Les pensées extraordinaires des Poètes sur ces matieres, sont autant de coups de burin qui gravent ces passions dans nôtre cerveau, plus avant qu’elles n’y étaient, et sans que nous nous en apercevions.
O si tu étais sur cette haute sentinelleh, et que tu pusses pénétrer les secrets, et ouvrir les serrures fermées des cabinets et chambrettes, et parvenir jusqu’à la conscience, et à la plus secrète et occulte pensée des humains !
Ce n’est pas toujours d’une proposition détachée, sur tout quand elle est suspendue sur un sens vague, qu’il faut juger de la pensée d’un Auteur ; il faut le lire en plusieurs endroits pour en juger sainement. […] Il devrait bien plutôt les avertir du danger évident où ils sont que Dieu n’alloue jamais aucune des œuvres sur lesquelles ils se confient, et leur répéter ces paroles qui suivent immediatement les reproches ci-dessus : Lavez-vous, soyez purs, ôtez le mal de vos pensées de devant mes yeux, cessez de mal faire, et apprenez à bien faire. […] O Dieu, quel nouveau feu est-ce que je sens s’élever en moi-même, à la pensée de tant d’irreligions et de profanations que j’apprends qui s’y commettent ! […] Je ne crois pas que cette pensée lui soit venue dans l’esprit. […] Mais ce silence politique n’excuse pas de péché, et ne met pas l’homme à couvert des châtiments de l’autre monde, parce qu’il ne peut jamais secouer l’assujetissement où il est, à cette Loi divine, qui le pénètre tout entier, pour en régler toutes les actions intérieures et extérieures, toutes les paroles, toutes les pensées, et toutes les affections, sans laisser rien d’impuni de ce qui l’écarte de sa dernière fin.
» La première pensée qu’on a en ces lieux, qui sont l’Eglise du Diable, comme le même Père les appelle ; Ecclesia Diaboli, c’est de voir et d’être vu. « Nemo in spectaculo incundo prius cogitat, nisi videre et videri.
[NDE] « Madame de la F. » est très probablement Madame de La Fayette, qui ne cachait pas son opinion sur la pensée de Nicole.
Qui ne connoît la lettre qu’écrivit Henri IV, sur le champ de bataille, au moment qu’il alloit combattre, à Gabrielle d’Etrées sa maîtresse, que ses amours ont rendu célebre : si je meurs, ma derniere pensée sera à Dieu, l’avant derniere à vous ; c’est trop peu respecter la mémoire d’Henri IV, de lui prêter des sentimens si peu chrétiens, & si peu raisonnables, & de les rapporter quand ils seroient vrais. Dans une bataille, tout occupé de l’action & du danger, souvent emporté subitement par un coup de canon, a-t-on de derniere & d’avant derniere pensée ? […] Cette pensée conduit-elle à celle de Dieu qui la suit, & doit-elle la faire détester ? […] Cette pensée a un air de sublime, par la supériorité qu’elle attribue à l’homme de lettres, sur tout ce qu’il y a de plus grand.
Cette pensée est à la rigueur fausse. […] Cette pensée prise à la lettre seroit outrée. […] Comme Narcisse, il excite lui-même de mauvaises pensées, des émotions de la volupté, des sentimens, des désirs du péché. […] Vous auriez beau être enveloppé des voiles les plus épais, vous portez à cette vertu les plus rudes atteintes ; vous êtes l’écueuil, où vous vous brisez, & où vous préparez le naufrage de tant d’autres, par les pensées, les désirs, les mouvemens, dont vous faites sur vous le funeste essai.
S’il s’en rapportait plus à son goût et à ses lumières qu’au mauvais jugement de gens qui préfèrent les expressions éblouissantes et les jeux de mots aux pensées les plus solides et aux expressions consacrées à la vérité du sentiment. La pensée de tel vers de votre Sonnet, par exemple, est fausse par telle ou telle raison. […] Mais on y peut appliquer cette pensée : « Parturient montes, nascetur ridiculus Mus. » « La montagne en travail enfante une souris. » du A vous entendre, on dirait que Regnard a fait sa Pièce exprès pour y introduire et légitimer tous les crimes que vous dites.
Le onzième, intitulé Pensées sur les Spectacles, se trouve dans la même histoire.
J’avais vu ma Lettre entre les mains de quelques gens de sa connaissance, qui en avaient ri comme les autres, mais qui l’avaient regardée comme une bagatelle qui ne pouvait nuire à personne ; et Dieu sait si j’en avais eu la moindre pensée.
Mes seules pensées ne soutiendront pas le nouveau Théâtre. […] S’ils ne mettent dans la bouche de leurs personnages que des pensées basses & populaires, c’est parce qu’ils s’appliquent à peindre la Nature.
Ce mespris nous a laissé dans une grande confusion de pensées sur la difference des Theatres & des Amphitheatres comme j’ay déja dit. […] La pensée vint à quelques-uns, de faire un Theatre plus estendu, où les divertissemens se prissent avec un peu plus de galanterie & de commodité.
» Ces jeux-là seulement peuvent passer pour honnêtes, dans lesquels on ne voit pas paraître de femmes, où il n’y a rien qui puisse donner de mauvaises pensées, ni réveiller ou exciter un amour déréglé. D’où il conclut que les Comédies de ce siècle ne se jouant jamais sans femmes, sans expressions tendres, capables de donner de mauvaises pensées, et qui excitent souvent un amour déréglé ; il faut dire que les Comédies ne sont pas des jeux honnêtes, mais très criminels et très dangereux.
