Il faut que ce Peuple soit bien amoureux de Spectacle. […] Ne ferait-on pas mieux d’arranger son sujet de façon que l’intrigue fut supposée se passer à l’heure ordinaire du Spectacle ? […] L’ouverture de la Scène est à six heures du soir ; & c’est alors le tems que le Spectacle commence. […] Les nouveaux Poèmes du Spectacle moderne contredisent autant la règle dont je parle que les Anciens. […] Les Drames du nouveau Spectacle ne suivent guères cette maxime établie de tout tems.
Réponse pour M. le Chevalier de***, A la lettre de M. des P. de B. sur les spectacles *. […] Ne dites point avec saint Augustin, qui amat periculum, in illo peribit : car ce danger ne peut rien sur un homme sensé, qui, débarrassé du joug des passions, porte au spectacle un esprit vertueux ; souvenez-vous enfin, Qu’à vaincre sans péril, on triomphe sans gloire. […] Non, Monsieur, ceux d’entr’eux qui liront votre brochure vous plaindront de négliger la partie la plus brillante de notre littérature, & porteront au spectacle l’arrêt de votre condamnation : pour moi je fais plus, j’entreprends aujourd’hui de le justifier à vos yeux. […] Le spectacle nous représente le tableau de la vie civile sous des noms empruntés. […] Vous serez peut-être surpris de ce que je n’ai pas pris la défense de l’opéra dans le cours de cette lettre ; ce n’est pas parce que je crois ce spectacle plus dangereux que les autres, mais c’est que les mêmes raisons que j’ai alléguées ci-dessus, doivent servir à l’excuser.
L’objection est forte et délicate, et contient presque tout ce qu’on peut dire contre les Comédies et contre les autres Spectacles. […] qui a composé, Ex professo, un Livre des Spectacles, décrit bien au long toutes les infamies qui s’y pratiquaient. […] Pour commencer par Tertullien : en même temps qu’il déteste l’horreur et l’infamie des Spectacles, il se fait cette objection. […] Le premier est de s’en informer à des personnes de poids et de probité, lesquelles avec l’horreur qu’elles ont du péché, ne laissent pas d’assister à ces sortes de Spectacles. […] Apparemment que ce saint homme n’en parlait pas par expérience, et qu’il n’allait pas aux Spectacles qu’il condamnait.
Qu'on cherche les jeunes Etudiants, à peine paraissent-ils un moment aux écoles, leur séjour ordinaire est au spectacle ou chez l'actrice. […] Voici quelques exemples frappants des effets du spectacle sur la jeunesse […] Les honnêtes femmes, il est vrai, ne paraissent point à celui-ci, elles seraient déshonorées ; mais de toutes ces vérités, il résulte que la vertu des femmes court au spectacle les plus grands risques, et que c'est la plus mauvaise éducation de leur permettre d'aller au spectacle. […] Cyr un spectacle public. […] Ce spectacle eut le plus grand succès, qui en doute ?
LEs Spectacles sont trop précieux aux hommes, par les amusemens qu’ils procurent, & par les avantages qu’on en retire, pour ne pas se faire une gloire d’être utile aux Poètes qui s’y consacrent. […] Il faut aller chercher dans une infinitè de Volumes ce qui regarde les Spectacles des Grecs, des Romains & des Nations de l’Europe. […] Au-lieu de n’être instruit que des loix d’un seul Spectacle, on les apprendra toutes, en paraissant n’en étudier qu’une partie. […] Afin de donner d’avantage à mon Livre un air de nouveauté, je ferai rapporter une partie de mes raisonnemens au Spectacle moderne. […] Il doit être question de cet art agréable dans un ouvrage où l’on voudra renfermer tout ce qui regarde les Spectacles.
