Qu’est-ce que le génie ? […] À le croire, nous serions encombrés d’hommes de génie ! […] Il n’avait d’autres droits que son génie. […] L’Homme de génie. […] L’Homme de génie.
Lombroso, traitait fort mal, sous le prétexte de découvrir les sources mystérieuses de son génie mélancolique et profond. […] Les timides lettrés s’habituent à tout, même au génie, même à l’exception. […] Son père, voyant les promesses de ce précoce génie, emmena l’enfant à l’atelier d’Andrea del Verrocchio, alors l’artiste le plus célèbre de Florence. […] Car il y avait un trait de germanisme dans ce génie qui, comme disait Goethe, « s’était fatigué en pensant, müde sich gedacht. […] Elles sont l’une et l’autre de bien peu d’importance pour l’étude du génie de Léonard.
Amore avait étudié l’art de Bellini, en se plaisant peut-être à surfaire un peu le génie de l’auteur de Norma. […] Avant la révélation de la forme de Beauté que nous ont donnée Raphaël, Michel-Ange, Vinci, s’était-il trouvé en le moyen-âge quelque œuvre de génie pouvant s’égaler à cette réalisation ? […] n’y a-t-il pas eu des souffrants, des attristés, des contemplatifs, des joyeux, des saints, des héros, des génies ? […] En outre, l’image légendaire et préjudicielle que nous suggéra le génie anglais persistant en notre rétine cérébrale avec la force des créations éternelles, une étrange superposition, un parallélisme constant nous déroute au grand désavantage de l’œuvre italienne. […] Le leitmotif est un procédé remarquable, mais un procédé seulement, et ce n’est point de l’employer systématiquement qui fait le génie.
Le génie de l’Évangile, plus encore, le génie religieux s’incarna dans ce troubadour du Christ, dans ce céleste jongleur, qui embauma l’Ombrie des parfums ineffables de la Galilée. […] Des artistes laborieux préparent et rendent possibles les beaux génies. […] Son génie est surtout réfléchi. […] Leur fusion aussi, dans le creuset du génie parfaitement cultivé. […] Ne leur enlèvera-t-elle pas tout génie et toute originalité ?
Malheureusement, Fogazzaro n’est pas un génie complet : il y a des défaillances dans son style et il a cédé, pour des vues pittoresques, à la fâcheuse tentation de transcrire des dialogues en dialectes, en patois, — au lieu de les transposer ; c’est grave. […] Si par son génie il produit une œuvre qui soit la gloire de sa patrie, qui en devienne le miroir symbolique, tant mieux. […] C’est pourquoi un écrivain doit suivre son génie, aveuglément, sans raisonner, comme un chien suit son maître. […] Lombroso, l’inventeur de ces drôleries, a donné la mesure de son génie critique en appréciant M. […] Les Protestants de la Renaissance qui voulurent le ridiculiser ne purent le salir : et c’est un des leurs qui, vaincu par la grâce de ce génie, a écrit son panégyrique en écrivant son histoire.
Lenzoni démontre l’impuissance de la science à établir une vraie vérité ; de la comtesse Lara, une étude sur Francis Saltus, littérateur américain ; Cesare Lombroso note que beaucoup d’hommes de génie furent épileptiques et se hâte de conclure : « Le génie n’est qu’une des formes de l’épilepsie », — raisonnement dont la naïveté a quelque charme ; M. […] Il aurait voulu les concilier : la conciliation est encore à faire ; ce fut l’œuvre tentée par la philosophie scolastique, — mais Boèce ayant refusé de dire le dernier mot, nul ne le proféra : Platon triompha avec le génie de Scott Érigène ; Aristote, avec le génie de Thomas d’Aquin. […] Ainsi la barbarie asiatique envahissait la civilisation néo-grecque, cette civilisation qui fut la première, tenant d’Athènes le génie plastique et de Rome le génie politique, où le dogme évangélique se soit, de forme et d’action, identifié aux nommes, ait trouvé sa mise en œuvre. […] Peinture ou mosaïque, les Icônes étaient presque toujours l’œuvre des Moines, manifestation de leur génie, et la vénération publique allait autant à l’auteur qu’à l’ouvrage. […] À vrai dire, c’était l’art chrétien revenant à son berceau latin, mais magnifiquement développé, orné de tout ce que lui avait ajouté le génie néo-grec et qui adoucissait sa primitive sévérité romaine.
