Lorsque les Italiens et les Anglais apprennent que nous flétrissons de la plus grande infamie un art dans lequel nous excellons, qu’on excommunie des personnes gagées par le Roi, que l’on condamne comme impie un spectacle représenté dans des couvents, qu’on déshonore des pièces où Louis XIV et Louis XV ont été acteurs, qu’on déclare œuvre du démon des pièces reçues par des Magistrats et représentées devant une Reine vertueuse, quand des étrangers apprennent cette insolence et ce manque de respect à l’autorité royale, cette barbarie gothique, qu’on ose nommer sévérité chrétienne, peuvent-ils concevoir que nos lois autorisent un art déclaré infâme, ou qu’on ose couvrir d’infamie un art autorisé par les lois, récompensé par les Souverains, cultivé par les plus grands hommes, et qu’on trouve chez le même Libraire l’impertinent libelle du Père le Brun à côté des ouvrages immortels de Corneille, Racine, Molière ?
Conduite qu’ils ont à tenir pour être constamment vertueux, 512, 557 Millot (l’Abbé). […] Désintéressement de l’homme vertueux, b, 383. […] Nécessité d’être vertueux dans la jeunesse, b, 442 Pavillon (Nicolas), Evêque d’Aleth. […] Ils ne sont pas un besoin pour des Militaires vertueux, 601. […] Citation non suspecte, qui prouve que le suffrage des personnes vertueuses n’est pas celui que les Poëtes dramatiques cherchent à se concilier, b, 546.
Ces Pieces ambiguës sont des perils, ces Pieces ambiguës sont tres-souvent des morts pour les personnes vertueuses qui se trouvent les victimes du monstre, parce qu’elles n’ont pas apprehendé d’entrer dans la caverne où elles ne le voyoient pas, & d’où la crainte de scandaliser les hommes, d’offenser Dieu, & de se perdre, les auroit obligées de se retirer, si elles en avoient eu la défiance que Dieu leur ordonnoit d’en avoir. […] Les Magistrats ne doivent pas moins craindre les foudres de la Justice divine s’ils ne donnent des ordres pour reformer ces Pieces, que s’il n’ont pas soin d’empescher qu’on n’en jouë de criminelles ; & puisque ces Pieces ambiguës entretiennent les méchans dans le mal, & y attirent tres-souvent les plus vertueux mesmes, que les Magistrats n’esperent point de demeurer impunis, s’ils ne sont reformer des Pieces qui rendent le mal ou incurable, ou plus difficile à guerir, & qui ruinent le bien qui se seroit défendu des Pieces criminelles par la retraite, & par l’apprehension que les bons auroient eu de se diffamer, de corrompre le prochain, de déplaire à Dieu, & d’en estre punis. […] Puissances du monde, les personnes vertueuses ne sont pas seulement la gloire & l’exemple de l’Estat, elles en sont encore l’appuy ; leurs jeûnes, leurs veilles, leurs aumônes, leurs prieres, leurs Communions arrestent les fleaux que Dieu déchargeroit, & retiennent les foudres qu’il lanceroit sur les Estats ; il n’en est presque pas le maître ; ils tiennent son bras avec une violence qui luy est si agreable, qu’il ne peut se resoudre de luy rien refuser, ny de déplaïre à une contrainte dont il reçoit tant de satisfaction. […] L es Comedies innocentes sont si rares, que les Peres ont condamné les Comedies sans distinction, non pas qu’ils ne sçeussent qu’on pouvoit en trouver quelques-unes d’innocentes, mais parce qu’ils sçavoient que la plus grande partie estoit contraire à la Religion, & aux bonnes mœurs, & que le petit nombre de celles qui estoient innocentes ne pouvoit pas empescher qu’on ne peust dire que les Comedies ne valoient rien, & le dire avec autant de verité, que le Prophete Roy dit de son temps qu’il n’y avoit personne qui observast la Loy de Dieu, parce que les personnes vertueuses estoient si rares, que le S. […] Si tous les theatres estoient dressez avec les intentions, conduits par les soins, & avec les precautions de ces hommes également scavans & vertueux, il n’y auroit point de censure à craindre ; mais la difference de ces Comedies, & de la pluspart de celles qu’on represente dans le monde, est si evidente, qu’on ne peut les traiter de la mesme maniere, que par la plus injuste & la plus dangereuse des confusions.
Nous avons déjà marqué nos allarmes sur la tragédie atroce, qui semble avoir passé les mets, & a transporté du théatre anglois sur le nôtre Beverlei, l’honnête criminel, le Roué vertueux, &c. avoient annoncé ce goût. […] » Il y a un avantage au contraire quand les rôles vertueux sont ainsi distribués : un caractere noble s’ennoblit, un caractere humain s’adoucit, &c. Il faudroit donc, pour bien rencontrer cet ordre, donner les rôles mauvais aux enfans vertueux, qui résisteroient au danger, & les bons aux méchans, qu’ils corrigeroient : ils ont besoin de prendre une autre tournure, & repaîtrir leur caractere . […] Où trouver même des pieces dont tous les rôles soient vertueux ? […] De toutes ces réflexions, qui sont très justes & très utiles à ceux qui ne jouent que des rôles vertueux, comme un prédicateur qui ne parle que pour la religion & la vertu, pour un avocat chrétien qui ne soutient que des causes justes.
Rousseau, que les spectacles ne sont nécessaires que pour y rassembler « des gens intrigants, désœuvrés, sans religion, sans principes, dont l’imagination dépravée par l’oisiveté, la fainéantise et l’amour du plaisir n’engendre que des monstres et n’inspire que des forfaits ; or sied-il bien à des personnes vertueuses d’aller se confondre avec ces gens oisifs et corrompus » ? […] C’est là qu’un jeune homme, dont la vertu faisait le bonheur de sa famille, apprend à connaître le vice et à mépriser les conseils d’un père vertueux ; c’est là enfin que se préparent tant d’infidélités dans le mariage. […] Ils y voient des grands, des vieillards, des personnes élevées en dignité, ou réputées vertueuses y applaudir ; ils agissent en conséquence, lorsqu’ils jouissent de leur liberté ; et les voilà corrompus dans le cœur et dans l’esprit pour le reste de leur vie.
Ce seroit, en vérité, dans le Christianisme chose bien nouvelle, qu’on nous montrât les auteurs, les acteurs & les partisans du spectacle de venus les plus vertueux & les plus Chrétiens d’entre nous. […] Rome fut long-temps vertueuse ; ce fut tant qu’elle ignora les spectacles, selon la belle remarque de Saint Augustin : Theatricas artes virtus Romana non noverat. […] Est-ce un Chrétien, soit de l’un soit de l’autre sexe, qui vertueux sans affectation, pénétré de sa foi, fait son unique affaire de se sanctifier par le recueillement, par la réception fréquente des sacremens, par l’ordre qu’il établit dans sa famille ?
