Je me trompe, on en convient en général ; mais on ne croit plus trouver du danger nulle part ; & jusques sur le sein de sa cruelle Philistine Samson repose, il dort, & croit dormir en fûreté. […] Je le souhaite, je souhaite que tous les saints Peres se soient trompés ; car tous les saints Peres assurent tous le contraire ; mais laissez-nous cependant déplorer la corruption de leurs cœurs, le déshonneur de la Religion & de l’Etat, & peut-être le déshonneur prochain de vos propres familles. […] Il réussit alors à le persuader ; malheureusement ce fut pour trop peu de temps ; & l’événement a fait voir si Caton s’étoit trompé.
8 J’avoue que je puis me tromper, & il peut se tromper aussi. […] Je me suis attaché dans ce Chapitre à détruire quelques opinions de l’Abbé du Bos, parce que par la maniere dont il explique quelquefois les passages qu’il cite des Anciens, ceux qui sans remonter aux sources se contentent de lire son Ouvrage, peuvent être souvent trompés.
L’infidèle qui l’avait toujours trompé, gardait du moins des mesures ; mais quand elle l’eut épuisé et se fut assuré un contrat, elle leva le masque et le chassa. […] Les libertés du bal, les commodités et la facilité du masque trompent les plus vigilants Ces assemblées ont beaucoup de ressemblance avec les cérémonies païennes du Temple de Cythère et de Paphos. […] Au souper qui suit le spectacle, on ne parla que des intrigues des Actrices, de dix amants ruinés, de trente trompés, de quarante assez imbéciles pour se croire aimés, etc. » Ne sont-ce pas bien là des objets dignes d’occuper le Conseil d’Etat, d’être soigneusement retenus dans leurs nobles fonctions, de n’obtenir que très difficilement la liberté de priver le public de leurs importants services ?
Du dégoût on en vient au mépris, à l’incrédulité : « Cum ad religionem accesserint litterati minus credunt. » Si vous ne voulez pas vous tromper vous-même, fuyez donc ces voluptés pernicieuses dont l’âme se repaît et s’empoisonne, comme le corps des viandes délicieuses ; préférez la vérité à l’erreur, l’éternité au temps, l’utile au frivole : « Qui non vult se ipsum decipere, abjiciat noxias voluptates. » Ne vous plaisez à voir que des actions justes et pieuses, à entendre que ce qui nourrit l’âme et nous rend meilleurs ; n’abusez pas de vos sens, qui ne vous ont été donnés que pour apprendre l’enseignement et la volonté de Dieu. […] Vous vous trompez vous-même, et vous trompez les autres, lui dit-il, les Comédiens ne se sont jamais étudié à rendre les hommes vertueux, leur unique dessein est de les faire pécher (les Actrices sont-elles du complot ?)
C’est la tromperie, à mon auis, dont Gorgias le Leontin entendoit parler ; Et qu’il preferoit aux actions legitimes ; C’est cette tromperie, auec laquelle il disoit que celuy qui trompe est plus juste que celuy qui ne trompe pas ; & à laquelle il croyoit que les fins & les habiles se deuoient laisser piper, pour estre plus fins & plus habiles.
On a senti la nécessité, non pas de penser mieux qu’un tel homme, cela était indifférent en ce cas, ou n’était pas l’affaire la plus importante ; mais de tenir une conduite opposée à la sienne, de ne pas marcher sur ses traces pour ne pas être soupçonné de vouloir arriver au même but, de ne rien dire, de ne rien faire qui ressemblât à ce qu’il avait dit, à ce qu’il avait fait pour attirer la confiance et tromper ; donc il a fallu abandonner ou négliger comme j’ai montré qu’on avait abandonné ou négligé les exercices pieux, ou les devoirs de la religion, les louanges de ses préceptes, et la pratique des autres vertus que le Tartufe en jugement observait si scrupuleusement pendant le temps qu’il méditait de faire des dupes, et pour mieux y parvenir ; donc cette satire, qui prête tant de vraisemblance au travestissement des plus belles actions d’un homme de bien, en indices d’un méchant qui médite le mal, devait nécessairement produire les désordres qui existent et que je lui impute en grande partie. […] Ainsi donc, après avoir mis à part, avec l’admiration et tous les égards qui leur sont dûs, l’esprit, le génie et l’art qui brillent dans la satire du Tartufe, et qui ont aveuglé le public sur ses défauts, comme la pompe et les richesses l’aveuglent ordinairement sur ceux des riches, on peut dire que son instruction s’est bornée à donner aux honnêtes gens l’avis qu’on pouvait les tromper sous un masque noir comme sous un masque blanc, ou sous l’habit ecclésiastique comme sous l’habit de laïc ; ce qui ressemble au soin de leur apprendre que les brigands et les voleurs, qui se mettent en embuscade aux coins des édifices profanes, pour surprendre et dépouiller les passants, se cachent aussi derrière les temples, quand ils croient y être plus avantageusement placés ; or, l’on n’attendait pas après une telle révélation ; tout le monde en conviendra ; donc la plus savante, la plus ingénieuse attaque dramatique a été dirigée contre un moulin à vent.
Le négociant a beau avoir toujours dans la bouche la droiture & la bonne foi, Machiavel monte avec lui sur son vaisseau & navige avec lui aux Indes, avec lui il veut envahir tout le commerce, il monopole pour mieux débiter ses denrées, il trompe le vendeur & l’acheteur sur le prix & sur la qualité des marchandises. […] Le Machiavélisme joue sur le théatre quelques rôles à chaque scène : il n’est point de piece où on ne trompe, où l’on ne dépouille quelqu’un par violence ou par artifice ; la tragédie le fait en grand par des princes, des seigneurs, des ministres, des troupes, par l’effusion de sang.
Mais ils se trompent, puisque l’Evangile les menace de malheurs éternels : « Væ vobis, qui ridetis nunc, quia lugebitis et flebitis. » Lucæ 6. 25. […] Ne vous trompez pas, il a en horreur tous ceux qui prennent encore quelque part aux pompes auxquelles ils ont renoncé dans leur Baptême : Et il ne met pas au nombre de ses enfants ceux qui prennent plaisir de s’écarter des voies qu’il leur a tracées.