Son génie résuma à lui seul toute l’ivresse. […] Spinoza avait judaïsé le génie colossal de Goethe. […] Dante fut le génie de la terreur du Moyen-Âge. […] Un jeune compositeur anglais, qui m’a tout l’air d’être sans génie, était scandalisé de l’audace de Rossini. […] Pica et moi, sur le noble et sympathique génie de Verga, et je me suis réjoui de cette rencontre.
Les professeurs officiels n’hésitent pas à écrire : « En lisant le traité de l’Éloquence vulgaire, on apprendra au prix de quels savants et consciencieux travaux s’est formée cette langue de bronze qui, mise en fusion à la flamme du génie, reçoit de la pensée une empreinte fidèle et indestructible. » En d’autres termes, le Traité de l’Éloquence vulgaire serait un traité d’éloquence, une rhétorique, la rhétorique de Dante. […] De même que Raphaël, de même que Mozart, Titien a toujours appartenu à l’espèce des génies « imitateurs » qui sont du reste les plus grands de tous et ceux aussi qui finissent par nous apparaître les plus personnels. […] Ayant l’âme plus haute que leurs confrères même les mieux doués, ils visent plus haut, et animent leurs œuvres d’une beauté supérieure : pour celui à qui s’est enfin ouvert le génie de Titien, combien pâlit le prestige d’un Palma le vieux ou d’un Tintoret. Mais du fait même de la supériorité de leur génie, les hommes de cette sorte sont plus exposés que d’autres à souffrir de leur génie. […] Je ne veux pas, bien entendu, rendre Raphaël responsable des croûtes de la grande galerie du Louvre comme les portraits de deux hommes ; mais le trop vanté Balthazar Castiglione, si mou de dessin et de modelé, si pauvre de couleur, mais la grande Sainte Famille, avec son saint Joseph appuyé sur un moignon singulier, sont d’un art dénué de toute poésie et de tout mystère ; et si admirables que soient telles parties de son œuvre, il est difficile de continuer à mettre Raphaël au rang des génies suprêmes de la peinture, Vinci, Titien, Vélasquez ou Rembrandt.
Le Barbier est le coup de génie d’une jeunesse exubérante. […] C’est là qu’il est lui-même, avec du génie tout cru, sans talent et sans goût. […] Du génie fruste, spontané, sans talent, sans goût, — entendez bien, — sans « goût » ! […] L’expression suprême en est dans leur homme de génie, Richard Wagner, en qui Arminius lui-même semble s’être réincarné, génie colossal aux proportions formidables, mais obscur et confus ; génie admirable, mais qui opprime notre âme de tendresse et de clarté par la violence même de sa force, génie que notre esprit latin ne peut pénétrer qu’en partie, et devant lequel il s’incline, parfois avec respect, parfois avec angoisse. […] Il y a des publicistes qui continuent leurs déclamations sur la fécondité du génie « latin », et qui l’opposent au « génie allemand », par amour des contrastes violents.
Le génie de Garibaldi — ce héros populaire, toujours prêt à donner son sang pour la Justice et la Liberté, sans se soucier guère des convenances diplomatiques — attira surtout notre poète national. […] Voici trois faits des plus marquants. — J’ai pris ceux-là on comprend pourquoi : « tout le monde étant maintenant d’accord sur la valeur de leur génie ». […] L’érudition n’entrant en cause ici, c’est donc à l’âme, à l’Esprit qu’il s’en faut remettre de ces progrès rapides de l’élève dans l’application des moyens ; l’élève, par une étude avant tout spirituelle, agrandissait sa conception du voisinage d’un génie ; et la chose est si vraie que c’est plus à l’inspiration du Pérugin qu’à sa méthode que Raphaël ressembla toujours. […] Le seigneur traitait à sa table Dante Alighieri, homme très illustre alors, et qu’il vénérait à cause de son génie.” » (Une année à Florence, édition Michel Lévy, page 194.)