Elle fut inconnue à Rome dans les tems vertueux de la République, & même dans le régne des premiers Césars ; elle étoit si opposée aux mœurs romaines, & elle eût mal figuré avec la couronne de lauriers qu’ils se faisoient gloire de porter ; des cheveux poudres d’or n’ont pas l’air militaire, ni l’air Magistrat, de pareilles têtes au Sénat, à la tribune, à l’armée auroient fait pitié. […] Nous n’en parlons que pour faire voir combien dans tous les tems, les gens vicieux, étoient jaloux de leur parure, comme les femmes l’ont été de leurs cheveux, les gens vertueux au contraire l’ont toujours négligée, & contens d’une propreté honnete, dont la bienséance fait un devoir à tout le monde, ont toujours méprisé & condamné comme une foiblesse, un grand danger pour la vertu, & même un vrai péché, cette affectation de nourrir, de friser, de poudrer, de teindre, d’arranger, de parfumer ses cheveux, qui fait presque la moitié de la vie, de tous les libertins, de tout état, de tout sexe, jusques dans le Sanctuaire. […] C’est pour une femme un grand sacrifice, ses cheveux sont un de ses plus chers ornements ; la punition la plus sensible d’une femme adultere, usitée chez plusieurs nations, c’est de la raser ; & la premiere démarche d’une personne qui se consacre à Dieu, dans l’état réligieux, c’est de couper les cheveux : le même objet sert ainsi à punir le crime qu’il avoit engagé à commettre, & à pratiquer la vertu, à qui il faisoit courir bien des risques ; on peut à ces traits distinguer les personnes vertueuses de celles dont la vertu est équivoque, le soin, la parure des cheveux étant l’enseigne du vice & de la vertu.
Quel homme vertueux voudra, je ne dis pas se lier avec eux, mais approcher de leurs palais & voir jouer leurs pieces, fussent-elles dévotes ? […] On lit dans le Mercure de mars 1765 une jolie Épître à la Doligni, jeune débutante, vertueuse, dit-on, mais au moment de perdre son innocence, qu’on exhorte à la conserver. […] La piece fût-elle décente, les Acteurs vertueux, la seule assemblée qui compose le spectacle est un préjugé contre lui, & devroit le faire éviter.
Jamais par ces moyens & dans ce tourbillon de monde on ne trouvera les sentimens vertueux qu’on prête à l’héroïne, & on n’obtiendra le parfait retour des maris. […] C’est un roman qui ne peint pas la vérité, ne donne pas des leçons efficaces, & en donne de très-mauvaises, en faisant croire qu’on peut se passer de religion, & être vertueux sans elle au milieu des folies du monde. […] En voici de toute espèce, que l’on voit avec surprise, non seulement dans des domestiques & des amis petit-maîtres, on s’y attend, mais dans la bouche de Sophie, amie raisonnable, &, ce qui est tout-à-fait indécent, dans la bouche d’Argante père, qui au lieu de consoler, d’exhorter sa fille en père vertueux, se met du côté des railleurs, & conte ses prouesses galantes, dont il fait trophée ; ce qui révolte & scandalise par de mauvais exemples & de mauvais discours dans une personne si respectable, faite pour inspirer la vertu à ses enfans.
Les Actrices s’offrent sur le théatre, elles affichent leurs amans & s’en font gloire ; elles sont dispersées dans tous les quartiers, & vont où il leur plaît ; il leur est défendu de loger à l’hôtel, où il seroit de la décence qu’elles vécussent en communauté sous les yeux d’une femme vertueuse. […] Laissons les choses comme elles sont, abandonnons-leur les loges & le théatre ; aussi-bien les plus vertueuses y cesseroient bien-tôt de l’être, il n’y auroit plus rien à discerner. […] A les en croire, il n’y a pas dans le monde de femme fidèle, de fille vertueuse.
Enfin, ne pouvant se dispenser de faire entrer dans leurs Pieces des méchans & même des scélérats, & de les faire parler conformément à leur caractere, ils eurent soin de prémunir l’esprit des Spectateurs contre le poison du vice, en introduisant sur la scene le Chœur composé de Personnages vertueux & innocens, qui prenoient part à l’action ; s’intéressoient pour la vertu opprimée ; détestoient l’injustice, & corrigeoient, par des maximes pleines de sagesse & de gravité, ce qu’il y avoit de repréhensible dans la conduite & dans les discours de quelques-uns des Interlocuteurs. […] Si l’on prenoit soin d’inculquer de bonne heure, aux jeunes gens, qu’ils ne sont point faits comme de vils animaux, pour se procurer des sensations voluptueuses ; que leur raison est le flambeau qui doit les éclairer ; que cette raison a besoin d’être épurée ; qu’elle dicte des devoirs ; que la satisfaction qui provient des actions vertueuses, ou conformes à la raison, est le plus grand de tous les plaisirs & le seul permanent ; qu’un homme, qui néglige sa raison, est plus à plaindre que celui qui renonceroit volontairement à l’usage de ses yeux ; qu’il est aussi impossible d’être heureux, avec une ame souillée de vices, que de se bien porter avec un corps couvert d’ulceres ; que la Science est la source des biens, l’ignorance la source de tous les maux, &c.
Un écrivain Anglois, pour remédier à l’extrême licence des comiques de sa nation, est d’avis qu’on y établisse des censeurs éclairés & vertueux qui repassent sur les pièces tant anciennes que nouvelles, & n’y laissent rien de grossier, rien d’équivoque, rien qui puisse offenser la pudeur. […] Oui, si les spectacles sont criminels, s’ils sont les avant-coureurs de la chûte des petits états, c’est fait de ta patrie, ô vertueux Rousseau !
La pudeur, l’innocence, la piété et la justice, n’y paraissent que pour essuyer le mépris des spectateurs : aussi les personnes foncièrement vertueuses et de bonne foi les regardent-elles comme une école d’impureté, comme le foyer de toutes les passions et le centre de tous les scandales qui ravagent la société.
Rousseau saura par cette petite Dissertation sur le Théâtre, qu’on a vu tout ce qu’il voit, mais qu’on l’a vu différemment : il pourra y remarquer aussi comment les gens vertueux se communiquent leurs idées, et que la douceur et la politesse sont les fidèles compagnes de l’honnêteté des mœurs.
Un amour vertueux peut même quelquefois se mêler avec d’autres passions par elles-mêmes peu saillantes ; il en adoucit les caractères, il anime l’action, et pour tout dire en un mot, il attendrit le Spectateur.
