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58. (1757) Article dixiéme. Sur les Spectacles [Dictionnaire apostolique] « Article dixiéme. Sur les Spectacles. » pp. 584-662

Ne la regarde-t-on pas comme une belle foiblesse qu’on propose à imiter ? […] Ne contribuez-vous pas à leur faire regarder ce plaisir comme indifférent ? […] Ne ne le regarderiez-vous pas comme un séducteur ? […] C’est la maniere dont on a toujours regardé les acteurs du théâtre dans le Paganisme. […] Regardez le cours précipité des siécles, les temps qui s’écoulent ; réveillez-vous à la pensée du Royaume de Dieu, il approche.

59. (1777) Des Spectacles « Des Spectacles. » pp. 75-92

Il est de son intérêt qu’on le regarde dans le monde comme un divertissement permis et honnête. Mais, mon Dieu, à l’heure de la mort les regarde-t-on comme tels ? […] Pourrait-on s’empêcher de regarder comme un terrible châtiment une telle mort, et ne regarderait-on pas comme une marque de réprobation, de mourir sur un théâtre ?

60. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre XIV. La fréquentation des spectacles ne peut se concilier avec la vie et les sentiments d’un véritable chrétien. » pp. 118-132

Un chrétien, obligé par état de ne faire que des œuvres de Jésus-Christ, de rapporter tout ce qu’il fait à Dieu, peut-il regarder la fréquentation des spectacles comme une œuvre digne de Dieu ? […] Ne la regarde-t-on pas comme une belle faiblesse qu’on propose à imiter ? […] On regarde l’effet comme une partie si essentielle à la pièce, que, si elle manque par cet endroit, elle passe pour un ouvrage froid et insipide. […] C’est là que, s’accoutumant à regarder un chimérique honneur comme le bien le plus précieux, il apprend à tout sacrifier pour se le conserver ou le réparer, sans égard pour les droits même les plus inviolables du sang et de l’amitié ; et il l’apprend d’autant plus volontiers que c’est un père barbare qui met lui-même un fer assassin entre les mains de son fils, et lui ordonne de tuer ou de mourir.

61. (1692) De la tragédie « De la tragédie ancienne et moderne. » pp. 148-162

On aura de la peine à me persuader qu’une âme accoutumée à s’effrayer sur ce qui regarde les maux d’autrui, puisse être dans une bonne assiette sur les maux qui la regardent elle-même. […] J’aime à voir plaindre l’infortune d’un grand homme malheureux ; j’aime qu’il s’attire de la compassion, et qu’il se rende quelquefois maître de nos larmes : mais je veux que ces larmes tendres et généreuses regardent ensemble ses malheurs et ses vertus, et qu’avec le triste sentiment de la pitié nous ayons celui d’une admiration animée, qui fasse naître en notre âme comme un amoureux désir de l’imiter. […] Quand Agamemnon sacrifia sa propre fille, et une fille tendrement aimée, pour apaiser la colère des Dieux, ce sacrifice barbare fut regardé comme une pieuse obéissance, comme le dernier effet d’une religieuse soumission.

62. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE VI. Histoire de la Poësie Dramatique chez les Romains. » pp. 145-175

L’Hecyre de Térence tomba parce que pendant qu’on la représentoit le Peuple s’occupa à regarder des Danseurs de Corde. […] Quoiqu’il fût devenu fort vieux, & que la perte d’un vieux Comédien ne soit pas fort à regretter, Ciceron regarde sa mort comme un malheur public, & parle de lui comme d’un homme qui ne devoit jamais mourir. […] Ce Peuple, qui par une fierté mal fondée, avoit pendant plusieurs siécles, regardé comme de vils amusemens des Grecs, tous les Arts qui font honneur à l’Esprit, admira un Baladin, dont la science consistoit à tout imiter par ses gestes : un Acteur toujours muet à qui sa main servoit de langue. […] Bien différens de ces Peuples, qui dès qu’ils ont su faire des Vers, ont cru surpasser les Grecs, les Romains n’ont jamais prétendu marcher de pair : & dans tous les Beaux Arts, ils ont regardé les Grecs comme leurs maîtres. […] Un Philosophe eût regardé avec plus d’attention que les Jeux, un Peuple attentif à ces sottises, Spectaret populum ludis attentiùs ipsis.