Il a montré un génie étendu. […] Il eut plus d’art que son élève qui passa pour avoir eu plus de génie.
Vous donnerez à entendre que les hommes d’État et les Ambassadeurs de cette époque avaient plus de génie que les nôtres ! […] Rien n’est plus près de la divinité que la jeunesse du génie. […] Il fera fructifier les dons de son génie et Giorgio les gaspillera. […] La simplicité de son âme m’attendrit autant que m’avait exalté son génie. […] — Et à ton génie… Tu enchantes les yeux et touches les cœurs.
Mais il semble reconnaître dans quelque sommet de l’expression esthétique une manifestation isolée du génie humain. […] On peut dire que les Médicis, pour parvenir au premier rang et s’y maintenir, déployèrent du génie. […] Ils découvraient une architecture bien plus conforme à leur génie que l’architecture gothique, dont l’Italie avait subi de mauvais gré l’influence. […] Qu’on nous épargne enfin la vue d’enquêtes semblables, présentées comme une sorte de justice rendue par la foule intellectuelle « aux vrais mérites et aux génies », puisque ce sont ceux qui jouent traditionnellement le rôle de « génie » qu’on a placés naturellement au premier rang. […] Pagello n’avait pas l’âme complexe et théâtrale, ni le génie d’une Sand ou d’un Musset.
Partage à faire entre le génie et la maladie cérébrale qui intéresse, sujet que n’a même pas effleuré, en réalité, le professeur Lombroso, occupé à vomir sans relâche, sur tout ce qui est intellectuel ou mystique, les abjects blasphèmes de sa porcine ignorance. […] Voilà qui me donne une certaine confiance dans les assertions du même volume (Le Génie et la Folie) que je ne puis vérifier. […] Lenzoni étudie Carducci, en lequel il reconnaît un classique, un poète qui ajouta l’érudition à son génie naturel, un de ceux eu somme que le public admet sans les comprendre : la partie la plus choisie du public en est toujours aux guitaristes du xviiie siècle, et Métastase ne fut jamais détrôné.
L’émotion est produite par la surprise, et la Beauté n’est que surprise, miracle, comme le Génie. […] Ils savent que le théâtre en vers est par excellence le théâtre du peuple, le génie poétique et le peuple ayant la même ingénuité, le même idéal. […] Dans l’histoire de l’âme de sa race, il représente, après Dante, le génie du grandiose. […] Après lui, un roi et un statisticien piémontais ont apporté à l’Italie la gloire sans génie d’une maison régnante. […] Borgese observe aussi les qualités de critique plus que remarquables de ce génie fécond d’intuitions que fut Mazzini.
« Ensuite il en releva les beautés avec toute la sagacité qui lui était naturelle et toute la justesse du génie d’un grand homme. Il aurait été injuste de s’attendre à quelque chose de mieux de la part des glossateurs les plus habiles de l’Italie22. » Lorsque Voltaire eut terminé, Casanova se tourna vers l’auditoire et s’écria « qu’il était excédé de surprise, qu’il informerait toute l’Italie de sa juste admiration. — Et moi, Monsieur, reprit le grand homme, j’informerai toute l’Europe de la réparation que je dois au plus grand génie qu’elle ait produit ». […] S’il n’avait pas, par cette palinodie, rectifié l’erreur du jugement qu’il avait porté sur ce grand génie, la postérité aurait sans doute refusé, du moins en Italie, de lui ouvrir les portes de l’immortalité, que du reste il a acquise à tant de titres. […] À peine laisse-t-il entrevoir qu’elles étaient très défavorables aux deux poètes, maladroites, d’ailleurs, et injustes, comme il ne manque pas de le lui faire sentir : Il me parla da Dante et de Pétrarque, et tout le monde sait ce qu’il pensait de ces grands génies ; mais il s’est fait du tort en écrivant ce qu’il en pensait.
