La Princesse inconsolable fit agir toute la Cour : ce fut une affaire d’Etat. […] Après que la toile fut baissée, & que toutes les agitations de l’Etat & du cœur, qui avoient rendu ses jours si tumultueux, furent calmes, il passa le reste de sa vie & la termina dans les sentimens les plus chrétiens. […] La Reine, plus touchée des maux de l’Etat que de l’humiliation des Princes, lui sut mauvais gré de son triomphe, & la fit rentrer dans les petitesses de la coquéterie pour lesquelles seules elle étoit née. […] Cette belle médiatrice parut à la Cour avec l’appareil & la gravité d’un homme d’Etat : mais cette ambassade comique ne réussit pas : le dénouement fut tragique. […] Elle avoit deux fils qui prirent l’Etat ecclésiastique, & tous deux le quitterent, l’un par inconstance, l’autre par libertinage.
Il déclara la fille de l’amour illégitime, inhabile à lui succeder, & Marie sa premiere fille légitime, héritiere de ses Etats. […] Elle étoit obligée de se ménager avec tous les partis, qui pendant trois regnes agitoient si violemment la Cour & l’Etat. […] Y a-t-il plus d’inconvenient de donner à des femmes les charges de l’Etat, que de leur en confier le gouvernement ? […] Ces dettes furent payées par l’Etat après sa mort tant bien que mal. […] Il veut prendre possession de ses Etats, & ses sujets ne veulent plus de lui.
La religion est un tyran qui ne s’accorde, ni avec les passions, ni avec la politique & l’agrandissement des Etats. […] Chaque Etat a sa religion ; ce sont des minuties pour le peuple. […] Ce projet ne réussit pas ; ce Traité fut méprisé de toutes, chacune persista dans son systême, & se maintint dans l’Etat. […] Quand j’eus acquis cet avantage, j’examinai mes prétentions sur les Etats voisins. […] La France vouloit ôter l’Empire à la Maison d’Autriche, & faire un Etat en Italie à l’Infant.
Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat Je suis de l’avis de ceux qui pensent que les bons citoyens dans leur belles pièces sérieuses peuvent inspirer, entretenir et fortifier l’amour pour la patrie et des sentiments de courage, de justice, et de bienfaisance ; je crois de même que dans leurs pièces comiques ils peuvent inspirer du dégoût et de l’aversion pour la mollesse, pour la poltronnerie, pour le métier de joueur, pour le luxe de la table, pour les dépenses de pure vanité, pour le caractère impatient, chicaneur, avaricieux, flatteur, indiscret, hypocrite, menteur, misanthrope, médisant, en un mot pour tous les excès qui font souffrir les autres et qui rendent les vicieux fâcheux et désagréables pour plusieurs des personnes avec qui ils ont à vivre. […] Au reste c’est à l’Etat à payer par des pensions une partie des frais des spectacles lorsqu’ils sont utiles à la société, et c’est aux spectateurs à payer l’autre partie de ces frais, parce qu’ils en retirent du plaisir. […] Il est de la bonne police de former quelques Poètes excellents et bons Citoyens, et d’en faire des Officiers importants à l’Etat et qui puissent dans cette profession y acquérir du revenu, de l’illustration, et même une noblesse héréditaire attachée à la qualité de Premier. […] On me dira peut-être que ce qui paraît possible dans la spéculation est réellement impossible dans la pratique ; mais je réponds que cela se dit sans preuve et que la chose vaut bien la peine d’être tentée, et même par plusieurs tentatives avec le secours des prix, il n’y a rien à risquer, et il peut en résulter un grand perfectionnement du théâtre, soit en France, soit dans les autres Etats. […] Si dès à présent on établit dans un grand Etat un Bureau pour diriger les spectacles vers les mœurs désirables de la société, si par les prix qu’elle distribuera aux Poètes qui plairont le plus et qui dirigeront le mieux leurs ouvrages vers la bonne morale, il arrivera avant trente ans que les pères et les mères les plus sages mèneront leurs enfants à la Comédie comme au meilleur Sermon, pour leur inspirer des sentiments raisonnables et vertueux, il arrivera que dans toutes les villes, de trente mille habitants il y aura aux dépens du public des théâtres et des Comédiens, afin qu’avec peu de dépense les habitants médiocrement riches puissent assister au spectacle, et l’on verra ainsi le plaisir contribuer au bon gouvernement, ce qui est le sublime de la politique ; car qu’y a-t-il de plus estimable que de mener les hommes par le chemin des plaisirs innocents et actuels, à une diminution de peines, et même à d’autres plaisirs futurs, la nation se polirait de plus en plus jusques parmi le peuple, les sentiments de vertu entreraient avec le plaisir dans les cœurs des Citoyens, et par le perfectionnement de nos mœurs, la société deviendrait tous les jours plus douce, plus tranquille et plus heureuse, et c’est le but que je m’étais proposé dans ce Mémoire.