Montausier étoit trop grand & trop vertueux pour aimer le théatre, il le méprisoit souverainement : un jour que Louis XIV lui demandoit son sentiment sur une pièce où ce Prince étoit fort loué. […] Ce Magistrat étoit dans la robe ce que Montausier étoit dans l’épée l’homme le plus vertueux & le plus respectable ; ce qui en avoit fait des ennemis déclarés de Molière & de ses farces, il ne méprisa pas moins ces traits lancés contre lui ; mais le Parlement eut moins de patience, prit en main la cause de son chef, & défendit de jouer le Tartuffe, Louis XIV, frappé des plaintes de tous les gens de bien, la défendit aussi pendant plusieurs, années, comme nous l’avons dit ailleurs. […] Cyr fut cent fois renouvellée ; le Roi, toute la Cour s’y rendit, les Demoiselles étoient exercées six mois à l’avance, elles s’étaloient les heures entières sur un théatre ; c’est une suite de la vie qu’elle avoit menée avec Scarron, avec Ninon Lenclos, avec Madame de Montespan, On a beau être vertueuse, on se monte sur le ton de ceux avec qui l’on vit ; j’avoue la foiblesse de mes lumières, je n’ai jamais pu, sur cet article, concilier Madame de Maintenon avec elle-même. […] Les loix & les mœurs Romaines furent très-chastes & très-éloignées de favoriser la débauche pendant les beaux jours de la République ; témoin Lucrece & Virginie, dont l’amour de la chasteté occasionna les plus grandes révolutions ; il n’y a point eu de nation plus décente & plus vertueuse jusqu’à ce que forçant toutes les barrières que lui opposoit la vertu, le théatre eut introduit la licence dans Rome où depuis elle ne connut aucune borne.
On se replie sur l’exemple des personnes vertueuses ; si elles le sont en effet, ce n’est pas en tout point : il faut louer leur probité, leurs aumônes, sans toutefois approuver en elles la fréquentation des Spectacles, Tertulien rapporte en cette occasion le trait du Roi Prophéte : lorsque vous appercevez un Voleur1 vous vous empressez de le suivre : imitez les bons exemples des gens de bien, & détournez les yeux de dessus leurs foiblesses ; car, selon l’Ecriture2, on ne doit point entrer dans la foule de ceux qui font le mal, ni marcher sur leurs traces. Considérant avec Saint Cyprien3, les pratiques autorisées par la coutume, dès-qu’elles s’écartent des bornes de la vérité, comme des vieilles erreurs, moins propres à exciter l’émulation qu’à causer de l’horreur à toute personne sincérement vertueuse.
Leur Cicéron louant un certain Comédien nommé Roscius, n'a-t-il pas dit qu'il était si habile dans son art, qu'il n'y avait que lui seul qui fut digne de monter sur le Théâtre; et que d'ailleurs il était si homme de bien, qu'il n'y avait que lui seul qui n'y dût point monter, marquant par-là, en termes bien exprès, que le Théâtre est si infâme, que plus un homme est vertueux, plus il doit s'en éloigner. […] C'est une chose honteuse à des personnes vertueuses d'adorer des Dieux qui regardent d'un œil favorable le culte déshonnête que leur rendent des infâmes.
J’ai toujours été la plus vertueuse Actrice de l’Opéra. […] Leur conviendrait-il d’être moins vertueux que ceux qu’ils corrigent, et n’aurait-on pas droit de leur dire avec Jésus-Christ, « Medice, cura te ipsum », et avec S.
La Princesse, vertueuse en y entrant, en sortit toute changée, et ne fut plus la même personne, etc. […] Je me sentis affligé de la voir malheureuse ; il me sembla même que j'étais un peu fâché qu'elle fût aussi vertueuse que son rôle la faisait paraître. Mais ce regret ne dura pas longtemps, j'appris bientôt que cette femme qui représentait sur le théâtre des personnages si vertueux, n'était dans le particulier rien moins qu'une Chimène.
« Heureux, si le Théâtre au bon sens ramené, N’avait point, de l’amour aux intrigues borné Cru devoir inspirer d’une aveugle tendresse Aux plus sages Héros la honte et la paresse : Peindre aux bords de l’Hydaspe Alexandre amoureux, Négligeant le combat pour parler de ses feux, Et du jaloux dessein de surprendre une ingrate Au fort de sa défaite occuper Mithridate : Faire d’un Musulman un Amant délicat Et du sage Titus un imbécile, un fat, Qui coiffé d’une femme et ne pouvant la suivre Pleure, se désespère, et veut cesser de vivre … … … … … … … … … … … … Mais on suppose en vain cet amour vertueux : Il ne sert qu’à nourrir de plus coupables feux L’amour dans ces Héros plus prompt à nous séduire, Que toute leur vertu n’est propre à nous instruire. » Au regard des Anglais, que la paix multiplie chaque jour dans le Royaume, ils seront bien aises d’avoir un excellent Auteur de leur nation traduit dans une langue qu’il leur est nécessaire de savoir pour vivre en un pays étranger avec quelque plaisir et quelque satisfaction.
Or, la sensation d’horreur & de désespoir qu’on dit en résulter, est-elle nécessaire pour éloigner du crime un cœur vertueux qui n’a pas besoin de ces horribles leçons ? […] L’événement justifia l’opposition que les Romains vertueux avoient eu pour les Spectacles. […] C’est de ces écrits dont les Auteurs eux-mêmes devroient détourner les ames vertueuses, comme Ovide le faisoit à l’égard de plusieurs de ses Poëmes qu’il déclaroit devoir être évités par les esprits les plus forts, & qu’il conseilloit de brûler35. […] On voit dans ces mêmes Capitulaires, que les gens vertueux évitoient de voir & d’entendre ces Farceurs, Bateleurs, &c. […] Il avoit été le Gouverneur de M. le Président Le Peletier de Saint Fargeau ; plante heureuse qui lui fut confiée, & sur laquelle il n’eut pas beaucoup d’efforts à faire pour développer toutes les qualités dont elle étoit douée, & qui en ont formé un Magistrat éclairé, vertueux & integre.
) que l’espoir ou la crainte des peines ou des plaisirs temporels, sont propres à former des hommes vertueux , l’ancien Venceslas récompensoit le vice & punissoit la vertu : le Moderne fera-til grace ce vice choquant ? […] Quel homme versé dans la connoissance de l’intérêt public , pour savoir ainsi fixer l’instant où chaque action cesse d’être vertueuse & devient vicieuse ! […] ) que l’on approche d’autant plus de la perfection & que l’on mérite d’autant plus le nom de vertueux, qu’il faut pour nous déterminer à une action malhonnête ou criminelle un motif & des objets plus capables d’enflammer nos désirs. […] L’espoir des plaisirs temporels sert à les rendre vertueux , apparemment parce qu’ils sont tout esprit. […] mais que tu serois vertueux , (p. 9.
de Montchal nous apprend que les Prélats vertueux éleverent leur voix contre cette licence ; tel fut entr’autres M. […] Une femme y étoit entrée vertueuse, elle en sort le crime & l’adultere dans le cœur. […] Le mérite de ce vertueux Académicien est caractérisé dans les Lettres de Noblesse que Louis XVI lui a accordées. […] Mais ces tiges augustes ranimées par ce secours extraordinaire, & unies à des épouses vertueuses, reprennent au moins quelquefois leur splendeur premiere. […] Ils n’exposoient sur le Théatre les malheurs & les crimes de l’humanité, que pour rendre les hommes plus sages & plus vertueux.