Tiersot montre ainsi la filiation complexe et l’obscure genèse du génie de Gluck, on éprouve que ce génie dut être le fruit d’un instinct entre tous incoercible, pour résister au sabotage à quoi son possesseur ne se lassa jamais de le soumettre. […] Il semble évidemment impossible que le musicien n’ait eu conscience du formidable essor de son génie dans ces deux ouvrages. […] Étrange énigme du génie. […] Théodore Dubois et Gédalge apparaissent des génies de la taille de Richard Wagner, et MM. […] C’est une enfant irritable et désarmée aussitôt, incapable de feindre ; ses sourires, ses colères, tout est spontané, tout est vrai comme le génie qui la possède au théâtre.
Carducci fut un haineux de génie. Il eut le génie de la haine, au même degré que le génie, ou plus justement le talent, lyrique. […] Depuis la Renaissance l’alliance du génie latin et du génie germain a produit des individualités d’une puissance et d’une ampleur exceptionnelles, et le temps n’est pas loin où les plus grands des Allemands se rendaient dans le Midi pour achever d’y développer et d’y mûrir leur âme. […] Son génie est seulement endormi ; il n’attend pour se réveiller que des circonstances favorables. […] C’est à cela que le génie réel, incomparable, de d’Annunzio doit ses tares et ses faiblesses.
Et son génie devance de très loin son époque. […] Une force rayonnait de lui, à laquelle tous ceux qui l’approchaient devaient se soumettre ; et pourtant, s’il fut indéniablement un homme de génie, son œuvre n’est pas ce qu’on aurait pu attendre de lui ; elle déçoit par certains côtés, elle a quelque chose d’incomplet, d’inachevé si l’on pense à celui qui l’a accomplie. […] Cet apôtre de l’idéal tragique fut un si merveilleux businessman que la supercherie des Danaïdes en acquiert une allure équivoque ; car, si des marques éventuelles du génie il étala l’orgueil naïf poussé jusqu’à l’outrecuidance, il paraît en avoir aussi possédé, au suprême degré, un parfait égoïsme. […] En réalité l’art théâtral de Gluck est un composé de trois éléments assez distincts, qui parfois apparaissent harmonieusement associés par la force du génie, parfois aussi, alternent comme juxtaposés au gré d’une solidarité intermittente. […] Son génie et son influence n’en demeurent pas moins d’ordre purement musical ; son œuvre eut une portée immense et des plus fécondes dans l’évolution de l’harmonie.
Quelle mère orgueilleuse pourra crier avec la matière : « Mon ventre a créé un être plus parfait en Beauté que celui jailli du cerveau du génie ? » De la compréhension de la Forme naît la connaissance de l’harmonie, seule manifestation de la Beauté ; et c’est aller aux confins de l’Esprit humain que de la saisir dans toute sa pureté, comme l’ont fait les génies de la Grèce. […] Mallarmé est une proie naturelle à la glose du scholiaste, et peut-être faudrait-il enfin rassembler et faire travailler ensemble les imaginations qui se meuvent autour de son génie et ordonner un recueil où son œuvre et sa pensée seules seraient étudiées : Le Mallarmiste, tels les Actes de la « Browning Society » ? […] Il y a dans cet opuscule dix autres absurdités, mais on peut en recommander la partie où est analysée l’œuvre de Verlaine et loué son génie.
Wagner, par le privilège du génie, a suivi l’esprit d’une fable qu’il ignorait ou du moins qu’il niait : et faute d’espace pour étaler la minutieuse mosaïque des preuves, j’indiquerai le sens de l’œuvre dantesque en évoquant le sauveur du Graal. […] L’idéal de Dante plane encore sur nous, ravivé par le génie de Wagner.
