Ainsi la suppression des priviléges dramatiques sera utile aux auteurs qui ne peuvent être joués que sur un seul théâtre, aux acteurs qui ne peuvent jouer que sur un seul théâtre, aux ouvriers de tous genres qui ne peuvent travailler que pour un seul théâtre, et au public qui jouira de l’effet heureux que produira la concurrence, et ne sera pas forcé à ne voir les pieces de Moliere et de Racine que sur un seul théâtre17. […] Il auroit fallu, d’après ce principe, empêcher Racine de donner les Plaideurs ; Corneille, le Menteur ; Voltaire, Nanine ; Piron, Gustave ; Destouches, le Rapatriage, etc. […] Corneille, Racine, Moliere, ont travaillé pour leur siecle et pour la postérité, pour la France, pour l’Europe entiere, et non pas pour les comédiens. […] MM. les comédiens François, après avoir avancé dans leur adresse, page 7, qu’une seconde troupe nuiroit aux progrès de l’art dramatique, ajoutent : « On ne peut se rappeler, sans émotion, le succès momentané qu’usurpa Pradon sur le divin Racine ». Ils n’ont donc pas lu l’histoire de leur théâtre ; ils ne savent donc pas que la Phedre de Pradon, qui fut préférée par une cabale de beaux esprits à la Phedre de Racine, fut donnée pour la premiere fois en 1676, et celle de Racine en 1677 et qu’ainsi Pradon auroit toujours en l’avantage, et que Racine n’auroit pas réussi à faire jouer sa Phedre, s’il u’y avoit pas eu deux troupes.
N’épargnons donc rien pour lui conserver la grandeur, le sublime que lui donna Corneille, l’élégance de Racine, le vrai comique de Molière, & la pureté des mœurs qui l’accompagne depuis long-tems. […] Nous devons peut-être Molière à la rivalité de Montfleuri, & Racine à celle de Pradon.
Son étendue ancienne, 204 R Racine le père, loué pour avoir quitté le Théâtre, 28 Racine le fils, beau portrait qu’il fait de la Comédie, 25 Riccoboni Comédien, critiqué sur ce qu’il dit de saint Charles, 235 et suiv.
Racine est plus habile plagiaire, ses voyages sont plus longs, le lecteur est mieux dépaysé. […] Personne depuis Pradon & Racine n’avoit osé traiter un sujet tragique dans le goût de Phedre. […] Il l’a pris pour son modele ; mêmes intrigue, confidences, situations, dénouement, craintes, remords, même rivalité en faveur d’une autre maîtresse, Biblis est calquée sur Phedre, & semble n’en être qu’une traduction libre, quoiqu’il y ait beaucoup de pensées propres au Comte, & même des traits plus beaux que dans Racine, semés sans doute à dessein, pour déguiser le plagiat, Précaution peu nécessaire au-delà des monts, où Racine n’est connu que de quelques amateurs. […] Mais l’envie de faire valoir Racine, dont Biblis est la copie, n’influe-t-il point sur ce jugement trop général.
Montrons-leur enfin les Quinault & les Racine pleurants leurs Opera & leurs Tragédies, & déplorant des égaremens dont ils auroient voulu qu’il ne restât pas la moindre trace.
Il s’agit maintenant, sur notre Théâtre Français particulièrement, d’exciter à la vertu, d’inspirer l’horreur du vice, & d’exposer les ridicules : ceux qui l’occupent, sont les organes des premiers génies, & des hommes les plus célèbres de la Nation ; Corneille, Racine, Molière, Renard, monsieur de Voltaire, &c. leur fonction exige pour y exceller, de la figure, de la dignité, de la voix, de la mémoire, du geste, de la sensibilité, de l’intelligence, de la connaissance des mœurs & des caractères, en un mot, un grand nombre de qualités, que la nature réunit si rarement, dans une même personne, qu’on compte plus de grands Auteurs que de grands Comédiens.
On feroit peut-être moins de Dissertations pour décider si Corneille est supérieur à Racine, si la Motte avoit plus d’esprit que Rousseau, &c. […] J’ai lû quelque part que Racine, ambitionnant le suffrage du célebre Arnaud, alla lui lire sa Phedre avant que de la donner aux Comédiens. […] Monsieur, lui dit Racine, sans cela, qu’auroient dit nos petits Maîtres ?
Du reste, je vous abandonne le Comédien et la plupart de nos Poètes, et même Monsieur Racine en plusieurs de ses Pièces.
*** D’un côté c’est Racine et de l’autre un Voltaire : L’un est tendre et touchant ; l’autre délicieux : Il tonne dessus nous, et menace les cieux ; Des hommes si profonds quittent trop tôt la Terre.
ON fit annoncer il y a trois ans, dans tous les papiers publics, que plusieurs gens de lettres s’étoient cottisés par la voie de la souscription, pour faire placer la statue du grand Voltaire dans la salle de la comédie, comme on place les statues des Rois dans les hôtels-de-ville, ou autres lieux plublics, au milieu des hustes & des portraits de Corneille, de Racine, de Moliere, comme le soleil au milieu des étoiles ; car tous ces héros de la scéne n’ont point de statues, quoiqu’ils ayent bien merité de l’éclat, & que leurs poëmes n’ayent point été inutiles à Voltaire ; ni les gens de lettres, ni personne, n’ont songé à leur ériger des statues. […] Les bustes de Corneille, de Racine, de Moliere avoient été placés sans cérémonie ; mais-est-il assez de distinction pour le Roi, pour le Dieu Arouet ? […] Du ton sublime de Corneille ; Il a fait parler les Romains ; Racine a formé son oreille, Et mis son pinceau dans ses mains. […] Ce mot Idolâtre, qui revient plusieurs fois, n’exprime que trop bien la folie du théatre & de ses amateurs, Racine a donc formé ce grand homme.
de tous les siecles, de toutes les nations, supérieur à Corneille & à Racine. […] Bien plus, il est supérieur à Corneille, à Racine, à Despreaux, non-seulement pour l’élévation du génie, mais par l’élégance, la noblesse, la correction du style. […] Mais l’usage en est établi, la poësie regne dans le tragique, les chef-d’œuvres de Corneille & de Racine (beaux noms que l’usage met par-tout) sont tous en vers : voilà le ton du jour. […] Corneille & Racine mêmes, s’ils revenoient au monde avec des chef-d’œuvres, ne voudroient pas tenter cette révolution, & n’y réussiroient pas. […] Corneille, Racine, Crébillon, &c. n’étoient pas moins républicains.