Le vertueux Riccoboni est tourné en ridicule sur la réforme qu’il a proposée des Comédiens & du théatre. […] 35. qu’on affecte de ne pas citer, quoiqu’un des plus redoutables adversaires, pour n’être pas écrasé sous le poids d’une si grande autorité : Le charme des sens est un mauvais introducteur des sentimens vertueux.
« Qu'une femme fût dans le désordre, qu’un homme fût dans la débauche, s’ils se disaient de vos amis, vous espériez toujours de leur salut : s’ils vous étaient peu favorables, quelquei vertueux qu’ils fussent, vous appréhendiez toujours le jugement de Dieu pour eux. […] [NDE] Nous corrigeons l’édition originale qui propose « quelques vertueux qu’ils fussent » à la suite de Racine.
Mais Molière a ruiné tout ce que ce sage Politique avait ordonné en faveur de la Comédie, et d’une fille vertueuse, il en a fait une hypocrite. […] et que peut-on espérer d’un homme qui ne peut être ramené à son devoir, ni par la considération d’une Princesse si vertueuse et si puissante, ni par les intérêts de l’honneur, ni par les motifs de son propre salut.
Mais plus les intentions du Gouvernement sont pures, & plus il désire d’avoir des Administrateurs vertueux.
Les gens du bon air, les demi-raisonneurs, les pitoyables Incrédules peuvent à leur aise se mocquer de ma démarche ; je serai trop dédommagé de leur petite censure & de leurs froides plaisanteries, si les gens sensés & vertueux, si les Ecrivains dignes de servir la Religion, si les ames honnêtes & pieuses que j’ai pu scandaliser, voient mon humble désaveu avec cette satisfaction pure que fait naître la vérité dès qu’elle se montre.
La religion de cette femme n’est point un titre dans l’idée du Poëte ; Pulcherie tient le même langage, malgré qu’on la peint vertueuse, & qu’elle est chrétienne, elle ne respire que la vengeance, s’obstine à la mort de Phocas1.
On n’a pas de peine à comprendre qu’il fasse par cet endroit une impression agréable sur des ames vertueuses ; mais pourquoi la peinture de la vertu a-t-elle des charmes pour le cœur même le plus déréglé ! […] Disons enfin, que si le spectacle d’une vertu éclatante plaît aux ames les moins vertueuses ; c’est parce qu’il agit sur elles par goût & par sentiment, plutôt que par voye de lumiere & de raison. […] C’est par-là que la Tragédie suspend l’impression du vice qui le domine ; elle en interrompt le cours par un mouvement contraire ; il s’anime à la vûe de la gloire qui environne les Héros ; il aime à se laisser enflamer d’une noble émulation ; il s’applaudit en secret de ce sentiment, dont le cœur le plus corrompu est toujours agréablement flatté, & peu s’en faut qu’il ne se croye vertueux, parce qu’il admire la Vertu. […] Un Poëte vertueux ne prend la route des sens que pour aller à la raison ; & c’est par-là selon Horace, qu’il atteint à la perfection de son Art.
J’ose dire que dans cette scène abominable Elmire est plus coupable que Tartuffe, puisque c’est elle qui le cherche, l’agace, lui offre tout, le conduit pas à pas avec un artifice dont le plus vertueux auroit peine à se défendre, aux sentimens, aux désirs, aux entreprises les plus criminelles. […] On auroit bien mieux réussi, en plaçant l’Imposteur dans une famille composée de gens sages & vertueux.
Mais, Madame, sa vertueuse parente l’y méne. […] Ainsi elle n’y peut pas suivre sa patente, & si cette Dame est veritablement vertueuse, je suis bien assuré qu’elle ne menera pas sa cousine, où l’innocence peut être blessée.
S’il ne peut nous rendre vertueux, il exige du moins que nous ne nous montrions qu’avec les apparences de la vertu.
Ces abus, ces maux peuvent être réparés par le zele des Grands ; qu’ils n’applaudissent plus qu’aux talents décents & vertueux, & la Scene sera purgée de tous ses vices.
Si vous permettez de faire tel personnage meilleur à la fin d’un Drame, ne puis-je pas dans le même cas rendre celui-ci méchant, de vertueux qu’il était ?
Pour ceux qui voudraient de bonne foi qu’on réformât à fond la comédie, pour à l’exemple des sages païens y ménager à la faveur du plaisir des exemples et des instructions sérieuses pour les Rois et pour les peuples : je ne puis blâmer leur intention ; mais qu’ils songent qu’après tout, le charme des sens est un mauvais introducteur des sentiments vertueux.
On a déjà dit pour défense, Qu’il y avait différence de Spectacles chez les Grecs et chez les Romains ; Que véritablement les représentations qui se faisaient en postures, en grimaces, et en danses, étaient lubriques et déshonnêtes, et n’étaient exécutées que par les Histrions et Pantomimes qui étaient les Bouffons ou bateleurs de ce temps-là, et qu’il n’y a point d’apparence de croire que ces sortes de gens fussent mis au rang des personnes d’honneur ; mais qu’il y avait des Comédiens sérieux qui ne représentaient que des Tragédies ou Tragi-comédies pleines de raisonnements Moraux et Politiques, et que c’était ceux-là qui n’étaient pas notés d’infamie comme les autres ; Qu’un Roscius Comédien qui a été tant estimé, pouvait être de leur bande ; Que c’était chez lui que les jeunes Orateurs de Rome allaient étudier le geste et la prononciation ; Qu’il était un des plus honnêtes hommes de la Ville, et que Cicéron ayant pris la peine de le défendre en une Cause, avait parlé de lui fort avantageusement ; Mais quoi que en effet ce Roscius ait été vertueux, s’ensuit-il que tous les autres Comédiens de son temps le fussent, et qu’ils lui ressemblassent en son mérite personnel ?