Ils apparaissent tous deux comme des manifestations isolées de l’activité intellectuelle et du génie propre de leurs races, à des époques qui, comme nous le disions au début, sont assez analogues. […] L’orgueil est donc une condition nécessaire à la libre manifestation du génie chez les deux hommes qui nous occupent. […] Les biographies anciennes apparaissent ainsi à M. d’Annunzio semblables à des formes que le génie a créées pour qu’elles durent comme la découverte des terres inconnues. […] Une expression singulière, une « fleur de génie », peut s’épanouir de ce feuillage, solide sinon très touffu, que représentent les groupements où l’on peut remarquer les rythmes des tendances communes. […] Et dans l’attente de génies dramatiques nouveaux, l’initiative de M.
Les pages où il commente Redon sont d’une critique très aiguë : « Une des œuvres les plus étranges et les plus originales qui aient vu le jour dans ces vingt dernières années, c’est l’Album dédié au poète américain Edgar Allan Poë, ce conteur de génie, par le français Odilon Redon, l’artiste le plus bizarrement macabre que je connaisse, ce vigoureux dessinateur qui, en une série d’abstruses et suggestives lithographies, a su fixer les plus terrifiantes hallucinations d’un cerveau exalté par la fièvre ou l’opium. […] Voici aussi les Cosmopolites et les Nationalistes, les uns rêvant un patrimoine commun d’art, une fusion de tous les styles et de toutes les sources d’inspiration ; les autres, qui croient que chaque peuple a ses nourritures esthétiques spéciales, désirent conserver leur physionomie et le génie de leur race, tout en s’essayant à de nouvelles réalisations artistiques. […] À vrai dire, on ne pouvait imaginer, à l’heure de ses débuts, quel artiste de génie devait prendre son essor vers la montagne : les virtualités d’un remueur d’idées et d’un créateur de formes n’y sont nullement. […] Mais nous savons déjà, par d’autres œuvres, que le feu des soleils couchants est une gloire d’entre toutes celles de Segantini ; si l’on supprime, selon la convenance normale, tout le génie et le feu nouveaux dont resplendit ce tableau ; si l’on enlève le grand nuage violâtre et celui en tournesol de clarté chair, immédiatement les personnages se haussent et ne sont plus réduits à l’humilité de condition, leur lot dans l’Alpe ; la terre, en s’élevant sur la toile, s’abaisse dans la réalité représentée : ce n’est plus le haut plateau, c’est la vaste plaine basse ; ce n’est plus la distance de la terre au zénith comme diminuée, le ciel comme rapproché, senti plus spacieux autour de soi, et surtout ce n’est plus le Segantini constamment « découvreur ». […] § L’installation à Maloja (1894) marqua dans l’œuvre de Segantini l’heure de la prédominance absolue des préoccupations de la pensée sur celles de la pure et simple représentation des réalités contingentes ; c’est l’apogée de son génie de peintre et de son génie de penseur.
Ils ont (vous le verrez tout à l’heure) tellement de talent à eux tous, que l’homme de génie survenant et rompant la monotonie de leur cercle leur paraîtrait simplement un imbécile ou mieux un Monsieur en retard. […] Comme avec les progrès de notre civilisation, notre division du travail et la répartition des salaires, y compris la bourgeoisie de Monsieur Loubet, nous entendons de mieux en mieux le libre échange du pittoresque, nous envoyons des études sociales habilement torchées à des gens qui nous retournent des portraits individuels supérieurement peints et, par politesse, nous admirons, mais sans saisir pourquoi, décidément, ce qui demeure du talent, du savoir-faire, chez nous, chez des gens peut-être plus naïfs, est du simple génie. Gabriele d’Annunzio a du génie et c’est justement pour cela qu’il embête un peu le lecteur français très habitué aux conventions littéraires françaises. […] Il avait rencontré un grand génie, Giuseppe Verdi, il en fut l’ami le plus intime et le plus dévoué : pour lui il composa les libretti de l’Othello et du Falstaff, chefs-d’œuvre dans leur genre ; et à l’étranger, par une de ces bizarreries qui semblent veiller à la carrière de cet artiste, on s’habitua vite à le considérer tout bonnement comme un excellent librettiste : même en France, à la mort de Giuseppe Verdi, lorsqu’il fallut nommer son successeur à l’Institut, on fut quelque temps embarrassé : et le nom qu’on vient de choisir, en apaisant la conscience des membres de l’Institut, n’a pas rencontré toutefois l’approbation des artistes en Italie.
