C'est donc ainsi que les Chrétiens ont fulminé contre les Jeux Scéniques et contre tous les Mimes et Bateleurs qui n'y paraissaient que pour faire les divertissements du peuple, par des actions et des paroles dignes de la plus grande sévérité des Lois, et qu'ils ont empêché que la sainteté des Chrétiens ne fut souillée par la communication de ces impudences, dont le poison se pouvait aisément glisser dans l'âme par les yeux et par les oreilles : ils n'ont pas traité de la même sorte la représentation des Poèmes Dramatiques, et je ne trouve que fort peu d'endroits qui témoignent ce qu'ils en ont pensé « Comœdiae et Tragœdiae horum meliora Poemata. » Tertull. de Spect. […] observer la différence dont Saint Cyprien se sert pour condamner les Mimes et les Poèmes Dramatiques ; car à l'égard des premiers il blâme leur corruption et leur mollesse plus honteuse que celle des femmes les plus perdues ; mais à l'égard des autres, il blâme seulement les soins et les pensées inutiles que les Comédiens peuvent donner, et ces voix extravagantes et fortes des Tragédiens ; et l'on jugera si ces choses leur pouvaient donner sujet de prononcer contre eux la censure qu'ils ont prononcée contre l'impudence des Histrions et Farceurs « Et hæc sunt tolerabiliora ludorum Comœdiae scilicet et Tragediae. » August de Civit. c. 8.
Quoiqu’il en soit, ce sont certainement de fort mauvaises leçons à donner à des enfans. […] C’est le chef-d’œuvre de la nature théatrale, le dernier dégré de perfection ; & certainement le comble de l’aveuglement de l’amour propre : il est fort au dessus de Cominge & d’Euphemie ; qui ne sont que sombres, & Fayel est terrible. […] Telle la tragedie de Fayel très-tragique certainement ; mais qui par les fureurs & par les barbaries d’un Energumene, soutenu depuis le commencement jusqu’à la fin, n’en est que plus desagréable, & si fort tragique, qu’elle est insoutenable, à la représentation, & à la lecture. […] L’émotion excessive des organes, fut-elle même causée par le plaisir, fatigue, incommode, deplaît, & nuit en effet, A plus forte raison, l’émotion causée par la douleur & la crainte. […] Le plus exquis parfum, s’il est trop fort, entête & fait mal.
Le tems ne partage pas sa course ; il est burlesque de dire qu’il coule, tantôt sur l’un, tantôt sur l’autre : je doute que Moliere doive être fort flatté d’être chanté si mal, d’avoir de pareils admirateurs, & d’avoir formé de pareils éleves. […] qui sont si fort à la mode, eût un grand succès qu’elle ne méritoit pas. […] Trop de femmes étoient intéressées dans cette cruelle affaire, la piéce entiere a été punie du crime de quelques vers ; il est vrai que c’étoit fort imprudemment parlé contre ses juges, & le procès n’en a pas été mieux jugé. […] Peut-elle ne pas en obtenir le pardon, devant des spectateurs Français, si fort indulgens pour le sexe, par une suite de la galanterie nationnale. […] L’auteur des caractères, dit fort plaisamment de ces deux ménages, qui sont aujourd’hui du bon ton pour le bon ordre ; Monsieur garde la maison toute la nuit avec beaucoup d’inquiétude, & Madame pendant le jour fort en repos.
C’étoit le fort de la Favard. […] L’Opéra s’empressa de faire faire de pareils habits, si fort de son goût. […] L’Actrice Philosophe seroit le sujet d’une fort jolie piece. […] On est bien serieux en Paradis ; je doute fort qu’on y aille en plaisantant. […] Leur sera-t-on fort redevables d’avoir formé de pareils Magistrats, & de les avoir fait monter sur les fleurs de lys ?
