Ceux qui ont daigné les protéger parmi nous, ont consulté leur goût, & jamais l’utilité publique. […] Nous avons triomphé de la barbarie, répondront-ils ; nous avons adouci les mœurs publiques. […] Les premiers, si j’ai bien lû leurs Ouvrages, tendoient directement à l’utilité publique & particuliere de leurs Concitoyens : c’est là l’unique but qu’ils semblent s’être proposés dans leurs Compositions. […] A considérer la légereté & la futilité des Ecrits qui occupent quelquefois l’attention publique, ne pourroit-on pas demander, avec autant de raison, depuis quand les hommes, parmi nous, ont cessé d’écrire ? […] Fixez le goût du Public sur des objets vraiment intéressans, & tout rentrera dans l’ordre : bientôt nos Ecrivains, jaloux d’occuper l’attention publique, changeront de batterie, & chercheront à se surpasser mutuellement, non plus par la légereté & les graces, du style, mais par la profondeur & la vérité de leurs recherches.
Le genre de la Pièce ne sera jugé que par le Public, après cinq Représentations ; & l’Auteur ne pourra être demandé & couronné, qu’après la huitième. […] Ce serait-là le moyen de tirer un avantage, inconnu jusqu’à présent, de nos Colléges & de toutes nos maisons publiques d’éducation. […] Deux prix égaux, seront la recompense de celui & de celle que le Public couronnera. […] Temps de l’admission au Théâtre public : Rôles. […] Grave raisonneur, je n’ai qu’un mot à répondre : le Public est juge compétent des Rois.
Observations sur une comédie de Molière intitulée Le Festin de Pierre Il faut avouer qu’il est bien difficile de plaire à tout le monde, et qu’un homme qui s’expose en public, est sujet à de fâcheuses rencontres : il peut compter autant de Juges et de Censeurs, qu’il a d’Auditeurs et de Témoins de ses actions ; et parmi cette foule de Juges, il y en a si peu d’équitables et de bien sensés, qu’il est souvent nécessaire de se rendre justice à soi-même, et de travailler plutôt à se satisfaire, qu’à contenter les autres. […] Voilà en peu de mots ce que l’on peut dire de plus obligeant et de plus avantageux pour Molière : et certes, s’il n’eût joué que les Précieuses, et s’il n’en eût voulu qu’aux petits Pourpoints et aux grands Canons, il ne mériterait pas une censure publique, et ne se serait pas attiré l’indignation de toutes les personnes de piété : mais qui peut supporter la hardiesse d’un Farceur, qui fait plaisanterie de la Religion, qui tient École du Libertinage, et qui rend la Majesté de Dieu le jouet d’un Maître et d’un Valet de Théâtre, d’un Athée qui s’en rit, et d’un Valet plus impie que son Maître qui en fait rire les autres. […] L’hypocrite et le dévot ont une même apparence, ce n’est qu’une même chose dans le public, il n’y a que l’intérieur qui les distingue, et afin de « ne point laisser d’équivoque, et d’ôter tout ce qui peut confondre le bien et le mal »c, il devait faire voir ce que le Dévot fait en secret, aussi bien que l’hypocrite. […] Ou Louis XIV, le plus glorieux de tous les Roys au monde (s.l., 1664), qui qualifie Molière ainsi : « Un homme, ou plutôt un Démon vêtu de chair et habillé en homme et le plus signalé impie et libertin qui fut jamais dans les siècles passés, avait eu assez d’impiété et d’abomination pour faire sortir de son esprit diabolique une pièce toute prête d’être rendue publique, en la faisant monter sur le Théâtre, à la dérision de toute l’Église, et au mépris du caractère le plus sacré et de la fonction la plus divine, et au mépris de ce qu’il y a de plus saint dans l’Église, etc. » Le pamphlet a été pilonné, apparemment sur ordre de Louis XIV. […] Et enfin sans m’ériger en Casuiste, je ne crois pas faire un jugement téméraire d’avancer, qu’il n’y a point d’homme si peu éclairé des lumières de la Foi, qui ayant vu cette Pièce, ou qui sachant ce qu’elle contient, puisse soutenir que Molière dans le dessein de la jouer, soit capable de la participation des Sacrements, qu’il puisse être reçu à pénitence sans une réparation publique, ni même qu’il soit digne de l’entrée de l’Église, après les anathèmes que les Conciles ont fulminés contre les Auteurs de Spectacles impudiques ou sacrilèges, que les Pères appellent les Naufrages de l’Innocence, et des attentats contre la Souveraineté de Dieu.
on voyoit le Grand Condé aux Comédies de Moliere laisser le public en suspens qui des deux étoit le plus grand. […] On pressa l’Abbé Genest de livrer ses pieces au public, il faisoit le difficile : Madame la Duchesse employa son autorité pour l’y engager. […] ne furent-point apperçues du public. […] C’est un aveu du discrédit où est tombé Moliere, & du peu de goût qu’a pour lui le public, quoique placé parmi les Dieux par l’Abbé Schrone. […] Le public n’a pas tort, à cinq ou six pieces près, qui même ont bien des défauts, le Théatre de Moliere est fort peu de chose.
