En 1630. l’Opéra-Comique devait avoir pris déja certaine forme, puisque l’on trouve une pièce imprimée en 1640, intitulée La Comédie des Chansons. […] Blaise le Savetier fit prendre une forme différente à l’Opéra-Comique, & changea même notre Littérature.
Quant à moi, je ne suis point d’avis, qu’il soit séant à la majesté divine, ni que ce soit suivre la forme de la discipline Ecclésiastique, que par une si vilaine et infâme contagion, l’honnêteté et la sainteté de l’Eglise soit souillée Deuter.
Que ce soit ou de plus loin ou de plus près, il n’importe ; c’est toujours là que l’on tend : par la pente du cœur humain à la corruption, on commence par se livrer aux impressions de l’amour sensuel : le remède des réflexions ou du mariage vient trop tard : déjà le faible du cœur est attaqué s’il n’est vaincu, et l’union conjugale trop grave et trop sérieuse pour passionner un spectateur qui ne cherche que le plaisir, n’est que par façon et pour la forme dans la comédie.
Les comédiens du troisième âge, ayant reçu leur institution du prince et des lois du royaume, ne sont point comptables de leur profession au clergé ; L’abjuration de cette profession, exigée par le clergé, est un véritable délit, parce que aucune autorité dans l’Etat n’a le droit de vouloir le contraire de ce qui a été créé et autorisé par les diplômes du prince et la législation du pays ; Le refus de sépulture, fait par le clergé aux comédiens, est encore un délit manifeste et réel, puisque c’est infliger une action pénale, imprégner un mépris public à une profession que le prince, les lois du royaume, les ordonnances de police ont instituée et régularisée ; et en cette circonstance l’outrage est non seulement fait à la personne et à la profession du comédien décédé, mais encore aux autorités suprêmes qui ont autorisé et commandé son exercice : voilà pour ce qui concerne l’état politique et celui de la législation ; c’est aux procureurs du roi qu’il appartient de faire respecter, par toutes les autorités existant dans l’Etat, ce qui a été institué et par l’action du prince et par le fait de la législation et des règlements de la police du royaume ; Le refus de sépulture est encore un autre délit envers les lois ecclésiastiques même, puisque, pour avoir lieu d’une manière canonique, il faut que les individus auxquels on veut l’appliquer aient été excommuniés, dénoncés dans les formes, et que jamais les comédiens du troisième âge ne se sont rencontrés dans cette catégorie ; Le clergé de France est d’autant moins fondé à frapper les comédiens de ses sentences exterminatoires, qu’il a lui-même aidé à leur institution, et que dans le principe de leur création les prêtres ont rempli des rôles dans les mystères que les comédiens représentaient ; que les obscénités, les scandales qui se pratiquaient alors dans les églises, ou dans ces comédies pieuses, étant tout à fait nuisibles à la religion, l’autorité séculière a fait défendre aux prêtres de remplir désormais des rôles de comédiens, et à ceux-ci de ne plus prendre leurs sujets de comédie dans les mystères de la religion ; Le clergé, dans l’animadversion qu’il témoigne contre les comédiens, signale son ignorance, son injustice, son ingratitude, et démontre en outre qu’il agit avec deux poids et deux mesures, ce qui est on ne peut pas plus impolitique pour un corps aussi respectable ; car on a vu que c’étaient des papes et des cardinaux qui avaient institué des théâtres tant en Italie qu’en France ; on a vu un abbé, directeur de notre Opéra à Paris, on a vu les capucins, les cordeliers, les augustins demander l’aumône par placet, et la recevoir de nos comédiens ; on a vu les lettres où ces mêmes religieux, prêtres de l’Eglise apostolique et romaine, promettaient de prier Dieu pour la prospérité de la compagnie des comédiens.
La pudeur est l’apanage des femmes ; et c’est en supposant que cette vertu fait presque leur essence, que les hommes ont réglé la forme de vie que le sexe devait tenir.
Il est impossible que la musique la plus parfaite forme des conversations même avec les gestes de l’acteur, quoiqu’à la vérité l’un aidât à l’autre, lui donnât de l’énergie, en fit un meilleur tableau, car tous les deux sont pittoresque, il faudroit doubler l’orchestre pour faire entendre de plus loin ; aussi les Romains avoient dans leurs amphitéatres vingt & trente mille personnes, je ne sache pas qu’ils aient jamais employé la musique pour aider les pantomimes, ni qu’ils aient connu ces musiques pittoresques, telles qu’on les entend, encore moins telles qu’on les voudroit, qui même sont impossibles. Le pittoresque de la musique ne forme qu’un tableau des mouvements de l’ame, jamais des conversations ni des idées spirituelles de la poésie, des regles, des axiômes, &c. L’Académie de Parme distribue plusieurs prix, elle a donné en 1770, pour prix de l’architecture, le plan d’un théatre magnifique, propre à toute sorte de représentations, qui réunisse les différences parties de la distribution, & décoration antérieure & extérieure, la forme & les dimensions de l’orchestre, des loges, de l’amphthéatre, pour les changements de scéne, la pompe de la représentation dans toutes sortes de drames liriques, tragiques & comiques ; tout le théatre est mis sur le trône littéraire. […] Un aveugle sera plus affecté d’une bonne piece, qu’un sourd ne le seroit d’une bonne gesticulation ; l’aveugle ne seroit pas blessé du défaut du Costumé, de la décoration, des habits mesquins, de la laideur des actrices, qui défigurent une piece ; mais aussi seroit-il privé de l’agrément qui résulte de la perfection de toutes ces choses, dont l’assemblage forme l’illusion & le plaisir, quand elles sont bien assorcies, & par conséquent le danger pour les bonnes mœurs.