Il se trompait sur le fait, ne sachant pas ce qui s’était passé en 16967, où à l’occasion d’un Jubilé, les Comédiens Français hasardèrent de présenter à Innocent XII une Supplique tendante à lui demander d’y participer, et à se plaindre du refus qu’on faisait de les absoudre. […] Il traite Molière d’Auteur pernicieux, lequel, dit-il, ne tend qu’à concilier du crédit et de l’autorité au crime, en décriant ceux qui s’y opposent, ou en apprenant aux jeunes gens l’art de tromper des parents chargés de leur conduite.
Il s’est trompé, lui répond le judicieux Journaliste de Bouillon.
Mais on s’est trompé : ce n’est pas seulement l’idolâtrie, c’est encore la dangereuse représentation du crime, les leçons du vice, l’apologie des passions, les occasions du péché.
En général, les Peuples modernes de l’Europe se sont trompés dans la façon dont ils ont conçus la Parodie.
… Mon amie, tu le vois bien, mes pressentimens… chère Ursule, ils ont toujours été vrais… Mais, me trompé-je !
Monsieur D’Alzan les a remarqués : — Pourquoi me tromper, a t il dit en me regardant — ?
La suite fit voir que Scipion ne s’était pas trompé, et l’établissement des spectacles à Rome fut l’époque du luxe et de la mollesse, qui corrompirent enfin cette fameuse République.
Mais Pontas s’est trompé en disant : « Tout le monde sait que les pasteurs denoncent publiquement les comédiens pour des gens excommuniés, tous les dimanches, au prône des messes de paroisse 11 » ; car la formule du prône, dans la plupart des rituels de France, ne fait point mention de cette excommunication12.
Qui bâtit une rhapsodie de paradoxes tirés de la fable des Abeillesc 7, pour tromper les hommes, et leur faire croire qu’ils sont faits pour vivre seuls dans les forêts ?
Mais enfin, quand je me tromperais, ne dois-je pas agir, parler, selon ma conscience et mes lumières ?
Ce célèbre Musicien, dont les talens étaient déjà connus par la musique de plusieurs balets, ne trompa point les espérances qu’on avait conçues en sa saveur ; il rendit bientôt l’Opéra Français un des plus fameux Spectacles de l’Europe. […] Soyons convaincus que tous ceux qui ont écrit que l’Opéra-Sérieux était énnemi du possible & du simple, se sont furieusement trompés, puisqu’il renferme ces deux qualités si précieuses au Théâtre. […] Qu’ils disposent leurs trapes de manières qu’en s’ouvrant elles semblent former un gouffre ; que des toiles peintes trompent les yeux des Spectateurs : & quand Médée, par éxemple, perce la voûte d’un Palais en s’envolant dans son char, que le Machiniste fasse disparaître une partie des toiles qui représentent cette voûte, & qu’il fasse entendre un certain bruit, comme si véritablement tout le Palais s’entre-ouvrait avec violence. […] Ils écrivent avec tant d’art, qu’on peut soutenir sans crainte de se tromper, que la musique & la danse sont toujours au dessus des paroles : Eh !
Sous un extérieur galant qui leur sert à tromper ceux qui n’ont point d’affaires avec eux, je proteste au Public qu’ils n’en cachent pas moins une âme aussi barbare que jamais. […] Ces Midas répandus aujourd’hui dans les cercles brillants, y contractent une urbanité usuelle qui ne sert qu’à tromper ceux qu’ils respectent ou qui leur sont indifférents, mais pour les bien juger, c’est dans leur Commerce avec leurs subordonnés, qu’il faudrait aller chercher l’opinion qu’ils méritent et saisir leurs traits caractéristiques pour en faire un portrait ressemblant et juste, experto crede Roberto. […] Si toutes les professions exposent la bonne foi en faveur de l’intérêt, on me permettra donc de croire que j’ai bien choisi en m’attachant à celle qui ne m’oblige jamais à tromper personne, on me permettra de croire que je dois en conscience faire usage d’un talent qui peut contribuer à faire d’honnêtes gens, comme l’expérience le prouve, et qui par conséquent facilite aux Pasteurs le moyen de sanctifier leurs Ouailles. […] mon Père, lui dis-je, je ne l’ai pas cru alors, mais j’ai craint de m’être trompé et c’est pour cela que je m’en accuse.
» Aussi le but moral de ce Poème n’est-il pas de guérir les Peuples du Fanatisme, mais de les en garantir, en leur démontrant, non pas qu’on les trompe, mais comment on peut les tromper. […] que la sotte vanité de George Dandin et du Bourgeois Gentilhomme, que le faible du Misanthrope pour une coquette qui le trompe ? […] Allez persuader à un charlatan de ne pas tromper le peuple, vous y perdrez votre éloquence. […] Rousseau ; c’est un honnête homme du monde qui se fait peine de tromper celui qui le consulte. […] Du reste, il n’y a que l’amour effréné qui détache l’âme de ses devoirs, et qui en rompe les liens : tout sentiment vif les relâche ; l’amitié, le sang et l’amour trompent l’équilibre des intérêts qui meuvent l’âme ; mais cet équilibre est une chimère.
Je suis très-persuadé qu’elle n’a point donné le jour à un méchant de l’espece de celui dont nous parlons, si je me trompe dans ma bonne opinion, elle trouvera en vous un second Ciceron. […] Est-ce tourner en dérision les respectables droits des maris que de montrer combien une femme est adroite quand elle veut tromper son époux ? […] Je crois ne m’être pas trompé. […] Ne vous y trompez pas, si dans leurs societés il ne s’y rencontre point d’hommes, elles en voyent en rentrant dans leurs maisons, et; leur premier soin sera de réjouir leurs maris des bons mots que l’histoire du jour aura fourni. […] Je puis me tromper, mais j’imagine avoir suffisamment rempli la tâche que je m’étois prescrite, quand j’ai mis la main à la plume pour convaincre mes lecteurs que la Comédie est honnête, utile, nécessaire même.
Vous vous trompez, lui répond le Chanoine, ce n’est pas le Peuple qui aime les choses ridicules, ce sont les Poëtes qui n’en savent pas faire d’autres. […] Résolu de l’amener à Rome avec lui pour l’épouser, afin de tromper le Sénat, il écrit à Rome qu’il amenera Cleopatre pour la faire servir d’ornement à son triomphe.
