L’intérêt général est confondu avec celui des particuliers ; mais cette union insensible, pour la plûpart d’entr’eux, est souvent regardée comme un ridicule de plus. […] Seroit-ce parce que le rapport du bonheur particulier au bonheur général, est encore moins frappant que le rapport du bien général au bien particulier ?
Et cette disposition produit d'elle- même une aversion particulière pour les Comédies, parce qu'elle y voit un vide et un néant tout particulier.
Un des premiers effets de la lumière de la grâce est de découvrir à l'âme le vide, le néant, et l'instabilité de toutes les choses du monde, qui s'écoulent et s'évanouissent comme des fantômes, et de lui faire voir en même temps la grandeur et la solidité des biens éternels : et cette même disposition produit dans toutes les âmes chrétiennes une aversion particulière pour les Comédies; parce qu'elles y voient un vide et un néant tout particulier.
Qu’il n’est point permis aux particuliers de faire des Assemblées pour la danse, ni pour toute sorte de sujet. C’est un désordre dans les Républiques, très éloigné du bon sens, et de la raison, que des particuliers assemblent du monde pour la danse, ou au moins qu’ils le fassent pour la moindre occasion, et pour toute sorte de sujet.
Aussi les Jeux Scéniques ne contenaient pas dans leur propre signification les Comédies ni les Tragédies, mais des Jeux particuliers, comme nous le ferons voir dans la suite. […] Cette révérence néanmoins ne lui fut pas si particulière qu'elle n'ait passé jusqu'aux autres Dieux qu'ils honoraient par les Jeux du Théâtre ; car aux Fêtes de Minerve les Athéniens introduisirent la même dispute de Poésie et de Musique ; et chez les Romains il y avait toujours sur le Théâtre deux Autels, l'un à la main droite, consacré à Bacchus, comme au Dieu du Théâtre, et l'autre à la main gauche, au nom de celui en l'honneur duquel on faisait les Jeux ce jour-là. Ainsi, comme les Prêtres en avaient un soin particulier, qu'ils y étaient présents, et qu'ils les traitaient comme un acte de Religion, les honnêtes femmes, et mêmes les Vestales ne faisaient point de scrupule d'y assister, encore que les premières fussent d'ordinaire dans leur appartement éloigné de la société des hommes, et que les autres fussent engagés dans un état séparé du commerce de la vie civile. […] « Sors que vous êtes, je représente un furieux. » Mais sans rechercher d'autres preuves de l'usage religieux des Tragédies et des Comédies, il leur faut attribuer toute la superstition des autres Spectacles ; Car quand les Auteurs écrivent que les Jeux de Théâtre étaient donnés au peuple par les Magistrats, et qu'ils n'en désignent point quelque espèce particulière, il y faut presque toujours comprendre les représentations des Poèmes Dramatiques, qui n'en furent guère séparées dans les derniers temps, et les témoignages des bons Auteurs que nous rapporterons dans la suite de cette Dissertation, autoriseront encore ces vérités.
Saint Charles Borromée, qu’on veut faire passer pour un protecteur de la Comédie, a fait composer un livre particulier contre les Comédies, qui prouve qu’elles sont mauvaises à cause des circonstances qui les accompagnent, et de leurs effets, et que c’est pour cela qu’elles sont défendues. […] Cependant après plus de vingt années de silence, un particulier entreprit de justifier la Comédie par une Lettre qu’on a voulu faire passer pour une réponse faite à Boursault, auteur d’un volume de Pièces de Théâtre. […] Indépendamment de ces Ouvrages particuliers, on trouve dans ceux de différents autres Auteurs plusieurs passages contre la Comédie assez circonstanciés, pour mériter d’être indiqués.
J'ajoute une autre loi des Empereurs Valentinien, Théodose, et Arcade dans laquelle après avoir fait mention de plusieurs Fêtes particulières ; ils marquent toute la quinzaine de Pâques, le jour de Noël, et de l’Epiphanie, et les Fêtes des Apôtres : « dans lesquels jours (disent-ils) à cause de leur sainteté, nous défendons toutes sortes de spectacles ; et nous mettons encore au même rang des Fêtes dont nous avons parlé, les jours qui étaient nommés les jours du Soleil, et que les Chrétiens appellent communément, plus justement, les jours du Seigneur, ou les Dimanches ; que l’on doit célébrer, et solenniser avec une pareille dévotion et révérence ». […] Et nous désirons avec tant d’ardeur que cette Ordonnance soit observée, que nous voulons que celui qui la transgressera, ou en assistant aux spectacles un jour de fête, ou en faisant quelque acte de justice, sous prétexte des affaires publiques ou particulières, en soit puni par la dégradation, et par la confiscation de tous ses biens. » Et infra. […] Amissionem militiæ, proscriptionemque patrimonii sustinebit, si quis umquam hoc die festo spectaculis interesse, vel cujuscunque Judicis apparitor, prætextu negotii publici, vel privati, quæ hac lege statuta sunt, crediderit temeranda. » On voit bien dans ces Constitutions pieuses et Chrétiennes, quels ont été les sentiments des Princes touchant l’observance des Fêtes, et des autres jours qui demandent une particulière application à Dieu, et à la prière, puisqu’ils ont défendu en ces saints jours, sous des peines très rigoureuses, tout ce qui sert à la volupté.
Peut-on leur défendre de s’établir dans des quartiers ou des lieux particuliers ? […] Peut-on empêcher un théâtre de s’établir dans un quartier ou dans un lieu particulier ? […] La nation ne peut pas abandonner ses droits et sa propriété, parce que quelques particuliers s’en sont fait une hypotheque. […] Les ministres portoient même l’arbitraire de leur autorité jusqu’à interdire à quelques particuliers l’entrée des spectacles. […] On la jouoit cependant sur tous les théâtres particuliers ; mais il étoit défendu de l’offrir au peuple.