Je ne crois pas que cela puisse produire aucun mauvais effet, puisque cet Amant et cette Amante sont des personnes fort vertueuses, et que jamais ils ne se témoignent ainsi mutuellement leur passion dans toute sa force, qu’il n’y ait quelque puissant obstacle, qui s’oppose à l’accomplissement de leurs désirs ; ainsi je ne fais que les plaindre, et leur vertu même peut redresser le cœur de ceux qui s’abandonnent aveuglément à leur passion. […] Cette vertu a des effets bien différents, vous savez ce que des personnes fort sages ont dit il y a longtemps de la lecture des Romansh, dans lesquels aussi bien que dans les Tragédies, on dépeint des Héros fort alangumoureux et fort vertueux. […] Les autres passions ne sont point si engageantes ; la tendresse d’un Père envers ses enfants, ou d’un frère envers son frère, ne saurait produire que des sentiments vertueux : la haine, l’ambition, la vengeance, la jalousie sont des vices qu’on peut voir dans toute leur force et dans toute leur étendue, puisque naturellement on a de l’horreur pour le dérèglement de ces passions ; on s’y porte avec moins d’ardeur, et jamais on n’est pour les personnages qui soutiennent ces caractères ; on les blâme toujours, et il arrive aussi presque toujours qu’ils sont malheureux et qu’on se réjouit de leur malheur.
Leur profession ne cesseroit-elle pas en effet d’être honorable, si elle les obligeoit de mener une vie licencieuse, ou d’être moins vertueux ? […] Les gens vertueux ne cesserent d’en représenter les dangers ; & ils furent enfin écoutés. […] Recevez, je vous prie, mes remercîmens avec ceux du Public vertueux, &c. […] L’Avocat habile & vertueux ne connoît point les remords ; il n’embrasse que de bonnes causes. […] Elle n’en paroît pas moins odieuse aux personnes vertueuses de la Cour.
Mais quand ces hommes, si vertueux et invulnérables suivant eux, n’auraient réellement rien à craindre pour eux-mêmes, n’auraient-ils pas toujours à craindre le scandale qu’ils donnent aux autres ? […] Elle le verra, non plus dans les hommes à qui le monde permet tout, mais dans une fille qu’on montre comme modeste, comme pudique, comme vertueuse, en un mot, dans une héroïne ; et cet aveu dont on rougit dans le secret est jugé digne d’être révélé au public, et d’emporter comme une nouvelle merveille l’applaudissement de tout le théâtre ».
La plus noble faculté de l’ame, perdant ainsi l’usage & l’empire d’elle-même, s’accoutume à fléchir sous la loi des passions ; elle ne réprime plus nos pleurs & nos cris ; elle nous livre à notre attendrissement pour des objets qui nous sont étrangers ; & sous prétexte de commisération pour des malheurs chimériques, loin de s’indigner qu’un homme vertueux s’abandonne à des douleurs excessives, loin de nous empêcher de l’applaudir dans son avilissement, elle nous laisse applaudir nous-mêmes de la pitié qu’il nous inspire ; c’est un plaisir que nous croyons avoir gagné sans foiblesse, & que nous goûtons sans remords. […] Les Citoyens ne seront plus des hommes vertueux & justes, toujours soumis au devoir & à l’équité, mais des hommes sensibles & foibles qui feront le bien ou le mal indifféremment, selon qu’ils seront entraînés par leur penchant.
Car enfin quelque austerité que l’on ait dans les mœurs, on ne peut pas dire, qu’écouter precisément des Acteurs qui récitent un poème où l’on fait voir le crime puni et la vertu recompensée, où il ne s’agit que d’un amour vertueux et légitime, qui n’aboutit qu’à un lien sacré ; quelque sévère, disent-ils, que l’on soit, on ne peut pas dire que ce soit un péché en soi-même.
La description d’un pareil spectacle n’avait effectivement rien de magnifique aux yeux d’un Barbare vertueux, et c’est avec raison qu’il demandait si les Romains n’avaient ni femmes ni enfants.
» Le temps que l’on passe au spectacle ne serait-il pas mieux employé en le destinant à la compagnie de quelques amis vertueux, avec lesquels on multiplie, pour ainsi dire, son être, en se communicant réciproquement, dans les tendres épanchements de la confiance, tout ce qui peut intéresser de louables affections ?
Dieu lui-même veut bien en paroître touché, & en parlant de la vertueuse épouse dans le livre des Cantiques, il y dit avec une sorte d’admiration, que vos démarches sont belles avec votre chaussure, fille du Prince ! […] L’homme vertueux, comme un voyageur courageux, franchit tous les obstacles pour arriver au terme heureux de l’éternité.
La Grèce sur ses Théatres voulut former des citoyens vertueux dans le sein même du plaisir. […] M. de Chamfort est embarrassé de concilier l’Académie avec elle-même, & avec le gouvernement éclésiastique & civil, & de justifier l’indécence qui priva des honneurs littéraires un de nos plus célébres écrivains, un citoyen vertueux des droits de citoyen & à la vie & à la mort, car il est vrai que Moliere a vécu dans l’infamie légale, & Corneille en homme d’honneur, qu’il est mort sans aucune marque de religion, qu’il a été privé de la sépulture éclésiastique, & Corneille en bon Chrétien.
« Je comprends bien qu’il ne faut pas toujours regarder à la catastrophe pour juger de l’effet moral d’une Tragédie, et qu’à cet égard l’objet est rempli quand on s’intéresse pour l’infortuné vertueux plus que pour l’heureux coupable. »cu Or on plaint George Dandin et l’on méprise, on déteste Angélique, on voudrait qu’elle fût punie : donc Molière était de votre avis, sa pièce ne mérite aucun reproche, si vous voulez vous accorder avec vous-même. […] Ne donnez point un masque odieux à Philinte, pour en prêter un gracieux à Alceste, ils perdraient tous deux à la Métamorphose que vous leur prescrivez : laissez-nous voir les gens tels qu’ils sont, et que leur père les a faits ; et soyez sûr que la Vertu ne s’offensera pas plus de nous voir rire d’un fou qui défend la vérité comme un Dogue, que de nous voir estimer la prudence, la politesse, et la complaisance d’un homme qui se contente d’être honnête homme lui-même, en pardonnant aux autres leurs défauts, « Comme vices unis à l’humaine Nature. » dp Sachez Monsieur reconnaître dans Philinte un homme vertueux, un amant raisonnable, un ami tendre, sincère, et confiant : sachez qu’un sage à votre façon serait une espèce de fou tel que fut Diogène : sachez enfin que la Vertu, loin d’exclure les qualités sociales, leur a donné l’être elle-même : elle est donc bien éloignée de proscrire la politesse, la prudence, la complaisance et la discrétion, et de prendre des Ours pour ses Avocats.
Un homme vertueux content de l’être, néglige de se rendre agréable, il ne faut donc pas qu’il se montre.
Elle ne pense plus à sa vengeance, enfin son caractère est tout vertueux, comme ledit le Poëte lui-même.
Soit que fils vertueux d’une coupable mère, Servant d’un Dieu vengeur l’implacable colère, Tu sortes tout sanglant du tombeau de Ninusn ; Soit que fils criminel du stoïque Brutuso, Tu pleures dans les bras d’un Romain trop sévère : Mais quand voyant briller entre les mains d’un père, Sur le sein d’Hypermnestrep un poignard suspendu, Tu peins le désespoir d’un amant éperdu, Tous les cœurs partageant ta douleur et ta rage, Volent pour désarmer le tyran qui t’outrage.