De prétendue Maîtres de goût leur apprenoient comment il faut prononcer les équivoques, comment, dans ces occasions, les gestes doivent-être, tantôt d’accord avec la phisionomie, tantôt en contradiction apparente avec elle, comment en appuyant sur certaines syllabes, on forme un sens obscène. […] Une badine ou un gros bâton, un chapeau de forme bizarre, des bottines, une cravate énorme, un juste-au-corps étroit ou bien une redingotte immense, quelquefois des boucles d’oreilles, ainsi qu’en portoient les Perses, le peuple le plus efféminé de l’antiquité, voilà la manière de s’habiller de ces hommes perdus ; vous vous attendez bien que celle des femmes qui leur ressemblent n’est pas plus décente. […] Mais aujourd’hui, mais depuis que Monnet, le premier, eût décoré ses loges élégantes de taffetas bleu, bordé de franges d’argent, depuis que ces tréteaux ont eu des orchestres réguliers, qu’on y a eu recours à des danses volupteuses, à des évolutions militaires, à des patomimes ; depuis qu’on a eu la liberté de formes des troupes de comédiens-enfans, depuis enfin qu’au fonds des pièces qui a été constamment le même, c’est-à-dire, essentiellement ridicule, on a ajouté des accessoires propres du moins à flatter les passions, la bonne compagnie a appris le chemin du Préau de l’Abbaye, du fauxbourg Saint-Laurent et de la rue de Richelieu. […] Une des principales sources de ces opinions nouvelles est à la foire, aux boulevards & autres lieux semblables, c’est là que l’on puise des leçons depuis plus de vingt ans, c’est là que se forme une génération qui va dominer à son tour et qui est si ignorante, si inappliquée, si présomptueuse qu’en vérité elle sera pire que celle qui l’a précédée.
Elle servait autrefois à décrire des aventures amoureuses & tragiques ; c’est la forme que lui donnèrent les Troubadours, les plus anciens Poètes Français, lorsqu’ils sortirent de la Provence pour aller réciter leurs Vers dans les Cours des Princes. […] Je n’adopte pourtant pas dans toutes ses parties l’opinion du Philosophe de Genève, qui soutient que, « la transition de la parole au chant, & sur-tout du chant à la parole, à une dureté à laquelle l’oreille se prête difficilement, & forme un contraste choquant qui détruit toute l’illusion, & par conséquent l’intérêt » (66). […] Les Poètes de nos jours, qui travaillent pour le nouveau Théâtre, ne feraient-ils pas mieux de donner à leurs Pièces la forme qu’avait autrefois l’Opéra-Comique ; c’est-à-dire, ne devraient-ils pas se servir plutôt du Vaudeville que de l’Ariette ?
Platon définit que la vertu peut prendre une forme visible ; la représentation en donne un à la vertu & au vice, les idées abstraites y prennent un corps, le contraste du caractere prête des forces à la morale ; nous sommes conduits à la vertu par elle-même. […] On peut en dire autant du vice, quand on le joue sur le théatre : il s’y revêt d’une forme visible ; la représentation le met sous les yeux, & des yeux au cœur, que la route est facile ! […] On peut douter si le jardinage a beaucoup gagné à cette anglomanie, désavouée peut-être par les anglois mêmes, qui vient de bouleverser tous nos jardins, proscrire la ligne droite, l’ordre simétrique, les formes régulieres, avec les décorations & les points de vue qui en résultent ; offrir des rivieres sans eaux, des montagnes faites à la main, des palais déguisés en masures, des irrégularités étudiées, des accumulations grotesques d’objets disparates, parodier d’une maniere mesquine & bisarre le grand tableau de la nature, tourmenter cette nature, sous prétexte de s’en rapprocher, la contrefaire aulieu de l’imiter, la défigurer pour l’embellit : voilà le théatre, les drames à deux, à quatre, à cinq actes, ces fragmens qui font un ouvrage de marqueterie à pieces rapportées, ces malheureux qui se tuent en chantant & en dansant, ces bergers qui fredonnent des ariettes, ces paysans ingénieux & courtisans, ces héros petits-maîtres, ces actrices prudes, ces conversations en sentences, cette philosophie que personne n’entend, cette licence modeste, cette malignité bienfaisante, &c. […] Il n’est point d’école qui forme mieux ses éleves que la scène. […] Ce sont les drames qui roulent sur des enchantemens, des Magiciens, des Fées, des Génies, des Sylphes, Salamandres, &c. à l’occasion d’une comédie du grand Shakespear, intitulée l’Isle enchantée, mise depuis en meilleure forme par le poëte Driden.