Par ces Empiriques j’entends les Corneille et les Racine, qui prêchent la vertu, si vous voulez, mais une vertu de Théâtre, une vertu louche, et qui n’est point capable de déraciner les défauts des hommes. […] M. Racine en plusieurs de ses Pièces.
Mais il n’est pas nécessaire de donner le secours du chant et de la musique à des inclinations déjà trop puissantes par elles-mêmes ; et si vous dites que la seule représentation des passions agréables dans les tragédies d’un Corneille et d’un Racine, n’est pas dangereuse à la pudeur, vous démentez ce dernier, qui, occupé de sujets plus dignes de lui, renonce à sa Bérénice, que je nomme parce qu’elle vient la première à mon esprit ; et vous, qui vous dites Prêtre, vous le ramenez à ses premières erreurs.
Corneille & Racine, fort supérieurs pour la religion & les mœurs, l’état, la naissance, qui jamais ne s’abaisserent jusqu’à être des Comédiens, le valoient bien, chacun dans son genre. […] Mais le Chancelier Daguesseau, qui ne fut jamais à la comédie, & qui dans ses Mercuriales en fait un portrait hideux, pour en éloigner les Magistrats ; mais M. de Lamoignon, que Moliere joua, ce qui a fait écrire si vivement contre Moliere Baillet son Bibliothécaire ; mais M. le Franc de Pompignan, qui malgré ses brillans succès y a renoncé si généreusement & si bien écrit contre ce dangereux spectacle au religieux fils de Racine ; mais Corneille, Racine, Quinault, Lafontaine, inconsolables d’avoir travaillé pour le Théatre, lorsque la grace leur ouvrit les yeux, auroient-ils placé Moliere sur les autels ? […] Moliere a égalé Racine dans l’art de peindre l’amour. […] Tombe à ses genoux, il a égalé Racine dans l’art de faire des vers ; quelle foule de vers charmans ! […] Sensibilité exquise du cœur & des organes qui enlevoit les ames, comme Racine charmoit les cœurs, & dans la conversion des Calvinistes offroit à la religion des conquêtes dignes d’elle.
Corneille et Racine, dont la foi n’a jamais été suspectée, et qui même ont eu, dit-on, des alternatives de piété en travaillant pour le théâtre, emportés par la fougue de leur imagination, ont avancé une infinité de maximes blasphématoires, et ont sacrifié la raison, la probité, la foi, à la satisfaction d’éclore une prétendue belle pensée.
Racine est châtie mais trop tendre. […] L’amour paternel a eu la foiblesse d’aller déterrer des pieces du théatre, qu’il avoit composé il y a plus de 50 ans, que le public avoit heureusement oubliées, & qu’il se devoit à lui-même doublier aussi, & s’en répentir & en faire pénitence, comme Quinaut, Racine & la Fontaine, il en a donné une nouvelle édition, augmentée de plusieurs pieces d’une date plus récente, qui n’ajoutent pas de fleurons à sa couronne. […] Ces grands Auteurs dont on représente les pieces, Corneille, Racine, Moliere, Regnard, &c. […] L’Abbé d’Olivet, quoique tenté de faire des tragédies de Racine un livre classique, n’a pas osé proposer ce parallele, ou plutôt donner cette préférence à Racine, quoiqu’aussi bien écrit que Térence.
Le nombre la variété, la beauté de ses pieces, en sont le plus grand ornement ; & quoique dans un genre different de Corneille & de Racine, il peut se mesurer avec eux. […] Les Jansenistes n’ont commencé à parler de théatre, que dans le tems de Nicole & de Racine, après la mort de Mazarin, qui d’ailleurs les laissoit fort tranquilles ; il est vrai que les Sinodes & les Ministres protestants, Port Royal, & les Ecrivains Jansenistes, ont condamné la comédie, & ils ont raison. […] Madlle. fit travailler Racine & Corneille sur sur le même sujet, Berenice. […] Le théatre est l’organe des passions, il jouoit son rôle : le grave Corneille, le devot Racine, ne s’en faisoient aucun scrupule. […] Dangeau & Racine firent chacun sa comédie, & la piété du Roi, ne gagna rien ni aux billets doux, ni aux drames.
Quand on lit les tragédies de Corneille, on est frappé de la grandeur qu’il donne à ses héros, on se sent élevé avec son génie, on est intéressé & attendri par l’art de Racine, qui touche, pour ainsi dire, toutes les cordes de l’ame, & en exprime tous les tons du sentiment. […] Le style de Bourdaloue & de Massillon ont-ils rien de comparable avecceluide Corneille & de Racine ? […] Racine, plus prudent, n’a rien donné au public ; il a refusé à l’Académie son discours de réception, contre l’usage. […] Racine, dans les Plaideurs, applique ces vers mot à mot aux Sergens, pour se mocquer de Corneille. Corneille en fut très irrité, & ne pardonna pas à Racine cette espece de parodie.
Noms immortels que la postérité révère, que les Corneille, les Racine, les Voltaire ont fait revivre sur la Scène, animez mon ame échauffée d’un zèle respectueux pour vos vertus ?
Jettez les yeux sur la prémière Tragédie de Corneille ou de Racine, voyez comme ils mettent dans la bouche de leurs Acteurs toutes les figures de la Rhétorique.
« N’est-il pas bien cruel, dit un apologiste du théâtre, que les auteurs de Cinna, d’Héraclius, de Phèdre (Corneille et Racine), aient été fondés à verser des larmes d’un juste repentir. » Bossuet se sert du témoignage de Racine pour prouver que la représentation de ses tragédies est dangereuse à la pudeur. […] Arnaud ayant reproché à Racine d’avoir travaillé en ce sens ; celui-ci lui répondit […] Le grand Bossuet a fait tout un traité pour flétrir le théâtre. « Français, Italiens, Anglais, Espagnols, Corneille, Racine, tous, dit le marquis de Pompignan, se réunissent à consacrer à l’amour la muse de la tragédie.
Racine en instruisant la Chanmêlé développoit-il en elle un talent qu’il n’avoit point lui-même ? […] Mais à n’envisager que les chœurs, & l’étendue du Théatre Grec, quels changemens Racine n’a-t-il pas dû faire à sa piéce pour l’accommoder au notre ?
