/ 31
2. (1896) Articles du Mercure de France, année 1896

Il faut Ie parfum d’amour de leurs fleurs étoilées avec le charme du fruit que l’on peut cueillir. […] Dans cette chapelle de fleurs et de verdure, j’évoquerai la Princesse du Rêve. […] Car sa pudeur n’ose rêver que de l’Adolescent timide et fier, qui triste cueillera la fleur d’amour pur, laissant de son casque ailé s’envoler sa pensée vers la Princesse du Rêve : il est l’âme sœur et ses épaules porteront le même manteau de pourpre. […] » Et que l’arbre, le rocher, la fleur, le nuage, l’ombre et la lumière, la montagne et la mer, l’homme dans toute la nature, te révèlent toujours à mon regard adorant !  […] Vous qui alliez, seul debout en face de l’universelle angoisse, réduire à des jeux d’amour et à des pluies de fleurs tout le spectacle intellectuel ?

3. (1890) Articles du Mercure de France, année 1890

Segantini expose un mâle hymne à l’Existence : Une fleur des Alpes, avec cette épigraphe : J’ai rencontré en haut, près des glaciers, une fleur étonnante.

4. (1899) Articles du Mercure de France, année 1899

et en couvrant de fleurs la civilisation anglo-saxonne, qui pourtant, si elle n’est pas militariste, est diantrement militaire et prête à partir en guerre pour Cuba aussi bien que pour Fachoda. […] Il y portait à la perfection le vieux style de la miniature florentine, en mettant avec minutie chaque feuille sur les arbres et chaque fleur dans le gazon, où se tenaient debout le premier homme et la première femme. […] Léonard était le dernier homme qui pût trouver un poison dans les fleurs exotiques de sentiment qui s’y épanouissaient. […] Il peignait les fleurs avec un bonheur si surprenant que divers critiques lui ont attribué une affection particulière pour certaines fleurs, comme Clément pour le cyclamen, et Rio pour le jasmin ; à Venise se trouve une feuille détachée de son carnet toute couverte d’études sur les violettes et les roses sauvages. […] Cependant il garda jusqu’au siècle dernier des adorateurs assez fervents pour parsemer religieusement de fleurs à chaque anniversaire de sa mort l’endroit où s’était élevé son bûcher.

5. (1893) Articles du Mercure de France, année 1893

Ce portrait semble représenter l’une des deux femmes de Lionel d’Este, duc de Ferrare, une pâle tête aux cheveux blonds relevés qui se profile sur un fond de ciel et de fleurs, œillets et ancolies ; tout autour, des vols de papillons. […] Riccardo Sonzogno vient de traduire, pour la première fois, les Fleurs du mal.

6. (1911) Articles du Mercure de France, année 1911

Il y avait là des guirlandes de fleurs auxquelles se mêlaient des grenades ouvertes et des raisins. […] Et ces fruits et ces fleurs étaient vendus par la fille du paysan : une vraie déesse, pour moi ! […] C’est une fleur ! […] Avec quelle nonchalance cette fleur ne s’offre-t-elle pas au soleil en se penchant sur une fontaine ! […] Son lyrisme était simple et émouvant, fleur d’un talent très ému.

7. (1905) Articles du Mercure de France, année 1905

D’un nœud de jeunesse en fleur rayonne une blanche lumière. […] — Dis-moi, ma petite fleur, alors je la fais venir, cette personne ? […] Ce soir-là, l’âme du séminariste était comme une fleur ouverte vers le ciel, et qui attend la rosée. […] Le sureau commençait à répandre l’odeur délicate de ses fleurs de cire. […] — Tu vois bien, ma petite fleur, même en dormant il te hait.

8. (1910) Articles du Mercure de France, année 1910

Les rues sont très larges et sans ruisseaux, les maisons très basses, ouvertes, profondes et toutes favorisées d’une cour avec plus ou moins d’arbres et de fleurs. […] On l’a couverte de fleurs, on lui a crié : Divina ! […] Notre héros n’est certes plus celui de cape et d’épée, fleuri au milieu des temps de mœurs militaires, comme la fleur du sang généreux de la race. […] « C’est la première fois que je porte une fleur dans le ciel. […] Pauvres fleurs, 1839, p. 259, 319, 323. — Bouquets et prières, 1843, p. 141, 163, 173.