En vain ceux qui sont intéressés à tromper les Peuples, voudroient maintenant ralentir la communication des idées. […] Ainsi les Charlatans, qui trompent les Peuples, font toujours semblant de confondre la cause des hommes & la cause de Dieu. […] Cet esprit de fanatisme & d’intolérance qui a causé nos Guerres Civiles du seizième siècle, s’est beaucoup affoibli parmi nous ; mais quand il subsisteroit dans toute sa force, quand il seroit encore l’esprit général ; quand les partisans effrénés du dogme auroient conservé sur la Nation cette influence qu’ils ont perdue ; seroit-ce en effet respecter la Nation que de la tromper ?
S’il y a des dévots et des gens d’église qui trompent, quelle autre classe de la société ne fourmille pas de menteurs et de trompeurs ? […] Je renouvelle aujourd’hui ce vœu que j’ai déjà formé, pour que les hommages qui vous sont dûs vous accompagnent jusqu’au-delà du tombeau ; qu’il soit fait une distinction nationale entre la mémoire d’un homme vil qui a passé sa vie à déshonorer sa profession, autant qu’il fut en lui, à tromper, à affliger ses concitoyens, dont il a mérité le mépris et la malédiction, et la mémoire de l’homme probe et bienfaisant qui emporte avec lui la bénédiction, les regrets et les larmes de ceux qui l’ont connu ; et que le nom chéri de ce bon citoyen soit proclamé et célébré ; que ses restes vénérables soient conduits au dernier asile par un père de la patrie, entourés des honnêtes gens dont il s’est fait aimer, des infortunés qu’il a secourus et qui pleurent sa perte ! […] On s’y prend ainsi pour les punir, sous prétexte que la loi ne peut les atteindre ; mais en réfléchissant sur son résultat, on trouve la un étrange supplément à cette loi qui n’est arrêté que par la crainte de se tromper, de punir les bons pour les méchants.
On se trompoit & on ne cherchoit qu’à se tromper de part & d’autre. […] On croit que l’amour que j’ai pour mes sujets, m’engage à visiter souvent mes Etats : on se trompe, ce n’est que pour maintenir mon autorité, contenir les Gouverneurs & les Ministres, comme les richesses & les besoins. […] Pour les mieux tromper & découvrir leurs secrets, il faut avoir des ambassadeurs plus fin qu’eux & moins scrupuleux, qui s’expriment en termes vagues, en phrases louches, pour avoir une porte de derriere.
Franc-homme a le langage d’un brutal ; il trompe une veuve, il en débauche le fils et le révolte contre sa mère. […] se trompe un peu : car Face ne rend-il pas raison de ses procédés ? […] Et telle doit être, si je ne me trompe, la fin de la Comédie.
Elles estoient encouragées au Combat par les chamades d’un Triton, qui par le moyen d’une Machine secrete & industrieuse sortit du milieu de l’eau avec sa Trompe.
Les vers polis, et les discours agréables, gagnent les esprits, et les portent où ils veulent : c'est pourquoi celui qui recherche la vérité, et qui ne veut pas se tromper soi-même, doit rejeter les voluptés pernicieuses, auxquelles l'âme s'abandonne, comme le corps aux viandes délicieuses, il faut préférer les choses véritables à celles qui sont fausses, les éternelles, aux passagères, et les utiles aux agréables.
Au lieu de travailler à guérir les plaies qu’ils ont faites à l’âme, et à la délivrer de la dépendance où elle est à leur égard, on fortifie les liens qui l’asservissent, on la force à se répandre au dehors ; on l’amuse par des choses frivoles, on lui cache son véritable bonheur ; au lieu d’apaiser sa faim par la nourriture solide de la vérité, on la trompe en lui donnant les viandes empoisonnées de l’erreur et du mensonge.
On lui cache son véritable bonheur, on l’amuse par des choses frivoles, et au lieu de satisfaire sa faim par une nourriture solide, on la trompe en lui donnant des viandes peintes, ou en l’empoisonnant par l’erreur et le mensonge.
vieillards dans les Tragédies sont représentés comme des tyrans, des usurpateurs : dans les Comédies, des jaloux, des usuriers, des pédants, des pères insupportables que tout le monde conspire à tromper.
Là l’on fait la représentation de toutes les secrètes pratiques, des feintes, des adresses, des confidences qui trompent des yeux jaloux ; et la passion qui échappe à tous les liens, des lois, de la conscience, de l’honneur, qui l’emporte sur l’amour des frères, et le respect des parents, est hautement louée, comme une généreuse fidélité.
Mais pour parvenir à relever le genre de l’Ariette, il faut qu’ils le croient susceptible de nouveaux ornemens, & qu’ils avouent s’être quelquefois trompés dans tout ce qui le concerne : il faut s’armer d’une attention scrupuleuse, & n’être point éffrayé de la difficulté du travail. […] C’est pourquoi il me semble que l’Auteur de la Fée Urgèle se trompe lorsqu’il met tant de finesse & de choses recherchées dans ses Ariettes.
« Ceux-là se trompent étrangement qui s’imaginent que les ouvrages de ce genre ne font sur eux aucune impression funeste, parce qu’ils n’y réveillent aucun désir coupable. […] De là une aversion profonde et une complète indifférence pour les affaires et les devoirs de la vie commune ; et ces jeunes cœurs, trompés dans leur attente, s’inquiètent, se tourmentent et soupirent après une félicité imaginaire.
Je ne sais si je me trompe ; mais il me paraît que la Tragédie d’Andromaque est très convenable pour nous faire sentir de quelle manière on peut traiter la passion de l’amour sur le Théâtre : on pourrait ajouter même qu’Euripide nous a laissé, dans Andromaque un modèle parfait pour présenter cette passion sur la Scène avec toute la circonspection que la Réforme ou plutôt la raison demande, et avec l’heureux avantage de corriger et d’instruire les Spectateurs. […] Je ne sais si je me suis trompé ; mais, en tout cas, je soumets sans peine mon jugement à la décision de mon Lecteur, à laquelle je souscris aveuglément.
Combien de fourbes, de femmes d’intrigue, de fripons, de valets, qui arrachent le secret des familles, & en abusent pour tromper leurs maîtres !