Le théatre a de même servi d’échelle pour monter au faste des honneurs littéraires, à Messieurs Racine, Voltaire, Duclos, Marmontel, Historiographes de France & de l’Académie Françoise.
Massillon, ce grand Orateur, que l’insinuation, les graces, la douceur, la fermeté, ont rendu si célèbre ; que les amateurs du théatre croient beaucoup louer en les comparant à Corneille & à Racine, ont prononcé leur condamnation. […] Elle vaut bien la lecture de Moliere & de Racine, & de toute la bibliothèque du théatre.
Louis étoit confus, dit la Baumelle, de l’impie plainte de la piété qui faisoit valoir à Dieu même son exactitude & son recueillement à la messe ; mais il étoit charmé de se reconnoître dans la grandeur & le faste d’un Roi de Perse (cette flatterie seroit une satyre : Racine avoit-il assez l’esprit de Port Royal pour oser censurer le Pénitent du P. la Chaise ?). […] Racine le fils, dans la vie de son père & l’examen de ces pieces, convient qu’on fit toutes ces applications, qui sont en effet très-plausibles, quelle qu’ait été l’intention du Poëte & de la favorite. […] Le théatre, après avoir volé les pieces Espagnoles, a voulu imiter la Cour d’Espagne ; il fait des grands, le grand Corneille, le grand Racine, le grand Moliere, le grand Voltaire, le grand Panard, le grand Marmontel, &c.
Quinaut, Racine, la Fontaine, encore n’étoient-ils pas Acteurs, depuis peu la Gaussin, & quelques autres en petit nombre, ont quitté le théatre, & se sont sincèrement convertis. […] Quinaut, Barbourg, Racine, la Gaussin se sont convertis, qu’on en nomme beaucoup d’autres : Apparent rari nantes in gurgite vasto. […] Je ne répondrois pas que les jeunes Religieuses qui font représenter des pieces de Racine à leurs Pensionnaires, eussent toujours la même facilité de composition ; mais les Pénitens, qui sans doute sont Poëtes, fetont cette édifiante réforme.
Qui sauroit sans Baron que Racine a vêcu ? […] Racine n’a peint que les juifs. […] Il l’emporte sur Corneille & Racine. […] Peut-on s’aveugler jusqu’à ne pas voir que le délire d’adulation de crédite même le peu qu’il y a de bon & de vrai dans Voltaire, & qu’il est encore plus ridicules que la préférence sur Corneille & Racine ? […] C’est que Moliere, licencieux, sans religion, ce que n’étoient ni Corneille ni Racine, étoit un philosophe, &, de tous les philosophes, celui qui a mieux vu les defauts des hommes.
Sur le revers Apollon tenant une couronne de laurier d’une main, & un rouleau de l’autre, où sont écrits ces trois noms, Corneille, Racine, Moliere, & au-tour de la médaille, Et qui pascuntur ab illis. […] & quel tableau est aussi attendrissant qu’une scène de Racine, aussi piquant que les obscénités de Moliere, que les pas de deux, de trois, de quatre des Lani, des Allard ? […] Il se corrigea de cette foiblesse en entendant quelque vers de la tragédie de Britannicus, où Racine en faisoit sentir l’indécence dans la personne de Néron.
Elle fit revenir malgré lui sur la scène le pieux Racine, que la religion & la vertu en avoient arraché, & revivre les talens séduisans & les coupables écrits dont il avoit connu le danger & la gloire funeste qu’il arrosoit de ses larmes, & rallumer les feux demi-éteints de Louis XIV pour des jeux que, par un pareil motif, il avoit cru devoir s’interdire, & se reprochoit d’avoir trop aimé. […] Il est vrai que Racine ne fit depuis que deux tragédies, Esther & Athalie, pleines de sentimens de religion, où il n’entre point de galanterie : mais tout est lié au théatre, d’une piece sainte on passe aisément à une piece profane ; & dans la piece sainte même, le goût du spectacle que l’on prend, la décoration mondaine qu’on étale, ne sont gueres moins dangereuses dans Esther & Athalie, que dans Phedre & Bérénice : Clairon est Clairon par-tout.
L’illustre Prince de Conti, M. le Duc de la Rochefoucault, Bussy-Rabutin, la Bruyere, Racine, & beaucoup d’autres qui en avoient fait l’expérience, ont tous écrit que les spectacles sont dangereux, séduisans, corrupteurs, & qu’il est impossible d’aimer la comédie & l’opéra, si on n’a jamais eu d’amour ni d’autre passion. […] Ceux qui ont comparé le théâtre de Racine, des deux Corneilles, de Moliere, &c. avec celui d’Euripide, de Sophocle, de Ménandre, de Séneque, de Plaute, de Terence, &c.
On devroit bien faire aussi des pieces sur Corneille, Racine, Panard, Dominique, qui valent bien Moliere, chacun dans son genre.
[FRONTISPICE] Epistresurla condamnationdu theatre a Monsieur Racine a Paris, Chez la veuve de Jean Baptiste Coignard Imprimeur ordinairedu Roy et de l’Académie Française, rue S.
Elles suffisent sans doute pour déterminer tout Chrétien docile à la voix de la Religion ; et quiconque ne l’est pas, se trouve également sans excuse, au tribunal de la Raison : il a contre lui les Philosophes, les Protestants, les Auteurs dramatiques, les Comédiens eux-mêmes, Corneille, Racine, Boileau, Lefranc, La Mothe, Riccoboni, Gresset, Bayle, Jean-Jacques Rousseau, et tant d’autres : qu’il écoute leurs témoignages ; ils ne sont pas suspects25. […] Et quel sera même l’effet de ces deux pièces admirables de Racine, toutes les fois qu’elles se trouveront comme dénaturées par des acteurs qui sont habituellement les organes de la volupté ? […] Voici ce que le célèbre Racine écrivait à son fils sur les Spectacles. […] Ce cri part d’un homme, fort connaisseur dans le genre dramatique, grand admirateur de Racine, de Molière, et des autres coryphées de la Scène, d’un homme qui jamais ne passa, parmi les partisants du monde, ou de la prétendue philosophie, pour l’émissaire des Prêtres, ou de ceux que nos incrédules appellent, avec aussi peu d’esprit que de justesse, Enthousiastes, Fanatiques, Etres superstitieux, Ésprits faibles. etc. etc. etc.
