On y trouve trouve aussi deux Titres, dont l’un déclare infâmes les Comédiens qui font métier de monter sur le théâtre, Tit. 3. […] Despreaux a dépeint dans le troisième Chant de l’Art Poétique : « Chez nos dévots Aïeux le Théâtre abhorré, Fut longtemps dans la France un plaisir ignoré : Des Pèlerins, dit-on, une troupe grossière, En public à Paris y monta la première, Et sottement zélée en sa simplicité, Joua les Saints, la Vierge, et Dieu par pitié. » Le Cardinal Le Moine acheta l’Hôtel de Bourgogne à Paris pour ses dévots Comédiens, à condition qu’ils ne représenteraient que des Pièces pieuses. […] On a écrit de Rome, que les Comédiens de Paris qui se présentèrent à la Confession au Jubilé de l’année dernière 1696. croyant que c’était un temps de grâce pour eux, comme pour les autres pécheurs, parce que les Confesseurs avaient le pouvoir d’absoudre des cas réservés ; surpris néanmoins que les Confesseurs leur eussent refusé l’absolution, s’ils ne promettaient par écrit de ne plus monter sur le Théâtre, avaient présenté une Requête au Pape, dans laquelle ils remontrent qu’ils ne représentent à Paris que des Pièces honnêtes, purgées de toutes saletés, plus propres à porter les Fidèles au bien qu’au mal, et inspirant de l’horreur pour le vice et de l’amour pour la vertu ; et ils prient le Pape de répondre si les Evêques ont droit de les excommunier.
Le théatre a de même servi d’échelle pour monter au faste des honneurs littéraires, à Messieurs Racine, Voltaire, Duclos, Marmontel, Historiographes de France & de l’Académie Françoise.
N’allez pas dès l’abord, sur pégase monté, Crier… d’une voix de tonnerre ; Je chante le vainqueur des vainqueurs de la terre.
Revenu chez lui, il se fait tambour dans ses armées, mousse dans les vaisseaux, & monte par dégré, est reçu lieutenant, capitaine, colonel, velt-maréchal, pilote, enseigne, capitaine de vaisseaux, amiral ; il épouse une gourgandine, & la fait couronner Impératrice ; il fait faire la barbe à tous ses peuples, les obligeant de se raser malgré eux ; comme si le Roi de France vouloit forcer tous les François à reprendre la barbe ; sur-tout il fait bâtir un Théatre, & joue la comédie au milieu de la neige & des glaces ; cependant il fait mourir son fils ainsi : sur un échafaud, sa sœur dans un couvent, & une infinité de gens dans les tourmens, & il est toujours dans la débauche. […] Ses successeurs ont porté bien loin l’embellissement de la Moscovie, l’art dramatique s’y est introduit, le Théatre y brille, & tout jusqu’aux femmes s’avise de monter sur la Scène.
Dans la Tragédie de Rodogune je trouve, que la méchanceté de Cléopâtre (qui fait le motif de l’action) ne tire son origine que de sa basse jalousie contre Rodogune, et de la haine qu’elle a conçue pour elle craignant de la voir monter sur son Trône, parce qu’elle a inspiré de l’amour à ses deux fils. […] De l’autre côte Roxane, qui aime Bajazet, quoi qu’elle soit Sultane favorite du Grand Seigneur, ne travaille à faire monter son Amant sur le Trône, qu’à condition qu’il l’épousera.
Le théatre fut toûjours monté sur ce ton. […] De là le mot tragédie, qui malgré l’élévation de tant de Rois & de Héros, qu’elle barbouille de la lie du vice, signifie en Grec chanson de bouc, & dont encore les vices, qui n’en deviennent pas plus nobles, pour être habillés de pourpre & montés sur de grands mots, sont le fruit ordinaire. […] Il est aisé de sentir dans son style un habitant de ce climat cynique, monté sur le ton de la causticité, par l’esprit qu’il y a pris.
Ils n’estoient point montez comme les nostres sur des Chevaux caparaçonnez, parez, poudrez, & chargez de rubans, & n’eussent pas osé se trouver à la teste des Troupes d’Infanterie, dans un équipage peu guerier.
Les prêtres et les évêques voudraient-ils aujourd’hui appeler l’opprobre et l’excommunication sur ceux auxquels ils donnèrent l’existence, et, nous le répétons, sur ceux avec lesquels ils fraternisèrent au point de monter avec eux sur les théâtres ?