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11. (1634) Apologie de Guillot-Gorju. Adressée à tous les beaux Esprits « Chapitre » pp. 3-16

De cette raison GUILLOT-GORJU passe à une autre, et dit que puisque les animaux recherchent le plaisir avec tant de contention et d’ardeur, on peut conclure que c’est un bien convenable à leur nature : C’est pourquoi les Philosophes dans la division du Bien en ont fait de trois sortes : à savoir, un bien honnête, un utile, et un délectable : ou pour mieux dire, ce n’est qu’un même bien, qui a trois faces comme un corps naturel, trois dimensions lesquelles ne se peuvent séparer l’une de l’autre. […] Pour les actions honnêtes et de la vertu, qui les pratiquerait jamais sans le plaisir qui se trouve dans la vertu. […] Mais outre cet avantage les anciens Orateurs n’en sont pas demeurés là, car ils ont soigneusement recherché les endroits de leurs harangues où ils pouvaient mêler une honnête raillerie pour relâcher de la sévérité des Juges. […] Il y a non seulement des farces indifférentes, mais honnêtes ; et si on demande combien il y a de Comédies honnêtes, on peut répondre qu’il y en a autant que d’actions honnêtes parmi les hommes : que si ce qui suit la Comédie peut être plus proprement appelé le tableau des actions humaines, si par hasard on y représente quelque chose qui choque la modestie, combien les actions en effet sont-elles plus odieuses, dont les Comédies ne sont que le tableau ?

12. (1694) Lettre d’un théologien « Lettre d'un théologien » pp. 1-62

Ce n’est donc point un mal ni rien d’indigne de l’homme Sage et Vertueux, de ne se point refuser des plaisirs innocents et honnêtes ». […]  : « Les Comédiens qui jouent d’une manière honnête, ou pour se divertir, ou pour délasser les autres, et qui ne font rien contre les bonnes mœurs, ne sont point réputés infâmes. » Vous voyez donc bien que selon ce Commentateur, l’infamie ne tombe que sur les Comédiens qui jouent d’infâmes Comédies, et non pas sur ceux qui n’en représentent que d’honnêtes. […] La grande Raison, et, pour ainsi dire, l’unique qui a fait autrefois déclarer les Comédiens infâmes, était l’infamie qui régnait dans les Comédies qu’ils représentaient, et celle qu’ils y ajoutaient eux mêmes par la manière honteuse dont ils accompagnaient ces coupables représentations : Maintenant que cette Raison est anéantie, il est indubitable que ses conséquences ne subsistent plus ; et s’il y en a quelques-unes à tirer, c’est, Monsieur, que la Comédie étant devenue toute honnête, ceux qui la représentent, et qui vivent honnêtement d’ailleurs, doivent sans difficulté être au nombre des honnêtes Gens. […] » Faut-il aussi faire cesser la Comédie qui sert aux hommes d’un honnête divertissement, parce qu’on y représente des Fables avec bienséance et modestie, et qu’il se trouve quelqu’un qui ne peut pas les voir sans ressentir en soi les passions qu’on y représente ? […] [NDUL] « Je dis donc, Philothée, qu’encore qu’il soit loisible de jouer, danser, se parer, ouïr des honnêtes comédies, banqueter, si est-ce que d’avoir affection à cela, c’est chose contraire à la dévotion et extrêmement nuisible et périlleuse. » (Introduction à la vie dévote, I, 23).

13. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Septième Lettre. De la même. » pp. 73-99

Il ne se fatigue pas, pour courir après les plaisirs honnêtes ; mais il en jouit, lorsqu’ils se présentent, il les approuve, il favorise leur existence, il aime à les voir se multiplier. […] Si la profession de Comédien peut être honnête ? […] Elle n’afflige point la femme honnête & tendre, qui sait trop que ce sentiment accompagne toujours le véritable amour ; elle n’est un fardeau que pour la coquette. […] Il est hors de doute que la profession de Comédien peut être honnête : la rendre telle, est le but du Plan de Réforme, & j’y renvoie*. […] Par cette manière de défendre les Spectacles, on voit que j’abandonne tout ce qui peut blesser en eux la Religion & les mœurs ; comme d’un autre côté, je soutiens ce qu’ils ont de légitime, d’honnête & d’utile.