On apprendra de Corneille à donner au style une majesté simple, au dialogue une vigueur pressante, &c, de Racine, un choix heureux des expressions pures & élégantes, insinuantes, &c. de Voltaire, à donner une couleur mâle, une philosophie touchante, &c. de Marmontel, tout, &c. […] Il est singulier que les trois derniers Historiographes de France, Racine, Voltaire, Marmontel, soient des Poëtes Dramatiques. […] Il y est si superficiel, si médiocre, & très-souvent si faux, qu’il eût mieux fait pour sa gloire de se borner à quelque ouvrage ; à l’exemple de Racine, qui plus habile & plus sage que lui ne voulut jamais ouvrir son porte-feuille, & ne donna que ses tragedies, qui toutes même ne sont pas également bonnes. […] L’intigue est mal conçue, on y voit des traits pillés dans les Plaideurs de Racine, & on rapporte une scene assez plaisante entre le Cadi & quelque paysan qui fait le niais, & se moque de lui.
Jamais on ne justifiera du côté des mœurs une pareille fripponnerie, quelque adresse qu’y emploie Racine, quelque divertissante qu’elle soit. […] J’ai préféré Corneille & Racine, ces deux chefs de la poësie dramatique. Est-il possible qu’un Comédien leur admirateur déclaré, ne conserve que cinq pieces de Racine & sept de Corneille, & deux on trois en les corrigeant ?
Et c’est justement en cela, comme en bien d’autres choses, que M. de Voltaire doit voir comparer son génie à celui de Corneille, de Racine et de Crébillon, puisque comme eux c’est par la prospérité du crime qu’il a su rendre son personnage encore plus abominable. […] J. Racine, Phèdre, Paris, C. […] J. Racine, op. cit.
[NDE] Racine reprend la distinction avec une certaine ironie.
On auroit du faire le même honneur à Corneille, à Quinault, à Lulli, on le fera à Racine, à Crébillon, & dans la suite immense des siécles au grand Voltaire jusqu’à la fin du monde ; mais il me semble qu’on ne devroit pas prendre leur mort pour époque, il faudroit choisir quelque événement brillant de leur vie : car leur mort n’est pas brillante. […] Tels Corneille, Quinault, Racine, la Fontaine ; est-il de l’honneur du théatre de solemniser ces repentis ? […] Les statues de Corneille, Racine, Voltaire orneroient le péristille de la nouvelle salle, que l’on projette de bâtir, & la France depuis long-tems, la plus heureuse rivale d’Athenes, dans les beaux arts, le seroit aussi dans les honnuers rendus à ceux qui les cultivent. […] La plaidoirie en étoit une très-comique, aussi bien que celle des Plaideurs de Racine ; il est de l’intérêt & de l’honneur des comédiens de ne pas laisser introduire ces degrés de jurisdiction, où un tribunal supérieur casse leur sentence ; & il est bien de l’intérêt des auteurs de forcer les comédiens à jouer ?
Il ne tient pas à l’anglomanie des dramatiques françois, qu’on ne rende les pareils honneurs à Corneille, Racine, Moliere. […] Shakespear a autour de lui Sophocle, Euripide, Plaute, Térence, Corneille, Racine, Moliere : mais point de Voltaire. […] Corneille & Racine, Homere & Virgile, Cicéron & Démosthenes, Sophocle & Térence, Bossuet & Bourdaloue, qui chacun dans son genre valent bien le poëte anglois, n’ont pas cru que l’un dût dispenser de l’autre. […] Cet affront fait au créateur du théatre anglois a été souvent renouvellé en France : Corneille, Quinault, Lulli, Racine, &c. ont à se plaindre que, sans respect pour leurs chefs-d’œuvres, on a réformé leurs pieces, leur poësie, leur musique.
Bossuet1, a été le témoin oculaire des regrets de Quinault, Racine ouvrit les yeux au milieu de sa carriere, on a regardé sa retraite comme un vain scrupule ; c’étoit plutôt un retour de sa foi éclipsée ; il comprit qu’on ne sçauroit la concilier avec les sentimens & la profession de ceux qui travaillent pour le Théâtre.
bref, je ne sais que penser. » Telle était la situation du théâtre, lorsque vers le milieu du seizième siècle la comédie profane intervint avec ses obscénités, et rivalisa avec la religieuse jusqu’au siècle de Louis XIV, où les Corneille et les Racine commencèrent à illustrer notre scène, et lui donnèrent un caractère de décence et de moralité.
Lorsque les Italiens et les Anglais apprennent que nous flétrissons de la plus grande infamie un art dans lequel nous excellons, qu’on excommunie des personnes gagées par le Roi, que l’on condamne comme impie un spectacle représenté dans des couvents, qu’on déshonore des pièces où Louis XIV et Louis XV ont été acteurs, qu’on déclare œuvre du démon des pièces reçues par des Magistrats et représentées devant une Reine vertueuse, quand des étrangers apprennent cette insolence et ce manque de respect à l’autorité royale, cette barbarie gothique, qu’on ose nommer sévérité chrétienne, peuvent-ils concevoir que nos lois autorisent un art déclaré infâme, ou qu’on ose couvrir d’infamie un art autorisé par les lois, récompensé par les Souverains, cultivé par les plus grands hommes, et qu’on trouve chez le même Libraire l’impertinent libelle du Père le Brun à côté des ouvrages immortels de Corneille, Racine, Molière ?
Il est vrai que ces deux talens sont rarements réunis ; Moliere n’a point fait de tragédie, Corneille & Racine n’ont point réussi dans les comédies : mais c’est abuser de la confiance du public, de faire bien payer pour un acteur qui ne joue pas, quelque grand qu’on suppose le Kain dans son genre. […] Je n’avois point à choisir , répondit-il, Corneille avoit prix le ciel, Racine la terre, il ne me restoit plus que l’enfer, je m’y suis jetté à corps perdu. On a voulu faire une antithese : le premier membre est faux, Corneille n’a pris ni le ciel païen, ce ne sont point les dieux qu’il fait parler, ni le ciel chrétien, il ne fait point agir les saints ; à moins qu’on ne l’entende de Polieucte & de Théodore : mais en ce cas, Racine par Esther & Athalie, a pris aussi le ciel. […] Les acteurs parfaits comme Racine, Baron, sont três-rares. […] Racine, Moliere alloient l’entendre par curiosité & profiter de ses leçons, les inséroient dans leurs pieces de théatre, & Boileau dans ses satyres.
