait pas le voyageur sentencieux, et à peine celui-ci cessa de parler qu’il reprit pour son propre compte : « Sous le masque de ma légende, il y a peut-être un sourire, un sourire amer, mais dans mon cœur il n’y a que l’angoisse toujours renouvelée de mes désillusions. […] Quelquefois les feuilles s’écartaient ou se ramassaient toutes vers le fond, et alors je voyais dans l’eau mon visage et je le fixais si longuement qu’il me semblait ne plus exister pour mon compte avec mon propre corps, mais être seulement une image fixée dans l’eau dormante pour l’éternité.

31. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVI, numéro 236, 15 avril 1907 »

Il l’a fait avec l’autorité qui lui est propre.

32. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 247, 1er octobre 1907 »

Papini haïsse et tue continuellement son moi passé, sous forme de son propre « moi » ou de celui d’un ami cher.

33. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVI, numéro 235, 1er avril 1907 »

Cette tragédie est en célébration d’une agonie dionysiaque. » Il résume la fatalité morte de Brando en ces mots : « Sa soif, il ne pourra l’éteindre que dans ses propres veines bondées. » Il parle aussi de la nécessité de la mort, pour que cette vie héroïque, qui n’a pas pu se réaliser, soit féconde, dans la lumière rouge du sacrifice.

34. (1899) Articles du Mercure de France, année 1899

C’était une vie de péchés brillants et d’amusements exquis ; Léonard devint un dessinateur fameux de spectacles ; prendre les choses telles qu’elles se présentaient à lui, voilà qui convenait merveilleusement aux qualités propres de son génie, composé presque également de deux sentiments, la curiosité et le désir de beauté. […] C’est une figure de sexe incertain, placée dans l’ombre de ses propres cheveux, la ligne de la joue qui touche cette ombre étant vivement éclairée, avec une pointe de volupté et de satiété dans les yeux et dans les lèvres. […] Voilà qui nous montre bien la manière dont Léonard choisissait ses élèves : c’étaient des hommes que distinguait quelque charme naturel du corps ou de l’esprit, comme Salaino, ou une naissance illustre et des habitudes princières, comme Francesco Melzi, — des gens ayant juste assez de génie pour recevoir l’initiation à son secret, mais disposés à effacer pour cela leur propre individualité. […] De même que nous l’avons vu se servir des épisodes de l’histoire sacrée, non pour eux-mêmes, ni pour les rendre simplement par la peinture, mais comme d’un langage symbolique pour ses fantaisies particulières, de même il manifeste son propre état d’âme en prenant une de ces femmes languissantes et en l’élevant comme Léda ou Pomone, comme la Modestie ou la Vanité, jusqu’au septième ciel de l’expression symbolique.

35. (1910) Articles du Mercure de France, année 1910

Et quand un Giglioli prend pour texte les objets de son musée, passe en revue les croyances des « sauvages », bien qu’il laisse au lecteur italien le soin de comparer la teneur et le mécanisme de ces croyances aux siennes propres, et de les trouver identiques, que fait-il, sinon préparer un public à de futurs professeurs dûment patentés ? Bref, le modernisme et le pragmatisme ne pourront se soutenir par leurs propres forces : et qu’on ait bien vu le danger de l’autre côté, rien ne le prouve autant que le zèle subit des Mgr Le Roy, des abbé Bros, des R.  […]  » Parmi cette « nombreuse matière exotique », Goethe citait sa propre Italienische Reise, dont Stendhal donnait les passages qu’il en traduisait comme lui ayant été contés par une Marchesina ! […] […] Aussi les peintres font, imprudemment beaucoup, leur propre portrait. […] Pierre Jean Jouve et nous désirerions qu’ayant accepté les leçons les plus conformes à son propre génie il se présentât en sa nue simplicité, sans être couvert par les ombres protectrices des demi-dieux qu’il évoque.

36. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVII, numéro 237, 1er mai 1907 »

En philosophie, la critique des sciences, de leurs méthodes et de leurs limites, et les études de psychologie, ont établi définitivement le champ propre des croyances, expression provisoire et obscure de la réalité profonde et totale, inaccessible à l’expérience et perçue et sentie par l’esprit qui ne peut orienter que vers elle les fins suprêmes de la vie et de l’activité consciente.

37. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVIII, numéro 244, 15 août 1907 »

Dans un milieu tout différent, et qui se trouve beaucoup plus adapté aux faits que celui où Casanova nous conduit, avec les ressources propres de sa sensibilité et de son imagination, Pierre Louÿs a transporté et revécu une aventure qu’un autre avait réellement vécue.

38. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXX, numéro 252, 15 décembre 1907 »

Devant son hôte « ébahi », — c’est sa propre expression, — il récita en italien un long passage de l’Orlando, le voyage d’Astolphe au Paradis, où il allait reconquérir la raison égarée de Roland, et l’entretien d’Astolphe avec l’apôtre saint Jean.

39. (1898) Articles du Mercure de France, année 1898

Après sa mort, bien des critiques, en croyant porter sur lui leur propre jugement, ne firent que répéter l’opinion d’une de ces deux foules passionnées, notamment de la première. […] C’est pourquoi son œuvre politique ne lui survivra pas ; il l’a mortellement blessée de sa propre main.

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