14. (1697) Histoire de la Comédie et de l’Opéra « HISTOIRE ET ABREGE DES OUVRAGES LATIN, ITALIEN ET FRANCAIS, POUR ET CONTRE LA COMÉDIE ET L’OPERA — CHAPITRE III » pp. 42-76

« Si l’on veut regarder la Comédie dans son progrès et dans sa perfection, dit ce pieux Prince, soit pour sa matière et pour ses circonstances, soit pour ses effets ; n’est-il pas vrai qu’elle a traité presque toujours des sujets peu honnêtes, ou accompagnés d’intrigues scandaleuses ? […] Quoiqu’on veuille dire que le Théâtre ne souffre plus rien que de chaste, et que les passions y sont traitées de la manière du monde la plus honnête, je soutiens qu’il n’en est pas moins contraire à la Religion Chrétienne. […] Mais pour pousser encore davantage cette matière sans sortir pour cela des bornes de la vérité : peut-on appeler tout à fait honnêtes des ouvrages, dans lesquels on voit les filles les plus sévères écouter les déclarations de leurs amants, être bien aises d’en être aimées, recevoir leurs lettres et leurs visites, et leur donner même des rendez-vous ? J’avoue que nonobstant tout cela elles sont tout à fait honnêtes, puis qu’il a plu ainsi au Poète : mais en vérité y a-t-il personne de tousceux qui sont les plus zélés défenseurs d’une si mauvaise cause, qui voulût que sa femme, ou sa fille fût honnête comme Chimène, et comme toutes les plus vertueuses Princesses du Théâtre ? […] Enfin cet Auteur s’est retranché à dire dans le 12me et dernier Chapitre, que la représentation des Comédies et des Tragédies ne doit pas être condamnée tant qu’elle sera modeste et honnête ; pourquoi il cite saint Thomas.

15. (1698) Mandement de Monseigneur l’Illustrissime et Révérendissime Evêque d’Arras au sujet des Tragédies qui se représentent dans les Collèges de son Diocèse [25 septembre 1698] « Mandement  » pp. 37-43

Nous croyons pouvoir tolérer l’ancien usage de faire à la fin des Classes des Tragédies, pour apprendre aux Enfants à déclamer et leur inspirer une hardiesse honnête. […] La raison d’apprendre aux Enfants à déclamer, et de leur inspirer cette hardiesse honnête, nous paraît très faible, et il est fâcheux de dire et difficile de persuader, que l’on ne puisse apprendre l’un, ni se donner l’autre, que sur un Théâtre sur lequel on ne paraît qu’une ou deux fois au plus en sa vie, et sur lequel il serait très honteux de monter dans un âge plus avancé. […] Nous n’empêchons pas non plus que l’on ne puisse mettre dans les entr’actes de ces Tragédies une Symphonie honnête et modeste : mais nous ne voulons pas que l’on y emploie des personnes consacrées à Dieu ou par l’Etat Ecclésiastique qu’ils ont embrassé, ou par les fonctions Ecclésiastiques qu’ils exercent dans des Eglises particulières où on les voit revêtus de Surplis.

16. (1667) Traité de la comédie et des spectacles « Traité de la comédie et des spectacles » pp. 1-50

Si l'on veut regarder la simple Comédie dans son progrès et dans sa perfection, soit pour sa matière et pour ses circonstances, soit pour ses effets;, n'est-il pas vrai qu'elle traite presque toujours des sujets peu honnêtes, ou accompagnés d'intrigues scandaleuses ? […] Quoiqu'on veuille dire que le théâtre ne souffre plus rien que de chaste, et que les passions y sont traitées de la manière du monde la plus honnête, je soutiens qu'il n'en est pas moins contraire à la religion Chrétienne. […] J'avoue que nonobstant tout cela elles sont tout à fait honnêtes, puisqu'il l'a plu ainsi au Poète. Mais en vérité y a-t-il personne de tous ceux qui sont les plus zélés défenseurs d'une si mauvaise cause qui voulût que sa femme, ou sa fille, fût honnête comme Chimène, et comme toutes les plus vertueuses Princesses du théâtre. […] Comme ces deux passions ne passent dans l'esprit de ceux qui ne se conduisent pas par les règles de l'Evangile que pour de nobles maladies de l'âme, surtout quand on ne se sert pour les contenter que des moyens que le monde trouve honnêtes.

