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50. (1766) Réflexions sur le théâtre, vol 5 « Réflexions sur le théâtre, vol 5 — REFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE CINQUIÈME. — CHAPITRE IV. De la Médisance. » pp. 80-99

L’Historien continue : Le Roi & la Reine d’Angleterre étoient ravis qu’on peignît le Pape Innocent XI, qui avoit contribué à les détrôner, comme un aveugle à qui le Diable avoit crevé les yeux : Et l’enfer couvrant tout de ses voiles funèbres, Sur les yeux les plus saints a jeté ses ténèbres. […] On donnoit un bouc au plus bouffon, soit parce qu’on immoloit un bouc à Bacchus, soit pour mieux peindre par la saleté de cet animal la nature du chef-d’œuvre dont il étoit le digne prix : Carmine qui tragico vilem certavit ob hircum. […] Le théatre veut si bien qu’on connoisse ses mœurs & sa malignité, qu’il a peint son génie & ses talens sous l’emblême de Satyres avec des pieds de chèvre, des cornes, des oreilles pointues, un masque à la main, un ris caustique, des attitudes indécentes. […] On a même renchéri sur l’antiquité, qui ne connoissoit point de Satyresses, quoique quelques Peintres se soient avisés d’en peindre, & que M. de Piles, dans ses Conversations sur la Peinture, en parle. […] Tout est pantomime, les yeux, les mains, la tête, la posture, le ton de la voix, le tour de la phrase, le souris, la démarche, tout peint, tout est imité ; maîtres, amis, parens, gens graves, stupides, savans, &c. rien n’épargne, rien n’est épargné.

51. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE III. Immodestie des Actrices. » pp. 57-84

Ne diroit-on pas que ce saint Père avoit à peindre la N … ? […] que peindroit le discours le plus détaillé & le plus grossier, que ce qu’on montre, & cent fois moins vivement qu’on ne le peint en le montrant ? […] Le discours le plus libre est moins dangereux, il ne peint qu’à l’esprit, il demande du temps & de l’attention, il s’envole, il choque le plus souvent, ou on fait semblant de s’en choquer. La nudité peint aux yeux, elle subsiste ; un regard suffit, & on en peut jeter mille ; elle attire, elle plaît, on s’en repaît sans être apperçu ; on ne peut parler continuellement, & à tout le monde, & tout le monde voit, & voit sans cesse ; nulle fatigue ni à voir, ni à se faire voir. […] Le Saint-Esprit a ainsi voulu peindre sous les traits d’un amour profane les chastes libertés de l’amour conjugal, & les saintes délices de l’amour divin.

52. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre quatriéme. — Chapitre XI. Du jeu des Acteurs. » pp. 345-354

Tous ceux qui s’étonnent que des gens de Lettres ayent si bien imités dans leurs ouvrages des Bucherons, des Savetiers, qu’ils ne fréquentent sûrement pas ; ont plutôt lieu d’admirer des Acteurs qui se rendent tout-à-fait semblables à des Personnages qu’on n’a fait que leur peindre. C’est avec raison que j’employe le terme peindre, puisque la plupart des Auteurs de Poètique appellent un Drame un tableau : le Poète n’est donc que le Peintre, & le Comédien prend réellement la ressemblance des objets qu’on lui indique.

53. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VII. Des Duo, Trio & Quatuor. » pp. 329-339

Le Duo des Scènes d’Opéras est particulièrement fait pour peindre l’entretien de deux Amans. […] Le quatuor ou le quinqué est un éxcellent moyen de peindre une grande rumeur, & les cris d’une foule de gens qui se disputent ou se réjouissent.

54. (1675) Traité de la comédie « XIII.  » p. 293

Cependant si l'on considère les Comédies de ceux qui ont le plus affecté cette honnêteté apparente, on trouvera qu'ils n'ont évité de représenter des objets entièrement déshonnêtes, que pour en peindre d'autres aussi criminels, et qui ne sont guère moins contagieux.

55. (1758) Causes de la décadence du goût sur le théatre. Première partie « Causes de la décadence du goût sur le théâtre. — Chapitre VI. De la Poésie de style. Si elle fait seule la destinée des Poëmes. » pp. 94-121

Qu’on donne cette même pensée à exprimer à une imagination brillante ; d’un seul trait elle nous peindra le lieu ; elle nous y montrera ses yeux ouverts pour la premiere fois au jour, & portera les notres sur la lumiere qui nous environne, elle nous conduira dans une lice, dont l’athléte à atteint l’extrêmité. […] D’un autre trait, elle nous peindra les douces occupations qui ont amusé ses loisirs. […] « Le Père Mallebranche, dit-il, a écrit contre la contagion des imaginations fortes, dont le charme, pour nous séduire, consiste dans leur fécondité en images, & dans le talent de peindre vivement les objets.

56. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique —  CHAPITRE XI. Les Grecs ont-ils porté plus loin que nous la perfection de la Tragédie ? » pp. 316-335

Sa victoire passagere, dépendoit des applaudissemens du Peuple, & il ne pouvoit les attirer qu’en jettant ce Peuple dans une grande émotion, par la vivacité de l’Action ; il songeoit donc plutôt à peindre les Passions dans toute leur fureur, qu’à chercher ces finesses de l’Art, que l’Art sait cacher pour donner à l’esprit le plaisir de les chercher, par cette adresse à développer les ressorts du cœur humain, par cette délicatesse de sentimens, & toutes ces beautés, qu’on ne découvre pas dans une premiére lecture, loin qu’on en puisse être frappé dans la premiere Représentation. […] Que de mœurs, que de caracteres, que d’Actions à peindre ! […] Les Poëtes ont peint les Hommes tels qu’ils étoient alors.

57. (1603) La première atteinte contre ceux qui accusent les comédies « A la signore Isabelle » pp. 25-

S’il leur faut des louanges dignes de leurs mérites, imitez ce Dieu dont vous avez la langue et l’esprit : faites-les vous-même, ainsi que d’une seule bague il ôte et envoie le sommeil, si des Grâces qui égalent celles qu’ils portent vous les devez figurer ; car c’est vous qui êtes peinte en ces beaux et rares vers, qui ont dépouillé le Parnasse de ses fleurs, et fait une Iris en terre pour recevoir l’image de votre Soleil, qui se tire lui-même ; parce qu’aucun peintre ne le peut représenter.

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