9. (1913) Articles du Mercure de France, année 1913

J’ai voulu jeter quelques fleurs sur votre tombe. […] Et je m’exaltais à la pensée que la fleur parfaite pour laquelle tous les yeux n’avaient que regards étonnés, éblouis, ou enchantés, était à moi, à moi ! […] Nous étions les enfants de la terre, comme les animaux et les fleurs, et nous étions animés du même souffle. […] « Ni convoi funèbre, ni discours, ni fleurs. […] Jetez des fleurs à cette fleur !

10. (1914) Articles du Mercure de France, année 1914

Masqués et costumés, ils s’étaient introduits dans des maisons, portant des torches, des fleurs et des présents. […] Une odeur de fleurs envahit l’atelier, et rendit plus impressionnante le morbidezza d’un nocturne de Chopin. […] Des barques chargées de fleurs montent vers le Rialto, et des gondoles les suivent. […] Et Antonio lui envoya des fleurs par le barcarol. […] Une barque chargée de fleurs vient de passer sous le Rialto ! 

11. (1900) Articles du Mercure de France, année 1900

Du Sodoma, c’est une Pietà superbe ; de Luini, une femme au sourire franc, au regard profond, à la chevelure étoilée de fleurs, où le grand fresquiste se retrouve. […] Souple et légère comme la tige d’une fleur, Tritonia se délivra de Nauplie aux cheveux rouges, qui appuyait sa tête sur sa poitrine, et apporta les amphores. […] Après avoir traversé cette région embrasée (XXVII), Dante et ses guides gagnent la forêt divine aux frais ombrages et aux fleurs délicieuses. […] D’autres vieillards vénérables et des personnages diadémés de fleurs ferment la marche. […] Sur l’une des rives du fleuve de lumière qu’égaye un printemps sans fin, et d’où ne cessent de jaillir d’étincelantes topazes, se dressent des fleurs aux volutes si naturellement ornementales qu’on ne voit qu’elles.

12. (1895) Articles du Mercure de France, année 1895

Dans la série de poésies qu’il a nommées Printemps helléniques, nous revient encore la grâce de Sapho, la noblesse d’Alcée, l’attrait impérissable des dieux de la Grèce, qui ignorent le crépuscule, et qui dorment dans les troncs des arbres, dans les fleurs, au-dessus des montagnes, des fleuves et des mers. […] » Ainsi, avec la grandeur ascendante d’Avérard, de Jean de Bicci et de Côme, le père de la patrie, l’art monte avec Cimabue, Giotto, Masaccio ; avec Laurent le Magnifique, l’art fait une pause pour représenter des forces : Léonard de Vinci, Fra Bartholomeo, Michel-Ange, Titien, Raphaël, André del Sarto naissent ; sous Léon X, tout ce qui promettait tient, tout ce qui était fleur devient fruit ; sous Côme Ier arrivé au sommet de la puissance, l’art arrive à son apogée, et l’art et les Médicis, ne pouvant plus monter, commençant à descendre : les Médicis avec Ferdinand Ier, Côme II et Ferdinand II ; l’art avec Vasari, le Barroccio, l’Allori, Jean de San Giovanni et Mathieu Rosselli ; jusqu’à ce qu’enfin ils tombent ensemble, l’art avec les Gabbiani et les Dandini, les Médicis avec Côme III et Jean Gaston.

13. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 — Fin du tour d’Italie en 1811 — [Premier extrait] — Chapitre LX »

Il mourut en 1732, à la fleur de l’âge, et, à ce qu’on dit, par l’effet du poison.

14. (1909) Articles du Mercure de France, année 1909

En cette cuisine, tout est pour la fleur du goût. […] Son visage a quelque chose d’égaré, de fou ; il ressemble un peu au Charles Baudelaire qui est gravé en tête des Fleurs du Mal. […] La mort même a perdu son aspect effrayant : la mort est un sommeil dans l’immortalité du souvenir, un sommeil paisible entouré d’images heureuses : figures souriantes, enfants joueurs et fleurs en guirlandes. […] L’idée dominante de Ruskin fut que « tout art élevé est le produit d’un siècle croyant et vertueux ; la religion, la justice et le bon ordre sont les racines d’un arbre puissant dont les beaux-arts ne sont que les fleurs ». […] Nous cueillions des fleurs et des feuillages, et la mère de ce cardotto, qui ne quitte jamais ce lieu, nous faisait toutes les caresses imaginables.

15. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXVIII, numéro 242, 15 juillet 1907 »

Pour les Italiens, c’est une nouveauté dans sa fleur.

16. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXV, numéro 229, 1er janvier 1907 »

Et la fleur qui se redresse le sait.

17. (1897) Articles du Mercure de France, année 1897

Les Petites Fleurs de la vie du petit pauvre de Jésus-Christ, saint François d’Assise, traduction d’Arnold Goffin, Bruxelles, Société Belge de Librairie, 1.25 J.  […] Malgré ce qu’il y a de mièvre et d’enfantin en ces petits récits, et peut-être pour cela, les Fioretti ont gardé leur parfum de fleurs ombriennes.

18. (1898) Articles du Mercure de France, année 1898

Car Blanchemarie n’aime pas Mycènes ni sa campagne aride et poussiéreuse, et elle regrette les beaux jardins fertiles où il y a de larges fleurs et où mûrissent des fruits voluptueux. […] Dans l’Enfant de Volupté, comme dans l’Intrus et le Triomphe de la Mort, M. d’Annunzio excelle à rendre le charme des fruits et des fleurs, la volupté des saveurs et des parfums : et il y a dans la Ville morte quelques couplets lyriques sur les oranges, les myrtes, et aussi sur l’eau, qui sont des poèmes exquis. […] Il est bien vrai qu’il n’y a que deux moyens pour charmer la foule : les gros mots ou la libéralité princière ; des deux, Cavallotti avait adopté le premier, et en jouait intarissablement, semant les mêmes fleurs de rhétorique, tulipes vulgaires, pour repousser une loi qu’il croyait nuisible ou pour révéler des commérages d’antichambre. […] C’est à ne rien faire qu’elle fleurit de toutes ses fleurs.

19. (1902) Articles du Mercure de France, année 1902

Prosper Blanchemain, qui commenta Ronsard pendant dix ans, de 1857 à 1867, imagina que Cassandre, “dans les belles prairies de la Touraine”, était “une toute jeune fille, presque une enfant, pauvre et simplement vêtue, mais ayant pour parure cette première fleur de la jeunesse et de la beauté qui charme les rêveurs”. […] Celle-ci est aveugle, mais elle seul le parfum de ces fleurs maudites : elle se rappelle que jadis son mari, lorsqu’il était fiancé, avait trompé elle et deux autres jeunes filles avec un œillet rouge, et depuis lors la vieille comtesse a pris en horreur la fleur innocente. […] Pas plus dans ses ouvrages incontestés que dans ce panneau probablement authentique ne cherchez l’être humain beau en soi, la femme « délicieuse », l’enfant « ravissant », cette fleur enfin de la vie humaine qui devant Raphaël, devant le Corrège, mêle à notre admiration l’attendrissement sensuel du plaisir.

20. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXX, numéro 249, 1er novembre 1907 »

Personne ne s’occupait de ce jardin, le vieux propriétaire était mort et sa fille, ennuyée et dévote, considérait les arbres comme des mécréants et les fleurs comme des coquettes. […] Sa tête était encore toute remplie de ce romantisme fait de chevelures désordonnées, de montagnes maudites, de tempêtes et de batailles avec roulements de tonnerre et de tambours, et son cœur s’égarait en ce pathos germanique (fleurs bleues, lune entre les nuages, tombes de chastes fiancées, chevauchées nocturnes, etc.) duquel vivent les maigres dandys mélancoliques et les demoiselles blondes grassouillettes.

21. (1901) Articles du Mercure de France, année 1901

La vigne en fleurs embaume. […] Elle rappelle ces breuvages de la sorcellerie où il entrait des fleurs et des reptiles, du miel et du sang de tigre. […] Elle lui a apporté, comme son cadeau de noces, cette amnistie qu’on vient de concéder à l’occasion de mariage, et le peuple l’a couverte de fleurs et de bénédictions.

22. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXIX, numéro 248, 15 octobre 1907 »

L’hiératisme de ses vierges, la fidélité de ses représentations de fruits, de fleurs et d’oiseaux, le bel équilibre décoratif de sa composition, la richesse de son coloris nous séduisent infiniment.

23. (1917) Articles du Mercure de France, année 1917

Lui-même écrivit, sous sa propre signature, une préface, sorte de biographie émue sur Lorenzo Stecchetti qu’il dépeignit sous les traits d’un jeune poète mort poitrinaire à la fleur de l’âge. […] Les fleurs ne réveillent pas à la vie l’âme du défunt qu’elles recouvrent ; plantez une vigne sur mon tombeau. […] Les chroniqueurs du temps rapportent que le public, qui raffolait de la Malibran, dépouilla tous les jardins de Milan pour amasser la pluie de fleurs sous laquelle sembla disparaître la grande artiste. […] Le dénombrement des fleurs d’un petit jardin qu’une jeune fille qui va se faire religieuse fait à la jeune fille qui va devenir mère est une page de touchante beauté. […] Arturo Onofri, dont l’évolution vers la poésie nouvelle a été suivie avec une sympathie attentive, vient de réunir dans Orchestrine la fleur de ses poèmes lyriques en prose.

24. (1908) Articles du Mercure de France, année 1908

Oui, le Génie au front ceint de fleurs et d’étoiles, Qui, d’un souffle puissant, anime, ici, les toiles, Prête, en outre, la vie au marbre avec éclat. […] XII L’ombre fraîche des bois, les vertes promenades, Les parterres de fleurs recréés du zéphyr, Venise ! […] Sa robe flottante du fermoir à l’ourlet, Nulle fleur brodée ne l’ornait, Sauf une blanche rose, présent de Marie, Et pour son service justement portée ; Sa chevelure qui tombait sur son dos Était jaune comme le blé mûr. […] Vos mains sont étendues ouvertes dans le long gazon frais ; — Les pointes des doigts ressemblent au travers à des fleurs roses : Vos yeux sourient le calme. […] Il ne faut point les battre même avec des fleurs.

25. (1916) Articles du Mercure de France, année 1916

L’une, découverte en 1913 sur l’emplacement de l’ancienne Cyrène, dans la nouvelle province italienne de Libye, est une admirable Vénus de marbre, à laquelle manquent malheureusement la tête et les bras, mais dont le corps merveilleux, dépouillé de tout voile, se dresse comme une blanche fleur aux délicates inflexions, avec une pureté de lignes délicieuse. […] Ce qui est moins facile, c’est de magnifier, au moyen d’un verbe harmonieux et prenant, la douceur, les élans poétiques ou la sérénité des âmes qui ont souffert avant de triompher sur leurs faiblesses mondaines, et qui ont su cueillir les fleurs du contentement parmi les buissons les plus épineux, c’est-à-dire dans l’acceptation de la douleur comme discipline de la sensibilité et du vouloir. […] Et il y eut des heures où, tel un saint François d’Assise, il sentit vivre dans la matière même le souffle et l’esprit de Dieu, des heures où il devina des tristesses et des joies presque humaines « dans le vent, dans les ondes, dans les forêts, dans les eaux courantes, dans les formes délicates des fleurs, dans les lignes expressives des rochers et des montagnes pensives ». […] Tu étais content de m’aimer, d’aimer ta fille, l’Italie, tes fleurs, ta musique, les beautés du lac et de la montagne.

26. (1918) Articles du Mercure de France, année 1918

Rome était égayée de fleurs et de drapeaux ; partout la foule exultait ; c’était « la fête de la guerre » dont nul ne pouvait prévoir la longueur. […] L’Archevêque de Milan Anselme rassembla la fleur de la noblesse lombarde l’incitant à prendre la croix et à crier : Ultreja ! […] Tous préparent pour elle des cadeaux et ses compagnes ornent de fleurs une antique image de la madone qui lui est chère. […] Malheureusement, un accident vient troubler cette joie : Antonio, qui était monté sur un pêcher pour y cueillir des fleurs, tombe de l’arbre et meurt dans sa chute.