Arnaud moins sévère, quoique plus ardent Janséniste, se mêloit de tout, même des pieces de Racine, qu’il protégea, & réconcilia l’Auteur avec Port-Royal. […] Racine dans Esther & Athalie, Voltaire dans Brutus, se sont passés d’amour, & n’en sont pas moins estimés. […] En voici, disoit l’Avocat, une preuve que je voudrois pouvoir dissimuler ; sa bibliothèque est composée des Œuvres de Corneille, Moliere, Racine, du Théatre Italien ; le Théatre y est complet, &c.
Corneille, Racine, Crébillon, Voltaire, ne sont point obscènes. […] Nos filles ont si bien joué, disoit Madame de Maintenon à Racine, qu’elles ne joueront plus de leur vie. […] Un Comédien n’est pas déclamateur : Moliere, Racine, Baron, la Clairon, sont-ils des déclamateurs ?
Vous les avez conduits aux tragédies de Corneille, & de Racine ; ils ont vu jouer Moliere ; mais votre sagesse ne vous a pas permis de leur laisser voir toutes ses comédies. […] n’est-ce pas encore un badinage fort heureux, que le projet de rendre les vers de Racine, sans parler, uniquement par le moyen des doigts ? […] Nicole, contemporain de Molière, de Racine et de Quinault ; J.
L’Auteur de Mérope, qui semble avoir hérité de Racine le grand art d’intéresser, & dans cette Piéce, & dans toutes celles que nous avons de lui, ne nous fait verser tant de larmes, qu’en opposant les sentimens aux passions, ou celles-ci à ceux-là.
Tragédie de Racine.
Qu’on les compare à ceux de Racine, des deux Corneilles, de Molière, etc. on verra lesquels sont les plus propres à corrompre le cœur.
En 1670 il vit jouer la belle pièce de Britannicus ; il fut frappé du portrait que fait Racine des folies de Néron, parmi lesquelles son amour excessif pour les spectacles lui donnait le plus grand ridicule. […] Mais sans remonter aux premiers siècles de l’Eglise, où les Basile et les Chrysostome parlaient aux Grands de leur temps avec tant de courage et de zèle, on n’a qu’à ouvrir les sermons de Bourdaloue, de la Rue, de Massillon, et en particulier le petit carême de ce dernier, pour se convaincre que la religion et la vertu n’ont aucun besoin du théâtre pour annoncer la vérité aux Grands, que les Orateurs Chrétiens le font avec plus d’autorité, de liberté et de fruit que tous les Corneille et les Racine du monde.
L’autre par une noble émulation, s’élevant au-dessus des difficultés que Racine lui-même croyoit insurmontables, entraîne tout Paris à sa pièce.
Racine ajoute à ce défaut une tendresse plus insinuante.
1 » Il est donc vrai, Monseigneur, que le Pape avait un Théâtre où sa Sainteté occupait la première place, l’Empereur la seconde, et le Doge de Venise la troisième : Eh qu’y pouvait-on représenter de plus beau, de plus pur, et, si je l’ose dire, de plus profitable que les Pièces de Corneille et de Racine ?
M. Racine l’aîné, son intime Ami. […] Maffei : Ne croyez pas, Monsieur, que cette malheureuse coutume d’accabler nos Tragédies d’une Episode inutile de galanterie, soit due à Racine, comme on le lui reproche en Italie.
Mr. Racine d’avoir renoncé à la Poésie du Théâtre : « Que ne suit-on les pas du modeste R... […] Il cite Racine qui a renonce à sa Bérénice, la croyant dangereuse à la pudeur ; et prétend que Corneille dans son Cid veut qu’on aime Chimène, qu’on l’adore avec Rodrigue.
L’amour des plaisirs physiques est commun à tous les hommes ; l’amour de la gloire convient à des Rois, et c’est dans leurs âmes qu’il faut l’exciter : c’est ce que Racine a fait avec tant d’art ; et Racine a du moins, sur tous les écrivains politiques ou moraux, l’avantage d’attacher ses lecteurs.
Ecoutez Messala parlant à Tite, dans Racine, Eh bien, l’ambition, l’amour & ses fureurs, Sont-ce des passions indignes des grands cœurs ?
La complaisance d’un Auteur à peindre dans ses personnages les mœurs et les caractères de ses compatriotes, c’est-à-dire de donner à ses Héros des Vertus que l’histoire leur refuse, et qui sont communes dans sa Patrie, me paraît louable en ce que c’est un moyen d’entretenir ces bonnes qualités dans la Nation, de les faire aimer davantage et de captiver l’attention du spectateur en l’intéressant pour des Vertus et des bonnes qualités qu’il a lui-même ; c’est sans doute le motif qui a porté Racine à donner à ses Héros la politesse et la galanterie Françaises, et ce ne sont que des gens de mauvaise humeur qui peuvent trouver que ces Héros y aient perdu. […] « Les chefs-d’œuvre de Corneille et de Molière tomberaient aujourd’hui, et s’ils se soutiennent, ce n’est que par la honte qu’on aurait de se dédire, et non par un vrai sentiment de leurs beautés ; une bonne pièce, ajoutez-vous, ne tombe jamais que parce qu’elle ne choque pas les mœurs de son temps. »s Après vous avoir fait distinguer ce que Molière et Racine ont bien fait de ménager dans nos mœurs, il est question de vous prouver maintenant que Molière surtout n’a pas à beaucoup près respecté ce qu’il y avait réellement de vicieux en elles. […] Corneille, le pieux Racine et M. de Voltaire ont-ils attendu des motifs pour attaquer l’orgueil despotique, l’hypocrisie et le fanatisme ? […] Corneille, Racine et Voltaire n’ont cependant pas attendu ces événements, pour s’efforcer d’en inspirer la crainte ; nous pouvons ce me semble conclure de ces exemples que nos Auteurs ne sont pas aussi lâches que vous le dites et ne respectent pas autant les mœurs du siècle que vous feignez de le croire.
