J’ai suivi les représentations des pièces les plus renommées, j’ai été jusqu’à les lire ; j’ai observé ce qui se passoit parmi les spectateurs ; que vous dirai-je ? […] Il est tellement de l’essence de ces vils Spectacles que la pudeur y soit offensée, et les auteurs y sont si fidèles à suivre ce principe, que jusques dans les pièces qui semblent avoir un but moral, comme par exemple dans le fou raisonnable et dans le nouveau Parvenu, il y a toujours la part de la canaille.
Quoique je sois assuré de votre piété, dit-il, cependant il se trouve bien des protecteurs indulgents et séduisants du vice, qui lui donnent du crédit et abusent des Ecritures pour l’autoriser, comme si les spectacles n’étaient qu’un amusement innocent, car la vigueur de la discipline est si fort énervée, et le désordre si dominant, que non seulement on excuse, mais on autorise le vice : « Jam non vitiis excusatio, sed autoritas datur. » J’ai cru devoir vous en avertir, car rien ne se corrige plus difficilement que ce qui est coloré par des excuses et suivi de la multitude. […] Si le sermon, si l’office, si la messe, sont un peu longs, nous nous ennuyons, nous nous endormons, nous nous irritons ; il semble que les exercices de piété soient un procès dont on veut être au plutôt débarrassé, afin de suivre l’impression du démon, qui nous entraîne vers l’amusement, la volupté, le spectacle : que notre misère est extrême !
L’ignorance de tant de siécles barbares qui les ont suivis, a pris cette complaisance pour une vérité, & en a fait un préjugé contre lequel, disent-ils, la bonne philosophie reclame aujourd’hui.
Ce que ne peut un Comédien, qui suit pas à pas un Poëte jusques dans ses écarts.
Mais pourquoi Dieu nous aurait-il fait une loi de pardonner à nos ennemis, s’il n’avait voulu lui-même la suivre ?
Et Salvien Evêque de Marseille les blâme, avec un cœur plein de zèle, et avec une éloquence très mâle et très forte, disant, que c’est une imitation du dérèglement des Païens ; et traitant les Chrétiens qui aiment et qui recherchent ces divertissements, comme des apostats, qui après avoir renoncé à Satan et à ses œuvres, se joignent à lui de nouveau, et suivent derechef son esprit.
L’Homme ne se contente pas de pécher, il le veut faire tranquillement, il veut suivre ses passions sans être inquiété par des remords importuns, capables d’en empoisonner toute la douceur.
On suit comme des yeux les honteux progrès de sa passion ; on écoute de sa bouche ses criminels aveux, et les sens ne résistent pas à une amorce si dangereuse.
Ceux qui invitent à leur table une chanteuse des Chœurs ou une figurante des ballets de l’Opéra, ou toute autre femme de Théâtre qui n’a pas des talents distingués, n’invitent que rarement les hommes à ce repas ; ils y seraient de trop, eu égard à l’objet de la partie, et aux amusements qui suivront le dessert : vous pouvez penser de ces Grands-là tout ce qu’il vous plaira ; mais ceux qui invitent aussi bien les Comédiens que les Comédiennes, dont la table est toujours environnée de Dames vertueuses et d’hommes respectables, n’ont assurément pas le même objet que les premiers lorsqu’ils admettent un Acteur ou une Actrice célèbres à ce Cercle. […] Il est bien difficile de détruire une opinion universellement reçue comme un sentiment de vertu ; opinion si enracinée qu’on rougirait de ne pas la suivre, quoiqu’on en sente toute l’absurdité. […] Puisque j’ai le même droit que vous, puisque j’ai tous les titres que vous croyez suffisants pour être aussi Législateur, je casse votre Cour d’honneur si elle ne suit pas les documents que je vais lui prescrire.