On doit s’attendre qu’il persécutera vivement la main vertueuse qui le démasque, comme les Philosophes & les Courtisannes n’ont jamais pardonné à M. […] Mais quel est donc ce Palissot qui se donne pour protecteur de la Religion & de la vertu, contre des gens de lettres, qui passent pour religieux & vertueux ? […] Je reconnois que tous les membres de l’Aréopage, également éclairés & équitables, ont pour les gens de lettres les égards, le respect, la déférence que tout subalterne doit à ses bienfaiteurs & à ses guides ; que toujours fideles à leurs engagemens ils n’ont jamais séparé leurs intérêt de ceux de leurs maîtres, jamais affecté de prédilection offensante, jamais cherché à les désespérer par des tons despotiques & des délais éternels ; que les jugemens de la Troupe, tous inspirés par un goût infaillible, précédé d’un mûr examen, motivés par la plus saine raison, méritent en tout temps les acclamations du public ; que les gestes toujours d’accords avec la pensée, toujours variés comme la déclamation, toujours nouveaux comme les rôles, offrent tour à tour, dans le même acteur, la dignité d’un héros & la lâcheté d’un perfide, les traits mâles d’un sauvage & l’air efféminé d’un Sibarite ; que les femmes du Théatre, ausi chastes que modestes, aussi décentes que desintéressées, aussi vertueuses que sensibles, n’ont jamais séduit l’innocence, dupé la bonhommie, outragé l’hymen, dépouillé les familles, introduit le désordre dans la société ; que dans tous les siecles & chez tous les peuples, la profession de Comédien fut une profession noble & honnête ; qu’on a partout puni l’Ecrivain téméraire & séditieux qui a osé ébranler une opinion si respectable, & que le meilleur moyen d’établir les bonnes mœurs & la vertu, de détruire le faste, le luxe, la dissolution, c’est d’engager le Gouvernement à combler les Comédiens d’honneurs & de richesses. […] Aucun personnage vertueux, tel que celui de Lysimon dans ma piece, n’y contraste avec les mœurs dépravées qu’il y représente.
L’Evangile & le Théâtre opposés, leurs maximes contraires forment ici un contraste frappant, dont l’Auteur profite pour rappeller aux Chrétiens la sainteté de leur profession, & surtout l’obligation ou sont les pères & mères d’instruire leurs enfans dans la foi, de les former à la piété, de veiller sur leur innocence, & d’en écarter tout ce qui peut la séduire & la corrompre, soit en affoiblissant les attraits vertueux par le ridicule qu’on y attache ; soit en fortifiant les penchants vicieux par l’honneur qu’on en tire.
L’Evangile & le Théâtre opposés, leurs maximes contraires forment ici un contraste frappant, dont l’Auteur profite pour rappeller aux Chrétiens la sainteté de leur profession, & surtout l’obligation où sont les pères & mères d’instruire leurs enfans dans la foi, de les former à la piété, de veiller sur leur innocence, & d’en écarter tout ce qui peut la séduire & la corrompre, soit en affoiblissant les attraits vertueux par le ridicule qu’on y attache ; soit en fortifiant les penchants vicieux par l’honneur qu’on en tire.
A l’entendre parler de Don Juan, presque dans chaque page de son livre, il voudrait que l’on ne vît que des vertueux sur le théâtre.
On voit dans ses Capitulaires que les gens vertueux évitaient de voir ces bateleurs et jongleurs.
Partout la tentation de mal faire augmente avec la facilité ; et il faudrait que les comédiens fussent plus vertueux que les autres hommes, s’ils n’étaient pas plus corrompus.
Lorsque Phèdre est possédée d’une honteuse passion elle n’oublie rien pour la cacher : elle est aussi retenue et aussi chaste dans son langage que la plus vertueuse Matrone de la Grèce. […] Dans son Hippolyte il définit la débauche, une folie, une stupidité : être vertueux selon lui, aussi bien que selon Eschyle, c’est être raisonnable. […] Mais supposé, reprend Eschyle, que vous eussiez corrompu votre siècle ; et que d’une nation vertueuse et pleine de courage vous en eussiez fait une république de lâches et de voluptueux : que mériteriez-vous en ce cas ?
L’auteur de ce roman entreprend de les détromper ; mais c’est sur-tout au bien de la jeunesse qu’il croit travailler en écrivant ces mémoires. « Les peintures trop attrayantes d’un tendre amour, quelque vertueux qu’il soit représenté, intéresse, émeut, et la morale devient sans effet. […] On verroit des familles respectables rougir de l’opprobre que la contagion du théâtre a répandu dans leur sein ; des enfans élevés dans les leçons de la vertu, perdre tout sentiment du devoir pour fournir à l’entretien d’une comédienne, dissiper la fortune de leurs pères, usurper l’héritage de leurs frères, se jouer de la confiance publique et envahir la possession de l’Etat13, porter par une société toujours funeste avec les histrions, dans l’enceinte d’une maison vertueuse et paisible tous les effets du vice et de la plus incorrigible licence.
) Il prétend qu’il n’y a point d’homme de goût qui ne souhaite d’avoir été comédien (folie ;) Il n’ajoute pas hommes vertueux, ce ne sont pas les desirs de la vertu, en parlant de la subtilité que doit avoir un acteur pour bien rendre son rôle, ou naturel, ou factice ; il dit que c’est dans la vie privée, auprès des femmes, au milieu des enfants, dans le monde qu’un comédien doit former en lui le grand tâlent de la sensibilité. […] C’est une chimère ils ne s’acquireroient bien de l’un ni de l’autre, sur-tout de l’emploi serieux & utile, ou ils renonceroient aux autres emplois pour ne s’occuper que du théatre ; & voilà la profession dominante : ce livre est en forme de lettre, sous envelope, comme le premier, d’une intrigue de quelques actrices qui corrompent un homme vertueux.
Cette idée d’une Venus vertueuse, d’une espèce de sainte au goût des femmes, digne des autels, d’un amour platonique ; son fils Cupidon, lien sacré des cœurs vertueux sans que la grossiéreté des sens y eut aucune part.
Depuis que la corruption des mœurs eut perdu les peuples long-temps vertueux, on en répandit sur tout le corps, & il y en avoit particulier pour chaque partie, les pieds, les mains, les cheveux, le visage, le sein, &c. […] Licurgue chassa de Sparte, & Solon d’Athenes les marchands de parfums, pour ôter l’occasion d’amollir & de corrompre un peuple qu’ils vouloient rendre vertueux.