Les uns éclairez de la veritable sagesse, qui est la sagesse de l’Evangile, les reprouvent ; les autres trompez par les fausses lumieres d’une prudence charnelle les justifient, ou s’efforcent de les justifier.
Des oisifs de toute espèce, des paresseux de profession, dont l’unique affaire est de ne rien faire ; l’unique soin, celui de n’en point prendre ; l’unique occupation, celle de tromper leur ennui ; passant de la table aux cercles ou au jeu, et de là aux spectacles, pour y assister sans goût, sans discernement, sans fruit, fort satisfaits au reste d’avoir rempli le vide d’un temps qui leur pesait.
ne se trompe donc pas lorsqu’il lui donne la gloire d’avoir inventé un genre de Tragédie inconnu à Aristote, où, sans s’attacher uniquement comme les Poëtes de l’ancienne Tragédie, à émouvoir la Pitié & la Terreur, il ne pense qu’à exciter dans l’ame des Spectateurs par la sublimité des pensées, & par la beauté des sentiments, une certaine admiration dont plusieurs personnes s’accommodent souvent beaucoup mieux que des véritables passions tragiques. […] Il ne s’est pas trompé non plus lorsqu’il a remarqué que l’homme se plaît naturellement à l’imitation, soit qu’il imite lui-même, soit qu’il ne fasse que sentir l’effet de l’imitation faite par un autre. […] On les écoute dans la résolution de s’y laisser tromper, & c’est parce qu’on s’y trompe en effet, & qu’on prend la copie pour l’original, que des malheurs seints excitent une compassion presque réelle, & que l’image de la douleur y fait couler des larmes passageres, mais, en un sens véritables.
Nous avons besoin au théatre, qui est l’aliment de la passion, de leur trouver du mérite & des vertus ; du moins de ne rien voir qui suppose qu’elles n’en ont pas. c’est-à dire de nous tromper, pour nous mieux séduire, & de cacher le piége, pour nous y prendre. […] L’infidélité partout condamnée, n’est qu’un jeu au théatre, un honneur dans Amphitrion, un tour d’adresse dans George Dandin, par-tout un goût pardonnable : le chagrin des maris trompés, leur vigilance, & leur zèle un vrai ridicule ; le grand Moliere en a été la victime, & le modéle ; il n’a pû vivre avec sa femme, malgré les plus basses satisfactions, & il le méritoit aussi peu qu’elle, quoiqu’à tous égards actrice complette. […] Les femmes, dit-on, ne sont ni élevées à la magistrature, ni instruites dans le droit : on se trompe, qui sait mieux le droit, qui est plus véritablement magistrat, que l’actrice qui forme les magistrats, dicte leurs Arrêts : On se louoit autrefois de la chasteté de la langue française, grace à la Comédie, & aux Femmes qui vont y apprendre à parler ; leur nouveau Dictionnaire feroit rougir les hommes les moins devots, s’ils ne devenoient femmes avec elles.
Mais la flatterie y a tenu la plume dans cette nomenclature ; on seroit bien trompé si on pesoit le mérite à sa balance. […] David, dans les rues de Jérusalem, fit devant l’Arche un pieux ballet ; chez les Egyptiens, qui en faisoient une grande partie de leur culte, ils dansoient le couronnement, les exploits, & sur-tout les amours d’Osiris ; on lui mettoit une mitre, un globe, un trompe d’éléphant sur la tête, un bec d’épervier sur le nez & un fouët à la main. […] Il se trompe dans cette exclusion.
Le Philosophe immortel qui fait tant d’honneur à notre siècle, rira de mon sentiment : sans ôser combattre ce grand homme, je vais proposer mes idées ; s’il trouve que je sois dans l’erreur, il daignera me faire grâce ; il sait trop que les malheureux humains sont sujets à se tromper. […] Je vais citer tout de suite un assez long passage d’un Auteur Français, qui achèvera de prouver que le Citoyen de Genève s’est beaucoup trompé dans les morceaux que je viens de rapporter, & qui achèvera de faire entendre au Lecteur en quoi les deux musiques différent l’une de l’autre. « On ne peut s’empêcher, dit l’Auteur dont je vais transcrire les paroles(62) ; « On ne peut s’empêcher d’admirer dans les Musiciens d’Italie les desseins nouveaux de leurs figures si bien imaginées, la vivacité pétillante de leurs imitations redoublées & de leurs modes enchaînés ; mais si nous leur cédons la science, ne doivent-ils pas nous céder le naturel, & l’éxécution tendre & noble, sur-tout pour l’harmonie des instrumens ?
Oui, Monsieur, vous méprisez moins les femmes que vous ne dites, vous les haïssez moins qu’il ne paraît, et la nature vous trompe. […] … Non, Madame, vous êtes belle, vous avez de l’esprit, vous me tromperiez mieux qu’une autre, mais vous n’aurez pas l’honneur de me persuader….
C’est par de telles raisons que la société des jésuites veut à tout prix se charger d’instruire les hommes, non pour les éclairer, mais pour les tromper, sans les rendre meilleurs, et enfin pour les démoraliser. […] Les lumières ne peuvent que les rendre meilleurs, et les empêcher de tromper les hommes ou d’être la dupe de leur crédulité.
Mais il ne croit pas que sa vertu soit dans un degré assez haut, s’il ne fait monter sa piété vers Pompée, jusques à l’impiété et au blasphème envers les Dieux de l’antiquité ; car il la fait parler dans la première Scène du cinquième Acte aux cendres de son mari, en cette manière ; « Moi je jure des Dieux la puissance suprême, Et pour dire encore plus, je jure par vous-même ; Car vous pouvez bien plus sur ce cœur affligé, Que le respect des Dieux qui l’ont mal protégé. » Et sur la fin de la Scène quatrième du même Acte : « J’irai, n’en doute point, au partir de ces lieux, Soulever contre toi les hommes et les Dieux : Ces Dieux qui t’ont flatté, ces Dieux qui m’ont trompée, Ces Dieux qui dans Pharsale ont mal servi Pompée, Qui la foudre à la main l’ont pu voir égorger : Ils connaîtront leur crime, et le voudront venger ; Mon zèle à leur refus, aidé de sa mémoire, Te saura bien sans eux arracher la Victoire. » « Ce serait une fort méchante excuse à cette horrible impiété, de dire que Cornélie était Païenne ; car cela prouve seulement qu’elle se trompait, en attribuant la divinité à des choses qui ne la possédaient pas : mais cela n’empêche pas que supposé qu’elle leur attribuât la divinité, elle n’eût pas des sentiments effroyablement impies.
