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16. (1675) Traité de la comédie « V.  » p. 279

L'auteur l'arrête où il veut dans ses personnages par un trait de plume ; mais il ne l'arrête pas de même en ceux en qui il l'excite. La représentation d'un amour légitime et celle d'un amour qui ne l'est pas font presque le même effet, et n'excitent qu'un même mouvement qui agit ensuite diversement selon les différentes dispositions qu'il rencontre : et souvent même, la représentation d'une passion couverte de ce voile d'honneur est plus dangereuse, parce que l'esprit la regarde avec moins de précaution, qu'elle y est reçue avec moins d'horreur, et que le cœur s'y laisse aller avec moins de résistance.

17. (1768) Instructions sur les principales vérités de la religion « CHAPITRE LII. De la Comédie et des Spectacles ? » pp. 142-146

Tout ce qui est capable de réveiller les passions, d’exciter la concupiscence de la chair et des yeux, et l’orgueil de la vie, s’y réunit. […] Quant aux sujets qui sont le fond et la base de la comédie, sans compter les bouffonneries, les extravagances, les sauts et les gestes dissolus ; ces femmes et ces Acteurs qui exposent leur vie en se balançant, en voltigeant indécemment sur des cordes, que voit-on dans le reste, qu’une peinture des passions, plus propre à les exciter qu’à les éteindre. […] En vérité, un Chrétien se peut-il croire innocent dans le plaisir qu’il prend à voir, à entendre ce qui excite en lui tant de passions différentes ?

18. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — I.  » pp. 455-456

Il faut qu'ils les expriment le plus naturellement et le plus vivement qu'il leur est possible, et ils ne le sauraient faire, s'ils ne les excitent en quelque sorte en eux-mêmes, et si leur âme ne prend tous les plis que l'on voit sur leur visage. […] Ainsi la Comédie, par sa nature même, est une école et un exercice de vice, puisque c'est un art où il faut nécessairement exciter en soi-même des passions vicieuses.

19. (1675) Traité de la comédie « II.  » pp. 275-276

Il faut qu'ils les expriment le plus naturellement, et le plus vivement qu'il leur est possible ; et ils ne le sauraient faire s'ils ne les excitent en quelque sorte en eux-mêmes, et si leur âme ne se les imprime, pour les exprimer extérieurement par les gestes, et par les paroles. […] Ainsi la Comédie par sa nature même est une école et un exercice de vice, puisqu'elle oblige nécessairement à exciter en soi-même des passions vicieuses.

20. (1702) Lettre de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour. Lettre de Lettres curieuses de littérature et de morale « LETTRE. de M. l’Abbé de Bellegarde, à une Dame de la Cour, qui lui avait demandé quelques réflexions sur les pièces de Théâtre. » pp. 312-410

Sentiments, c’est tout ce qui fait la matière du discours ; tous ces traits vifs et éclatants, qui excitent les passions. […] Si le Héros que l’on représente sur le Théâtre, n’a une grande vertu, on n’est que médiocrement touché de ses infortunes ; la vertu affligée excite cette pitié tendre, qui fait le plaisir le plus délicat de la Tragédie ; mais si le Héros tombe dans la disgrâce par sa faute, ou par son imprudence, ou après avoir commis quelque mauvaise action, on se sent indigné contre ses vices, et peu attendri de ses maux : La punition d’un méchant homme est une chose ordinaire, qui n’excite pas de grands sentiments. […] Pour exciter ce sentiment dans le cœur du spectateur, il faut que le Poète amène avec art les aventures de son Héros ; et que la perfidie de ceux qui lui sont unis par les liens du sang, de l’amitié, ou de l’amour, le fassent tomber dans le malheur. […] Le Poète doit avoir grand soin de réserver le plus tragique pour la fin de la pièce, et pour en faire le dénouement, afin d’exciter de plus grandes passions dans l’âme des Auditeurs. […] La qualité des personnes qui souffrent, leurs vertus, leur sexe, leur âge, les dispositions de ceux qui les font souffrir, la nature des peines qu’elles endurent ; tout cela peut beaucoup contribuer à exciter la compassion.

21. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre IV. Les spectacles inspirent l’amour profane. » pp. 32-50

Loin de l’exciter en soi et dans les autres, il faut au contraire faire des efforts continuels pour la contenir dans les bornes que la raison et la religion lui ont prescrites. Aussitôt qu’on cesse de la combattre, et qu’on recherche ce qui la flatte et l’excite, elle rompt tous les liens qui la retenaient ; elle ne connaît plus de bornes. […] D’ailleurs la représentation d’un amour légitime, et la représentation d’un amour qui ne l’est pas, font presque le même effet, et n’excitent qu’un mouvement qui agit ensuite diversement, selon les différentes positions qu’il rencontre. […] Ne sait-on pas que toutes les passions sont sœurs, qu’une seule suffit pour en exciter mille, et que les combattre l’une par l’autre n’est qu’un moyen de rendre le cœur sensible à toutes ? […] Mais Corneille, Racine, Molière, Voltaire et tous les poètes modernes ne se sont occupés dans leurs drames qu’à exciter l’amour.

22. (1694) Réfutation des Sentiments relâchés d'un nouveau théologien touchant la comédie « Réfutation des sentiments relachés d'un nouveau Théologien touchant la Comédie. » pp. 1-190

Mais il faudra sortir de ce retranchement si je vous fais voir que le dessein, la fin et tout le but de la Comédie d’à présent est d’exciter et d’émouvoir les passions : sans doute ce ne sera pas par hasard qu’elle les excitera. […] Je veux bien faire cette différence avec vous ; mais il faut que j’ajoute, qu’il y en a encore entre exciter en effet, et avoir le dessein et la fin d’exciter, quoiqu’on n’excite pas toujours ; et c’est ce qui vous a trompé, ou que vous n’avez pas connu, ou que vous avez tu par adresse. Parce que la Comédie n’excite pas toujours les passions, vous avez cru, ou du moins dit, que sa fin et son dessein n’était pas de les exciter, et que si elle les excitait quelquefois, ce n’était que par hasard : et moi je prends le contre-pied, et je dis que si la Comédie dans l’usage ordinaire d’à présent n’excite pas toujours les passions, ce n’est que par hasard, parce que sa véritable fin et tout son but est de les exciter. […] Le désir, et le dessein de plaire, est ce qui conduit l’Auteur et qui anime l’Acteur, celui d’être touché, est ce qui attire le spectateur : ce qui ne pouvant s’exécuter sans que les passions soient excitées, il est évident que tout le but de notre Comédie est de les exciter, que ce n’est pas par hasard qu’elle les excite, et quoiqu’elle ne les excite pas toujours, c’est contre sa véritable fin et son principal dessein ; qu’il est toujours vrai de dire qu’elle les excite dans un grand nombre, qu’elle peut les exciter dans tous, et qu’elle le doit même faire plus ordinairement, si on considère de bonne foi, quel est l’empire naturel d’une représentation vive, jointe à une expression passionnée sur le tempérament des hommes. […] [NDE] Comprendre : l’harmonie de l’âme est fort ébranlée (…) en ce que la comédie excite

23. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « LIVRE QUATRIEME. » pp. 1-3

A entendre quelques-uns de ses apologistes, on dirait qu'il ne mérite que des éloges, pourvu qu'on le purge des infamies de l'impureté ; comme si l'amour était la seule passion qu'il excite, ou la seule qui soit à craindre ! […] Il n'est pas difficile de montrer que le théâtre remue et excite toutes les passions.

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