D’ailleurs, la source remonte à Alexandre Manzoni, le Maître inégalable ; hormis l’auteur de Daniel Cortis, les suivants de cette école sont restés bien au-dessous du modèle ; on n’est pas simple lorsqu’on veut, et Manzoni avait la simplicité du génie. […] Après lui, les yeux et les cerveaux changent, la pente commence qui aboutira par Pietro Vannucci à Raphaël, dont le génie ignore complètement l’austère vision du maître de Borgo-san-Sepolcro. […] — qu’une lutte sans trêve et sans scrupules : même avec la plume, on ne se bat pas, on s’assomme ; dans un homme on écrase une faction, et le pêle-mêle des haines, des accusations, des calomnies, des intrigues est tel, que qui en sort l’honneur intact peut remercier son bon génie. […] Les éloges que lui prodiguent ses amis sont déplacés ; il n’avait pas de génie et sa muse était loin du rare ou du sublime ; mais il laissait librement déborder son inspiration, et ainsi arrivait de temps à autre à une certaine originalité. […] Il faut donc l’homme dont Paul V avait dit qu’il serait le Michel-Ange du siècle et qui venait d’achever le baldaquin de Saint-Pierre, la fontaine de la place Navone, la Baroccia, le Triton, les clochers du Panthéon, la façade de Barberini, la sainte Thérèse de Comaro, l’homme que quatre papes s’étaient légués, que s’étaient disputé Philippe IV, Charles Ier et le duc de Modène, qui, au grand contentement de tous épandait la faconde prétentieuse, précieuse et encombrante de son particulier génie, qu’Alexandre VII, escorté de seize cardinaux, allait visiter alors qu’il tenait le lit et qui écrivait les comédies pendant ses convalescences.
Je n’aime pas Léonard de Vinci parce que c’est un génie qui a enseigné aux autres le droit de ne pas en avoir par le raisonnement. […] Une exposition publique de ce précieux cabinet eût été désirable, occasion de joie et d’étude, de développement… Jusqu’à quel point (soit dit, dans la circonstance, en toute courtoisie) les détenteurs de merveilles d’art, initialement comme à jamais dédiées au monde par le génie, ont-ils le droit d’en intercepter, au profit d’eux-mêmes ou du prochain acquéreur, le rayonnement ? […] Ce panneau, très probablement détaché d’un polyptyque dont les autres éléments sont épars, semble bien réunir, dans sa figure principale tout au moins, les caractéristiques du génie des Van Eyck. […] C’est au génie italien que nous les demandons, — flattés par l’apprêt sensuel, en effet si séduisant, dont il les environne, et aveuglés à ce point par lui qu’alors qu’il s’interpose entre eux et nous massivement, nous croyons les pénétrer grâce à lui. […] La conception septentrionale exclut la grâce ou ne la comporte qu’accidentellement ; quand elle ne procède pas du génie, elle rencontre aisément la rudesse, la grossièreté, la trivialité.
Le génie est la lumière ; la foule est l’ombre. Mais, de même que la lumière illumine l’ombre, ainsi le génie éclaire la voie des multitudes. […] Issu d’une famille tout à fait bourgeoise et provinciale, son génie l’a isolé dans son milieu dès son enfance. […] Nous n’avons qu’un génie. […] Le génie familier de M. d’Annunzio a des antennes toujours eu éveil qui lui indiquent le vent du snobisme.