Un amusement si instructif sera-t-il toujours accusé, & doit-on se faire un nouveau titre des regrets que Corneille & Racine ont témoignés sur la fin de leurs jours ? Corneille & Racine ont gémi ; ils en ont eu raison, sans doute, puisqu’ils ont passé leur vie dans une occupation condamnée : mais n’est-il pas bien cruel que les Auteurs de Cinna, d’Héraclius & de Phédre, ayent été fondés à verser des larmes d’un juste repentir ?
Pour tout le reste, il y a plus de piété dans une tragédie d’Eschile, que dans tous le théatre de Corneille, de Racine, de Crébillon & de Voltaire. […] Lulli, Rameau, Moliere, Racine ont formé peu d’oracles de la Jurisprudence ; si ce n’est dans Pourseaugnac ; le Temple de la Guerre, termine ces belles allégories en sucre.
Mais on doit en user sobrement : il y en a peu dans Racine & dans Corneille. […] Jamais Corneille, Racine, Voltaire, n’ont fait tenir ce langage à leurs amans ; Moliere même & les autres comiques ne le font tenir qu’à des valets ou des pay sans.
M. Racine.
D’ailleurs, quelque prévenu que l’on soit en faveur du Comédien, on ne met apparemment pas son talent au-dessus du génie des Corneille, des Racine, des Crébillon, des Voltaire.
Messieurs Corneille le ieune, Desmarests, Moliere, Quinaut, Gilbert, Boyer, Racine, & Mademoiselle Desjardins ont droit aux plus justes loüanges qu’on ait jamais données ; & si nous voulons étaler nos petites Galanteries, & tous ces petits amusemens de Theatre, par où l’on tâche de delasser l’esprit des Auditeurs apres de serieux Spectacles : Il est des Devisés, des Viliers, des Iacobs, des Poissons, des Boursault, Chevalier, & beaucoup d’autres, que ie n’ay pas le bien de connoître, ou qui sont echapez de mon souvenir, qui sont tres-capables de divertir les plus delicats par leurs petites Comedies, & d’effacer les anciennes Fables Atellanes.
Dans ces reduits prompts à crier merveille Pradon est préferé à Racine. […] Que Racine connoit bien mieux la bienséance ! […] Racine est un grand maître : c’est dommage qu’il enseigne si bien la plus dangereuse des passions ; il n’en est que plus dangereux. […] M. Racine & M. de la Harpe sont deux hommes fort différens.
Louis XIV a été plusieurs fois satyrisé par Racine. […] Que de millions ont valu à la France Corneille, Moliere, Racine, dit-il avec un enthousiasme que je prie d’écouter sans rire ! […] Tout cela réduit à sa juste valeur signifie qu’on a acheté plusieurs exemplaires des ouvrages de ces Auteurs, qui ont été imprimés en Hollande & en Angleterre ; que quelques Auteurs dramatiques étrangers les ont traduits & pillés, & mis à leur goût ; que quelques Acteurs, danseurs, chanteurs Italiens se sont donnés au théatre de Paris ; que des étrangers qui viennent à Paris, vont au spectacle, car assurément pas un seul n’a fait un voyage exprès pour Corneille, Racine, Moliere.
Les Académies ne se sont point occupés de ses ouvrages, & les Colleges n’en ont point fait un livre classique, quoique l’Abbé d’Olivet en ait fait un des Œuvres de Racine, & aucun Auteur n’a fait des Commentaires sur Moliere, comme Voltaire en a fait sur Corneille. […] Racine, Poëte galant, passionné, nourri à la Cour, a fait un cours complet de galanterie. […] Il seroit à souhaiter que quelque Académicien exécutât sur Moliere ce que l’Abbé d’Olivet a fait sur Racine, & Voltaire sur Corneille.
Si Phèdre a excité de la commisération sur notre Théâtre, quoiqu’elle fût criminelle, c’est que Racine, d’un génie supérieur, et maître de son sujet, a si bien ménagé la faiblesse de cette Reine, qu’il en a fait retomber tout le blâme sur la confidente, qui abusait de la confiance que sa Maîtresse avait en elle. […] Racine, est si pathétique, et si touchant, que le spectateur est autant attendri par cette narration, que s’il voyait de ses yeux Hippolyte traîné par ses chevaux, et Aricie pâmée auprès du corps de son Amant, qui expire, et qui est tellement défiguré, qu’à peine le peut-elle reconnaître. […] Racine a bien ménage cette liaison d’événements dans sa Phèdre.
[NDE] Racine, Andromaque, 1667. […] [NDE] Racine, Mithridate, 1672. […] [NDE] Racine, Préface de Bérénice, 1670.
2 Il est inutile de répondre qu’on n’est occupé que du chant et du spectacle, sans songer au sens des paroles ni aux sentiments qu’elles expriment et inspirent : car, comme dit encore Bossuet, « c’est là précisément le danger, que pendant qu’on est enchanté par la douceur de la mélodie, ou étourdi par le merveilleux du spectacle, ces sentiments s’insinuent sans qu’on y pense et plaisent sans être aperçus ; mais il n’est pas nécessaire de donner le secours du chant et de la musique à des inclinations déjà trop puissantes par elles-mêmes ; et si vous dites que la seule représentation des passions agréables dans les tragédies d’un Corneille et d’un Racine, n’est pas dangereuse à la pudeur, vous démentez ce dernier, qui, occupé de sujets plus dignes de lui, renonce à sa Bérénice, que je nomme parce qu’elle vient la première à mon esprit ». […] Racine, Bayle, la Mothe, Gresset, Riccoboni, qui avaient connu les dangers des spectacles, gémissaient de s’être dévoués au service du théâtre et formaient des vœux pour sa suppression.
Un moment : je fais ce que je dis, & je ne prétens pas, comme tu pourrais le croire, faire rendre les chefs-d’œuvre de Molière, de Corneille, de Racine, &c. […] On doit sur-tout l’attribuer au trop de liberté qu’on laisse aux Actrices : on ne daigne imposer aucuns devoirs à des femmes destinées à l’emploi sublime de faire passer dans nos âmes le sentiment vif, animé de toutes les beautés de notre Corneille, de notre Racine, de notre Voltaire.
M. Racine, dit-il, avoit formé le plan d’une Tragédie Françoise d’Œdipe, suivant le goût de Sophocle, sans y mêler aucune intrigue postiche d’amour, & suivant la simplicité Grecque.
