.), croit qu’il est permis aux Religieux de représenter des pièces de théâtre, prises de la vie des Saints ou de quelque sujet de morale, sans autres acteurs et spectateurs que les Religieux. […] Sait-on dans le monde, et y croira-t-on, que dans le procès de la canonisation de S. […] Lazare crurent devoir à la gloire de leur fondateur, et se devoir à eux-mêmes, de faire tous leurs efforts pour abolir le théâtre de la foire, et la Cour de Versailles, qui protège cette Congrégation, et qui s’intéressait à la canonisation d’un Saint à qui l’Eglise et l’Etat étaient redevables des plus importants services, donna cette satisfaction à la Cour de Rome, et supprima ce théâtre, qui par sa licence l’avait d’ailleurs bien mérité. […] Mais rapprochons-nous de nos bons ancêtres, tâchons de justifier leur simplicité théâtrale, et à même temps la conduite d’une grande partie du Clergé le plus pieux et le plus distingué du royaume, qui dans son Séminaire a cru pouvoir sans conséquence se permettre ces amusements.
Son discours et son autorité furent si efficaces, que le Sénat fit enlever tous les sièges que l’on avait préparés pour voir le spectacle : « Hujus verbis commota senatoria providentia, etiam subsellia quibus in spectaculo civitas uti cœperat, prohiberet apponi. » Avec quel zèle eût-il totalement aboli ces jeux, si éclairé des lumières de la foi, il eût connu combien étaient méprisables les dieux que le peuple croyait honorer par ces fêtes ! […] Si quelque étincelle de raison vous fait préférer l’âme au corps, jugez qui mérite mieux votre culte : « Pontifex propter animarum cavendam pestilentiam scenum construi prohibebat. » Mais ce que la postérité aura peine à croire, la corruption était si grande, l’aveuglement si profond, qu’après le sac de Rome les amateurs du théâtre, fugitifs, étant venus à Carthage, allaient en foule se passionner au spectacle : « Animos miserorum tantis obcacavit tenebris, tanta deformitate fœdavit, ut Romà vastata, quos pestilentia illa possiderat, in theatris quotidie certatim pro Histrionibus insanirent. » O insensés, l’univers entier est étonné et affligé de vos malheurs, et vous, quelle fureur ! […] » Les Grecs, par une conduite honteuse, à la vérité, mais conséquente, bien loin de regarder les Comédiens comme infâmes, les élevaient quelquefois aux honneurs, ne croyant pas pouvoir mépriser des hommes dont le métier honorait les Dieux : « Græci turpiter quidem, sed Diis suis omnino consequenter. » Ce qui devait faire sentir combien ces Dieux étaient méprisables qui se croyaient honorés de la représentation de leurs crimes : « Quomodo non detestandi Dii qui inter honores sua celebrari flagitia poscerent ? […] Ce sont donc de francs ignorants qui ne connaissent pas le prix des choses : « Nemo Histrionum qui non sibi finem in pecunia constituat, necesse est ergo musicam nescire Histriones. » Cependant, comme on peut agir contre sa foi, ses lumières et sa conscience, et préférer ce qu’on sait et qu’on croit être mauvais, « video meliora proboque, deteriora sequor », il est certain qu’on peut être savant et pécheur, et par conséquent savant et Comédien, mais ce ne sera jamais de la vraie science, incapable de préférer la terre au ciel, le démon à Dieu, la volupté à la vertu, l’intérêt à la vérité ; et c’est de cette science mauvaise, et véritablement fausse, que l’Ecriture a dit que tout pécheur, fût-il le plus habile homme, et à plus forte raison que tout Comédien est un ignorant : « Omnis peccans est ignorans, impius ignorat scientiam.
Personne n’ignore sa fortune & sa chûte : mais tout le monde ne fait pas que cet arlequin, est d’une maison distinguée dans la robe, fut d’abord ecclésiastique & chanoine de la cathédrale du Mans ; & qu’après avoir été forcé de quitter son collet & son bénéfice, il osa solliciter des bénéfices simples, mais si simples , disoit-il, qu’il ne faille que croire en Dieu pour les posséder . […] Je ne sai s’il y croyoit : il eût fallu y croire bien peu pour lui en donner. […] Elle fit revenir malgré lui sur la scène le pieux Racine, que la religion & la vertu en avoient arraché, & revivre les talens séduisans & les coupables écrits dont il avoit connu le danger & la gloire funeste qu’il arrosoit de ses larmes, & rallumer les feux demi-éteints de Louis XIV pour des jeux que, par un pareil motif, il avoit cru devoir s’interdire, & se reprochoit d’avoir trop aimé.
Si vous croyez, si vous espérez, si vous aimez autre chose qu'eux, il faut vivre autrement qu'eux ; car, l'Apôtre dit, qu'il n'y a point de convenance du Temple de Dieu avec les Idoles, et qu'il ne faut point avoir de société avec les Démons. […] « Tu aimerais certainement tes Enfants, si tu les aimais en celui qui te les a donnés, crois-tu les aimer parce que tu favorises leurs damnables voluptés ? […] Je vous ai crus misérables, je l'avoue, quand je vous ai vus si maltraités ; mais je vous tiens plus misérables de demander à l'Empereur les Spectacles du Théâtre et du Cirque.
Nous vous laissons ces choses frivoles et inutiles, mais croyez plutôt les vérités de notre Religion, et quittez à notre exemple ces badineries. […] Il y a des fidèles, qui par simplicité ou par défaut de docilité, ont peine à croire qu'ils soient obligés de se priver du divertissement des Spectacles, parce, disent-ils, qu'il ne paraît point dans l'Ecriture sainte que cela soit défendu aux serviteurs de Dieu. […] Je crois que les représentations du Cirque, du Théâtre, de l'Amphithéâtre, et tous les efforts de l'industrie des hommes, n'égalent point ces Spectacles.
Je crois que plusieurs de ceux qui nous abandonnèrent hier pour aller aux Spectacles d'iniquité, sont aujourd'hui ici présents, je voudrais les pouvoir reconnaître publiquement, afin de leur interdire l'entrée de ces Jeux sacrés, non pas pour les laisser toujours dehors, mais pour les rappeler après leur amendement. […] Conduisez-vous de même à l'égard de ces paroles infâmes, et s vous voulez que nous croyions que vous n'aimez pas à en dire, n'aimez pas aussi à les écouter. […] C'est pourquoi quand même vous seriez assez chaste pour n'être point blessé par la contagion de ces lieux, ce que je crois impossible, vous ne laisseriez pas d'être sévèrement puni de Dieu, comme étant coupable de la perte de ceux qui vont voir ces folies, et de ceux qui les représentent sur le Théâtre.
Je ne sais pas si l'on croira qu'un même Génie leur [a] donné l'être ; et comment il est possible qu'une imagination aussi vive et aussi étendue qu'il était convenable de l'avoir pour faire le premier, ait pu s'abandonner à l'opiniâtreté du travail et de la lecture qui se sont trouvés nécessaires pour le second.
Croyez-moi entièrement, Monsieur, vôtre, etc.
De l’excommunication considérée comme injuste et par conséquent nulle, de la part des prêtres qui se croient en droit d’anathématiser les Comédiens morts sans les secours spirituels de l’Eglise.