63. (1715) Dictionnaire de cas de conscience « COMEDIE. » pp. 739740-750

 » Ce sont les termes de ce Concile ; et il n’y a pas lieu de s’étonner de cette ancienne sévérité de l’Eglise à l’égard des Comédiens, et de ceux qui assistaient, ou qui participaient à leurs spectacles ; puisque les Païens mêmes, comme Sénèque, ont regardé les Comédies, comme la chose la plus contraire aux bonnes mœurs : « Nihil tam moribus alienum, dit ce Philosophe, quam in spectaculo detineri » ; et qu’il y eut même quelques Empereurs, du nombre desquels est Domitien, qui chassèrent de Rome tous les Comédiens, comme autant de gens, dont il regardait la profession, comme pernicieuse au bon Gouvernement de ses Etats : en quoi certainement il ne se trompait pas dans cette pensée. […]  » Car ils ont beau dire que la coutume a autorisé la Comédie et les Comédiens dans tous les Etats les mieux policés, et que cette coutume est autorisée par les Princes et par les Magistrats : Tout cela ne suffit pas pour les justifier, puisque l’Eglise les condamne et les a toujours condamnés et qu’elle veut qu’on regarde encore aujourd’hui les Comédiens comme des gens excommuniés et qu’on leur refuse les Sacrements et la Sépulture Ecclésiastique. […] Cyprien écrit à Eucratius, qui l’avait consulté, pour savoir comment il se devait comporter à l’égard d’un certain Comédien qui avait à la vérité quitté le théâtre, mais qui continuait à enseigner sa Profession à d’autres : sur quoi ce Saint Martyr répond que cet homme-là doit être regardé et traité comme un excommunié. […] A plus forte raison doit-on dire, qu’il ne leur est donc pas permis de s’en dépouiller pour se revêtir d’habits de théâtre, ni même d’en couvrir les leurs en les mettant par-dessus leurs robes : ces habits n’étant propres qu’à des gens que l’Eglise regarde comme excommuniés. […]  » Ce sont les termes du Concile, qui ne doivent pas moins regarder les Religieux que les Religieuses, et qui condamnent encore plus ceux dont il s’agit dans l’espèce proposée ; puisqu’ils sont eux-mêmes les Acteurs de la Comédie.

64. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE III. De la Comédie. » pp. 92-118

C’est un fripon du premier ordre, je le regarde comme tel ; mais je suis charmé que l’orgueil, la prodigalité, les penchants libertins d’un plat bourgeois l’exposent au péril de tout perdre et que les autres bourgeois, entêtés de noblesse, apprennent de Jourdain que le sort qui les attend est d’être dépouillés par des Escrocs, quand pour mieux ressembler aux grands Seigneurs, ils osent en affecter tous les vices et les ridicules. » Ma foi, M. le Public, je vois bien que vous avez raison et je condamne M. de Genève à mieux regarder à l’avenir ce qu’il verra, afin d’en porter un jugement plus solide et plus sensé. […] « Je comprends bien qu’il ne faut pas toujours regarder à la catastrophe pour juger de l’effet moral d’une Tragédie, et qu’à cet égard l’objet est rempli quand on s’intéresse pour l’infortuné vertueux plus que pour l’heureux coupable. »cu Or on plaint George Dandin et l’on méprise, on déteste Angélique, on voudrait qu’elle fût punie : donc Molière était de votre avis, sa pièce ne mérite aucun reproche, si vous voulez vous accorder avec vous-même. […] « Franchement, il est bon à mettre au cabinet. »df S’il faut de pareils traits à la Philosophie pour vous la rendre agréable, vous êtes fondé à regarder Alceste comme un sage, mais les autres vous regarderont vous et lui comme deux… etc. […] Ce ne serait plus un Misanthrope mais un sage, s’il était insensible à tout ce qui le regarde personnellement, comme vous voudriez encore. […] Voilà Molière, je crois, suffisamment disculpé de vos reproches : je ne crois pas qu’aucun homme sensé qui lira cette réfutation, le regarde désormais comme un « Auteur dangereux »dq  : votre conséquence tombe absolument.

65. (1759) Remarques sur le Discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie « Remarques sur le discours qui a pour titre : De l’Imitation par rapport à la Tragédie. » pp. 350-387

Nous voulons être parfaits, & c’est ce qui forme en nous le desir d’apprendre, outre la satisfaction que nous trouvons à fixer par un objet nouveau l’agitation de nos pensées ; mais nous désirons encore plus d’être heureux, & nous regardons le plaisir du sentiment, comme ce qui nous met en possession d’une félicité présente & d’un bonheur actuel. […] Ce n’est pas seulement par les nombres & par la cadence que les Vers peuvent être regardés comme une espéce de Langue à part, qui nous attache beaucoup plus que la Prose. […] Juger de l’exacte observation des regles de l’Art, c’est le plaisir du Philosophe & du Connoisseur ; mais ce n’est pas celui du plus grand nombre des hommes : le Philosophe & le Connoisseur même, s’ils ont l’ame sensible, ne le goûtent que par réflexion, & leur plaisir direct est le même que celui du Peuple, je veux dire, le plaisir qui naît des mouvements excités dans leur ame par une action qu’ils veulent bien regarder pour un moment comme une action véritable. […] La seconde est que nous croyons exercer par-là un acte de supériorité, & nous regardons notre critique comme une espece de tribunal auquel nous attribuons presque le privilége de l’infaillibilité. […] Il ne se regarde à l’égard de ces notions que comme la toile qui reçoit l’impression des différentes couleurs ; mais pour les autres, il croit être le pinceau, ou plutôt le Peintre qui les distribue : & en effet, plus un esprit a d’étendue & de pénétration, plus il découvre de ces rapports ; & comme rien n’en fait connoître un plus grand nombre que l’Imitation, il n’est pas surprenant qu’il prenne un plaisir singulier à juger des Ouvrages qu’elle produit.

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