Chapitre LXXIX
Je suis allé voir le Cénacle de Bossi, chez M. Rafadi. J’ai été mécontent sous tous les rapports : 1° du coloris ; 2° de l’expression. 1° le coloris est l’opposé de celui de Vinci. Le genre noir et majestueux de Vinci convenait surtout à cette scène. Bossi a pris un coloris illuminé de partout. Il est sûr que, dans une église, son tableau ferait plus d’effet que celui de Léonard. Mais, dans une galerie, le tableau de Bossi déplaira toujours. Un livre fait par l’auteur d’un tableau ôte à ce tableau la grâce nécessaire pour toucher. Pour le prouver, qu’on songe à l’effet contraire, un tableau, trouvé par hasard, d’un auteur malheureux, intéresse sur-le-champ. — 2° expression. Quant à l’expression, je me charge de prouver (7 novembre 1811) que Judas ressemble à Henri IV. La lèvre inférieure avancée lui donne de la bonté et beauté d’autant plus grande qu’elle n’est pas détruite par l’esprit.
Judas est un homme bon qui a le malheur d’avoir les cheveux rouges. Sans sortir de la nature, la figure de M. N.-S. (de Rome) donnait sur-le-champ un meilleur Judas. Celle du général A —. La campagne aperçue derrière la tête du Christ m’a fait beaucoup de plaisir, même avant que j’y aperçusse du véritable vert. Une tête de Christ, de Guido Reni, que j’ai trouvée dans l’atelier de Rafaelli, a été pour moi une terrible critique du tableau de M. Bossi. La gravure de Morghen me fait beaucoup plus de plaisir. Ce n’est pas une raison décisive. (7 novembre.) J’ai encore besoin d’une traduction pour plusieurs peintres. Les Carraches, par exemple, dont les noirs me déplaisent. Vu ce matin, 7 nov., la galerie de l’Archevêché. Belle figure de J. César Procacini. Copie de la Madeleine du Corrège, qui me semble jolie. Beau portrait du pape, en petit, de Titien, dit-on. Relief d’un profil du Titien.