Je sais en quelle considération ils sont dans le monde, et quels bons effets ils peuvent produire dans un Etat. […] Si bien qu’il y avait de la Politique dans son harmonie, et pendant qu’il accordait son Luth avec sa voix, il songeait à réunir les esprits de ses Sujets, et à mettre une parfaite tranquillité dans son Etat. […] Pour l’Astrologie, si nous écoutons ses raisons, Elle ne s’élèvera pas seulement au-dessus de la Peinture et de la Musique : mais Elle essaiera de nous persuader qu’elle est plus utile aux Princes que la Politique même : Car elle se vante qu’elle lit dans les Astres les secrets de l’avenir, qu’Elle présage les maux qui menacent les Etats, qu’elle enseigne les moyens de les détourner, et qu’un Astrologue est plus utile à un Roi que tous ses Soldats et tous ses Ministres.
La justice n’est pas une vertu d’Etat. […] l’Etat peut-il avoir intérêt à rendre les hommes féroces ? […] Mais est-ce bien de l’intérêt public, de l’intérêt de l’Etat, de les faire sentir à des sujets, et leur laisser apprendre à les goûter, et affaiblir, en s’y familiarisant, le juste éloignement qu’ils doivent avoir des forfaits atroces. […] Tarquin régnait depuis vingt-quatre ans sur un Etat jusqu’alors monarchique. […] Quel trône subsisterait, si ces sortes de raisons suffisaient pour chasser un Roi et sa famille, et changer la constitution d’un Etat ?
On a reconnu que la valeur dépendait beaucoup de l’habitude et cette observation engage le Gouvernement à dissimuler quelquefois les abus d’une qualité qui, dans les occasions où l’Etat doit l’employer, ne peut jamais être excessive. […] Dans une Démocratie au contraire un Citoyen est toujours instruit des motifs qui font agir les Chefs de l’Etat. […] Il convient donc de leur laisser leur indifférence en matière d’Etat. […] Ce courage ne doit avoir lieu que vis-à-vis les ennemis du Prince, et dès qu’on l’emploie contre un de ses compatriotes on devient criminel envers l’Etat, puisqu’on s’expose à le priver d’un bras destiné pour sa défense. […] Le procédé de Louis XIV est donc absolument le contraire de celui que vous lui reprochez : il enseignait par-là à tout le monde que la Noblesse est si respectable qu’il n’est jamais permis qu’aux lois de l’Etat de la punir de ses désordres.
Les ecclésiastiques commettent un délit, envers les lois civiles, à raison de ce refus de sépulture, attendu qu’il ne leur est pas permis de condamner une profession que les diplômes du prince, les lois de l’Etat et les règlements de la police du royaume, ont instituée, protégée et honorée ; ils commettent un autre délit, envers les lois de l’Eglise, attendu que le refus de sépulture ne peut être fait qu’à des excommuniés dénoncés, et que les comédiens ne sont nullement dans cette catégorie. Le tableau historique de plusieurs saints honorés par l’Eglise catholique, apostolique et romaine, qui ont été comédiens de profession, et qui ont souffert le martyre pour la foi de Jésus-Christ ; Le récit de plusieurs processions, messes, et autres cérémonies religieuses, pratiquées par le clergé, et qui ont été et sont encore, par leur scandale et leurs obscénités, infiniment plus nuisibles à la religion que l’exercice de la profession de comédien ; L’exposé de divers conciles constitutifs de la discipline ecclésiastique qui imposent aux évêques et aux prêtres, dans leur vie privée, des devoirs qui ne sont plus pratiqués de nos jours et qu’il est utile de rappeler à leur mémoire ; attendu que puisqu’ils se montrent rigides observateurs des canons des conciles, à l’égard des fidèles, ils doivent eux-mêmes donner l’exemple de leur soumission aux lois qui leur sont propres, et sans l’exécution desquelles la religion perdrait son lustre et l’utilité de son institution ; L’oubli qui a eu lieu, de la part des évêques et des prêtres, de ces lois canoniques sur la discipline qu’ils doivent pratiquer, a excité l’ambition du clergé, au point de vouloir s’emparer du gouvernement de l’Etat, et lui a fait commettre des crimes qui ont ensanglanté le trône de nos rois, et bouleversé le royaume.
En effet, les gens de théâtre appartiennent à l’autorité civile, et l’art théâtral est devenu légalement une profession dans l’Etat. Il en résulte que, non seulement à Rome et en Italie, mais encore dans tous les autres Etats, et par conséquent en France, la profession de comédien doit y être entièrement affranchie des anathèmes et de l’excommunication de l’Eglise, pourvu toutefois que les acteurs se soumettent, ainsi que tous les autres citoyens, aux devoirs de chrétien et aux pratiques de religion.