17. (1757) Article dixiéme. Sur les Spectacles [Dictionnaire apostolique] « Article dixiéme. Sur les Spectacles. » pp. 584-662

On ne représente que des inclinations honnêtes. […] appellerez-vous honnête une Morale empoisonnée qui pour attaquer un vice en justifie un autre plus éclattant, mais plus dangereux ? […] Quelques honnêtes qu’on suppose les spectacles, ils portent communément au mal. […] Les divertissemens qui nous sont permis doivent étre honnêtes. […] On ne représente que des inclinations honnêtes.

18. (1671) De la connaissance des bons livres « DE LA COMEDIE  » pp. 232-248

On a déjà dit pour défense, Qu’il y avait différence de Spectacles chez les Grecs et chez les Romains ; Que véritablement les représentations qui se faisaient en postures, en grimaces, et en danses, étaient lubriques et déshonnêtes, et n’étaient exécutées que par les Histrions et Pantomimes qui étaient les Bouffons ou bateleurs de ce temps-là, et qu’il n’y a point d’apparence de croire que ces sortes de gens fussent mis au rang des personnes d’honneur ; mais qu’il y avait des Comédiens sérieux qui ne représentaient que des Tragédies ou Tragi-comédies pleines de raisonnements Moraux et Politiques, et que c’était ceux-là qui n’étaient pas notés d’infamie comme les autres ; Qu’un Roscius Comédien qui a été tant estimé, pouvait être de leur bande ; Que c’était chez lui que les jeunes Orateurs de Rome allaient étudier le geste et la prononciation ; Qu’il était un des plus honnêtes hommes de la Ville, et que Cicéron ayant pris la peine de le défendre en une Cause, avait parlé de lui fort avantageusement ; Mais quoi que en effet ce Roscius ait été vertueux, s’ensuit-il que tous les autres Comédiens de son temps le fussent, et qu’ils lui ressemblassent en son mérite personnel ? […] Quoique les Tragédies et les Tragi-comédies soient tenues pour fort honnêtes en comparaison des Comédies ; cela n'empêchait pas que l’impudicité et plusieurs autres habitudes très dangereuses n’y fussent décrites fort naïvement, puisque ces Pièces avaient été composées par des Poètes Païens qui faisaient gloire des mauvaises actions que les Chrétiens ont depuis condamnées. […] Il faut observer ici qu’ils ont toujours eu dans l’imagination, qu’en ce qui est de leurs Tragédies et de leurs Tragi-comédies, elles sont d’un style fort honnête, et que personne n’y peut trouver à reprendre. […] Beaucoup de personnes de grand esprit et d’une véritable vertu, tiennent que la Comédie est un passe-temps honnête où l’on peut apprendre le bien aussi tôt que le mal.

19. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre XII. Que la représentation des Comédies et Tragédies ne doit point être condamnée tant qu'elle sera modeste et honnête. » pp. 237-250

Que la représentation des Comédies et Tragédies ne doit point être condamnée tant qu'elle sera modeste et honnête. […] Il y a cinquante ans qu'une honnête femme n'osait aller au Théâtre, ou bien il fallait qu'elle y fut voilée, et tout à fait invisible, et ce plaisir était comme réservé aux débauchées qui se donnaient la liberté de les regarder à visage découvert. […] Il est certain néanmoins que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber peu à peu dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l'on mêle bien des choses contraires au sentiment de la piété, et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la justice de nos Rois, et y rappelleront la honte et les châtiments ; et j'estime que tous les honnêtes gens ont intérêt de s'opposer à ce désordre renaissant, qui met en péril, et qui sans doute ruinera le plus ordinaire et le plus beau des divertissements publics ; Car l'opinion des doctes Chrétiens, est que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être condamnée quand elle est innocente, quand elle est honnête.

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