Quelque châtié que soit le théatre, les ouvrages les plus dangereux sont ceux où l’amour est représenté comme la vertu des belles ames, & les maximes des gens vertueux traitées de contes de vieille, où l’on établit que la raison ni la sagesse ne sont pas faites pour le bel âge, où les passions, au lieu d’être peintes d’une maniere à en donner de l’horreur, sont déguisées & revêtues de tous les charmes qui peuvent les insinuer dans un cœur sans expérience, & le faire tomber dans ces agréables rêveries, source ordinaire de la corruption. […] On y suppose en vain un amour vertueux ; Il ne sert qu’à nourrir les plus coupables feux : L’amour dans les héros plus prompt à nous séduire Que toute leur vertu n’est propre à nous instruire.
Ne fût-ce qu’un moment, fût-on dans le lieu saint, ne regardât-on qu’une femme vertueuse & modeste, la plus haute vertu craint & doit craindre le coup d’œil : Oculus meus deprædatus est animam meam. […] Toutes les femmes qui ne se montrent que pour les produire, seroient inconsolables de ne trouver que des yeux distraits ou modestes, des cœurs insensibles ou vertueux.
Que de vertueuses actions il a faites dans l’obscurité !
Et l'Histoire nous apprend qu'aux Jeux donnés par Messius Edile où Caton assistait, le peuple n'osa demander la danse des femmes nues en la présence de cet illustre et vertueux personnage, et que ne voulant pas s'opposer aux plaisirs publics, il se retira, les abandonnant ainsi à leur propre dérèglement.
Ceux qui invitent à leur table une chanteuse des Chœurs ou une figurante des ballets de l’Opéra, ou toute autre femme de Théâtre qui n’a pas des talents distingués, n’invitent que rarement les hommes à ce repas ; ils y seraient de trop, eu égard à l’objet de la partie, et aux amusements qui suivront le dessert : vous pouvez penser de ces Grands-là tout ce qu’il vous plaira ; mais ceux qui invitent aussi bien les Comédiens que les Comédiennes, dont la table est toujours environnée de Dames vertueuses et d’hommes respectables, n’ont assurément pas le même objet que les premiers lorsqu’ils admettent un Acteur ou une Actrice célèbres à ce Cercle. […] Je ne voudrais pas qu’on s’imaginât sur ce que je viens de dire que je méprise la Bourgeoisie en général : je sais combien cette classe renferme de bons citoyens, de gens vertueux et respectables. […] Vous ne voudrez pas croire non plus que ceux qui jouent un Euphémon, un Licandre, un Ariste, un Burrhus, un Alvarès deviennent les gens du monde les plus vertueux : il faut pourtant convenir avec vous-même ; et si l’emploi de chaque Comédien a tant d’influence sur ses mœurs, ceux qui jouent les rôles de Saints, de Héros, et d’honnêtes gens doivent devenir des Saints, des Héros, d’honnêtes gens, comme ceux qui jouent des rôles de suborneurs et de fripons sont selon vous, suborneurs et fripons.
Les personnes sur qui on ne prend point d’exemples, ne sont guéres coupables que de leurs propres péchez : mais ceux qui passent pour vertueux, sont souvent responsables de bien des fautes qui se commettent par des Ames foibles, qui n’ont pas la force de résister aux mauvais exemples.
La dévotion de cette grande et vertueuse princesse est trop solide pour s’attacher à des bagatelles qui ne sont de conséquence que pour les tartufes.
Bref, la morale et l’instruction que les Spectateurs peuvent tirer de cette Tragédie, se réduisent à cette maxime ; que dans les plus vertueux et les plus grands Héros, non seulement la passion d’amour est excusable, mais que d’une certaine façon elle est même nécessaire ; maxime insoutenable et très pernicieuse : ainsi je ne crois pas que l’Alexandre de M.
Le plus charmant objet de la Nature, le plus capable d’émouvoir un cœur sensible et de le porter au bien, est, je l’avoue, une femme aimable et vertueuse ; mais cet objet céleste où se cache-t-il ? […] Au lieu qu’il faudrait apprendre aux jeunes gens à se défier des illusions de l’amour, à fuir l’erreur d’un penchant aveugle qui croit toujours se fonder sur l’estime, et à craindre quelquefois de livrer un cœur vertueux à un objet indigne de ses soins. […] Il s’en faut peu qu’on ne nous fasse croire qu’un honnête homme est obligé d’être amoureux, et qu’une amante aimée ne saurait n’être pas vertueuse. […] Le devoir de se chérir réciproquement n’emporte-t-il pas celui de se plaire, et n’est-ce pas un soin digne de deux personnes vertueuses et chrétiennes qui cherchent à s’unir, de préparer ainsi leurs cœurs à l’amour mutuel que Dieu leur impose ? […] [NDA] Je n’entends point par là qu’on puisse être vertueux sans Religion ; j’eus longtemps cette opinion trompeuse, dont je suis trop désabusé.
Mais si, quand il faut de puissans remèdes, on nous donne des palliatifs ; si l’on veut ménager encore les prétentions arbitraires, & cet empire de l’habitude, cette autorité des anciens usages ; si l’on se contente de remplacer un Gouvernement absurde par un Gouvernement supportable ; si l’on ne fait que perfectionner le mal, pour me servir de l’expression du vertueux Turgot ; si, quand il faut établir une grande constitution politique, on s’occupe de quelques détails seulement ; si l’on oublie un instant que les loix doivent également protéger tous les Ordres de Citoyens, que toute acception de personne ou d’état, est une chose monstrueuse en législation, que tout ce qui ne gêne point l’ordre public doit être permis aux Citoyens, & que par une conséquence nécessaire, il doit être permis de publier ses pensées, en tout ce qui ne gêne point l’ordre public, de quelque manière, sous quelque forme que ce soit, par la voie de l’Impression, sur le Théâtre, dans la Chaire & dans les Tribunaux ; si l’on néglige cette portion importante de la liberté individuelle ; la France ne pourra point se vanter d’avoir une bonne constitution : les ames fières & généreuses, que le sort a fait naître en nos climats, envieront encore la liberté Angloise que nous devions surpasser : nous perdrons, peut-être pour des siècles, l’occasion si belle qui se présente à nous, de fonder une puissance publique ; & les Philosophes François, écrasés, comme autrefois, sous la foule des tyrans, seront contraints de sacrifier aux préjugés, ou de quitter le pays qui les a vu naître pour aller chercher une Patrie ; car il n’y a point de Patrie sans liberté. […] Ainsi l’art de penser & d’écrire, rendra chaque jour les hommes plus éclairés, & par conséquent plus vertueux, & par conséquent plus heureux.
L’auteur effrayé sans doute de combattre le sentiment unanime des Chrétiens de tous les siécles, y mettoit bien des précautions & des assaisonnemens ; il en excluoit sans pitié les Religieux & les Ecclésiastiques, même des loges grillées ; il ne souffroit que des piéces épurées, des acteurs vertueux, des actrices modestes, des spectateurs raisonnables ; en sorte que la pureté n’y courroit aucun risque, tel que pouvoit être le théatre de quelques Communautés Religieuses, mais tel que ne fut & ne sera jamais le théâtre public. […] Cet ouvrage bien reçu du Public, & digne de l’être, fit impression sur les esprits, & confirma les gens habiles & vertueux dans leurs sentimens.
