Ainsi le Bal merite bien quelque sorte de soins, & qu’un galant homme s’aplique à se bien tirer d’un pas si dangereux. […] Il faut que tout cela se face à la juste portée des yeux, & que l’on voye un homme de tous sens & de niveau, pour juger juste de ce qu’il est, & de ce qu’il sçait faire.
L a Comédie est un Poème Dramatique qui représente une action, qui d’une manière ingénieuse et plaisante corrige les défauts des hommes, et divertit par la peinture naïve qu’elle fait de leurs différents caractères. […] Parce que l’exemple d’un homme réglé, qu’on verrait au spectacle, autoriserait une infinité de personnes d’une vertu plus que médiocre, à y assister.
Maurice était un grand capitaine, d’accord ; mais était-il un grand saint, était-il un homme d’Etat, un guerrier sage, un grand homme, un vrai héros ? […] Au reste, c’est la même chose ; les jeux voluptueux qui efféminent les hommes, ne sont que le théâtre en détail, et le théâtre n’est que l’amas de tout ce qui corrompt les mœurs. […] Le théâtre est le tableau du monde : nos Comédiens sont les hommes et les femmes de tous les temps, de tous les pays, de toutes les passions, de tous les crimes. […] [NDE] Peut-être un écho d’un usage vieilli : Baigneur: Celui qui tenait une maison de bain et de plaisir pour les hommes de bon ton (Littré).
n’est-ce qu’un petit mal d’en détourner les hommes jusqu’à leur faire perdre jusqu’à vingt millions de journées par an dans un royaume ? […] Tout homme volontairement oisif est un voleur public : quel tort ne fait pas à l’Etat l’école où il se forme ? […] Le célèbre Molière, l’homme du monde qui en avait le moins de besoin, puisqu’il était et si fécond en fines plaisanteries, et si riche des libéralités de la Cour, et si intéressé pour sa gloire à ne pas s’avilir par la bassesse des propos, Molière a échoué à cet écueil. […] Ceux mêmes qui allument le flambeau de l’hymen, énervés par la débauche, dissipés par une vie frivole, dégoûtés du travail et des affaires, n’ont la plupart, ne peuvent ni ne veulent avoir des enfants, n’ont aucun soin de ceux que le hasard leur donne ; ils ne savent leur donner qu’une éducation théâtrale, qui ne forme ni Magistrat, ni Militaire, ni artisan, ni laboureur, ni aucun genre de citoyen, mais des hommes frivoles, à charge à la société. […] Nos politiques dans leurs calculs prétendent que depuis un siècle il y a quatre ou cinq millions d’hommes de moins dans le royaume.
Le sujet du Triomphe estoit aussi reglé, & il faloit avoir defait un ennemy considerable ; avoir tué sur la place * quatre ou cinq mille hommes ; avoir poussé plus avant les limites de l’Empire, & avoir enfin fait un notable progrez pour le bien & pour l’honneur de la Republique. […] Il portoit sur sa teste une Couronne, qui au commencement n’estoit que de laurier, & que l’avarice ayant fasciné l’opinion des hommes & des temps, a fait changer pour une de métail, & d’or. […] Car c’estoit un point & un mystere de la superstition de ces grands hommes, de n’oser toucher à la Victime destinée, que l’on n’eust pris une entiere vengeance des ennemis, & qu’ils ne fussent egorgez. […] Car il ne craint point de dire, que cét homme splendide traita toute la Ville & les Faux-Bourgs. […] Ie ne répondray donc à cét article que par autruy : & deferant beaucoup plus à l’opinion d’un des plus habiles hommes de nostre siecleI.
L’Homme ne se contente pas de pécher, il le veut faire tranquillement, il veut suivre ses passions sans être inquiété par des remords importuns, capables d’en empoisonner toute la douceur. […] Dieu était-il obligé pour cela de changer sa loi immuable, et de s’accommoder à l’avarice, ou à la bizarrerie des hommes. […] Il faudra effacer des Epîtres Canoniques ces paroles de saint Jean, « n’aimez point le monde, ni tout ce qui est dans le monde, parce que ce n’est que concupiscence de la chair, concupiscence des yeux et orgueil de la vie », et de saint Paul, « ne vous conformez pas au siècle présent, mais reformez-vous sur l’homme nouveau »Rom. 12. […] Au lieu de considérer les frivoles merveilles des hommes, arrêtez-vous à celles de Dieu, contemplez-les, ce sont des miracles d’une sagesse toute divine dont la vue devrait causer un plaisir toujours nouveau, les livres sacrés vous en fournissant encore de beaucoup plus admirables.
Il n’y a point d’honneste, homme si distrait du bon sens, ny si emporté dans la debauche, qui ne soûfre quelque peine des choses trop libres & méseantes. […] Comme si la Dance estoit une connoissance indigne d’un homme de qualité ! […] Ces belles qualitez passent pour des deffauts, pour des talens estrangers, & pour des objets ridicules dans un homme de condition. […] Cependant, qu’est-ce qui peut distinguer d’avantage l’honeste homme du trivial & du vulgaire, que cette curieuse education dans la connoissance des belles choses ? Le sçavoir est un depart qui separe les hommes des hommes, les galants des grossiers, les habiles des sots, & ceux qui ont du merite de ceux qui n’en ont point.
Il remarque que si l’on observait tout ce que ce saint Evêque ordonne à ceux qui veulent aller à la Comédie, les Théâtres seraient bientôt fermés, et il trouve son discours aussi propre à en détourner que ceux des saints Pères, par les dangers qu’il y fait voir ; de même qu’un homme sage ne voudrait pas manger d’une viande, si celui qui la lui présenterait, l’avertissait qu’elle est capable de lui faire un mal considérable. […] La troisième, que tandis qu’on goûte ces plaisirs, mille milliers d’hommes et de femmes souffrent de grands maux dans leurs lits, dans les Hôpitaux, dans les rues, la goutte, la gravelle, la fièvre ardente ; et qu’il viendra un temps où l’on se trouvera dans le même état. […] L’Auteur s’étend fort au long sur tout cela, et il prouve par un autre endroit de saint Thomas, que bien loin d’approuver la Comédie, il a dit dans la 2. 2. q. 167. art.2. ad.2. « Que l’assistance aux Spectacles devient mauvaise, en ce qu’elle porte l’homme aux vices d’impureté et de cruauté, par les choses qui y sont représentées. […] Ainsi les Hommes y prenaient l’habit, et faisaient les personnages de Femmes. […] » Enfin il finit en répondant à ceux qui voudraient ménager à la faveur du plaisir des exemples et des instructions sérieuses pour les Rois, et il dit : « Que les Rois n’apprendront jamais rien au Théâtre : et que Dieu les renvoie à sa Loi pour y apprendre leurs devoirs : Qu’ils la lisent tous les jours de leur vie ; qu’ils la méditent nuit et jour comme un David ; qu’ils s’endorment entre ses bras, et s’entretiennent avec elle en s’éveillant comme un Salomon : que pour les instructions du Théâtre, la touche en est trop légère, et qu’il n’y a rien de moins sérieux, puisque l’homme y fait à la fois un jeu des vices, et un amusement de la Vertu.