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110. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE II. Théatres de Société. » pp. 30-56

Le spectacle public fait le portrait des mœurs publiques, celui-ci décelle le secret du cœur des familles amatrices. On y garde moins de mesures qu’à la comédie, le cœur s’y épanche sans obstacle, & s’y livre à son goût avec liberté. […] Lusignan paroît, tous les cœurs commencent à s’émouvoir à la vue de ce vieillard vénérable. […] que tant de traits lancés par l’amour ont toujours trouvé le cœur insensible ? […] Le suffrage, l’exemple de tant de cœurs dépravés peut-il donc rassurer une ame timorée qui veut se sauver ?

111. (1738) Sentimens de Monseigneur Jean Joseph Languet Evéque de Soissons, et de quelques autres Savans et Pieux Ecrivains de la Compagnie de Jesus, sur le faux bonheur et la vanité des plaisirs mondains. Premiere partie « Sentimens de quelques ecrivains De la Compagnie de Jesus, Touchant les Bals & Comedies. Premiere Partie. — Entretien troisieme. Le danger des Bals & Comedies découvert par l’Auteur des Sermons sur tous les sujets de la morale Chrétienne de la Compagnie de Jesus. » pp. 26-56

Elle se prend de maximes incontestables, & de cette décision reçûë de tous les Docteurs, que c’est déja un peché grief, que de s’exposer volontairement & de gayeté de cœur, à commettre un peché. […] Dans les concerts qui entrent souvent dans ces divertissemens, si ce que l’on chante n’est passionné, & n’amollit le cœur, peut-on seulement les écouter ? […] & pour cela, qu’ils l’impriment eux-mêmes dans leur cœur, afin de l’exprimer par leurs gestes, & par leurs paroles ? […] Peut-on se figurer que leur cœur en soit fort dégagé, lorsqu’il marque y avoir tant de passion ? ou du moins n’y a-t-il point de danger que leur cœur ne s’y corrompe par le plaisir même qu’ils ont a le voir ?

112. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VIII. Sentimens de S. Chrisostome. » pp. 180-195

C’est celui du grand Juge qui doit juger de toutes vos actions : Regarder une femme avec un mauvais désir, c’est, dit-il, avoir commis l’adultère dans son cœur : Jam mœchatus est in corde. […] Une Actrice est un chêne qui ne porte que du gland pour nourrir des pourceaux : son amour a poussé dans votre cœur de profondes racines ; il en coûte de les arracher. […] Vous l’avez commis par vos désirs ; la flamme de la concupiscence embrase votre cœur. […] Dieu ne dit pas moins aux gens mariés qu’aux Religieux : Si vous regardez une femme avec un mauvais désir, vous avez commis adultère dans le cœur. […] Vous courez en foule au théatre, comme vous iriez à l’entrée de quelque Ambassadeur ou de quelque Général d’armée, pour remplir vos cœurs & vos oreilles d’infamie.

113. (1834) Discours sur les plaisirs populaires « Discours sur les plaisirs populaires, les bals et les spectacles » pp. 1-33

« Ces jouissances amollissent ton cœur, et le rattachent aux biens périssables de la terre. […] mes frères, admirons, nous, dans la sincérité de notre cœur, cet exemple de bienveillance et de sociabilité pratique, et bénissons la bonté de Jésus. […] Et n’est-ce pas un soin digne de deux personnes vertueuses et chrétiennes qui cherchent à s’unir, de préparer ainsi leur cœur à l’amour mutuel que Dieu leur impose ?  […] comme il n’est pas dans notre cœur de repousser l’anathème par l’anathème, nous vous supplions d’arrêter les effets de ces menaces que votre divin Fils adresse aux faux interprètes de sa loi, et encore de celles qui terminent cette terrible allocution. […] Etouffez, ô mon Dieu, dans le cœur de vos ministres, cet esprit de domination, de fanatisme et d’intolérance qui les anime, les agite !

114. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE IV. Apologie des Dames. » pp. 119-155

Les gens sages ne voient dans leur simplicité qu’un gage précieux de la pureté de leur cœur. […] Quel cœur assez farouche et quelle âme inhumaine Pourrait être insensible aux douleurs de la Reine ? L’assemblage parfait de toutes les vertus, Est l’objet des soupirs de nos cœurs abattus. […] Ton cœur ne sait-il pas me rendre mieux justice ? […] Je me reprocherais comme un vice honteux de mon cœur d’être sorti d’une représentation de Zaïre sans avoir pris pour elle le plus tendre intérêt : c’est le tribut que tout cœur vertueux doit payer à la Vertu malheureuse.