Cette seule Pensée suffit pour nous faire regarder comme très-frivole, non seulement la Poësie, mais tout ce qui n’est pour les Hommes qu’amusement. […] Cette seule Reflexion doit nous empêcher de croire qu’Aristote ait eû une pareille pensée, à moins qu’il ne se soit expliqué très-clairement. […] Je désirerois que le Traducteur se fût plus étendu pour nous faire comprendre la pensée d’Aristote. […] Cette pensée est si bizarre que je ne puis l’attribuer à Aristote, & les différentes explications de ses Commentateurs prouvent l’obscurité de ce Passage. […] Par ce raisonnement si peu conforme à la morale chrétienne & humaine, il prétend prouver la nécessité des Spectacles, dont la Nation Angloise a, selon lui, un besoin plus pressant que toute autre, parce qu’il faut retirer les Anglois de ces rêveries sombres où les plonge leur tristesse naturelle, causée par la température de leur climat : il faut les arracher à leur humeur ténébreuse & mélancolique, & les distraire de leurs pensées lugubres par la Représentation de nos Passions sur le Théâtre.
Cette foule de gens prêts à les déprimer, qu’ils voyent comme en perspective, leur en impose, les fait tenir sur leur garde, & leur fait peser avec soin les èxpressions & les pensées dont ils se servent.
Leurs Tragédies charmeront pourtant toujours les Spectateurs, par la seule beauté de la diction & des pensées ; par l’intrigue prise dans le fond du sujet, & par les diverses passions, qu’elles éxcitent.
Ce grand exemple autorise la pompe des Rois, et les oblige à ne se montrer jamais en public qu’ils n’imitent la magnificence de Dieu : Mais au milieu de cette cérémonie, ils doivent se ressouvenir que les habits sont les peines du péché, que dans l'état d’innocence, l’homme n’était revêtu que de la Justice originelle, que cette robe précieuse était à l’épreuve de toutes les saisons, et que comme il n’avait point encore offensé Dieu, il ne craignait point aussi la honte ni la douleur dans sa nudité, Cette pensée retiendra les Princes dans la modestie au milieu de leur Triomphe, et leur persuadera que les plus riches habits sont les reproches et les supplices de notre ancienne désobéissance.
Au reste un serment mis en œuvre n’est pas une médiocre ressource pour quantité de nos Dramatiques : c’est ce qui remplit le vide de la pensée, ce qui renfle une expression plate, ce qui donne de l’harmonie et de la rondeur à la période ; ce qui apprécie enfin l’éloquence et le mérite de ceux qui se signalent en l’art de jurer. […] Sang-farouche avait déjà donné une étrange preuve de sa Religion : « Lorsqu’un homme va chez une femme de qualité, il doit être saisi de frayeur, et tout tremblant : c’est ma pensée qu’il y a beaucoup de piété à cela. […] Le moindre changement au dehors suffira pour renverser notre manière actuelle de concevoir, et nous jeter dans un nouvel ordre de pensées et de désirs. […] Dryden avait tant de passion pour nous traduire Juvénal, ne devait-il pas du moins en colorer un peu la pensée ?
Laissez-les enfin à ces ennemis de la croix de Jésus-Christ, qui n’ont de pensée & d’affection que pour la terre & pour ses vains plaisirs, qui mettent leur gloire dans ce qui fait leur confusion & leur honte, & dont la fin sera la damnation éternelle. […] Mais tout ce qui est véritable & sincère, tout ce qui est honnête, tout ce qui est saint, tout ce qui est d’édification & de bonne odeur, que ce soit-là l’objet de vos pensées & la règle de vos mœurs ; & que la paix de Dieu, cette paix infiniment supérieure à tous les plaisirs du monde ; cette paix qui surpasse tout sentiment & toute pensée, garde vos esprits & vos cœurs en Jésus-Christ notre Seigneur, jusqu’à l’éternité bienheureuse que je vous souhaite au nom du Père, &c.
Ie fremis d’horreur en céte pensée ; mais l’idolatrie en donne bien d’autres suiets. […] Dans ces lieux où les débauches fleurissent auec excés, quelle posture peut tenir vn Chrestien à qui les seules pensées du vice sont des crimes ; quelle satisfaction a t’il de voir l’impureté dans son throsne ; prend-il plaisir à voir tant d’objets & de marques d’infamie, pour estre puis après moins honteux & plus libertin ; & ne considere t’il point que pour auoir souuent veu faire le mal, on apprend à le faire aussi par coustume.
Quel Poëte (fût-il Corneille), quel Orateur approche de l’élévation, du style, de la grandeur des pensées, de la sagesse des maximes, de la force des expressions, de la douceur, de l’insinuation, du naturel même & de la belle simplicité qui font le caractère du langage céleste de celui dont les levres font couler le lait & le miel ! […] Augustin ont la même pensée sur ce fameux passage de S.
Les premieres inventions ne sont jamais les plus belles ; & comme la reflexion des corps solides augmente la chaleur & la lumiere, les premieres pensées croissent & profitent infiniment des imaginations retâtées & reflechies. […] Telle pensée peut encore estre appuyée sur le nombre des Amphitheatres que* Bulanger a marqué ; car il compte celuy de Cesar pour le premier, celuy de Taurus pour le second, & celuy de Tite pour le troisiéme.
L’Abbé du Jarry, célébré Prédicateur, avait eu la même pensée. […] Vous venez de voir que, suivant la pensée de Riccoboni, les sentiments les plus corrects changent de nature en passant par la bouche des Acteurs : bien entendu qu’il y comprend aussi les Actrices, à qui il nous apprend13 qu’Innocent XI défendit de monter jamais sur aucun Théâtre ; c’est nous dire assez qu’à Rome on est sur cet article plus sévère qu’en France.
Le Poéte & le Comédien s’animerent d’une ardeur mutuelle ; l’un substitua la régularité du plan, une diction noble, l’éclat des pensées, aux licences extravagantes, aux sujets peu convenables, à un badinage grossier ; l’autre, au lieu de la bouffonnerie trivialle, des contorsions, des grimaces, donna à son jeu une action honnête, une déclamation aisée, des gestes expressifs.
C’est qu’ils se laissoient emporter à la fougue de leur imagination, c’est qu’un Auteur dramatique sacrifie tout & la raison & la probité & la foi, à la satisfaction d’éclore une prétendue belle pensée.
