/ 411
40. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre IV. Des Personnages. » pp. 239-251

Il est donc important de mettre tous ses soins à ce qui les regarde. […] Si l’on trouve que celui de son frère Micion soit aussi très marqué, qu’on ne reproche point à ce grand Poète d’avoir fait une faute : il a eu soin d’avertir de ce qu’il se proposait, en intitulant sa Pièce les Adelphes, c’est-à-dire les Frères. […] Il faudrait qu’il eut soin de ne faire rencontre qu’une seule fois ses amans ensemble, & que même les circonstances les empêchassent de se parler de leur passion.

41. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « Corrections et additions. » pp. 364-368

Il est vrai qu’il faudrait qu’il fût beaucoup plus réservé que Molière, & qu’il employât bien des soins & des ménagemens ; il serait sûr au moins de voir ses Ouvrages se distinguer de la foule, en poursuivant un vice qu’il est comme défendu de vouloir réprimer : la Comédie étendrait plus loin les droits qu’elle a de reprendre & de corriger. […] Afin d’achever de faire connaître en peu de mots les Poèmes du grand-Opéra de nos voisins, je dois ajouter que la Musique n’en est pas toujours si admirable, puisque des Récitatifs d’une longueur énorme en composent la plus grande partie, & qu’on n’y rencontre que quatre ou cinq Ariettes travaillées avec soin, qui sont même les seuls morceaux que l’on écoute attentivement.

42. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre II. L’Exposition, le Nœud & le Dénouement. » pp. 183-210

On a soin de les lier ensemble avec des fils imperceptibles. […] Le Poète est donc obligé de mettre tous ses soins à l’Exposition d’un Drame. […] Le Poète qui compose un Drame du nouveau genre, & qui veut se distinguer de la foule, aura pourtant soin dans la prémière Scène d’exposer le sujet. […] Je conseille aux jeunes Poètes qui voudront éviter de tomber dans de pareilles fautes, de détacher du sujet de leur Drame tout ce qui pourrait lui nuire, & faire perdre un instant de vue l’action principale ; qu’ils ayent soin que les événemens se rapportent au Héros de la Pièce. […] « Comme il est nécessaire que l’action soit complette, il faut n’ajouter rien au-delà, parce que quand l’éffet est arrivé, l’Auditeur ne souhaite plus rien, & s’ennuie de tout. » Si l’on réfléchissait avec soin sur cette observation d’un grand homme, on ne verrait pas tant de Pièces en tout genre dont la fin est défectueuse.

43. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre prémier. Le sujet. » pp. 160-182

La Comédie & la Tragédie souffrent un sujet rempli d’incidens ; elles éxigent même qu’on ait toujours soin d’en faire naître plusieurs les uns des autres ; elles ne veulent pas néanmoins des faits incroyables ou compliqués, comme ceux de l’Etourdi & d’Héraclius, mais de simples & de naturels. […] S’ils les travaillent avec soin, ils auront sûrement la gloire de réussir. […] Qu’on ait donc soin de choisir des sujets simples. […] « Il ne faut pas oublier, (& ce n’est pas une des moindres observations que j’aye fait sur le Théâtre) que si le sujet n’est conforme aux mœurs & aux sentimens des Spectateurs, il ne réussira jamais, quelque soin que le Poète y employe, & de quelques ornemens qu’il le soutienne. » Ainsi nous aurions les mœurs d’un Bucheron, d’un Savetier, &c.

44. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « IV. S’il est vrai que la représentation des passions agréables ne les excite que par accident.  » pp. 10-18

Dites, que tout cet appareil n’entretient pas directement et par soi le feu de la convoitise ; ou que la convoitise n’est pas mauvaise, et qu’il n’y a rien qui répugne à l’honnêteté et aux bonnes mœurs dans le soin de l’entretenir ; ou que le feu n’échauffe qu’indirectement ; et que, pendant qu’on choisit les plus tendres expressions pour représenter la passion dont brûle un amant insensé, ce n’est que « par accident » c, que l’ardeur des mauvais désirs sort du milieu de ces flammes : dites que la pudeur d’une jeune fille n’est offensée que « par accident », par tous les discours où une personne de son sexe parle de ses combats, où elle avoue sa défaite, et l’avoue à son vainqueur même, comme elle l’appelle. Ce qu’on ne voit point dans le monde : ce que celles qui succombent à cette faiblesse y cachent avec tant de soin, une jeune fille le viendra apprendre à la comédie.

45. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — TROISIEME PARTIE. — Tragédies à conserver sur le Théâtre de la Réformation. Avant Propos. » pp. 118-127

Si, dans les ouvrages de belles Lettres, les Savants ont soin de laisser au Lecteur intelligent le moyen d’occuper son esprit, soit en devinant, ou même en ajoutant quelque fois aux idées qui lui sont présentées, et que l’Auteur, dans cette intention, n’aura pas tout à fait développées, j’ai cru que je ne pouvais rien faire de mieux que d’imiter une conduite également sage et utile ; parce qu’elle ne dérobe rien au Lecteur ignorant (pour qui il y en a toujours assez) en même temps qu’elle procure un vrai plaisir au Lecteur de génie et de goût, qui est bien aise de pouvoir mettre quelque chose du sien à sa lecture. […] Je laisse donc aux Poètes même le soin de se rendre justice, et à leurs amis celui de les critiquer et de leur donner des conseils utiles dans l’occasion.

46. (1665) Observations sur une comédie de Molière intitulée Le Festin de Pierre « Observations sur une comédie de Molière intitulée Le Festin de Pierre » pp. 1-48

Cette pièce a fait tant de bruit dans Paris ; elle a causé un scandale si public, et tous les gens de bien en ont ressenti une si juste douleur, que c’est trahir visiblement la cause de Dieu, de se taire dans une occasion où sa Gloire est ouvertement attaquée, où la Foi est exposée aux insultes d’un Bouffon qui fait commerce de ses Mystères, et qui en prostitue la sainteté : où un Athée foudroyé en apparence, foudroie en effet tous les fondements de la Religion, à la face du Louvre, dans la Maison d’un Prince Chrétien, à la vue de tant de sages Magistrats et si zélés pour les intérêts de Dieu, en dérision de tant de bons Pasteurs, que l’on fait passer pour des Tartuffe, et dont l’on décrie artificieusement la conduite : mais principalement sous le Règne du plus Grand et du plus Religieux Monarque du Monde : cependant que ce généreux Prince occupe tous ses soins à maintenir la Religion, Molière travaille à la détruire : le Roi abat les Temples de l’Hérésie, et Molière élève des Autels à l’Impiété, et autant que la vertu du Prince s’efforce d’établir dans le cœur de ses Sujets le Culte du vrai Dieu par l’exemple de ses actions ; autant l’humeur libertine de Molière tâche d’en ruiner la créance dans leurs esprits, par la licence de ses Ouvrages. […] C’est par ces degrés que Molière a fait monter l’Athéisme sur le Théâtre, et après avoir répandu dans les âmes ces poisons funestes, qui étouffent la pudeur et la honte ; après avoir pris soin de former des Coquettes, et de donner aux filles des instructions dangereuses ; après des Écoles fameuses d’impureté, il en a tenu d’autres pour le libertinage, et il marque visiblement dans toutes ses Pièces le caractère de son esprit : il se moque également du Paradis et de l’Enfer, et croit justifier suffisamment ses railleriesDans sa Critique. […] Le Maître et le Valet jouent la Divinité différemment : le Maître attaque avec audace, et le Valet défend avec faiblesse : le Maître se moque du Ciel, et le Valet se rit du foudre qui le rend redoutable : le Maître porte son insolence jusqu’au Trône de Dieu, et le Valet donne du nez en terre, et devient camus avec son raisonnement : le Maître ne croit rien, et le Valet ne croit que le Moine Bouru : et Molière ne peut parer au juste reproche qu’on lui peut faire d’avoir mis la défense de la Religion dans la bouche d’un Valet impudent, d’avoir exposé la Foi à la risée publique, et donné à tous ses Auditeurs des Idées du Libertinage et de l’Athéisme, sans avoir eu soin d’en effacer les impressions. […] Nous avons l’obligation aux soins de notre glorieux et invincible Monarque, d’avoir nettoyé ce Royaume de la plupart des vices qui ont corrompu les mœurs des siècles passés, et qui ont livré de si rudes assauts à la vertu de nos Pères. […] Et néanmoins, malgré tous les soins de ce grand Prince, elle retourne aujourd’hui comme en triomphe dans la ville Capitale de ce Royaume, elle monte avec impudence sur le Théâtre, elle enseigne publiquement ses détestables maximes, et répand partout l’horreur du sacrilège et du blasphème : Mais nous avons tout sujet d’espérer que ce même Bras qui est l’appui de la Religion, abattra tout à fait ce Monstre, et confondra à jamais son insolence.

47. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Seconde partie « Causes de la décadence du goût sur le théatre. — Chapitre XXIV. Le sentiment, juge plus sûr que le goût. Celui-ci préféré au premier. Pourquoi ? Amour du Théatre, funestes à ses progrès. Honneurs avilis en devenant trop communs. Cabales. Leurs effets, & les moyens qu’on employe pour les éluder.  » pp. 129-150

Doit-on s’étonner que ceux qui s’adonnent à ce genre périlleux, prennent presque autant de soin de gagner les spectateurs, que de composer de bons ouvrages ? […] Ce sont autant d’accusations sans replique, autant d’outrages que nous avons soin d’écarter, ou même de ne pas appercevoir. […] Quelques commodes qu’ils soient, ils exigent des soins & des complaisances, & c’est autant de perdu pour leurs études.

/ 411