Combien de fois ne se sont-ils pas trompés ?
Or, il est tout visible, qu’il n’est point de tems, où vous pensiez moins à mourir que lors-que vous oubliez méme de vivre en Chrétiens, & par consequent si Jesus-Christ ne nous a point donné un faux avis, s’il ne nous a point trompé lui-méme, il n’est point de tems, où vous aïez plus de sujet de craindre la mort ; Quâ horâ non putatis, filius hominis veniet.
Le Fils de Dieu s’est assez ouvertement declaré contre les jeux, & les danses dans le Miracle, dont il est parlé dans l’Evangile, en resuscitant la fille du Prince de la Synagogue ; Miracle, qu’il ne voûlut pas operer tandis que les danseurs, & les joueurs d’instrumens seroient dans la maison ; c’est pourquoi il les fit chasser avant que d’y entrer… Saint Jerome parlant des Danseurs, dit, que c’est le demon qui danse dans leurs personnes, & qu’il se sert de ses laches Ministres pour seduir, & tromper les hommes… En effet tout ce que la volupté, est capable d’employer d’artifice est attaché au bal, à la danse, & à la comedie.
Je puis, je crois, me dispenser d’avertir de nouveau que les personnages de notre Spectacle doivent être vrais, & si ressemblans à leur modèle qu’il soit facile de s’y tromper.
Je ne m’en étonne pas : car nos douleurs et nos tristesses sont très véritables, puisqu’elles sont de justes peines de notre péché : mais nous n’avons point sur la terre depuis le péché, de vrai sujet de nous réjouir : ce qui a fait dire au Sage : « J'ai estimé le ris une erreur, et j’ai dit à la joie : pourquoi me trompes-tu ?
Lorsqu’après la mort de Marie, l’Ambassadeur d’Espagne la demanda en mariage pour son maître, elle répondit avec une effusion de reconnoissance, & une démonstration qui trompa un moment tout le monde : Ma personne, mon mariage ne peuvent payer les obligations que j’ai au Roi Catholique. […] La Comédienne d’Angleterre le trompa & le conduisit au tombeau ; Campistron auroit dû faire paroître un Envoyé d’Angleterre sous un nom supposé, il auroit pû former des scènes intéressantes. […] Le Duc d’Albe, alors Gouverneur des Pays-Bas, appeloit ce manège une farce politique ; & la Reine une Actrice qui gagne par ses flatteries sans s’engager elle-même, dit une chose & en pense une autre, promet tout & ne tient rien, & trompe tout le monde comme sur le théatre, & cependant persécute les Catholiques & détruit leur Religion. […] Elisabeth ajoute la dissimulation aux attentats, la fourberie à l’inhumanité, le deuil à l’assassinat ; ce n’est pas la conduite d’une femme d’esprit, on se fait mépriser quand on juge tout le monde si grossièrement dupe ; mais c’étoit son caractère, son art, son talent qu’on nomme politique, feindre, dissimuler, tromper.
Et peut-on s’y tromper ? […] Si le rolle est furieux, colere & véhément, tout le monde sçait quel est le caractére de ces fortes de mouvemens, & personne ne se trompera au genre de la démonstration : s’il est noble, sublime & généreux ; chacun sçait encore la nature de ces sentimens. […] Non : la vertu & le vice ont des caractéres qui leur sont propres, & auxquels on ne peut pas se tromper. […] Parce qu’une maîtresse dupe son amant, une femme trompe son mari, qu’une fille échappe à sa mere ; que tout cela se passe avec dextérité, & par des voies aussi heureuses que naturelles : c’est un motif d’écarts pour des cœurs fidéles, des femmes vertueuses, des filles sages, une sorte de mouvement séduisant.
Momus dit s’être déguisé pour tromper les hommes : est-ce le moyen d’accréditer les éloges ? Il dit vrai, il les trompe en effet, en les louant. Le déguisement abusa le public dans tous les tems , & voilà le crime de Moliere, il a masqué la vertu, la montrant ridicule, & haissable ; il a masqué le vice, le montrant excusable, & agréable ; la dévotion, la traitant d’ypocrisie ; les peres, les meres, les tuteurs, les traitant de tyrans, l’adultere, n’en faisant qu’un jeu, la galanterie, la donnant pour le bon air du monde ; il a tant déguisé, & par ses déguisemens, a trompé les hommes, & corrompu les mœurs de la nation.
Rapportons ses propres paroles dans le langage naïf d’Amiot : « Quand ce Musicien eût un peu ébranlé & sondé la Compagnie du festin, & qu’il sentit que plusieurs étaient enclins à son intention, & se laissaient mener pour le plaisir qu’ils prenaient à tout ce qu’il voulait leur sonner, & à toute dissolution qu’il voulait représenter ; alors se découvrant tout à l’ouvert, il nous fit voir clairement que la musique, à ceux qui en abusent impudemment à toutes heures, enivre plus que pourrait faire toutes sortes de vins que l’on pourrait boire : car ceux qui étaient à table ne se contentèrent plus de crier à pleine tête & de frapper des mains l’une contre l’autre ; mais à la fin la plus-part d’iceux se levèrent de table & commencèrent à se tremousser de mouvemens dèshonnêtes & indignes de gens d’honneur, mais qui convenaient aux Sons & Chansons qu’il leur sonnait. » Un certain Ephore, Auteur Grec, cité par l’Historien Polybe, affirme qu’elle ne fut introduite que pour tromper & abuser les esprits. […] Plutarque rapporte qu’Isménias, fameux joueur de flûte, le même peut-être qu’on nomma Ambassadeur de Perse, fut fait prisonnier de guerre par Athan, roi des Scytes, & qu’il se mit aussi-tôt à jouer de sa flûte devant ce Prince, se flattant de se procurer un sort heureux : le fameux Isménias se trompa dans son attente. […] Si cet Ecrivain s’est trompé, s’il lui est échappé une espèce de blasphème musical, c’est à son siècle qu’on doit s’en prendre.