Juges souverains. 1°. le public par l’impression de leurs ouvrages. 2°. […] Tous les Tribunaux offrent au public un spectable redoutable ; mais nécessaire, pour terminer les différents des Citoyens, & maintenir la paix dans la société. […] Est-ce à cette classe d’hommes arrogans, présomptueux, ignorans, débauchés, sans lettres, sans mœurs, sans goût, sans modestie, sans décence, que le public ne cesse de gâter, qu’il faudroit accorder cet empire ? […] la misere, le libertinage, l’incapacité pour tout autre état, font seuls entrer dans une troupe qui n’est qu’un ramassis d’avanturiers de cette espece, à qui le libertinage public donne du pain. […] Cette foule fait plutôt une confusion qu’un spectacle agréable, au reste rien n’est oublié pour attirer le public.
Le Maistref, pour le procureur général du Roi, dit que anciennement les Romains instituèrent plusieurs jeux publics, de la plupart desquels parle Tite Liveg, et les récite tous Flavius, qui a écrit de Roma triumphante h. […] Et encore après que les Romains furent attediésm de tels jeux publics, et qu’ils connurent qu’il tournait en lascivité et in perniciem n de la république, qu’ils les laissèrent, et y euto loi expresse que les frais et impensesp qui se faisaient des jeux publics seraient employés ès réparations et fortifications de la ville de Rome. […] Sont les joueurs artisans mécaniquesaa, comme cordonniers, savetiers, crocheteurs de grève, de tous états et arts mécaniques, qui ne savent lire ni écrire et qui onques ne furent instruits ni exercés en théâtres et lieux publics à faire tels actes, et davantage n’ont langue diserte, ni langage propre, ni les accents de prononciation décente, ni aucune intelligence de ce qu’ils disent, tellement que le plus souvent advient que d’un mot ils en font trois, font point ou pause au meilleur d’une proposition, sens ou oraison imparfaiteab, font d’un interrogant un admirantac ou autre geste, prolation ou accents contraires à ce qu’ils disentad, dont souvent advient dérision et clameur publique dedans le théâtre même, tellement que, au lieu de tourner à édification, leur jeu tourne à scandale et dérision. […] Quinto, l’on reconnaît oculairement que ce qu’ils en font est seulement pour le quêteag et pour le gain, comme ils feraient d’une taverne ou négociationah et qu’ils veulent devenir histrions, joculateursai et bateleurs car, comme dit Panormitanusaj in titulo « Cum decorem », un personnage est réputé histrion, bateleur et joculateur quand par deux fois il retourne causa questus ak à faire jeux ou spectacles publics, et ainsi en propres termes le déclare Panormitanus In dicto titulo « Cum decorem » divine domus. […] [NDE] Référence au Codex Justiniani, livre XI, « De expensis publicorum ludorum » (des dépenses des jeux publics).
Tout homme volontairement oisif est un voleur public : quel tort ne fait pas à l’Etat l’école où il se forme ? […] comment s’appliquer à remuer le rabot, à soigner des enfants, à servir le public ? […] N’y eût-il d’autres inconvénients, que personne ne peut désavouer, il serait du bien public de supprimer tous les théâtres. […] C’étaient des femmes qui se présentaient au public dans un état indécent : qu’on regarde, ou plutôt qu’on ne regarde pas nos Actrices, qu’on n’écoute pas leurs conversations, qu’on ne suive pas leurs démarches, on rougirait des Majuma Français, célébrés, non au mois de mai, mais toute l’année. […] Autre objet bien intéressant pour le public, la population.
faut-il refuser les Sacremens aux pécheurs publics ? […] Il n’y avoit encore de son temps, il n’y eut de long-temps encore aucun théatre public en Europe, aucun théatre à demeure ; ce n’étoient que des Poëtes ambulans, d’abord Provençaux, dont M. […] C’est le bon goût, le bon ton, ce sont les talens même & les graces exposées aux yeux & aux désirs du public. […] Tout cela peut être diversifié, multiplié, adouci, voilé, assaisonné de mille manieres, augmenter ou diminuer le danger & le mal ; mais dans la totalité du spectacle public, dans l’état où il se trouve & sera toujours, pour peu qu’on écoute la voix de la conscience, il ne peut pas y avoir deux avis sur sa condamnation. […] Son ouvrage fut composé par ordre de Benoît XIV : preuve certaine que quoique les Papes tolèrent à Rome le théatre, comme les femmes publiques, ils ne l’ont jamais approuvé.
Les temps ont bien changé : une fête publique, la plus simple entrée de quelque Seigneur dans une ville, le jour de dimanche ou quelque autre (car qui songe à la fête ?) […] Les mêmes Conciles défendent, les jours de fête, les danses publiques, les jeux de hasard, la fréquentation des cabarets. […] Non sans doute ; mais j’en conclus très sérieusement que la justice, la sagesse, le zèle du bien public, ne permet pas à plus forte raison aux Magistrats de tolérer les théâtres, après avoir supprimé les Congrégations. […] un artisan, qui aussi bien qu’un Tapissier, un Charpentier, un Cordonnier, gagne sa vie à servir le public pour de l’argent. […] quelle nécessité publique ou particulière ?