Il est souvent défendu aux clercs d’assister aux spectacles, aux pompes, aux chants, aux réjouissances publiques : et il serait inutile d’en ramasser les règlements qui sont infinis. […] C’est-à-dire, Toutes les choses où se trouvent les attraits des yeux et des oreilles, par où l’on croit que la vigueur de l’âme puisse être amollie, comme on le peut ressentir dans certaines sortes de musique et autres choses semblables, doivent être évitées par les ministres de Dieu : parce que par tous ces attraits des oreilles et des yeux, une multitude de vices, turba vitiorum, a coutume d’entrer dans l’âme. » Ce canon ne suppose pas dans les spectacles qu’il blâme, des discours ou des actions licencieuses, ni aucune incontinence marquée : il s’attache seulement à ce qui accompagne naturellement « ces attraits, ces plaisirs des yeux et des oreilles : oculorum et aurium illecebras » ; qui est une mollesse dans les chants, et je ne sais quoi pour les yeux qui affaiblit insensiblement la vigueur de l’âme. Il ne pouvait mieux exprimer l’effet de ces réjouissances, qu’en disant qu’elles donnent entrée « à une troupe de vices » : ce n’est rien, pour ainsi dire, en particulier ; et s’il y fallait remarquer précisément ce qui est mauvais, souvent on aurait peine à le faire : c’est le tout qui est dangereux ; c’est qu’on y trouve d’imperceptibles insinuations, des sentiments faibles et vicieux ; qu’on y donne un secret appât à cette intime disposition qui ramollit l’âme et ouvre le cœur à tout le sensible : on ne sait pas bien ce qu’on veut, mais enfin on veut vivre de la vie des sens et dans un spectacle où l’on n’est assemblé que pour le plaisir ; on est disposé du côté des acteurs à employer tout ce qui en donne et du côté des spectateurs à le recevoir. Que dira-t-on donc des spectacles, où de propos délibéré tout est mêlé de vers et de chants passionnés, et enfin de tout ce qui peut amollir un cœur ? […] , dans les autres décrets de l’Eglise, que les passages de l’Ecriture sur laquelle on fonde la prohibition de l’usure pour les ecclésiastiques, regardent également tous les chrétiens : il faudra donc conclure dès làs, que l’on a voulu faire une obligation spéciale aux clercs de ce qui était d’ailleurs établi par les règles communes de l’Evangile : vous ne vous tromperez pas en tirant dans le même cas une conséquence semblable des canons, où les spectacles sont défendus à tout l’ordre ecclésiastique, et le canon du Concile de Tours que nous avons rapporté vous en sera un grand exemple.
Monseigneur, Si j’avais l’honneur d’être mieux connu de Votre Grandeur, je prendrais la liberté de l’aller voir au lieu de celle que je prends de lui écrire, pour la supplier très humblement de me regarder comme le seul coupable de l’impression d’une Lettre que j’ai mise au devant de quelques Pièces de Théâtre que j’ai données au Public, (si toutefois il y a du crime à mettre au jour les sentiments des Pères de l’Eglise, touchant les Spectacles qui peuvent être permis, et ceux qui doivent absolument être défendus). […] Votre Grandeur, qui est un abîme d’Erudition, sait mieux que personne que depuis que les Royaumes ont commencé d’être florissants, et que l’on a bâti de grandes Villes, il y a fallu des Spectacles pour en amuser les habitants, et que si les Pères de la primitive Eglise blâmaient les Chrétiens d’y assister, c’était parce que les Spectacles des Anciens faisaient une partie essentielle de la Religion Païenne. Les Empereurs dont la mémoire est le plus en vénération (c’est des Empereurs Chrétiens dont je parle) ne défendirent pas les Spectacles à leurs Sujets, mais ils en bannirent l’Idolâtrie ; et s’il vous plaisait, Monseigneur, de rappeler un peu votre souvenir, vous trouveriez que des Papes n’ont pas cru les plaisirs du Théâtre indignes de l’attention des Chrétiens, puisqu’ils ne faisaient point de difficulté d’y assister eux-mêmes. […] En Espagne et en Portugal, où l’Inquisition est si sévère, ne représente-t-on pas des Comédies : et parmi des Peuples où la moindre peccadille envers la Religion est souvent un crime irrémissible, ces Spectacles seraient-ils permis s’il était vrai qu’ils fussent si pernicieux ? […] Augustin, Orose, Lactance, Salvien, et pour citer des autorités encore plus grandes, les Conciles ont condamné le plus justement du monde les Spectacles de leur Temps, parce qu’en effet ils étaient abominables ; et si nous en voyions de pareils je suis persuadé que les plus Libertins de notre Siècle les condamneraient aussi ; mais aujourd’hui que la Comédie est non seulement exempte de ces abominations, mais capable de donner des leçons utiles, les raisons qui avaient donné lieu aux Anathèmes fulminés contre elle, ne subsistent plus ; et s’il faut des Divertissements aux hommes pour les délasser des fatigues qui sont inséparables de la vie, c’est un de ceux que je crois le plus innocents.
Jamais ce grand homme n’accorda son suffrage au spectacle. […] Les Censeurs à Rome, pour conserver les mœurs, avoient demandé les spectacles. […] Qu’il y ait un spectacle où ils puissent assister sans danger. […] qui est plus maître que le Souverain du choix des spectacles, & d’en écarter les dangers ? […] Les Grands procuroient des spectacles honnêtes & décens.