Il faudrait des voleurs pour deviner les ruses, le génie qu’ils déploient pour voler 10 sous.
Or, chaque art évolue, suit le temps, sollicite les poètes ; Dieu est un réflexe du génie créateur qu’interprètent l’époque et ses nécessités. — Les Dieux se reproduisent idéologiquement selon les modifications sociales et intellectuelles, les différences organiques des races, les bigarrures des mœurs, la physiologie des individus.
Lieu de concentration de l’infanterie, de l’artillerie, du génie, etc. » J’ai revu à quelque temps de là ce général, à son poste de commandement, dans un secteur qui fut au cours de ces dernières semaines le théâtre de furieuses offensives autrichiennes. […] Des détachements considérés comme perdus arrivèrent à l’entrée des ponts que le génie italien avait fait sauter. […] On organisera en Italie et en France de grandes solennités artistiques et scientifiques en l’honneur de cet homme de génie. […] Dans les trois autres variations sur le même thème dues au génie de Mantegna, l’héroïne triomphante ne perd pas de vue la tête sanglante d’Holopherne jusqu’à ce qu’elle l’ait mise dans le sac. […] Cette Judith est une expression complète du génie païen de Mantegna.
Dante revit en lui, avec tout son dédain et sa terrible passion civile, sinon avec son génie. […] Son génie devient un dogme, il faut l’admettre.
On n’a pas vu quelle était l’importance que le plus puissant génie boréal a voulu accorder aux différentes expressions du sentiment humain.
Ici comme là, il manque le génie représentatif, dont le nom seul évoquerait l’état d’âme de plusieurs générations aboutissant à une grande réalisation historique.
Pour cela, il aurait fallu un grand homme, apôtre et poète, c’est-à-dire un génie. […] Le génie individuel, évidemment, a cédé le pas au génie des peuples. […] Il me semble, en ouvrant ce livre, que j’ouvre une fenêtre sur la rue morne et grise de cet hiver parisien pour découvrir, à la place du camion militaire chargé du matériel des catastrophes, le char enguirlandé de la jeunesse, le char fleuri traîné par des chevaux blancs mâchant des roses dans l’écume de leur impatience… Ce n’est plus la rue morne et grise, c’est la pelouse du printemps, le champ des courses vers l’infini, la route ensoleillée de l’espérance, des génies secouent des palmes et du fronton des temples descendent en spirales moelleuses les colombes de Vénus.
Chatfield-Taylor se mit à étudier le grand comique italien, et, dit-il, « je découvris bientôt que Goldoni était un génie de la scène auquel le monde des lettres anglais n’avait jusqu’à présent prêté qu’une médiocre attention ». […] Deuxième point : les imbéciles, outre qu’ils sont tels, sont aussi des hypocrites nauséabonds s’ils participent à la guerre sans courir aucun risque, mais en exploitant avec l’habileté commerciale propre à beaucoup d’imbéciles de lettres, leur uniforme de soldat… Troisième point : préparer, ordonner, gagner des batailles est chose géniale et il n’y a pas de doute qu’un grand général soit un homme de génie à l’égal d’un grand homme d’État ; mais il est bon de rappeler en ces temps-ci qu’un grand poète, un grand critique, un grand peintre ne sont pas moins grands ni moins nécessaires à une nation qu’un grand général, si cette nation veut compter pour quelque chose dans l’histoire du monde… De là l’utilité d’une revue littéraire aujourd’hui et le courage louable qu’il y a à la maintenir en ce moment, où il arrive aisément qu’on prenne pour un manque de patriotisme ce rappel des valeurs supérieures.
Maintenant mon moi présent méprise mon moi passé — et cependant, en ce temps-là, je croyais, plus encore qu’aujourd’hui, être l’homme supérieur, l’être noble et grand, le sage universel, le génie en expectative.
Un défilé incessant d’étrangers, simples curieux ou voyageurs, qui apportaient leurs hommages au génie du lieu, consacrait sa gloire devant l’Europe attentive.