Le Possible bon ou plutôt suffisant, c’est ce qui regarde le changement de pensée, & les actions peu considérables des hommes : comme, par éxemple, que celui-ci se décide enfin à une chose qu’il ne voulait pas faire d’abord ; que tel personnage fasse dans un jour cent lieues, & que celui-là rencontre quelqu’un qu’il croyait bien loin.
On peut dire que l’Acteur met la dernière main au Drame ; il lui donne un vernis qui attire tous les yeux, mais qui malheureusement s’enlève trop-tôt : il en fait vivement sentir les passions, la force des pensées ; les sentimens qui l’animent passent dans l’ame des Spectateurs.
Mais, pour que la danse soit une occasion prochaine de péché mortel, il ne suffit pas qu’elle occasionne de mauvaises pensées ou autres tentations, même toutes les fois qu’on y va ; car on en éprouve partout, dans la solitude comme au milieu du monde.
Le démon n’exigerait pas de voir d’abord que vous vous livrassiez aux plus grands désordres, mais il ferait naître dans votre âme une multitude de pensées criminelles qui diminueraient ses forces, et qui lui feraient perdre la vie de la grâce.
L’esprit saisit bien une pensée, il s’en amuse, mais le profit en appartient au cœur, et la principale affaire est de le mettre de la partie.
Il ne s’agit plus de parler au petit nombre, mais au public ; ni de faire penser les autres, mais d’expliquer nettement ma pensée.
Presque tous les Interprettes conviennent que ce passage est la condamnation du fard & des ornemens que les femmes emploient pour parer leur sein & leur visage, parure que l’Esprit saint appelle des fornifications & des adulteres, parce qu’elles sont l’attrait le plus puissant qui y porte les hommes, & l’effet ordinaire du péché commis par les femmes, soit par les pensées dont elles sont remplies en le faisant, soit par le desir d’en exciter de pareilles dans ceux qui les voient. […] C’est faire naître du même endroit de bonnes & de mauvaises pensées, le péché & la vertu. […] Pensée que Juvenal a imitée & même embellie en parlant des débauches de Messaline : Et lassata vivis, sed non satiata recedit. […] Quand même il seroit vrai que Judith se le seroit permis, on n’en pourroit rien conclure pour des Chrétiens, dont la Loi condamne si sévérement tout ce qui tend à l’impureté, jusqu’aux regards & aux pensées.
Secondement celles qui frequentent des maisons ou des compagnies où elles tombent ordinairement dans le peché par pensées, par desirs ; ou par œuvres. […] En cinquiême lieu ceux qui frequentent les bals & les comedies, où ils commettent ordinairement plusieurs pechez d’impureté, comme mauvais desirs, pensées sales, regards lascifs, & attouchemens deshonnestes.
Il avoue en même tems les grands défauts de ce Poëte, un merveilleux contraire à la Nature, des pensées outrées, des expressions ampoullées Bombast, une versification tonante Thundering : mais il l’excuse en disant qu’il travailloit pour plaire à une Populace to please the Populace, & que juger Shakespear sur les Régles d’Aristote, ce seroit juger un homme sur les Loix d’un Pays où il n’a jamais été, & qu’il n’a pu connoître. […] Quand les Poëtes modernes, après s’être rendus inintelligibles par un pompeux galimatias, voulurent rabaisser leur ton, ils chercherent le merveilleux du style dans le brillant des pensées.
Elle en regarde le commencement, la suite et le dénouement, si les passions y sont traitées avec délicatesse, ou avec force et véhémence selon leur nature, ou selon leur degré, si les caractères et les mœurs des nations, des âges, des conditions, des sexes et des personnes y sont gardées: si l'action, le temps, et le lieu sont conformes aux règles que les Poètes se sont prescrites pour faire que l'esprit de l'Auditeur n'étant point partagé soit plus susceptible du plaisir, ou de l'instruction qu'on prétend lui donner: si la versification en est belle et pure, et si les vers aident, par leur tour, par leur justesse, par leur son, par leur gravité, par leur douceur, par leur richesse et leur magnificence, par leur agrément, par leur langueur ou par leur vitesse, à la fidélité de la peinture que les pensées qu'ils expriment, doivent faire dans les esprits, ou à l'émotion du cœur qui doit être excité par les sentiments qu'ils représentent. […] C'est une véritable peinture, les paroles y peignent les pensées ; et l'action, les actions et les choses; et si cette définition peut convenir en quelque sorte à l'Histoire et à la fable, le Poème Dramatique a cela de différent d'elles, qu'outre qu'elles ne lui servent que de matière; il nous fait voir les choses comme présentes, que l'Histoire et la fable nous racontent comme passées, et qu'il les représente d'une manière vive, animée, et pour ainsi dire, personnelle; au lieu que l'histoire et la fable ne nous les font voir que d'une manière morte et sans action.