115. (1731) Discours sur la comédie « TROISIEME DISCOURS » pp. 304-351

"La charité qui est selon Dieu doit procéder d’un cœur pur, d’une bonne conscience et d’une foi sincère 1. […] Le choix même des sujets qu’on croit les plus propres pour le Théâtre, est une nouvelle cause d’altération, parce qu’on en choisira qui donneront lieu aux spectateurs d’altérer l’Ecriture dans leur esprit et dans leur cœur. […] « Quel chemin ai-je pris pour entrer dans son cœur, Et pour y faire naître un amour exécrable ? […] …… Que de troubles cruels s’élèvent dans mon cœur. […] Savent-ils ces admirables règles que Saint Augustin a si bien développées dans les livres de la Doctrine Chrétienne, pour expliquer l’Ecriture ; règle néanmoins qu’ils devraient posséder parfaitement, ou plutôt il faudrait qu’ils eussent dans le cœur les saintes dispositions que ce grand Docteur demande ; car le cœur contribue autant que l’esprit à bien entendre la parole de Dieu S.

116. (1680) Entretien X. Sur la Comédie « Entretien X. sur la Comedie » pp. 363-380

Tout cela, ne sont-ce pas autant de fortes attaques, données par les yeux, & par les oreilles, au cœur des personnes, qui écoutent ce qui se déclame, & qui voyent le spectacle d’une comédie, pour y porter des impressions d’amour, en leur amolissant la volonté ; en leur gravant dans l’i-imagination des images, & des representations moins honnêtes ; & en leur laissant dans la memoire des idées, qui ont toûjours quelque chose de sensuel ? […] Je demande si cette disposition de l’esprit, & du cœur secondant elle-méme les sollicitations moles, & douces de ces objets, il est possible, qu’on s’en défende, sans s’y laisser aller fort sensüellement ? […] Car de penser, que parmi tant de charmes pour les yeux, & pour les oreilles, que présente le Théatre, l’on puisse y estre avec un cœur invulnérable, & une pureté toûjours exacte & délicate, c’est une idée, & tout ensemble une témérité, qui mérite, que l’on perde, ce que l’on prétend conserver. […] Le prémier est, que toutes les personnes, qui fréquentent ces sortes de spectacles, ne peuvent avoir d’ordinaire aucun sentiment de pieté ; car ces bons sentiments, dont une ame peut estre touchée ne viennent, que des saintes pensées, dont auparavant elle a esté remplie ; & encore le cœur a-t’il bien de la peine à goûter les choses divines, quelque plénitude de connoissance, qui aîr pü précéder ; c’est sa dureté naturelle, c’est son fond de corruption, c’est son oposition à la pieté, qui fait tout cela. […] Toutes ces choses au contraire desseichent infiniment le cœur, & le rendent incapable de tous les mouvemens, que la grace y pourroir insurüer : Vous n’en pouvez pas doûter, Madame, si jamais vous avez aimé la comédie, comme vôtre ame alors a esté éloignée de la dévotion, pour laquelle vous n’aviez, qu’un extréme dégoût, parce que vous astiez toute pénétrée du dégoût de la comédie.

117. (1770) Des Spectacles [Code de la religion et des mœurs, II] « Titre XXVIII. Des Spectacles. » pp. 368-381

Les préceptes peuvent diriger, les récompenses encourager, les menaces intimider, les peines arrêter ; mais un exercice qui, éclairant l’esprit, le formeroit ; qui, touchant le cœur, le corrigeroit ; qui, faisant connoître la vertu, la rendroit aimable ; qui, montrant le vice, en découvriroit la laideur, seroit le plus beau présent qu’on pût faire au public. […] Dans nos représentations antiques & grossières, l’esprit à la vérité ne brilloit pas, mais le cœur y gagnoit ; nos pères s’y délassoient ; ils en sortoient meilleursa. On n’offroit à leurs yeux que des Acteurs modestes : leurs oreilles n’entendoient que des leçons de vertu : le cœur en recevoir l’empreinte, elle s’étendoit sur toutes les actions. Aujourd’hui tout est renversé dans les spectacles qu’on nous offre ; si l’esprit paroît y gagner, le cœur à coup sûr y perd, ou plutôt le cœur & l’esprit y perdent. […] Tout en est mauvais & pernicieux ; tout tire à conséquence pour les spectateurs ; & le plaisir même du Comique étant fondé sur un vice du cœur humain, c’est une suite de ce principe, que plus la Comédie est agréable & parfaite, plus son effet est funeste aux mœurs ».

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