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15. (1664) Traité contre les danses et les comédies « Chapitre XIV. Que les danses sont aussi défendues les jours des Fêtes par les lois Canoniques. » pp. 76-93

Je dis donc que ces Canons dans la prohibition de la danse, n’ont parlé que des divins Offices, parce que les saints Conciles n’ont pas jugé qu’on peut dans un même jour vaquer aux mêmes Offices divins, et s’adonner aux divertissements du monde. […] Et quand bien même les Offices divins, et les exercices pour lesquels les fidèles s’assemblent, ne rempliraient pas entièrement le temps ; les Constitutions de l’Eglise ne permettraient pas néanmoins qu’on l’employât au jeu et à la danse, parce que la raison principale et fondamentale, pour laquelle on doit retrancher ces divertissements, subsiste toujours, qui est l’obligation de sanctifier les Fêtes, établie dans la loi de Dieu même. […] Puisque donc les Empereurs ont si absolument défendu toute sorte de jeux, de divertissements séculiers, et de plaisirs sensuels, afin que le peuple fidèle sanctifiât les Fêtes, et vaquât de tout son cœur aux choses de Dieu ; ce serait faire injure à l’autorité Sacerdotale, et à la puissance Ecclésiastique de penser que des saints Evêques eussent été moins exacts qu’eux dans leurs Ordonnances sur ce sujet, principalement puisque nous voyons qu’ils ne parlent jamais dans leurs écrits des jeux et des spectacles, qu’avec horreur et avec exécration. […] On sait assez que le nom de spectacle comprend généralement toute sorte de divertissements qui ont été fréquentés, et qui sont recherchés pour le plaisir ; et les lois que nous avons citées dans le Chapitre précédent le déclarent encore assez. […] D’ailleurs, la raison sur laquelle ces lois sont appuyées, regarde la danse aussi bien que les autres divertissements mondains ; car elles prohibent ces divertissements, parce que les jours des Fêtes sont destinés à gémir humblement : l’on ne fait pas moinsd au bal, et à la danse qu’à la comédie et aux autres spectacles.

16. (1675) Traité de la comédie « XXI.  » p. 309

Il s'ensuit de là que tous ceux qui n'ont point besoin de divertissement, c'est-à-dire que la plupart de ceux qui vont à la Comédie, ne le peuvent faire sans péché; quand il n'y aurait point d'autre raison de la croire défendue. Mais il ne s'ensuit pas que ceux qui ont véritablement besoin de se délasser l'esprit puissent y aller sans péché, parce que la Comédie ne peut passer pour un divertissement, ne pouvant avoir l'effet qu'il est permis d'y chercher. […] Or tant s'en faut que la Comédie y puisse servir, qu'il n'y a rien qui rende l'âme plus mal disposée, non seulement aux principales occupations Chrétiennes, comme la prière, mais aux actions mêmes les plus communes, lorsqu'on les veut faire dans un esprit de Chrétien, c'est-à-dire recueilli et attentif à Dieu, qu'il faut tâcher, autant que l'on peut, de conserver dans les actions extérieures; ainsi comme le besoin que nous avons de manger ne fait pas qu'il nous soit permis de manger des viandes qui ne servent qu'à affaiblir le corps; de même le besoin de se divertir ne peut excuser ceux qui cherchent des divertissements qui ne font que rendre leur esprit moins propre à agir Chrétiennement.

17. (1687) Instruction chrétienne pour l’éducation des filles « CHAPITRE XIII. Des jeux, des spectacles, et des bals, qui sont défendus aux Filles Chrétiennes. » pp. 274-320

Il viendra un jour où vous demanderez du temps pour faire pénitence : mais Dieu vous le refusera, dit l’Ange de l’Apocalypse, la femme et la Fille sage font toutes deux leur divertissement de leur occupation, et la femme et la Fille insensée font leur occupation de leurs divertissements ; il faut donc se faire une joie et un plaisir de s’occuper toujours ; et de faire son devoir. […] montre et prouve fortement, que la Religion Chrétienne a une aversion extrême pour ces sortes de divertissements, qu’elle les abhorre, et qu’elle ne les peut supporter. […] Il appelle ces habits somptueux, ces nudités, ces pruderies, ces rubans, ces frisures, ces cadences, ces bals et tous ces divertissements mondains, des escadrons de concupiscence. […] Il y a néanmoins d’honnêtes divertissements, qui sont permis, et que l’on peut prendre sans crime ; et il y a, dit l’Apôtre aux Philippiens, une sainte joie, qui est selon Dieu. […] Ce qui est défendu dans les divertissements ; c’est de les prendre avec trop d’affection, trop d’attache, et d’y mettre son cœur.

