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379. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre I. Continuation des Mêlanges. » pp. 7-31

La Jérusalem délivrée du Tasse, malgré tous les bons services que lui a rendus son traducteur M. de Mirabeau, en corrigeant, élaguant, adoucissant tout ce qu’il a cru avoir besoin de correction comme un bon jardinier qui approprie un grand parterre, en arrache les mauvaises herbes, taille les arbres, arrange les fleurs, &c. la Jérusalem délivrée a encore bien des défauts : la critique de Boileau, qu’on a trouvé severe, n’est pas si injuste. […] Depuis la boucherie des Templiers jusqu’à la mort du Chevalier de la Barre, on croit lire l’Histoire des Sauvages, on frémit un moment, & on va à l’Opera. […] Qui croiroit cependant qu’il ne parle pas des Vies des Saints, où on ne voit que de bonnes œuvres, à l’exceptions des crimes de leurs persecuteurs, qui font leur grande sainteté, & les égaremens de leur jeunesse, dont ils ont fait penitence. […] Depuis qu’ils se croient des Messieurs & des Dames (de haut parage) ils se sont arrogé le droit de juger les auteurs & leurs ouvrages. […] Malgré les arrêts du Parlement de Paris, & la défense faite à tous les Colléges d’y jouer des Comédies, le petit Collége de Vernon a cru se donner du relief en jouant Grégoire du P. du Cerceau, suivi d’un ballet.

380. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 2 « Chapitre III. Jurisprudence du Royaume. » pp. 51-74

On peut croire après cela que ce grave Magistrat était bien éloigné de les fréquenter et d’y souffrir les arbitres de la justice : « Scenica arti spectacula ut irritamenta vitiorum, et ad corrumpendos animos potentissime valentia, caute et studiose vitanda. » (pag. 364.) […] Il faut croire qu’il ignorait que les conciles, les saints Pères, les lois Romaines, les canons, les Magistrats, les avaient condamnées. […] Montaigne, qui se vantait de connaître le monde, croyait-il le public décidé pour la modestie, le protecteur zélé des bonnes mœurs ? […] Ce qu’on peut conclure à Rome, à Venise, à Naples, de la tolérance publique des femmes de mauvaise vie, desquelles on tire quelque profit, sur lesquelles la police veille avec le plus grand soin, pour le maintien de l’ordre ; qu’il est des maux presque inévitables qu’on croit devoir tolérer. […] Leur exemple a été contagieux, l’indécence a gagné du théâtre dans le monde ; par une criminelle émulation, les femmes se font gloire de l’imiter, et elles croient se donner des grâces, en s’habillant comme des Actrices.

381. (1704) Des Bals et Comedies « Des Bals et Comedies. » pp. 31-33

Nous exhortons tous les Fidèles que la Providence nous a confiés de s'abstenir de ces faux et malheureux plaisirs du Siècle, où quand on s'abuserait assez pour croire que l'on n'y fait aucun mal, on ne saurait se défendre de celui qu'y font les autres, et comme les complices du péché selon St.

382. (1667) Traité de la comédie « Traité de la comédie — VIII.  » p. 462

Que ceux et celles qui ne sentent point que les Romans et les Comédies excitent dans leur esprit aucune de ces passions que l'on en appréhende d'ordinaire ne se croient donc pas pour cela en sûreté, et qu'ils ne s'imaginent pas que ces lectures et ces spectacles ne leur aient fait aucun mal.

383. (1675) Traité de la comédie « IX.  » pp. 284-285

Que ceux donc qui ne sentent point que les Romans et les Comédies excitent dans leur esprit aucune de ces passions que l'on appréhende d'ordinaire, ne se croient pas pour cela en sûreté, et qu'ils ne s'imaginent pas que ces lectures et ces spectacles ne leur aient fait aucun mal.

384. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre douzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et litteraires, sur le théatre. — Chapitre III.  » pp. 68-96

Croiroit-on que Corneille, Moliere, La Fontaine, Lulli sans compter Guerin, enfin l’abbé Aubert se soient exercés sur ce sujet ridicule, chacun à sa maniere ? […] Je ne suis pas moins surpris de le voir prosterné aux pieds de La Fontaine avec une vénération qu’on n’a pas dans ce siécle pour les livres saints ; il se tue à excuser son attentat, d’avoir osé travailler après ce prodige, & trouver dans cet auteur divin quelque legere négligence, qu’il a cru ne devoir pas imiter, quelques endroits qu’il a cru devoir retoucher, & qui en effet sont mieux que dans son modele. […] Moliere, La Fontaine sont pleins de platitudes, on croit avoir des chefs d’œuvre jusques dans leurs Errata. […] Comparaisons plaisantes avec le visage d’une femme, sermon au reste qu’il assure être assez inutile, parce que l’amour de la parure est dans toutes les femmes une passion invincible ; fussent-elles dans un désert, sur le mont Athos rùre latent fingunt qui comas , (frisent leur cheveux :) licet arduus illas celèt athos cultas altus habebit athos  ; n’y eût-il que le plaisir de se plaire à elles-mêmes, aucune qui ne se croie belle, & ne cherisse ses attraits ; ut etiam placuisse tibi quotacumque voluptas, virginibus cordi est grataque forma tibi . […] La Magicienne Medée me rappelle la magicienne Circé sa parente, dont les avantures galantes ornent l’Odissée d’Homere, & les Métamorphoses d’Ovide, deux célebres Romans aussi pleins de folies que nos Contes des Fées : mais aussi bien écrits dans leur langue, & utiles quelquefois par la bonne morale qu’ils renferment ; je veux le croire, tachons donc d’en tirer du fruit.

385. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE VII. Du Père Porée. » pp. 149-177

Quel homme sage voudroit conserver ce qu’il croit mauvais & pernicieux, parce qu’avec de grandes difficultés & un succès très-douteux il est absolument possible de le bonifier ? […]  21. plus indulgent, croit que ce n’est souvent qu’un péché véniel, quoique très-facilement mortel. […] Il examine ensuite le sentiment singulier d’un Théologien qui croit qu’on n’est pas obligé de fuir, mais seulement de ne pas rechercher les occasions du péché, même les plus dangereuses, parce qu’on est libre d’y résister. […] Croira-t-on que c’est le plus relâché Casuiste, & ce à quoi se réduit la morale la plus relâchée ? […] L’Auteur sur cette question cite des Casuistes qui traitent cette folle dépense de péché véniel ; mais il combat leur sentiment, & croit le péché mortel avec le commun des Théologiens.

386. (1715) La critique du théâtre anglais « CHAPITRE IV. Le vice élevé en honneur et substitué à la place de la vertu sur le Théâtre Anglais. » pp. 240-301

Afin donc d’échapper à l’objection qu’on lui fait fondée sur l’autorité, il se jette dans un raisonnement tiré de la nature même de la chose, à ce qu’il tâche de croire. […] Un homme de bon sens eût cru gâter tout par là ; mais Torrismond, grâces au Poète a de quoi prévenir le mal : l’impiété est un spécifique, qui chez nos Auteurs remédie à tout. […]  » Pour moi, je crois que si Céladée avait demandé au lieu du Chaos une voiture, et s’était jetée dedans pour porter chez elle son extravagance frénétique, elle eût été beaucoup plus sage et beaucoup plus dans le caractère de son sexe. […] Je le croirais volontiers : car lorsqu’un homme en est réduit à un aussi pauvre expédient ; n’est-ce pas une grande misère ? […] Monsieur, sans présumer trop de ma figure, permettez-moi de vous dire que si vous aviez vu autant de Milords que j’en ai vu, vous ne croiriez pas impossible qu’une personne de pire apparence que moi pût être un homme de qualité à la moderne.

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