27. (1907) Articles du Mercure de France, année 1907 « Tome LXV, numéro 231, 1er février 1907 »

Un Poète, digne vraiment de ce nom, lorsqu’il atteint dans son œuvre la grandeur de l’expression d’un temps ou d’une collectivité vaste, lorsqu’un pays tout entier se reconnaît en lui et l’exalte, est aussi mystérieux que la fleur, dont le lien visible qui la rattache à la plante, la tige, ne révèle point l’énorme secret de la vie qui en elle transforme la sève en étincelantes couleurs de pétales, en profondes odeurs de calices.

28. (1912) Articles du Mercure de France, année 1912

Parmi le désordre de notre joie moderne, Renoir a su trouver encore et cueillir les simples fleurs de la calme allégresse ; c’est un peintre, en somme, qui, quoique très moderne, a trouvé le moyen de vivre dans une atmosphère de suavité et de paix voluptueuse que les autres n’ont pas rencontrée. […] C’est pour cela, pour cette sincérité géorgique que la très littéraire poésie de Virgile ne connut pas, c’est pour cela que les générations en pleine éclosion mentale et sentimentale, aux environs de 1900, suivirent le poète romagnol, se détachant plus ou moins bruyamment du poète des Élégances et des Attitudes, qui, lui, n’avait chanté que les fleurs rares des serres patriciennes. […] Là, sur la vigne fructueuse, le raisin séchait sous l’ardeur de Hélios en un lieu découvert, et là il était cueilli et foulé ; et parmi les grappes, les unes perdaient leurs fleurs, tandis que d’autres mûrissaient23. » 12° Et maintenant, à la suite des Cuméens fugitifs, confions-nous à la mer onduleuse.

29. (1906) Articles du Mercure de France, année 1906

Déjà souffle au soleil une plus molle haleine, Le Printemps étincelle, et voici, dans la plaine, Que les arbres fruitiers sont tout roses de fleurs ; Bientôt l’âpre ravin succède aux terres grasses, Puis, sur la mer en fête où flambent les couleurs, Gênes voluptueuse étage ses terrasses. […] Et le rêve, surgi devant la face austère Des monuments de marbre clair où le jour luit, Frêle et profond, en pleine extase se poursuit Dans le cloître où des fleurs parent l’Unique Terre, La Sainte Terre prise au sol du Golgotha Et que la piété des Pisans rapporta De la ville tombée aux mains de l’Infidèle ! […] Par conséquent, le public, qui n’est pas entraîné, même malgré lui, dans l’action et dans l’émotion du dramaturge, reste froid et il a tout le temps de discuter inconsciemment avec le personnage qu’il a devant les yeux, il a tout le temps de se livrer à son esprit critique, de ne pas subir le drame, d’en repousser les fantômes Si l’on pense à Clytemnestre, qui dans l’œuvre tragique se révèle inéluctablement enracinée à Argos et inéluctablement entraînée au meurtre d’Agamemnon ; si l’on pense à Hamlet, qui se révèle tout entier et à tout instant comme une énorme fleur de lotus rouge ondoyant sur un lac de sang ; si l’on pense à Brand, qui révèle son impossibilité devant les fjords tragiques, et pendant toute l’action ne fait que tenir le spectateur dans l’attente de la catastrophe an milieu de la tempête de neige ; on comprendra que ces « types » créés par le génie du théâtre n’agissent que selon une indomptable fatalité qui est la résultante parfaite de leurs possibilités et du sol même où ils se révèlent à nous, et que, transportés avec d’autres attributs, en d’autres pays, au milieu d’autres contingences, ils ne seraient ni Clytemnestre, ni Hamlet, ni Brand.

30. (1915) Articles du Mercure de France, année 1915

publie comme article de fond quelqu’une des « petites fleurs » de saint François.

31. (1904) Articles du Mercure de France, année 1904

Hugo, il écoute, pensif, le chant sauvage qui s’éveille en mai dans la forêt, sur la mer, sur les moissons et les vignes en fleurs ; et ce chant est en lui, les vibrations éternelles du monde retentissent dans son cœur mortel, les germes de toutes les vies bouillonnent dans sa vie humaine : quand il s’étend au fond de sa barque, livré aux caprices de la mer, offrant au soleil ses membres nus, il sent de son corps gigantesque s’élever une forêt et naître l’île inconnue que des matelots découvriront un soir.

/ 31