L’importance de mieux régler l’emploi de ce fléau sur la scène, est d’autant plus grande, que non-seulement les méchants, mais aussi des auteurs très-estimables en ont fait l’usage le plus préjudiciable ; car, je le demande encore une fois aux plus grands partisans même de son utilité et de son indépendance accoutumée, l’auteur du Tartufe, qui, en considération du mal réel qu’il avait intention d’arrêter, du vice odieux qu’il voulait combattre, peut être justifié ou excusé d’avoir saisi l’arme du ridicule, tandis qu’un si grand nombre d’individus foulaient aux pieds avec scandale et paisiblement lès censures, la religion, toutes les vertus, et d’aller combattre d’abord ceux qui les recommandaient du moins à l’extérieur par des exemples et des discours ; et les combattre de manière encore à frapper également les bons et les méchants, à frapper ceux qui se cachaient de peur de scandaliser l’innocence et la vertu, comme ceux qui se cachaient seulement de peur d’être pris et pendus ; cet auteur, dis-je, est-il aussi excusable d’avoir employé cette arme cruelle dans ses critiques éclatantes et solennelles d’égarements, ou travers innocents qui accompagnent même les plus sublimes vertus, qui tiennent à la faiblesse humaine, lesquels n’ont pas plutôt disparu que d’autre les remplacent par une succession aussi nécessaire que celle des pensées frivoles qui assiègent continuellement les esprits forts et les faibles ? […] Les observations et les objections les plus fortes que l’on pourra me faire encore, et que je pressens en partie, relativement aux entraves que je crois nécessaire d’apporter aux leçons satiriques du théâtre, ne me feront pas départir de mon jugement sur les dangers de leur vague et l’arbitraire de leurs applications ; au contraire, ces observations m’excitent à aller plus loin pour les rendre nulles, à faire connaître le fond de ma pensée, sans mitiger, c’est-à-dire à conclure, en dernier résultat, de tout ce que j’ai exposé, que les attaques dramatiques individuelles, soumises à quelques conditions de rigueur, surtout à celles de la gravité du sujet et de la vérité de la censure, seraient souvent préférables aux généralités contre telle profession ou corporation, qui ont fait tant de mal sans éviter l’inconvénient des personnalités, et le rendant même plus grand. […] En présence d’institutions de toute espèce et pour tout besoin, organisées avec un soin scrupuleux, suivant toutes les règles de la prudence, dont les maîtres et sous-maîtres sont choisis par des supérieurs qui ont passé par tous les grades, subi eux-mêmes toutes les épreuves, les concours, les examens sévères sur les études et la capacité, sur les principes et la moralité, épreuves qu’ils font subir aux aspirants avant de leur accorder le droit d’instruire et former les autres, droit qui encore n’est que la faculté de transmettre avec une autorité respectable à leurs élèves ou disciples soumis, obligés de les écouter, des préceptes ou des leçons dès long-temps préparées et approuvées, déclarées classiques, après avoir été épurées au creuset de la sagesse et de l’expérience ; en présence de semblables institutions, dis-je, et de tels instituteurs, je vois une confusion de professeurs, auteurs, acteurs et actrices, ou maîtres et maîtresses, d’une institution différente, isolés, éparpillés, aventuriers, errants, sans unité, obscurs ou distingués, estimables ou méprisables, licencieux, effrénés, etc., qui ont la plus grande influence sur les mœurs qu’ils font métier de corriger, sans être obligés de prouver qu’ils en ont, et trop souvent sans en avoir ; qui sont sans mission régulière, sans titre ou sans caractère (observez qu’il ne s’agit pas ici d’écrivains qui publient simplement leurs pensées, mais d’instituteurs qui ont des écoles ouvertes dans toute l’Europe, qui appliquent leurs soins presque à tous les genres d’instruction, qui se chargent de l’éducation et de la réforme des deux sexes, des trois âges et de toutes les conditions) ; sans titre, dis-je, sans guide, sous le rapport essentiel, dont la dépendance immédiate est nulle dans l’intérêt des mœurs, qui n’ont que des chefs d’entreprise, ou spéculateurs, traitants, hommes ou femmes, pieux ou impies, croyants ou athées, édifiants ou scandaleux, à qui il suffit surtout d’avoir de l’argent et de l’industrie pour diriger une troupe de comédiens, ou maîtres de cette école, choisis comme eux ; qui, étrangers au grand corps constitué centre de l’instruction et de l’éducation publiques, et sans être astreints à aucune de ses plus importantes formes de garantie, jouissent également du droit d’instruire et de former ou réformer, en transmettant, non en maîtres, avec une autorité respectable, des préceptes ou leçons dès long-temps préparées et approuvées, mais en sujets tremblants, des leçons toutes nouvelles et hasardées pour la plupart ; non à des élèves soumis et obligés de les écouter, mais à des disciples-juges auxquels ils sont obligés, au contraire, de soumettre et préceptes et leçons, et leurs personnes mêmes, qui sont tous sifflés ou applaudis, rejetés ou admis, selon le goût et le bon plaisir des écoliers.
Ne faudra-t-il pas rendre un jour compte à Dieu de ses actions, de ses paroles, de ses pensées ? […] Qu’on se rende de bonne foi justice, va-t-on à la comédie la plus châtiée, sans avoir jetté quelques regards, pris quelque liberté, entendu quelques discours, formé quelque désir, senti quelqu’émotion, consenti à quelque mauvaise pensée, & par-conséquent commis quelque péché ? […] Les sentimens, les désirs, les pensées sont, pour ainsi dire, ses attitudes.
Corneille, par l’élévation de son génie, flatta l’orgueil, nourrit la fierté, mit dans les mains des hommes le poignard de la vengeance : heureux qu’il n’ait pas tourné du côté de l’amour l’enthousiasme de ses pensées & l’énergie de son style ! […] Il décide, 1.° que les Magistrats ne peuvent tolérer les Comédiens que comme en certaines villes on tolere les femmes publiques ; 2.° que quand on n’y va que par simple curiosité, & moralement certain qu’on ne risque point de consentir à quelque mauvaise pensée, on peut ne pécher que véniellement, sans quoi on pèche mortellement ; 3.° enfin qu’on peut donner de l’argent à l’entrée quand les Acteurs sont déterminés à jouer, parce qu’alors on n’en est pas la cause, mais qu’on ne pourroit pas sans péché mortel les appeler chez soi ou dans une ville, faire marché avec eux, en un mot les faire jouer : Indubitatum est eos qui antecedenter conveniunt cum Histrionibus peccare mortaliter. […] Il caractérise la plus belle ame, l’esprit le mieux fait, le cœur le plus pieux, le plus charitable, que la pensée de l’éternité jette dans la plus profonde tristesse, au milieu des plaisirs les plus vifs & les plus séduisans, dans un âge & dans une fortune où avec les attraits les plus piquans ils assiegent l’ame la plus sensible, & la trouvent inébranlable.