La Bruiere a dit que depuis cent ans les Auteurs qui nous ont prédédé ont moissonné dans le champ où nous ne faisons plus que glaner ; mais le fait a dèmontré depuis cent ans combien cet illustre Ecrivain, qui n’est pas exemt d’erreur, s’est trompé dans cette remarque. […] Si l’on souffre , dit-il, la Muse imitative, qui nous charme & nous trompe par la douceur de ses accens, bientôt les hommes n’auront plus pour objet ni la loi, ni les choses bonnes & belles, mais la douleur & la volupté. […] Il se trompe encore.
n’est-il pas à craindre qu’elle ne soit de celles des sages du monde, qui ne savent s’ils sont chrétiens ou non, et qui s’imaginent, comme dit encore Bossuet, avoir rempli tous les devoirs de la vertu, lorsqu’ils vivent en gens d’honneur, sans tromper personne, pendant qu’ils se trompent eux-mêmes en donnant tout à leurs plaisirs et à leurs passions ?
à faire entendre que toutes les Religieuses sont enfermées dans un couvent malgré elles, forcées par les passions, séduites par les Religieuses, trompées par les Prêtres, gémissant accablées sous le joug, sur-tour (car c’est là le grand vœu du libertinage), ne pouvant garder la continence : tant le Poëte (je ne sais s’il le sait par expérience) est persuadé qu’on ne peut se passer de volupté, & que personne ne peut se défendre de l’impérieux vœu de la nature. […] On l’égare, & je dois l’éclairer, on vous trompe.
Hors d’état de rendre raison d’aucune des choses qui sont dans son tableau, il nous abuse doublement par ses imitations, soit en nous offrant une apparence vague & trompeuse, dont ni lui ni nous ne sçaurions distinguer l’erreur ; soit en employant des mesures fausses pour produire cette apparence, c’est-à-dire, en altérant toutes les véritables dimensions selon les loix de la perspective : de sorte que, si le sens du spectateur ne prend pas le change & se borne à voir le tableau tel qu’il est, il se trompera sur tous les rapports des choses qu’on lui présente, ou les trouvera tous faux. […] Mais songez toujours que les Hymnes en l’honneur des Dieux, & les louanges des grands hommes, sont la seule espèce de Poësie qu’il faut admettre dans la République ; & que, si l’on y souffre une fois cette Muse imitative qui nous charme & nous trompe par la douceur de ses accens, bientôt les actions des hommes n’auront plus pour objet, ni la loi, ni les choses bonnes & belles, mais la douleur & la volupté : les passions excitées domineront au lieu de la raison.
« Tout véritable Misantrope (dit-il) est un monstre, s’il pouvait exister, il ne ferait pas rire, il ne ferait qu’horreur. » C’est une vérité incontestable, je le crois aisément, Molière s’est trompé, mais je ne prends point le change, c’est de lui qu’il parle, il est ce monstre « des Spectacles & des mœurs (dit notre Critique forcené) voilà qui formerait un Spectacle à voir, d’autant plus que ce serait la première fois. » Persifflage pitoyable & digne de l’Auteur, comme s’il n’était pas des Comédiens honnêtes gens : lui-même avoue avoir été étroitement uni avec un. Romagnezi, son Epouse, Silvia, ne sont-ils pas des preuves combien le Génevois se trompe ? […] Mais je m’imagine qu’il en résulterait souvent que le premier serait un misérable, & le second au contraire un homme très-estimable, auquel cas notre Caustique se trompe furieusement. […] Je ne m’y suis jamais trompé, j’ai pris souvent plaisir à les faire connaître, ennemi juré de la canaille, & je le prouve. […] Nos pères étaient plus méchans que nos ayeux ; nous sommes plus corrompus que n’étaient nos pères, & nous laisserons des enfans encore plus vicieux que nous. » Il se trompe encore une fois ; cette insolente épithète n’est synonyme qu’avec bâteleur : c’est en vain qu’il veut englober l’état de Comédien ; avec celui de Farceur ou d’Histrion ; il ne peut nous choquer étant faux ; on me dira qu’il n’y a que les vérités qui offensent : mais je repondrai que la calomnie révolte, & si l’on trouve trop de fiel dans mes discours, qu’on ne l’impute qu’à la grandeur de mes sentimens, & à la bassesse de mon Adversaire.
Cette différence entre les Histrions ou Bateleurs, et les représentateurs des Poèmes Dramatiques a été si peu connue des Modernes, que depuis plusieurs siècles les plus doctes Ecrivains s'y sont lourdement trompés ; car ils ont attribué tous les défauts des Mimes et Bateleurs scéniques, aux Comédiens et Tragédiens ; ils en ont confondu les noms, l'exercice, le mérite, les qualités, la réputation, et généralement toutes choses ; et je me suis cent fois étonné qu'une infinité de savants critiques se soient laissés fasciner les yeux, sans discerner combien ces différents Acteurs ont été distingués parmi les Anciens.
Saint Jerôme parlant des danseurs, dit que « c’est le démon qui danse dans leurs personnes, et qu’il se sert de ces lâches ministres pour seduire et tromper les hommes. » « His tripudiis diabolus saltat, his dæmonum ministris homines decipiuntur. » En effet tout ce que la volupté impudique est capable d’employer d’artifice, est attaché au bal, à la danse et à la comédie.
Ils trahissent leur maître, ils trompent, découvrent & rapportent pour venir à leur fin. […] Ils resistent, ils trompent, ils perdent le respect, & arrachent enfin un consentement forcé.
Jacob en envoya un présent à Joseph pour obtenir du bled, & long-temps auparavant les habits d’Esau étoient parfumés ; Isaac y fut trompé, & prit à l’odeur son fils Jacob pour son fils aîné, ut sensit vestimentorum fragrantiam . […] Ce Prince de la scène, ces merveilleux du logis ; victimes infortunées des maux innombrables aussi honteux que douloureux, fruits amers de leur corruption traînent des corps blasés des membres infects ; une salle de spectacle seroit pire qu’une salle d’hôpital, si la décoration des odeurs plus nécessaire que celles des peintures ne trompoit l’odorat, comme la perspective trompe les yeux, & ce n’est pas moins dans le physique que dans le moral que se vérifia la parole de Saint Paul.