18. (1666) Dissertation sur la condemnation des théâtres « Disseration sur la Condemnation, des Théâtres. — Chapitre XII. Que la représentation des Comédies et Tragédies ne doit point être condamnée tant qu'elle sera modeste et honnête. » pp. 237-250

Quand on renouvela ce divertissement dans l'Europe, il commença par des Satires aigres et mordantes qui tirèrent bientôt après elles le libertinage, et cela fut corrigé par les Histoires Saintes que l'on y fit représenter ; et les personnes de piété en prenaient tant de soin, que l'on forma cette Confrérie de la Passion, qui possède encore l'Hôtel de Bourgogne, où l'on représentait des Histoires Saintes ; et où maintenant on en représente encore de toutes sortes. […] Il est certain néanmoins que depuis quelques années notre Théâtre se laisse retomber peu à peu dans sa vieille corruption, et que les Farces impudentes, et les Comédies libertines, où l'on mêle bien des choses contraires au sentiment de la piété, et aux bonnes mœurs, ranimeront bientôt la justice de nos Rois, et y rappelleront la honte et les châtiments ; et j'estime que tous les honnêtes gens ont intérêt de s'opposer à ce désordre renaissant, qui met en péril, et qui sans doute ruinera le plus ordinaire et le plus beau des divertissements publics ; Car l'opinion des doctes Chrétiens, est que la représentation des Poèmes Dramatiques ne peut être condamnée quand elle est innocente, quand elle est honnête. […] Il propose comme une grande difficulté dans l'instruction qu'il nous donne touchant la modestie, « Que les Histrions semblent pécher contre cette vertu par l'excès du divertissement, en ce qu'ils n'ont point d'autre pensée en toute leur vie que de jouer. […] Ce qui n'est pas véritable ; au contraire, nous lisons dans la vie des Pères que Saint Paphnuce apprit par révélation qu'un certain Acteur de son temps serait quelque jour égal en la possession de la gloire du Ciel. » Et pour réponse à cette objection cet illustre Théologien dit, « Que le divertissement est nécessaire à l'entretien de la vie humaine, et que pour y parvenir on peut établir quelques emplois licites, comme l'art et le ministère des Histrions ; que quand on le fait pour cette fin, on ne peut pas dire que leur exercice soit défendu, ni qu'ils soient en état de péché quand ils le font avec quelque modération, c'est-à-dire, sans y mêler des paroles malhonnêtes, et des actions impudentes, pourvu que ce soit en des temps, et parmi des affaires qui n'y répugnent pas. […] D'où il s'ensuit que ceux qui leur font des libéralités, ne pèchent point, et qu'au contraire ils font justice en les payant du service qu'ils en reçoivent, si ce n'est qu'ils y consument leur bien en de vaines profusions, ou qu'ils le donnent à des Bouffons qui ne s'emploient qu'à des divertissements illicites, parce que c'est entretenir et favoriser leur péché. » Je veux bien qu'en cet endroit S.

19. (1768) Instructions sur les principales vérités de la religion « CHAPITRE LII. De la Comédie et des Spectacles ? » pp. 142-146

Mais, dira-t-on, je n’y vais que par divertissement, je n’y ai jamais eu ni mauvaises pensées ni tentations. […] S’il vous faut quelque divertissement, faites comme d’autres, qui, sans aller aux bals et à la comédie, savent se divertir innocemment. […] Loin d’approuver ces sortes de divertissements, il a écrit tout ce qui est capable d’en faire connaître le ridicule, le danger et le venin. […] N’alléguez point, qu’étant lié avec le monde, vous ne pouvez vous dispenser de faire comme les autres, ni vous passer de ces sortes de divertissements.