Comme ils n’avaient que des gestes à faire, on conçoit aisément, que toutes leurs actions étaient vives & animées : aussi Cassiodore les appelle des hommes, dont les mains discrètes avaient pour ainsi dire une langue au bout de chaque doigt ; des hommes qui parlaient, en gardant le silence, & qui savaient faire un récit entier sans ouvrir la bouche ; enfin des hommes que Polymnie avait formés, afin de montrer qu’il n’était pas besoin d’articuler des mots, pour faire entendre sa pensée.
[NDE] L’auteur fait référence aux Meditationes Historicae de Philipp Camerarius, dont le premier volume a paru en 1602, et qui a été traduit par Simon Goulart en 1603 : « Ces choses me sont venues en pensée oyant raconter à un personnage digne de foi les tyrannies du malin ès contrées plus avancées vers le Septentrion, où il tourmente les habitants par ses illusions et impostures, plus qu’il ne se fit onc.
En quoi certes il ne faut pas dire que les Anciens se moquaient de ceux qu'ils adoraient comme Dieux, en représentant des actions que l'on pouvait nommer criminelles, comme des meurtres, des adultères et des vengeances, ni qu'ils avaient dessein d'en faire des objets de Jeux et de risée, en leur imputant des crimes que l'on condamnait parmi les hommes ; Car toutes ces choses étaient mystérieuses, et bien que le petit peuple, ignorant et grossier fut peut-être incapable de porter sa croyance au-delà des fables que l'on en en contait ; il est certain que leurs Théologiens, leurs Philosophes, et tous les gens d'esprit en avaient bien d'autres pensées, et tout ce que nous lisons maintenant de la naissance de leurs Dieux et de toutes leurs actions avait une intelligence mystique, ou dans les secrètes opérations de la Nature, ou dans les belles Maximes de la Morale, ou dans les merveilles incompréhensibles de la Divinité.
Il ne lui a pas même permis d'avoir une pensée d'impureté : Comment donc peut-il prendre plaisir aux représentations de l'impureté, et comment s'exposera-t-il à perdre toute pudeur dans ces Spectacles, pour pécher après avec plus d'audace ?
Assurément il n’est jamais venu à la pensée du clergé de France de frapper les disciples de Loyola d’excommunication, ni de fulminer contre eux les canons et décrets des conciles d’Elvire et d’Arles, concernant les gens de théâtre.
De là naîtraient des pensées, des discours et des actes séditieux ; car le prêtre par sa conduite, semble dire publiquement, le prince et les lois ont tort d’honorer ce qui est digne d’anathème, mon autorité dans l’état est supérieure à celle du prince et à celle des lois, et j’ai la puissance de punir, d’anathématiser publiquement, et sans opposition, les actions sacrilèges du prince. » MM. les procureurs du roi doivent donc punir ce délit réel, qui est d’autant plus dangereux, qu’il laisse propager une usurpation de pouvoir, qui met le clergé au-dessus du prince et des lois, et qui lui donne les moyens terribles de punir audacieusement et publiquement, ce que le roi et les lois constituent et protègent.
LE COCU IMAGINAIRE, Cette petite Pièce est un des bons morceaux du Théâtre de Molière par l’art admirable avec lequel elle est tournée et dialoguée : il est vrai qu’elle a besoin d’être corrigée en bien des endroits, et particulièrement dans la deuxieme et la dix-septième Scène de la Pièce ; l’une contient le détail que la Servante fait sur le mariage, et on y trouve des pensées trop libres : dans l’autre ce sont des réfléxions que Scanarelle fait à propos du Cocuage.
Ce n’est pas un amour purement brutal et sensible, qui fait les grands désordres dans le monde ; c’est cet autre amour qui tient de l’esprit, qui se repaît de ses idées ; qui ne veut pour prix que des complaisances, qui se figure quelque choses de divin en son objet, et qui lui croit aussi rendre des respects fort innocents ; c’est cet amour qui met les soupirs au cœur, les larmes aux yeux, la pâleur sur le visage, qui occupe jour et nuit toutes les pensées, qui porte l’extravagance et à la fureur, et voilà l’amour que les plus chastes théâtres mettent dans les cœurs.
Il possédoit mon cœur, mes desirs, ma pensée, Je ne lui cachois point combien j’étois blessée.
Du cœur naissent les mauvaises pensées, les discours scandaleux, les écrits licentieux ; mais l’homme de bien tire de son trésor des choses anciennes & nouvelles : c’est l’Evangile.
Si cette malheureuse passion vue de loin dans deux personnes qui s’aiment, et dont on n’entend pas même les discours, est souvent capable de faire de vives impressions sur celui qui les observe ; qu’arrivera-t-il, lorsque, sur la scène, un jeune homme et une fille, avec toute la vivacité que l’art peut inspirer, font parade de leur tendresse dans un Dialogue, où les pensées étudiées du Poète sont toujours portées à l’excès ?
A la réserve donc de quelques pensées, et de quelques expressions, qui ont grand besoin d’examen et de correction, je crois que la Comédie du Misanthrope mérite d’être conservée, et qu’elle est très digne d’être admise au Théâtre.
Pensée forte.
I : « Des pensées, des désirs, de la joie ou de la complaisance et de la délectation morose en matière de luxure » ; art. […] Duguet, Pensées sur les spectacles, 1697 • Duguet, Jacques Joseph (1649-1733 ; oratorien) : Pensées sur les spectacles, par Mr l’Abbé Du Guet, 1697 Manuscrits • BnF, NAF 402, f. 108-. […] Pensées sur les Spectacles », p. 345-356, in Essais de morale contenant divers traités sur differens sujets, cinquième volume, Paris, Guillaume Desprez et Jean Desessartz, 1714, in-18. […] Pascal, [Pensée sur la comédie] • Pascal, Blaise (1623-1662) : [Pensée sur la comédie], nº 630 in Pensées, opuscules et lettres, éd. […] Remaniement probable d’une pensée de la marquise de Sablé .