Ce Valentin est pourtant traité en homme vertueux ; tout lui réussit à son gré, son bonheur surpasse même ses désirs. […] Berinthie prend sur elle de corrompre une personne vertueuse, et est contrainte de dire à ce propos : « En vérité je me suis chargée d’une belle commission !
Est-ce là une assemblée vertueuse, raisonnable, une belle école, qu’il soit utile de fréquenter ? […] Pourquoi ne pas célébrer ce trait vraiment grand, plus digne du pinceau d’un académicien vertueux, admiré de toute l’antiquité, que cette aventure de théatre qu’un honnête homme devroit ignorer & mépriser. […] Scipion, tout jeune, tout vainqueur, tout célibataire qu’il étoit, n’avoit point de concubine & fut toujours vertueux.
Les sujets vertueux sont très-rares, les Auteurs & les Acteurs qui sacrifient le plaisir à la vertu sont plus rares encore. […] Quand même on pourroit traiter des sujets de l’Ecriture, il est certain, de l’aveu de tout le monde, qu’on ne devroit y prendre que des traits décens & vertueux, Esther Athalie, les Macchabées, &c. […] Un Auteur vertueux pourroit faire de l’Ecriture un usage plus légitime, y montrer la condamnation même du spectacle.
Vous l’êtes justement, et c’est sans attentat Que vous avez changé la forme de l’Etat, etc. » Et son complice, qui ne médite pas moins la mort de son Prince, lui dit : « Oui, j’accorde qu’Auguste a droit de conserver L’empire où sa vertu l’a seule fait monter : Il a fait de l’Etat une juste conquête. » S’il est Monarque légitime et vertueux, quel droit, quel prétexte a-t-on pour l’assassiner ? […] Je vois que Rome encore a des cœurs vertueux. […] Remarquez même qu’afin qu’aucune vertu ne rachète ces noirceurs, on veut que le personnage qu’on donne pour vertueux (Zopire) trame avec le Sénat un assassinat aussi lâche contre Mahomet, qu’il ne fait que prévenir par celui de Zopire.
L’héroisme vertueux exprimé de la sorte peut-il charmer l’oreille, pénétrer les cœurs, & y exciter une émulation digne de lui ? […] Donnez-moi un Poëme Lyrique & notablement vertueux ; des Vers coulans, mais sentencieux ; une Musique mâle & agréable ; des danses aisées & severes, legeres & modestes, telles-ment liées au Poëme, qu’elles soient elles-mêmes une Poësie muette. […] N’en introduisez que de vertueux, ou de ceux qui veulent le devenir en se corrigeant, vous aurez bientôt dans la Scéne une Académie pure, & propre à épurer les mœurs. […] Défendez aux Acteurs de faire rougir un front vertueux ; tirez la Scéne, innocente par elle-même, de la cruelle nécessité d’être coupable des crimes d’autrui, & de la perte des cœurs.
Cette dame, d’ailleurs si vertueuse, eut le malheur d’affoiblir & de faire presque évanouir deux conversions les plus importantes en ce genre, d’un grand roi, l’amateur le plus déclaré, & du plus grand poëte dramatique, par l’air contagieux du théâtre qu’on leur fit respirer.
Une femme y étoit entrée vertueuse, elle en sort le crime & l’adultere dans le cœur.
La Comédie représente la diversité des mœurs vicieuses ou vertueuses, aussi a-t-elle été toujours recommandée ».
[NDE] Plutarque, Vertueux faicts des femmes, Des Milesiennes ; Aulu-Gelle, Nuits attiques, XV, 11 ; Érasme, Éloge de la folie ; Montaigne, Essais, II, 3, 354.
Le Mercure n’est pas moins exact à recueillir cette précieuse récolte ; le théatre forme aujourd’hui une bibliotheque nombreuse parmi les pieces détachées, il en est de singuliéres par le titre le Roué vertueux, l’honnête criminel, le précieux carnaval, &c. ; & sur chacune de ces productions, l’auteur fait des réflexions qui ne sont pas énergiques, des protégés si bas, des protecteurs si bêtes : sotte fatuité des uns, stultitiora patiuntur opes les très-basses & très-rampantes fourberies & friponneries des autres, cette idée de la piece n’est pas une chimere, ces personnages ne sont pas des êtres de raison. […] Le Roué vertueux, canevas satyrique qu’on laisse à remplir comme les impromptus italiens pour le faciliter, des argumens & des estampes mettent les acteurs sur la voie : la traduction du théatre Anglois, ne renferme que des comédies.
Quelquefois qu’on conserve dans le cœur, il n’est pas permis de contrefaire l’idolâtre, quelque pureté dont on se flatte ; il n’est pas permis de contrefaire l’impudique ; il est du dévoir de l’homme d’être & de paroître constamment vertueux, & inviolablement fidele à son Dieu ; il n’est point de moment, point d’intérêt qui puissent en dispenser, point de prétexte qui excuse, on doit plutôt cesser de vivre que de cesser de servir Dieu : Hæc testamenta præcordia penetrant, sicut serpentium morsus venestum diffundunt. […] Mais encore, ce n’est pas un poison lent, le vice de l’impureté lance ses traits avec violence, ils blessent subitement ; un coup d’œil suffit pour perdre l’ame la plus vertueuse, quand on regarde avec plaisir le séduisant objet : ce que l’Evangile exprime par ces mots, qui viderit ad concupiscendum, jam machatus est in corde sue .
Cest une calomnie, Anne d’Autriche étoit vertueuse, & même trop fiere, pour s’abaisser jusques-là. […] Un voluptueux qui sans faire tort à personne, passeroit ses jours dans la molesse, seroit donc un homme vertueux ?
La lutte des préjugés contre les principes a été longue et vive10 ; mais enfin, sans se rendre à la raison, ils ont cédé à la crainte, et les prêtres catholiques ont perdu avec tous les autres privileges, celui de ne pouvoir être exposés sur la scene tels qu’ils sont, vertueux ou fanatiques. […] Mercier, et ceux de M. de Falbaire, la Révolution de Portugal, l’Epouse vertueuse et d’autres pieces imprimées ou manuscrites, qui ne se jouent pas sur les autres théâtres.
Ces hommes frivoles les trompent, les abandonnent, les méprisent, les décrient ; ou si elles s’établissent, un faux goût donnera la préférence au flatteur sur le vrai, au petit maître sur l’homme sage, au libertin sur le vertueux.
Ce Sage caressé des Muses & des gens vertueux, crut autant s’immortaliser en fesant une espèce d’Opéra Bouffon qu’en écrivant ces ouvrages qui charmeront aussi bien la postérité que son siècle.