Je prie d’observer aussi que je ne me suis permis cette discussion tardive ou réchauffée sur cet auteur respectable, dont on ne peut lire les principaux ouvrages sans admiration, qu’enhardi par la pensée que malgré tout ce qui en a été dit, on pourra encore le discuter sous quelque rapport, même dans des siècles, comme nous le faisons tous les jours des anciens auteurs grecs et latins les plus fameux ; et me sentant d’ailleurs soutenu, quant au fond, par de grandes autorités, par celles de Labruyère, de Racine, du président de Lamoignon, de Bourdaloue, des savants de Port-Royal et d’autres, qui en ont parlé dans le même sens, qui ont combattu la comédie en question à sa naissance, et l’ont jugée dangereuse unanimement, par des présomptions, par des calculs de probabilité seulement, et sur qui j’ai donc l’avantage du temps, de plus longues observations, des faits, ou de raisons positives, en un mot, de l’expérience.
Manes du Grand Louis, rougiriez-vous d’avoir rappellé Racine au Cothurne qu’il avoit quitté, pour engager cet autre Prince de la Scéne Françoise à donner des Tragedies dignes du Theatre & des Actrices de S. […] Racine jeune le consola de Corneille vieilli & peu docile à suivre ses traces. […] Corneille dans le grand avoit étonné les esprits par la majesté pompeuse de ses pensées ; Racine dans le tendre fascina les cœurs par le charme enchanteur des sentimens. […] Corneille enfin forçant les obstacles d’un sentier escarpé, & sujet par conséquent à d’illustres chutes, redoublant toujours ses efforts pour tendre de plus en plus au sublime & au merveilleux, chercha par la voye de l’admiration des applaudissemens trop mérités, qu’il arracha des plus déterminés à les lui refuser : Racine suivant une pente plus douce, mais par-là plus sûre, s’élevant plus rarement, soutenant son vol avec grace, & le ramenant promptement aux amours, parut s’offrir de lui-même aux suffrages qui prévenoient son attrayante douceur. […] Quelle gloire pour Racine !
A l’exception de Plaute & d’Aristophane, qui sont trop libres, qui ne le sont pas plus que Moliere, qui le sont moins que Poisson, Dancourt, Vadé, le théatre de la Foire, tous les dramatiques Grecs & Latins sont autant & plus décens que les nôtres, & moins séduisans, moins galans, moins dangereux que Racine. […] Porée, Brumoy, les Abbés Abeille, Boyer & Pelegrin, Corneille même, Racine, Crébillon, Voltaire, quoique laïques, sont-ils jamais entrés dans aucune troupe ?
Malgré la galanterie de toutes parts répandue à pleines mains, ce n’est pas un cœur tendre comme Racine, c’est une imagination licencieuse comme Bocace & la Fontaine dans ses Contes, qui s’égaie sur le corps humain dans l’état de pure nature, & en diversifie les jours & les attitudes, toujours avec agrément, un ton de politesse & un air de décence. […] Ce n’est point ce que disoit Boileau : J’ai rendu service à Racine, je lui ai appris à faire difficilement des vers.
Il reste plusieurs de ces pièces, dont assurément on ne peut pas lire deux pages, mais qui pour le temps étaient des chefs-d’œuvre, étaient mieux payées, plus honorablement accueillies, et attiraient plus de monde, que celles de Corneille et Racine, ce qui est peut-être plus humiliant pour la raison humaine que pour le Poète. […] Tel Racine faisait profession de la morale sévère de Port-Royal, et composait Phèdre, Bérénice, et exerçait la Chammelé.
» Racine pense de même (Préface de Phédre) : « Le théâtre de Sophocle et d'Euripide était une école où la vertu n'était pas moins bien enseignée que dans celles des Philosophes. […] Racine, Corneille, Voltaire, ne veulent que plaire ; la passion n'est pour eux que le ressort du plaisir.
Mr. Racine, lors qu’il lui dit que1.
Corneille, Racine, Crébillon, Voltaire, n’ont-ils pas fait des fautes ?
Ces acclamations, ces demandes d’Auteurs, honneurs qu’on n’a pas faits aux Corneille, aux Racine, aux Moliére, ne signifient plus rien, sont tombés dans le mépris.
[NDE] Thirouin nous indique qu’ici se trouve une confusion chronologique de Racine : la réponse du Provincial date de 1656 ; le portrait d’Arnauld d’Andilly de 1658.
Les Anciens, selon Racine, se sont distingués par cette continuité d’action, qui fait que leur Théâtre ne demeure jamais vuide.
Le sublime Corneille, le tendre Racine, Molière le peintre de la Nature ; en un mot tous les grands Hommes qui l’ont rendu fameux, devraient enflammer votre génie, plutôt qu’un Spectacle où l’esprit est souvent contraint de se cacher.
M. Racine, celui dont on crut l’accabler, et que l’on peignit des couleurs les plus affreuses, fut d’avoir employé son esprit au soutien du Théâtre.
Les comédies de Molière, né en 1620 ; les drames de Racine, né en 1659 ; de Régnard, né en 1647, et de Voltaire, né en 1694 ; les représentations lyriques de Lully, né en 1633, et de Quinault, né en 1635 ; enfin, la gaîté de la comédie italienne augmentèrent la séduction des partisans des théâtres.
Dans la vérité, les meilleurs poëtes écrivent mal ; Moliere n’a qu’une conversation bourgeoise, souvent de harangere ; Quinault ne donne que des fadeurs de galanterie : ou le loue de ce qu’il sait choisir des mots mélodieux propres a la musique qu’il répete à tout moment ; Crébillon est dur, enflé, sombre, hideux, à quelques vers près, saillans & sublimes, Corneille n’a que du verbiage ; demandez-le aux commentateurs ; Racine & Voltaire sont les deux qui soutiennent mieux l’élégance, la décence, la correction du style : je ne parle pas de la religion ni de la vertu. […] Si l’on veut bien peser tout ce qui s’est dit du grand Corneille, de l’immortel Racine, de l’inimitable Moliere, du sublime Voltaire, du fameux Baron, de la charmante le Couvreur, soit dans des vers qu’on leur a fait, soit dans des dissertations sur les matieres théatrales, soit dans les discours présentés aux Académies, à l’honneur de Moliere & de Lafontaine, par les Sieurs Laharpe & Champfort, &c. on y trouvera les mêmes fatuités, non-seulement jettées au hasard dans quelques lettres obscures, mais très-sérieusement, avec réflexion établies & présentées au public, avec tout l’appareil de la démonstration géométrique. […] Le divin Moliere, cet immortel Racine, cet incomparable Voltaire, ce dieu du goût, du génie, cette déesse des graces, cette adorable actrice, sont-ils plus sensés ?