Le théâtre fut-il par lui-même indifférent, il devient très mauvais par la multitude des péchés qui s’y commettent, qui en sont inséparables, dont il est l’occasion prochaine ; pensées, paroles, regards, actions, parties de plaisir, esprit de malignité, d’irréligion, les péchés en sont les préludes, le cortège, les suites ; c’est évidemment un scandale public, une source intarissable de fautes : quelle sanctification des fêtes ! […] Pour jeûner comme il faut, unissez-y la prière et l’aumône, le démon n’est vaincu que par ces armes ; offrez le sacrifice d’un cœur contrit, visitez les malades, rendez justice à vos frères, pratiquez les vertus, refusez-vous les plaisirs des sens ; faites jeûner vos yeux, détournez-les de la vanité ; faites jeûner vos oreilles, fermez-les aux mauvais discours ; faites jeûner votre langue, interdisez-lui les paroles inutiles ; faites jeûner votre cœur, n’y souffrez que de pieux mouvements ; faites jeûner votre esprit, rejetez toutes les mauvaises pensées.
Parce que le public ne veut pas voir toute l’étendue du discernement de l’Auteur ; parce qu’un Comédien développera ses pensées, ses sentimens mieux qu’un autre, le Poëte ne les à point eus ?
Le Poëte a donc à sacrifier une pensée heureuse & sublime à une foible & médiocre, & vingt vers à refondre.
Enfin, pour nous convaincre que les Poëmes déja au Théatre, ne guident point le Comédien dans le jugement qu’il veut porter de ceux qu’on y présente, il ne faut que refléchir sur l’extrême différence qui se remarque dans les manieres des Auteurs, soit pour les sentimens, soit pour les pensées, soit pour l’expression.
Il tourne ses regards vers quelque homme puissant dont il sonde les sentiments & les pensées.
Diderot s’est élevé fortement contre eux par ce qu’ils ressemblent à ces pensées communes qu’on voit par-tout.
S’il se montre dans-leurs discours, si l’on croit le connaître aux pensées relevées, aux réfléxions, aux maximes qui leur échappent ; l’illusion se dissipe ; & l’homme de goût siffle avec mépris ce que le Poète s’applaudissait souvent d’avoir écrit.
» Le même Saint Cyprien ajoute dans son livre des spectacles : « Que peut faire un vrai fidèle dans ces tristes occasions, lui à qui il n’est pas même permis de souffrir les mauvaises pensées ?
1 Dans le nombre si considérable de livres que chaque jour voit éclore, mon attention se porte ordinairement sur ceux dont le titre me promet le développement de quelque pensée à peu près neuve ou de quelque vérité encore contestée.
Cette pensée commune qu’on trouve en cent endroits, ne vaut pas la peine d’être volée : un air d’impiété en fait tout le sel. […] Une matiere qui a du sentiment, qui sent son existence, n’est pas loin de la pensée ; le sentiment du plaisir, de la douleur, le sentiment de son existence, de ce moi qui fait l’individu spirituel. […] Se plaire à des mauvaises pensées, à des mauvais regards, s’y exposer volontairement ; la morale la plus indulgente le traite de péché mortel. […] Les loix de la pudeur sont-elles moins faites pour eux, & n’ont-ils pas à rendre compte au souverain Juge de leurs désirs & de leurs pensées ?
Les chimeres ne peuvent jamais former une belle pensée. […] Des pensées raisonnables, quelquefois sublimes, semées ça & là, parurent un prodige : tout courut pour voir ce phénomene, & l’admira. […] Les guerres des Protestans & de la Ligue, les troubles de la Regence de Médicis avoient formé l’esprit de Corneille, naturellement dur, & préparé celui des françois, une situation aussi favorable à la poësie, dont la sublimité tant vantée ne consiste le plus souvent que dans l’audace & l’insolence des pensées & des expressions républicaines, si analogues à son génie & à son siecle.
La pensée et l’amour de Dieu, le désir de lui plaire, l’affection à votre salut, la crainte d’être tant soit peu désagréable aux yeux divins, ne pourront-ils pas vous servir d’un coton qui estoupe vos oreilles, pour n’entendre les infamies qui se disent en telles récréations ? […] Vous serez comme les trois enfants jetés dans la fournaise ardente en Babylone, un seul cheveu de leur tête n’en fut point brûlé, ni leur robes aussi ; ains cette fournaise leur servit de rafraîchissement, comme une douce rosée ; une mauvaise pensée représentée par les cheveux, le dérèglement en votre corps, qui est comme la robe de l’âme, ne se trouveront point en vous : ains (ce qui est plus admirable, et qu’est arrivé à quelques bonnes âmes que je ne puis nommer, parce qu’elles vivent encore) vous sortirez de ces lieux-là, avec la douce rosée de la dévotion, et de l’union avec Dieu, comme si vous sortiez d’une Prédication, ou d’une Méditation ; ceci semblera étrange à ceux qui ne connaissent pas, comme Dieu traite les âmes qui lui sont fidèles en tout et partout ; ce que j'écris est néanmoins véritable. […] de façon que tout en riant, et vous recréant, vous preniez dextrement occasion de dire quelque chose qui soit pour édifier les autres, et leur mettre en l’âme quelque bonne et sainte pensée : C’est l’avis de saint Paul, écrivant aux Ephésiens, « Qu’aucune mauvaise parole ne sorte de votre bouche, mais celle qui édifie, qui rend plus agréables à Dieu ceux qui l’écoutent ; et ne contristes pas le saint Esprit » :72 Et en la même Epître il défend « les paroles qui ressentent, ou l’impureté, ou la bouffonnerie »,73 lesquelles contristent le saint Esprit qui est là présent, ou bien les personnes vertueuses, dans lesquelles est le saint Esprit.
Tâchons de faire entendre ma pensée, sans offenser personne. […] Lorsque le célèbre Baron fesait à son gré la fortune de pensées impertinentes, ridiculement exprimées, était ce à la Pièce qu’il devait ses succès ?