Tel est l’Avare de Moliere, l’une de ses bonnes pieces ; l’avarice, l’usure, les amours d’un vieillard y sont tournées en ridicule, c’est un bien ; mais un fils qui insulte son père, une fille qui souffre dans sa maison son amant déguisé en valet, cet amant qui flatte les passions de son futur beau-pere pour le tromper, ce sont des rôles scandaleux, qui demeurent impunis, & qui réussissent ; ils font sur l’esprit des jeunes gens les plus funestes impressions ; ils doivent la faire proscrire ou corriger. […] Pour y réussir, on trompe le père de la fille, on lui fait signer un contrat de mariage, lui laissant croire que c’est un papier de procédure.
» Lui à qui le Sage déclare qu'il vaut mieux aller dans une maison de deuil que dans une partie de plaisir, parce que dans l'une l'homme y apprend sa fin et celle des choses de la terre, et dans l'autre il en perd l'idée : « J'ai regardé le ris comme une erreur, et j'ai dit à la joie, pourquoi me trompez-vous ? […] Il faut se rendre à ce palais magique, où les beaux vers, la danse, la musique, l'art de tromper les yeux par les couleurs, l'art plus heureux de séduire les cœurs, de cent plaisirs font un plaisir unique.
Ce rouge Dauphin ne desseche point la peau, & ne lui fait contracter aucune ride ; il l’adoucit au rontraire, & en conserve l’uni, la finesse, la douceur, la fraîcheur, la couleur, l’éclat, & lorsqu’il est adroitement appliqué, il imite, à s’y tromper, la plus vive incarnation. […] Il n’y a pas grand mal qu’on les trompé à leur tour, comme elles trompent le public.
Vous vous trompez qui que vous soïez : ce ne sont point des jeux, ce sont des crimes. […] Celui qui a ce sentiment se trompe fort. […] C’est par ce moïen que les ministres de cet esprit de tenebres trompent & séduisent les hommes. » Voilà ce qui a fait dire à Conradus Clingius, sçavant Theologien & celebre Predicateur de l’Ordre de saint Françoisa, que la danse n’est autre chose qu’un cercle dont le diable est le centre, & les démons la circonference ; & par consequent qu’il arrive rarement, ou plûtôt qu’il n’arrive jamais, qu’on danse sans peché : Chorea mundana est circulus, cujus centrum est diabolus, & circumferentia Angeli ejus circumstantes ; & ideo rarò aut numquam sine peccato fit.
Voilà, si je ne me trompe, ce qu’on peut dire de plus fort pour réfuter mon opinion : examinons si cette objection est aussi solide que spécieuse.
Je me trompe ou par cette précaution le Poëme acquéreroit une chaleur qu’il est impossible de lui donner, quand on n’en a qu’imparfaitement l’ensemble dans son imagination.
Les Gens de Lettres alors seroient jugés par leurs pairs ; les avis seroient motivés ; on ne craindroit plus d’être humilié par un froid dédain, ou trompé par un enthousiasme aveugle ; les chûtes deviendroient moins fréquentes, les succès plus honorables, & les Acteurs retourneroient à leur place ; ils ne seroient que les interprêtes du génie, dont ils sont devenus les arbitres. » Voilà comme s’exprimoit hautement ce vif partisan des Comédiens, à qui ces Messieurs & ces Dames avoient accordé ses entrées.
Si les Savans se sont trompés, c’est à leur erreur que nous devons les entre-Actes, ou les intervalles ménagés dans nos Poèmes.
Saint Jerôme, parlant des danseurs, dit que c’est le démon qui danse dans leurs personnes, & qu’il se sert de ces lâches ministres pour séduire & tromper les hommes : His tripudiis diabolus saltat, his dæmonum ministris homines decipiuntur. […] Mais on se trompe ; car encore que vous ôtiez en apparence à l’amour profane, ce grossier & cet illicite dont on auroit honte ; il en est inséparable sur le théâtre, de quelque maniere que vous vouliez qu’on le tourne & qu’on le dore : dans le fonds ce sera toujours, quoiqu’on en puisse dire, la concupiscence de la chair, que saint Jean défend de rendre aimable, puisqu’il défend de l’aimer. […] Celles qui sont invitées, ne s’appliquent qu’à se rendre agréables ; elles passent les journées entieres à se parer, à s’ajuster, à cacher autant qu’il se peut tous les défauts de leurs visages, elles employent toutes les afféteries, toutes les adresses & tous les artifices imaginables, afin d’arrêter & de tromper les yeux de ceux qui les regardent. […] Je me trompe, on en convient en général, mais on ne croit plus trouver de danger nulle part ; & jusques sur le sein de sa cruelle Philistine Samson repose, il dort, il croit dormir en sûreté. […] Je le souhaite ; je souhaite que tous les saints Peres se soient trompés, car tous les saints Peres assurent tout le contraire.
Rien n’est oublié pour tromper la vigilance des époux, des mères & des domestiques.
n’est pas encore exact, à moins que tous les Auteurs qui s’accordent à dire qu’Eschyle avoit employé le chœur comme personnage mêlé à l’action, ne se soient trompés ; tant il est vrai que les meilleurs Critiques font mille fautes sur la littérature des Anciens !
Rien n’est oublié pour tromper la vigilance des époux, des mères & des domestiques.
« Le comédien cultive, pour tout métier, le talent de tromper les hommes, de s’exercer à des habitudes qui, seraient-elles innocentes au théâtre, ne servent partout ailleurs qu’à mal faire.
Lorsqu’un homme sincere & crédule est trompé par un fripon ingénieux, on rit, non de sa candeur qui est respectable, mais du défaut de lumieres qui l’a fait tomber dans le piége. […] J’ai choisi celui de l’honnête homme trompé par le fripon, parce que c’est une des plus abondantes sources du ridicule que la Comedie employe, & que vous l’avez choisi vous-même. […] Un tel art, loin d’être regardé comme nuisible, ne doit pas être mis au rang des amusemens indifférens, puisque de votre aveu le cœur de l’homme est toujours droit, sur tout ce qui ne se rapporte pas personnellement à lui-même , & que par conséquent il n’est pas à redouter, que les spectateurs se trompent dans les jugemens qu’ils porteront d’une action qui ne se rapporte pas à eux personnellement, & qu’au contraire il y a tout lieu d’espérer, que s’il se présente quelqu’occasion pareille, ils se jugeront comme ils ont jugé les autres, & feront sur eux-mêmes l’application de leurs propres maximes.