20. (1731) Discours sur la comédie « PREMIER DISCOURS SUR LA LETTRE DU THEOLOGIEN DEFENSEUR DE LA COMEDIE » pp. 2-32

Il n’est certainement pas possible qu’on ne trouve étrange, qu’un Prêtre obligé par son état à inspirer aux fidèles la fuite des divertissements dangereux, les y porte par un Ouvrage exprès, et qu’il détermine à faire des Comédies un Auteur qui craint de blesser sa conscience dans un semblable travail. […] Dira-t-on que les divertissements du siècle sont interdits aux Ecclésiastiques ? Mais ne leur est-il pas permis de se délasser quelquefois par des promenades, par des conversations ou par quelqu’un de ces divertissements, qui d’eux-mêmes sont indifférents, et qui sont même quelquefois nécessaires de peur que l’esprit et le corps ne succombent sous une application, et des fatigues continuelles ? Certainement il s’en pourrait trouver parmi eux qui mènent une vie laborieuse et appliquée, à qui quelques heures de divertissement dans la semaine conviendraient peut-être bien mieux qu’à la plupart des gens du monde, qui ne se lassent qu’à force d’être oisifs ; et par conséquent si la Comédie était un divertissement fort innocent et fort honnête, les Ecclésiastiques tels que ceux dont je viens de parler qui iraient se délasser une fois la Semaine à la Comédie, seraient peut-être bien plus excusables que ne le sont les gens du monde, et surtout la plupart des femmes, qui ne s’appliquant jamais sérieusement, cherchent mal à propos à se divertir. […] Et en voici un, qui la tête levée engage les Comédiens à ne fermer jamais leur Théâtre, parce qu’il peut toujours se trouver quelqu’un qui sera bien aise d’en avoir le divertissement.

21. (1694) Maximes et Réflections sur la Comédie « XXII. On vient à saint Thomas : exposition de la doctrine de ce Saint. » pp. 79-81

La question qu’il propose dans l’article second est à savoir s’il y a des choses « plaisantes, joyeuses : ludicra, jocosa » : qu’on puisse admettre dans la vie humaine ; « tant en actions qu’en paroles, dictis seu factis » : en d’autres termes, s’il y a des jeux, des divertissements, des récréations innocentes : et il assure qu’il y en a, et même quelque vertu à bien user de ces jeux, ce qui n’est point révoqué en doute : et dans cet article il n’y a pas un seul mot de la comédie : mais il y parle en général des jeux nécessaires à la récréation de l’esprit, qu’il rapporte à une vertu qu’Aristote a nommée eutrapelia De mor. 4. 14. […] Au troisième article la question qu’il examine est à savoir s’il peut y avoir de l’excès dans les divertissements et dans les jeux ; et il démontre qu’il peut y en avoir, sans dire encore un seul mot de la comédie au corps de l’article, en sorte qu’il n’y a là aucun embarras. […] Quoi qu’il en soit, Saint Thomas s’objecte à lui-même, que dans cet art, quel qu’il soit et de quelque façon qu’on le tourne, on est dans l’excès du jeu, c’est-à-dire du divertissement, puisqu’on y passe la vie, et néanmoins la profession n’en est pas blâmable.

22. (1694) Réfutation d’un écrit favorisant la Comédie pp. 1-88

Ces deux préceptes ne sont-ils pas violés, quand un Abbé, pour donner du divertissement aux Dames, met par an quarante ou cinquante louis d’or à la Comédie, dans un temps où les pauvres meurent de faim et de misère. […] Oui mes frères, c’est le démon qui a fait un Art de ces Divertissements et de ces Jeux, pour attirer à lui les Soldats de Jésus-Christ, et pour relâcher toute la vigueur et comme les nerfs de leur vertu. […] Ce qui a fait dire à Cicéron au livre 1. des Offices : Il y a une espece de divertissement indigne d’un honnête homme, qui est insolent, criminel, impur. […] Ces personnes se croient en sûreté, quand elles ont demandé, s’il y a péché mortel à prendre ces divertissements : elles veulent une réponse juste et décisive. […] Quel souvenir peut-on conserver de Dieu, de sa Loi sainte, et de ses jugements, au milieu d’un tel divertissement ?

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