Car si telle n’eût été sa pensée, commew aurait-il imaginé une si grande fourbex ? […] Pour moi, je les connais assez, ce me semble, et en suite de cette connaissance je jugerais que jamais telle convoitise ne leur est venue en pensée, non plus que jamais ils n’ont retiré un seul liard de celui qui représentait Jésus-Christ, que néanmoins ce calomniateur dit avoir plus payé que tous les autres.
On sent combien une telle autorité doit être respectée ; mais si ce divertissement étoit pur & innocent, il ne mériteroit plus une telle censure ; car si le principe de la vie sérieuse que commande la Religion, étoit porté trop loin, contre la pensée de Bossuet lui-même, il excluroit les plaisirs les plus innocents.
Je prie d’observer aussi que je ne me suis permis cette discussion tardive ou réchauffée sur cet auteur respectable, dont on ne peut lire les principaux ouvrages sans admiration, qu’enhardi par la pensée que malgré tout ce qui en a été dit, on pourra encore le discuter sous quelque rapport, même dans des siècles, comme nous le faisons tous les jours des anciens auteurs grecs et latins les plus fameux ; et me sentant d’ailleurs soutenu, quant au fond, par de grandes autorités, par celles de Labruyère, de Racine, du président de Lamoignon, de Bourdaloue, des savants de Port-Royal et d’autres, qui en ont parlé dans le même sens, qui ont combattu la comédie en question à sa naissance, et l’ont jugée dangereuse unanimement, par des présomptions, par des calculs de probabilité seulement, et sur qui j’ai donc l’avantage du temps, de plus longues observations, des faits, ou de raisons positives, en un mot, de l’expérience.
Les Grands et les riches en donnaient aux pompes funèbres de leurs parents, dans cette pensée, que le sang de leurs Esclaves gladiateurs qu’ils y faisaient répandre, et la vie que ces malheureux y perdaient, étaient autant de sacrifices agréables aux Mânes des défunts.
Il ne faut donc qu’un peu de vrai Christianisme ; il ne faut qu’un peu de zèle pour son salut et pour celui des autres, afin de bannir ces ennemis de la vertu et de l’honnêteté : que Messieurs les Magistrats se donnent la peine d’entendre le Saint Esprit, qui leur parle et qui leur crie, « apprenez Juges, ouvrez, les oreilles, vous qui tenez sous votre autorité, les multitudes, et qui vous plaisez dans les pouvoirs que vous avez sur les Troupes, apprenez deux choses, la premières que toute votre puissance vient de Dieu, la seconde que ce même Dieu vous demandera compte de toutes vos œuvres, et fondera jusqu’à la moindre de vos pensées, par la raison que vous ayant établi les Ministres de son Royaume, vous n’avez point observé la Loi de la Justice ni marché selon sa volonté : ce qui fait qu’en peu de temps il vous apparaîtra d’une manière terrible, et vous fera demeurer d’accord que le jugement contre ceux qui président aux autres, sera effroyable » : Que répondra donc à Dieu le Juge qui aura contribué à la perte des âmes, par la permission injuste qu’il aura donnée à ces persécuteurs de la vertu ?
Cependant malgré le soin que j’ai pris d’approcher autant que je l’ai pû, de la justesse de ses pensées, de la profondeur de son sens, de la noblesse de ses images, & du brillant de ses expressions, les Connoisseurs verront assez qu’il est extrêmement difficile de rendre dans le tour François, ce qui a été si heureusement pensé en Latin. […] Vous avez, sans doute, quelque impatience, Messieurs, de sçavoir ma pensée sur cette sorte de Théatre ; & peut-être se trouveroit-il quelqu’un dont la captieuse curiosité m’en seroit malignement la question. […] Véritablement la Tragédie Françoise n’a rien qu’elle puisse envier à la Tragédie Athenienne, soit pour la sublimité des pensées, soit pour l’élegance de la diction. […] Corneille dans le grand avoit étonné les esprits par la majesté pompeuse de ses pensées ; Racine dans le tendre fascina les cœurs par le charme enchanteur des sentimens. […] Pourquoi donc tant d’indulgence sur des pensées libertines, & sur un jeu indécent ?
On y voit quelques sentences utiles, quelques descriptions assez naturelles, mais le fond est très-peu de chose ; nul trait de génie, nulle élevation, une infinité de choses pillées de Boileau, de Moliere, de Voltaire, de Montesquieu, plutôt par reminiscence que par un plagiat affecté, une monotomie de pensées, de termes, de rimes, qui marque la plus grande stérilité. […] Cette pensée n’est pas élégante, l’auteur ne s’en pique pas ; mais est-elle décente ?
Je dis ordinairement, car il y a quantité de vers défectueux & de rimes fausses, des enjambemens, des répétitions innombrables de pensées, de tours, de rimes, d’intrigues, de dénouemens ; il se copie sans cesse. […] Il est pour ainsi dire à l’unisson des mots & des pensées.
quelle pensée de religion inspirent ces paroles : Honni soit qui mal y pense ? […] Ces allusions ne sont aucun mal, & inspirent de bonnes pensées.
Il avoue dans ses préfaces avoir pris la plûpart de ses pieces, & les plus belles, des Auteurs Espagnols, dont il a traduit ou francisé les pensées, les plans & le style. […] On l’a tellement pris, que dans les fêtes données à Vienne pour la fête du mariage du Roi des Romains, l’Impératrice a fait représenter plusieurs comédies par les Archiduchesses ses filles ; ce que ni Charles V, ni Charles VI, ni les Ferdinands, ni les Maximiliens n’avoient jamais eu la pensée de faire.