Vous avez beau démontrer à des fous que leurs chefs les trompent, ils n’en sont pas moins ardents à les suivre. […] 18 Quand, outré d’avoir vu son ami trahir lâchement son sentiment et tromper l’homme qui le lui demande, il s’en voit encore plaisanter lui-même au plus fort de sa colère. […] Ce n’est point-là le Misanthrope : c’est un honnête homme du monde qui se fait peine de tromper celui qui le consulte. […] On en fait dans les Tragédies des tyrans, des usurpateurs ; dans les Comédies des jaloux, des usuriers, des pédants, des pères insupportables que tout le monde conspire à tromper. […] Lecteurs, je puis me tromper moi-même, mais non pas vous tromper volontairement ; craignez mes erreurs et non ma mauvaise foi.
Noircissant tes cheveux, la vieillesse est aimable, Chacun te croyoit Cigne & te voilà Corbeau ; Tu ne tromperas point la mort impitoyable, Qui te démasquera sur le bord du tombeau. […] Philippe, son pere, appercevant un des Juges de l’aréopage, qui se fardoit les cheveux & la barbe, le dépouilla de la charge en disant on ne peut se fier à celui qui trompe par les cheveux, il tromperoit dans les affaires.
16, rapporte ce trait : nous avons besoin de veiller à toute heure, pour avancés que nous soyons dans la perfection, d’autant que nos passions renaissent, même quelquefois après avoir vécu long-tems en réligion, & avoir fait un grand progrès dans la vertu : comme il arriva à Silvain, Réligieux de Saint Pacôme, dans le monde il étoit comédien de profession, & s’étant converti & fait Réligieux, il passa plusieurs années dans une mortification exemplaire, sans qu’on lui vit jamais faire aucun acte de son premier métier ; vingt ans après il pensa pouvoir faire quelque badinerie, sous prétexte de récréer ses Freres, croyant que ses passions fussent tellement amorties, & qu’elles n’eussent plus le pouvoir de le faire passer au-delà d’une simple récréation ; mas le pauvre homme fut bien trompé, car la passion de la joie se réveilla tellement, que des badineries, il passa aux dissolutions, de sorte qu’on résolut de le chasser ; ce que l’on eût fait, sans un des Réligieux qui demanda grace, & se rendit sa caution, promettant qu’il se corrigeroit, ce qu’il fit, & veçut depuis très-saintement : Naturam expelles furcâ tamen usque recurret. […] Un entr’autres y a fait aller toute sa paranté, & a payé pour plusieurs, il n’a pourtant pas osé y paroître lui-même ; il donne sa Société pour garant, il se trompe.
Elles n’oublient rien pour se conserver l’air de jeunesse, elles veulent tromper les hommes, & je ne sais si elles n’espèrent pas de tromper la mort, elles veulent toujours être l’objet de l’amour des hommes, afin d’avoir part à tous les plaisirs quand la vieillesse a répandu ses caractères sur leur tein, elles tirent le rideau dessus pour la rendre invisible ; vous les voyez ces femmes idolâtres du monde & de la volupté ensevelir leurs têtes sous un amas de poudre pour confondre la blancheur de leurs cheveux avec cette blancheur étrangère ; elles comblent avec du fard les enfoncemens de leur visage, elles ombragent les rides de leur front avec des boucles, des rubans, des dentelles ; ce qu’elles font de plus prudent, c’est d’embaumer leur corps avec des parfums pour arrêter l’odeur qui sort de leur cadavre : dans cet équipage elles se mêlent dans toutes les sociétés, dans toutes les parties, au bal, à la comédie, elles y tremblent de foiblesse, à peine distinguent-elles les couleurs, après avoir été les idoles du monde, elles le châtient des crimes qu’elles lui ont fait commettre ; ce sont des spectres qui le poursuivent, il les fuit, il en a horreur.
La comédie renaissant au quatorzième & quinzième siècle, à l’ombre de la dévotion & des mystères, se sentit bien-tôt de la nature du théatre, & ne tarda pas à allarmer la piété même grossière, qui trompée par les apparences, avoit cru devoir l’autoriser. […] Les uns, dit-il, éclairés de la sagesse de l’Évangile, réprouvent les spectacles ; les autres, trompés par la fausse lumiere d’une prudence charnelle, s’efforcent de les justifier.
Ep. 2. dit : Ici tout se termine au criminel amour, à l’art de séduire une fille, & de tromper un père de famille. […] L’éloge de Baron, Acteur célèbre dans les rôles de Prince, porte : Il conservoit son rang aux pieds de ses Maîtresses, & se donnoit les airs de tromper les Duchesses.
Toutes ces mascarades théatrales ne servent qu’à tromper & à venir à bout de ses desseins criminels ; on démontre que les masques sont en effet un moyen des plus efficaces pour surprendre & faire commettre le crime, & le soustraire au châtiment. […] Un parfait Comédien est un vrai Prothée, un menteur achevé ; il a un masque universel qu’il prend & quitte dans l’instant, & qui trompe par une parfaite ressemblance.
vous êtes Saül, s’écria la Pythonisse ; pourquoi me trompiez vous ? […] C’est tromper la foi publique, c’est démentir la nature, c’est une espèce de sacrilège abominable : Mendacium fidei, mendacium naturæ, sacrilegium abominabile.
Quelle profession en effet que celle d’apprendre à tromper les hommes, à séduire la jeunesse, à mépriser des parents, à vivre dans le crime, à flatter les passions, à honorer les vices, à accréditer les erreurs ! […] C’est là qu’on apprend à tromper un Père sagement économe ; à surprendre la vigilance d’une Mère attentive : à nouer des intrigues avec des domestiques, à en faire des confidents, pour venir à bout d’effectuer de mauvais désirs, et de se livrer aux plus honteuses passions.
Dans Sophocle, Electre n’avoit pas vu Oreste depuis vingt ans, si je ne me trompe ; il étoit très-jeune quand elle l’avoit envoyé dans la Phocide.
Horace s’est donc trompé dans sa Poètique(10), lorsqu’il dit, « Le Spectacle satyrique est l’origine de la Pastorale ».