Puisque le sacrifice d’Eriphile mis dernièrement en action dans cette Pièce1, n’a pas réussi, on pourrait, avec moins de hardiesse, laisser entrevoir le tout, dans le fond de l’arrière-scène, à demi, ténébreusement ; Clitemnestre entendrait des cris confus ; elles appercevrait sa fille ; une scène muette, de quelques minutes, mais terrible, sans changer un mot à la Pièce de Racine, porterait l’épouvante au fond de tous les cœurs2. […] J’ai connu un homme de Lettres, qui disait, qu’il se trouvait presque tenté d’accuser Racine d’avoir fait de trop beaux Vers : Corneille, ajoutait-il, avec sa mâle négligence, approcherait peut-être du ton qu’auraient pris ses Héros, s’il n’était pas toujours gigantesque & boursoufflé. […] Il citait en exemples, Corneille, sur-tout Racine, Crébillon, dans la Tragédie ; Molière, quelquefois Regnard, & Destouches dans la Comédie. […] Les Ouvrages de Corneille, de Racine, de Crébillon, de Molière, paraissent être des productions mâles, sorties d’un cerveau mûr ; & ceux de quelques Auteurs modernes, des saillies brillantes, des éclairs de génie que laisse échapper une bouillante Jeunesse. […] Racine, dans laquelle on mit en action le sacrifice : on y vit le Temple, l’Autel, l’Armée, la Victime, Calchas, & la jeune Eriphile se poignarder.
Ainsi Moliere forma Baron, Racine forma la Chammélé ; ainsi les grands maîtres se sont rendus doublement utiles. […] Dans le siécle passé, où le hochet des actrices n’étoit pas encore devenu un sceptre, on en eût badiné, cette imagination burlesque eût fait rire, elle eût été prise pour une scéne à ajouter aux Plaideurs de Racine, ou à la Femme juge & partie, de Montfleuri.
Le P. la Rue a été mieux obei : on n’a plus pensé à ses pieces, qui en effet ne valent pas celles de Racine. […] Mais une circonstance à laquelle ne s’attend pas un homme qui a de la religion, de la vertu, & même du bon sens ; c’est que, dans ce vaisseau richement chargé, où l’on avoit embarqué des présens magnifiques pour quelque Nabab des Indes, & plusieurs compagnies de soldats, pour la garnison de Ponticheri, on avoit eu la précaution d’embarquer aussi une provision de femmes de bonne volonté, pour le service des passagers, des soldats & des matelots, & notamment une troupe de comédiens & de comédiennes, pour les divertir sur la route, & soutenir le théatre françois de la Compagnie des Indes, répandre sur les bords du Gange les grands noms de Moliere, Corneille, Racine, Crebillon, où ils étoient parfaitement inconnus, quoique leur gloire immortelle, disent nos oracles, ait rempli tout l’univers.
On veut que Corneille, Racine, Quinaut, se soient convertis, aussi-bien que la Fontaine ; j’en bénis le Seigneur ; aussi ont-ils cessé de composer pour le théatre : heureux d’avoir obtenu la grace d’une conversion si nécessaire, & d’en avoir rempli la condition indispensable, la cessation du crime ! […] Corneille, Racine, Quinault, la Fontaine, ces quatre hommes si célebres, ont expié par la plus amère contrition des ouvrages qu’on veut cire innocens.
Comment dès son premier pas dans la noble carrière des Corneille et des Racine, l’auteur a-t-il osé calomnier et tenter de flétrir ce qui faisait l’objet de la juste vénération de ses modèles ! […] Je ne saurais faire cette injure à mon siècle, et pour établir combien elle serait injuste, j’en appelle au succès qu’ont encore de nos jours les chef-d’œuvres de Corneille, de Racine et de Molière, partout où la réunion des artistes à talents permet de les offrir encore à l’admiration publique. […] NDA Ceci rappelle le trait de l’empereur dont parle Racine le fils, dans son poème de la Religion : « Au plus juste courroux qui peut s’abandonner, Quand le prince lui-même apprend à pardonner ? […] NDA Epître de Racine (fils), sur l’abus de la poésie. […] Pénétrés des grandes vérités de la religion, Racine et les autres hommes d’un grand mérite qui l’ont imité dans sa retraite du théâtre, n’ont point attendu le soir de la vie pour cesser de s’occuper de pareilles futilités, et quand la mort les a forcés à déposer leurs plus beaux lauriers sur les tristes bords du tombeau ; il y avait déjà longtemps qu’ils en avaient fait un noble et généreux sacrifice au Dieu même dont ils avaient, avec tant de munificence, reçu les dons du cœur et ceux de l’esprit.
C’est une Epître en Vers François, qui fut adressée au grand Racine, après son renoncement à la carriere dramatique. […] Le grand Racine eut le bonheur de se rendre à cette voix, lorsqu’à l’âge de 38 ans, il se repentit d’avoir travaillé pour le Théatre. […] Racine, c’en est fait : Tout son lustre a passé, Depuis qu’à l’embellir ta muse a renoncé. […] Madame de Maintenon ne tarda pas à l’éprouver à l’égard de quelques Tragédies de Racine qu’elle avoit fait représenter par les jeunes Demoiselles de la Maison de S. […] Mais Corneille, Racine, Moliere & presque tous nos Poëtes modernes semblent ne s’être occupés, dans leurs Drames, qu’à mettre en œuvre le Poëme d’Ovide sur l’art d’aimer.
Ce sont sans doute ces crimes inévitables, non-seulement pour les Actrices, mais encore pour les spectateurs, qui ont causé ces repentirs amers des Racine, des Corneille, des la Fontaine, des Quinault, des Greffet, &c. d’avoir travaillé pour le théâtre.
Nous avons en notre Langue des Poëmes bien écrits, qui n’ont pas réussi ; la Tragédie de Bérénice est, comme l’assure Racine lui-même, une de ses Piéces les mieux versifiées.