Il est même fort naturel que nos grands Poëtes ne reçoivent pas chez les Etrangers, tous les honneurs qu’ils méritent. […] Dans une Comédie de Congreve, on détourne un jeune homme de se faire Poëte en lui disant : Fai-toi plutôt Chapelain d’un Esprit fort, ou Complaisant d’une vielle veuve, que Poëte, à moins que tu n’aies assez de talens pour faire revivre parmi nous le Théâtre d’Athenes & rétablir la Poësie. Congreve qui a tant imité notre Moliere, étoit donc persuadé que la Poësie de sa Nation étoit fort éloignée de la perfection. […] Ce jugement est trop dur, mais il est vrai que leurs anciennes Tragédies sont presque toutes fort ennuyeuses, à cause de ces longs Monologues pleins de froides Réflexions, & que l’Action est conduite sans vraisemblance. […] Ils mettent, dit-il, tout leur esprit dans leur Cérémonial, & manquent de ce génie qui anime notre Théâtre ; ils sont très-corrects, & nous endorment, de même que ceux qui dans la Société ne savent faire que des civilités, sont fort insipides.
Car à quoi aboutira le soin qu’il prendra de nous étaler avec emphase les infamies du Théâtre pendant le règne de l’Idolâtrie, et de répéter fort souvent que l’Eglise ne condamnait la Comédie, qu’à cause qu’on y blasphémait le nom de Dieu, qu’on y voyait des ordures abominables et qu’enfin « les Pères ne condamnaient pas absolument les danses, les chants Page 18. […] Balaam fut celui qu’il choisit pour cette cérémonie, mais Dieu conduisit sa langue ; il lui fit bénir Israël, laissant les troupes de Balac dans la malédiction ; et il a conduit encore aujourd’hui la plume du Prêtre consulté par des Comédiens pour lui faire énoncer fort clairement que l’Eglise n’a jamais cessé d’anathématiser les spectacles. […] Certainement il s’en pourrait trouver parmi eux qui mènent une vie laborieuse et appliquée, à qui quelques heures de divertissement dans la semaine conviendraient peut-être bien mieux qu’à la plupart des gens du monde, qui ne se lassent qu’à force d’être oisifs ; et par conséquent si la Comédie était un divertissement fort innocent et fort honnête, les Ecclésiastiques tels que ceux dont je viens de parler qui iraient se délasser une fois la Semaine à la Comédie, seraient peut-être bien plus excusables que ne le sont les gens du monde, et surtout la plupart des femmes, qui ne s’appliquant jamais sérieusement, cherchent mal à propos à se divertir. […] Cependant on serait fort scandalisé de voir à la Comédie des Religieux et des personnes constituées en dignité Ecclésiastique. […] Véritablement quelques personnes s’étaient avisées de dire que Molière avait plus corrigé de défauts à la Cour et à la Ville lui seul, que tous les Prédicateurs ensemble : mais comme a dit fort judicieusement l’Auteur de la République des Lettres Avril. 1684. p. 201.
On peut déclamer fort bien la plus mauvaise piece & fort mal la meilleure. […] L’Héroïde lui tient fort au cœur : il y a mis beaucoup de prétentions, & le public n’en fait aucun cas. […] L’Auteur n’entend pas le grec ; Madame Dacier l’entendoit, & des chansons de crapule ne sont pas difficiles à traduire ; Mais on ne trouve rien de fort agréable dans sa traduction. […] Nous sommes fort heureux qu’il existe à Geneve un vieillard pour nous faire rire. […] Il faudroit copier toutes ces petites pieces qui ne respirent que le libertinage & l’irreligion, d’ailleurs sont fort peu de chose.
Leur idole ou nouveau dieu quitte vitement son échafaud, suivi de sa cambradet, étonné, comme fut tout le reste des joueurs et des spectateurs, non seulement de la pluie du tout extraordinaire, mais aussi des vrais tonnerres d’en haut et de la foudre qui tomba sur une maison proche de celle des jésuites, où elle fit du ravage, dont plusieurs des joueurs fort effrayés depuis sont morts : et tient-on compte de neuf ou dix des principaux, au moinsu. […] Il disait que les diables y conversent privément ès maisons, y servent, et sont appelés Drôles par ceux du pays : il pensent fort soigneusement les chevaux, et autre bétail, se montrent adroits et habiles à faire tout ce qu’on leur commande, sans faire mal ni dommage, ce disent les habitants, tellement que la conversation de ces Drôles est de grand profit et fort agréable à plusieurs maîtres », Les Méditations historiques, traduites du latin par Simon Goulart, vol. 1, Lyon, Antoine de Harsy, 1603 p. 302 (graphie modernisée).