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116. (1731) Discours sur la comédie « PREMIER DISCOURS SUR LA LETTRE DU THEOLOGIEN DEFENSEUR DE LA COMEDIE » pp. 2-32

Peut-être aurait-on de la peine à le croire, s’il ne l’avait dit lui-même en commençant sa Lettre. « Je ne puis plus tenir, dit-il, contre l’obstination et l’importunité de vos prières, et pour vous guérir de la crainte scrupuleuse où vous êtes que votre conscience ne soit intéressée dans les ouvrages de votre esprit, etc. » Qui l’aurait jamais cru qu’un Religieux, pour faire mettre au jour des Comédies, s’appliquerait à vaincre l’obstination d’un Laïque ; et que pour dissiper une crainte qu’il appelle scrupuleuse, il ne craindrait pas de renverser la Tradition, persuadé qu’il ne peut écrire en faveur de la Comédie, sans paraître s’opposer ouvertement à tous les Pères et à tous les Conciles ? […] 2°, Que les Religieux et les personnes constituées en dignité Ecclésiastique ne pouvant aller à la Comédie sans scandale, cela suppose même que le monde croit qu’elle ne peut s’accorder avec les maximes et la sainteté de la Religion Chrétienne, et qu’ainsi les notions communes s’accordent avec les saints Canons. […] Il la découvre dans les lieux mêmes où plusieurs personnes ne l’avaient point aperçue, et après les exemples tout récents de l’application avec laquelle il vient de purger les ouvrages publics de tout ce qui altérait la Tradition de l’Eglise, il est surprenant qu’un Prêtre ait cru pouvoir impunément attaquer ce qu’on prêche tous les jours dans nos Chaires. […] Il est certain qu’on croit communément que dans les livres même, où la Comédie se trouve dénuée de tous ces attraits du Théâtre qui parlent si vivement aux passions, elle ne laisse pas d’être dangereuse à plusieurs personnes.

117. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre III. De la Musique Française & Italienne. » pp. 252-286

Balancera-t-on encore à croire notre Langue moins mélodieuse ? […] Je crois que le Peintre amoureux de son modèle ; le Roi & le Fermier, Tome-Jones, soutiendraient un parallèle avec la Serva-Padronna, la Dona superba, &c. […] On a toujours cru que la musique Italienne & la nouvelle musique Française étaient tellement confondues ensemble, qu’il serait très difficile de donner à chacune les qualités qui la différencie. […] Il est aisé de s’appercevoir que le fond de l’air, ou le motif, se perd presque entièrement, & qu’il est des endroits où l’on croit entendre un autre morceau de chant, tant la marche & la mesure varient. […] Cette histoire est du moins la preuve que ce n’est pas d’aujourd’hui que les Musiciens Français n’aiment pas leurs rivaux d’Italie : j’ai cru que le Lecteur la lirait ici avec plaisir.

118. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre II. Du Philosophe de sans souci. » pp. 36-60

Voltaire & ses consorts s’y crurent notés, & n’avoient pas tort. […] Elle a mérité les plus grands éloges dans une vision, où il crut être descendu aux enfers, comme Ænée avec la Sybille. […] Tout Catholique étant obligé de croire aux miracles, le Parterre doit en conscience trembler devant l’ombre de Ninus. […] Crois-moi, choisis les meilleurs vins. […] Je crois fermement dans l’esprit que l’Homme n’est qu’une matiere qui végête & se détruit.

119. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE I. Réformation de Riccoboni. » pp. 4-27

Encore même avec tous ces ménagemens je la crois inutile & dangereuse pour les mœurs. […] Croiroit-on qu’il faille corriger Cinna, Britannicus, les Horaces, & rejeter le Cid, Pompée, Mithridate, Rodogune ? […] Pour y réussir, on trompe le père de la fille, on lui fait signer un contrat de mariage, lui laissant croire que c’est un papier de procédure. […] J’ai trop bonne opinion des Poëtes (sur-tout de théatre), pour le croire ; ils sont trop éclairés, trop honnêtes gens, trop chastes (par exemple, Carolet, Vadé, S. […] Si un Payen revenoit au monde & alloit à l’opéra, il croiroit être à Rome.

120. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE V. Des Pièces tirées de l’Ecriture sainte. » pp. 96-119

On a toujours cru dans toutes les religions que les choses saintes ne doivent pas être prodiguées au peuple ; en se familiarisant avec elles, il cesse de les respecter. […] La plupart des gens qui n’ont aucune connaissance de l’Ecriture, sur la foi de l’Acteur et du Poète, en croient tout ce qu’ils voient et entendent au théâtre. […] Judith en est bien aise, lui ordonne de faire le guet d’un œil curieux et jaloux, et croit que sa gloire a besoin d’un tel témoin. […] Les femmes surtout, qui y venaient en foule, croyaient trouver la justification de leurs galanteries dans la coquetterie d’une Sainte avouée de Dieu même. […] Comme si la religion n’avait ni mystères à croire, ni sacrifices à offrir, ni sacrements à recevoir, et s’il dépendait du Roi d’anéantir tous ces articles.

121. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE IV. Suite des effets des Passions. » pp. 84-107

Je ne crois pas même qu'elle s'embarrasse de ces abstractions ; contente de goûter, de faire goûter le plaisir, et de toucher son argent, elle renvoie ces subtiles distinctions au pays des songes. […] On paie l'incendiaire qui allume le feu, on se jette au milieu des flammes, on se plaît à être consumé, et on se croirait innocent ! […] On se croit maître de contenir les passions quand elles sont enflammées, on croit pouvoir en goûter le plaisir sans crime, et le faire naître sans conséquence. […] Ce n'est pas tant l'objet extérieur que la modification intérieure qui plaît, et on ne se fait aucun scrupule de ce qu'on croit ne voir qu'en figure, quoique le sentiment soit très réel. […] Vous le croyez, c'est votre religion ; vous le craignez, c'est votre intérêt.

122. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre troisiéme. — Chapitre IV. Il faut que le nouveau Théâtre se fonde sur la Vérité & sur la Nature. » pp. 133-138

Représente-t-il une action villageoise, on croit voir agir les vrais habitans de la campagne ; l’ame trompée par les charmes de l’illusion, éprouve alors le même sentiment dont elle est pénétrée quand nos oreilles sont frappées du son rustique des chalumeaux, & quand nos yeux errent agréablement sur une vaste plaine couverte d’herbes & de fleurs. […] Combien est-il d’hommes de Lettres qui se croiraient dèshonnorés s’ils se servaient d’éxpressions usitées, & s’ils disaient les choses comme on les éxprime ordinairement ? […] On croit voir & entendre l’Ouvrier, le Manœuvre, qu’ils placent dans leurs Drames.

123. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — CONCLUSION, de l’Ouvrage. » pp. 319-328

Le Théâtre devant réprésenter des actions humaines, soit les actions éclatantes des grands Hommes telles qu’on en voit dans la Tragédie, soit les actions communes des hommes ordinaires comme dans la Comédie, il est évident que l’art principal de ce Spectacle doit consister à imiter la nature, en sorte que le Spectateur croit voir ceux qu’on lui représente, et soit affecté de la même manière qu’il le serait si l’action représentée se passait réellement devant ses yeux. […] Je crois donc qu’il faut convenir que si le Théâtre excite toutes les passions, jamais, ou rarement du moins, il parvient à en déraciner quelqu’une ; et comme la passion de l’amour est la plus dangereuse, parce qu’elle est la plus séduisante, je crois qu’il est absolument nécessaire de réformer le Théâtre en ce point, comme je l’ai dit tant de fois, et comme je me flatte même de l’avoir prouvé.

124. (1781) Réflexions sur les dangers des spectacles pp. 364-386

Ne croyez pas, que l’histrionisme puisse jamais former de bons guerriers. […] Quel humiliant sujet de comparaison avec ces anciens peuples auxquels nous nous croyons si supérieurs ! […] Un philosophe à tête exaltée, a fait un livre sur l’an 2440, et s’est beaucoup occupé de l’état des hommes à cette époque ; mais je crois qu’il est raisonnable de demander si à cette époque il y aura encore des hommes. […] S’il est vrai que lorsque les maux sont devenus extrêmes, la Providence ne tarde point de les rapprocher des remèdes, j’ose croire que ce jour n’est pas éloigné. […] Se regardant comme identifiée aux objets qui l’attachent, elle croit prises sur son être toutes les privations qu’elle essuie.

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