La Religion Chrétienne qui règle jusqu’aux désirs et aux pensées, ne condamne-t-elle pas ces vastes projets d’ambition, ces grands desseins de vengeance et toutes ces aventures d’amour qui forment les plus belles idées des Poètes ? […] Mais vous croyez avoir grande raison, et vous apportez l’exemple de saint Jérôme comme si ceux de Port-Royal avaient dessein de s’en servir pour justifier une prétendue contradiction dont vous accusez leur conduite « vous nous direz, leur dites-vous,o que saint Jérôme a loué Rufin comme le plus savant homme de son siècle, tant qu’il a été son ami, et qu’il traita le même Rufin comme le plus ignorant homme de son siècle depuis qu’il se fut jeté dans le parti d’Origène. » Vous devinez mal, ils ne vous diront point cela, ce n’est point leur pensée, c’est la vôtre, mais quand ils auraient voulu dire une si mauvaise raison et d’une manière si injurieuse à saint Jérôme, Vous deviez attendre qu’ils l’eussent dit, et alors vous auriez eu raison de vous railler d’eux, au lieu qu’ils ont sujet de se moquer de vous.
Cette pensée, tournée et retournée, est répétée en mille endroits dans ses tragédies : a-t-elle pu être admirée ? […] Cela fit un si mauvais effet, que le Cardinal Richelieu ne le put jamais approuver. 2.° Qu’il prenne garde de n’y pas mêler des galanteries et d’y faire paraître des passions qui donnent de mauvaises idées aux spectateurs, et les portent à des pensées vicieuses.
C'est une pensée ridicule de La Mothe Le Vayer (Lettr. […] L'Auteur de la nouvelle Héloïse conclut son roman singulier par cette pensée très vraie pour quiconque mérite d'en sentir la vérité. « Je ne saurais concevoir quel plaisir on peut prendre à imaginer, à composer, à jouer le personnage d'un scélérat, à se mettre à sa place, et à lui prêter l'éclat le plus imposant.
Quelle place, quel temps reste-t-il aux pensées, aux discours pieux, quand tout est livré à la bagatelle ? […] Le bel antidote qu'une bonne pensée noyée au milieu de cent mauvaises !
Ce mêlange détruit absolument le recuillement, la modestie, la dévotion, occasionne des conversations & des libertés criminelles, presente aux yeux l’objet de mauvaises pensées & de mauvais désirs, fait de nos temples des salles de spectacle. […] Qui peut compter les pensées, désirs, paroles, actions, en un mot, les péchés qu’elle fait faire, non seulement dans l’instant que le trait part, maïs long-temps après par le souvenir ? […] Ce n’est pas mon intention, direz-vous ; pourquoi donc en donner les marques, & démentir vos pensées par vos œuvres ?
Comment ferait-elle valoir une pensée qui emprunterait toute sa force de la manière dont elle est èxprimée ? […] Il faut au Musicien des paroles douces & tendres, qui cachent sous une simplicité apparente des pensées grandes & majestueuses. […] Les Poètes lyriques de nos jours, en voulant faire dire à leurs personnages une pensée galante ou spirituelle, leur mettent souvent dans la bouche des complimens entortillés, d’une fadeur èxtrême, ou des jeux de mots ridicules : est-ce donc là l’image de la nature ?
Il faut voir maintenant si les ouvrages de nos Auteurs comiques se ressentent de ce faux raisonnement, & si je ne leur suppose pas ici une pensée qu’ils n’ont jamais eue.
Je vous en dirai ma pensée tout simplement, Agathon : C’est que jamais aucune autre Religion ne fut si favorable aux femmes que la Chrétienne ; et qu’elle l’est encore beaucoup plus aux femmes, qu’aux hommes.
Pour fortifier (P. 17.) ma pensée, entrelaçons la branche au tronc, & donnons au tout cette unité si favorable à l’établissement de la vérité & à la persuasion, opposons les notions, saisons contraster les principes, attaquons, ébranlons, renversons un tas d’opinions ridicules qu’on ose établir ouvertement . […] Moyens aujourd’hui si multipliés qu’il est surprenant, suivant la pensée d’un Auteur Comédien, (Louis Riccoboni, dans son Livre de la Réformation du Théâtre, pag. 34. qui écrivoit en 1740, & dont le témoignage ne peut manquer d’être ici d’une grande autorité sur tous les esprits). […] Pourrois-je donc paroître repréhensible pour n’avoir fait que mettre par écrit en langue vulgaire une pensée que les circonstances présentes nous font naître si naturellement, moi qui aurois pû écrire en langue sçavante, bien sûr que mes Traducteurs n’auroient jamais été poursuivis. […] Je n’ai plus qu’un mot à vous dire, Nations entieres : Quand vous lisez en tête du cinquiéme volume de l’Encyclopédie dans l’éloge de M. de Montesquieu qu’il renonça à une premiere Place de Magistrature, parce qu’il sentoit qu’il y avoit des objets plus dignes d’occuper ses talens , ne croyez pas que le Panégyriste ait voulu parler ici à la louange de son héros : il n’est personne d’entre nous qui ne regarde cette pensée du Démocrite François comme une tache pour sa mémoire ; sans doute il a voulu qu’elle demeurât toujours cachée ; peut-être même ne l’a-t-il jamais communiquée ; mais il n’en a pas moins fallu la mettre au grand jour, & pour la mettre à la portée du plus grand nombre, qui n’est pas celui des Souscripteurs de l’Encyclopédie, notre Mercure de Nov. 1755 lui a donné place parmi ses galanteries.
Dans une prison, dit-il, il pourra faire des réflexions salutaires ; au théâtre, il ne peut lui venir que des pensées damnables &c.
Dans une prison, dit-il, il pourra faire des réflexions salutaires ; au théâtre, il ne peut lui venir que des pensées damnables &c.
Lorsqu’il s’agit de faire parler un Artisan, un Laboureur, &c. il ne faut ni paroles élégantes, ni pensées sublimes.
L’instant arrive : la toile se lève : il faut paraître : je m’avance sur la Scène : un profond silence règne jusque dans le Parterre : mes regards concentrés n’osent quitter le tapis : je chancelais ; ma seule timidité sans doute me fit des Partisans : enfin j’ose lever la vue… Ma sœur,… vis-à-vis de moi… dans l’Orquestre, enseveli dans ses pensées… mon époux… je le découvre cet Amant vers lequel toute mon âme cherchait à voler… Un mouvement involontaire m’échappe, & je lève vers le ciel des regards supplians.