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62. (1758) Lettre de J. J. Rousseau à M. D’Alembert « JEAN-JACQUES ROUSSEAU. CITOYEN DE GENÈVE, A Monsieur D’ALEMBERT. » pp. 1-264

Voilà d’où naît la diversité des Spectacles, selon les goûts divers des nations. […] Un Auteur qui voudrait heurter le goût général, composerait bientôt pour lui seul. […] Mais tel est le goût qu’il faut flatter sur la Scène, telles sont les mœurs d’un siècle instruit. […] L’attrait de la chasse et la beauté des environs entretiennent ce goût salutaire. […] Et qu’est-ce au fond que ce goût si vanté ?

63. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quatorzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littérairesn sur le théatre. — Chapitre IV [III]. La Grange & Destouches. » pp. 90-114

Sa mere lui laissa la liberté de suivre son goût. […] Mais c’est le goût de tout ce qui fréquente le théatre. […] C’est le goût, ou plutôt la fureur du théatre qui l’égara. […] La ressemblance de goût & d’idée, qui lui avoit gagné le Cardinal, lui gagna aussi le Duc d’Orléans. […] Tout ce qui porte l’empreinte de la galanterie est si fort du goût des François, qu’on se l’arrache.

64. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE VI. De l’Iconomanie théatrale. » pp. 141-158

Iconomanie, est un mot composé de deux mots, Icon, qui en Grec signifie image, & manie, c’est-à-dire, goût excessif ; passion extrême, espece de fureur, pour quelque chose. Iconomanie est donc la passion pour les images, comme Bibliomanie, passion pour les livres ; Scénomanie, passion pour le théâtre ; Métromanie, passion pour les vers ; Musicomanie, goût excessif pour la musique ; Anglomanie, fureur pour les idées, les manieres angloises : Malicomanie, fureur de dire du mal, idée juste d’un calomniateur, définition juste que fait de lui-même un libelle diffamatoire. […] Voilà qui décele le caractère des hommes, chacun s’arrange selon son goût ; les meubles & les habits sont une espece de Physionomie, qui peint les inclinations. […]  22, fait la gradation de ses progrès : le regard fait naître la pensée, la pensée produit le goût, le goût méne à la délectation, la délectation entraîne le consentement au péché ; l’exécution suivra de près, elle enfantera l’habitude, & la damnation en sera le fruit. […] L’imagination est une espece d’appartement, où l’esprit de l’homme habite, & se repaît des images qu’elle lui trace ; les images en sont comme les meubles & les ornemens, il y a beaucoup d’analogue & de ressemblance entre son imagination & son appartement, lorsqu’il se fait son logement & ses meubles & son goût.

65. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome I « De l’Art du Théatre. Livre prémier. — Chapitre III. Origine des Théâtres. » pp. 22-49

La Comédie se ressentit du goût délicat qui distinguait les Grecs de tous les peuples du monde. […] Ce Peuple si fier & si estimable, honteux de se voir esclave, perdit en même tems son antique valeur & son goût pour les Arts. […] La protection dont Auguste l’honnora, & le goût qu’il conçut pour les Belles-Lettres, paraissaient devoir immortaliser la gloire du Théâtre. […] A la voix de ce grand Roi, les Arts se raniment, les Belles-Lettres fleurissent de toutes parts : le goût, la politesse viennent embellir la France ; & les Spectacles brillent d’un nouvel éclat. […] La dévotion, le goût des Croisades, firent adopter à toute l’Europe des pièces bizares.

66. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre I. Convient-il que les Magistrats aillent à la Comédie ? » pp. 8-25

On joue jusqu’au goût des Magistrats pour le spectacle, ce qui en effet est en eux un vrai ridicule. […] Si le public a perdu la vénération qu’il avait pour les hommes respectables, on peut dater ce changement du temps où ce goût ayant gagné la robe, on l’a vue s’y confondre avec les libertins et le peuple. […] Un jour que Caton y parut, on vit une Actrice fort immodeste, selon le goût et l’usage de ces sortes de femmes, qui ne pouvant soutenir les regards du Censeur, se retira brusquement. […] J’avoue à leur gloire, que si Caton revenait, il ne pourrait se mesurer avec ces Magistrats petits-maîtres pour la délicatesse, le goût fin, et l’élégance de la parure. […] Cependant on perd le goût et l’esprit de son état ; les devoirs qu’on n’aime pas, se remplissent toujours mal.

67. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — [Première partie.] — Seconde Lettre. De madame Des Tianges, À sa Sœur. » pp. 21-24

Celui de se conformer à ce goût général ; de conserver toujours une conscience sans reproche, un esprit sensé, une âme tendre, & de laisser quelquefois échapper au-dehors les apparences de l’étourderie & de la frivolité. […] Point de Pièces dont on ne soit rebattu, d’Acteurs qui soient supportables, d’Actrices qui veulent perfectionner leurs talens ; tout est médiocre ou mauvais… Le goût de ton mari n’en est pas moins vif… Qui l’attirerait ?

68. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre quinzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre VI. Suite d’Anecdotes illustres. » pp. 184-225

La Duchesse du Maine, une des Actrices, le Duc du Maine, dont Madame de Maintenon avoit élevé l’enfance, en prirent si bien le goût qu’ils passèrent leur vie en fêtes, en spectacles dans leur maison de Sceaux ; ce qui a fourni la matière d’un recueil de bagatelles, connu sous le nom de divertissement de Sceaux dont nous parlons ailleurs. […] On prétend que Madame de Montespan inspira ce goût au Roi, elle n’eut point de peine à y réussir ; ce Prince galant & magnifique voulut par-tout montrer sa puissance, il pensoit même que c’étoit donner de l’éclat à ses armes de faire la guerre en se jouant, & insulter à ses ennemis. […] Mais le goût du théatre aveugle, ces hommes ont un nom dans la littérature, mais ils n’en ont point dans l’empire de la religion & de la vertu. […] Chacun de ces grands Artistes donna son dessein & s’épuisa pour tracer le plus beau ; on cherche avec le plus grand soin dans quel heureux quartier on pourroit le construire, chacun choisit, selon son goût, le spectacle, se promena dans tout Paris, chaque quartier plaida pour être enrichi de ce chef-d’œuvre. […] Malgré la faveur & le goût de la Reine, le théatre n’eut pas à Londres ce degré de considération qu’il a eu depuis, & qu’il a maintenant en France ; il s’en faut bien qu’on eut alors profané la sépulture des Rois, en y mêlant les cendres d’une Actrice, ce qu’on n’a pas fait encore en France, & qu’apparemment on n’y fera jamais.

69. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 7 « Réflexions sur le théâtre, vol 7 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SEPTIÈME. — CHAPITRE VII. Sentimens des Prédicateurs. » pp. 168-180

Attentif à profiter du goût des hommes pour les vanités du monde, il les leur présente dans des spectacles les plus séduisans, & en triomphe lors même qu’ils se croient à l’abri de ses traits. […] Il y rassemble tout ce que le monde a de plus éblouissant & de plus propre à inspirer le goût de la volupté. […] L’Auteur & l’Acteur étudient le goût dominant pour s’y conformer, l’exprimer & le communiquer. […] L’un a besoin, & se sert utilement de l’autre, leurs intérêts sont communs, & leurs goûts les mêmes. […] La mortification, la simplicité, la pauvreté, y sont des ridicules ; le goût des choses saintes, le recueillement, la présence de Dieu, le soin des petites choses, la vigilance sur soi-même, l’emploi du temps, l’exactitude à ses devoirs, le rapport de toutes les œuvres à Dieu, en un mot, le corps entier de la piété chrétienne, quelle chimère !

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