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356. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [A] » pp. 297-379

Les Spectacles , dit-on, en passant des Payens aux Chrétiens, n’ont fait que changer de nom. […] Alors, rassasié de carnage, le Chrétien commença de s’épargner lui même : le noir Africain, l’Américain infortuné, voila des victimes qui suffisent à la soif de sang qui le dévore. […] Le Rit Chrétien, le moins cérémonieux qui fut jamais, lorsqu’il fut devenu la Religion des Empereurs, abandonna son appareil simple, & prit, comme les autres, une pompe extérieure. […] Je dis plus ; en condannant toute espèce d’amusement, de Spectacles, & les Drames de quelque genre qu’ils soient, le Chrétien raisonne conséquemment. […] Pourquoi voir dans nos Prêtres, autre chose que des Citoyens estimables, qui se consacrent à la concorde publique ; des Professeurs de bénignité, d’humanité, de bonhommie chrétienne ?

357. (1770) Des Spectacles [Code de la religion et des mœurs, II] « Titre XXVIII. Des Spectacles. » pp. 368-381

Qu’on nous donne des piéces que les oreilles chrétiennes puissent entendre : qu’on les représente avec la décence qui convient à des chrétiens : que la vertu y soit peinte avec les graces, le vice avec les traits qui leur sont propres ; on ramenera les spectacles à la fin de leur première institution, & les Loix n’auront plus à condamner des abus qui deshonorent notre siècle, qui font gémir la Religion & la pudeur.

358. (1833) Discours sur les spectacles « [Discours sur les spectacles] » pp. 3-16

Que signifient ces lois de haine et de vengeance qui livrent aux flammes éternelles les âmes des Larive, des Lekain, des Raucourt, des Talmah et de tant d’autres dont les talents ont plus contribué à faire admirer tout ce qu’il y a de sublime dans la religion chrétienne, que toutes vos dévotions de Marie Alacoquei, de Louis de Gonzaguej, du sacré cœurk et d’Ignace de Loyolal. […] Nos évêques seuls, s’aveuglant sur les vrais intérêts de la religion, leur refusent les prières de l’Église ; au mépris de la charité chrétienne, ils admettent une distinction des personnes que Jésus-Christ a défendue.

359. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre V. Autres Mêlanges. » pp. 121-140

Le Poëte chrétien est moins scrupuleux, il est dramatique. En effet, combien le poëte païen est il plus chaste que le dramatique chrétien. […] Alexis Piron, comme tous les gens de théatre, a donné dans les plus grands écarts : heureusement, dit-on, il s’est convertit & a terminé sa vie en chrétien.

360. (1752) Traité sur la poésie dramatique « Traité sur la poésie dramatique — CHAPITRE IX. Défauts que les Etrangers ont coutume de reprocher à notre Tragédie. » pp. 231-259

Quichotte, un Chevalier sans amour, est un arbre sans feuilles & sans fruit, un corps sans ame, Quoique bon Chrétien & très dévôt, il étoit si amoureux, qu’avant que de commencer ces combats dont l’occasion se présentoit si souvent, son premier devoir étoit de se recommander à la Dame de ses pensées : ce qui ne nous dispense pas, ajoute gravement D. […] Polieucte, tout Chrétien qu’il est, dit en parlant de sa Femme, Sur mes pareils, Nearque, un bel œil est bien fort. […] L’Amour avoit toujours été nommé la belle Passion des ames ; la Théodore de Corneille, toute chrétienne qu’elle étoit, parloit   De ces impressions Que forment en naissant les belles Passions.

361. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « CHAPITRE II. Des Spectacles des Communautés Religieuses. » pp. 28-47

Si le Concile n’en parle pas, c’est que ce goût universel de poésie, de bel esprit, de spectacle, ne s’était pas encore répandu dans le monde et introduit dans les Communautés : une éducation moins frivole et moins mondaine n’avait pas tourné les esprits vers la bagatelle et le plaisir ; mais, grâce au nouvel enseignement que vit naître la fin du seizième siècle, et qui s’est si fort accrédité dans les suivants, on voit plus d’acteurs et de beaux esprits que de Chrétiens. […] La même raison doit exclure notre Clergé ; nos pièces de théâtre sont aussi éloignées de la Religion Chrétienne que le culte des Idoles ; et les Vestales, quoique soumises aux supérieurs, et obligées, comme nos Religieuses, et sous des peines encore plus grièves, à la chasteté, peuvent-elles entrer en parallèle avec nos vierges consacrées à Dieu ? […] Elles se plaisaient à l’effusion du sang des gladiateurs, et montraient plus d’acharnement que personne à demander leur mort : « Pectusque juventis Virgo modesta jubet converso pollice rumpi. » L’assistance des Religieux au théâtre ne serait parmi les Chrétiens que plus indécente, et les suites plus scandaleuses.

362. (1768) Réflexions sur le théâtre, vol 10 « Réflexions sur le théâtre, vol 10 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE DIXIEME. — CHAPITRE PREMIER. Peinture & Sculpture. » pp. 4-40

Êtes-vous payen ou chrétien ? […] Ce n’est pas sur le compte d’un jeune libertin qu’il la met, il lui donne bien plus de poids, il la met dans la bouche de Jupiter-même, qui porté sur un nuage avec tout l’éclat de la Divinité, la prêche du haut des cieux, au mari-même d’Aleméne, qu’il vient de deshonorer ; & l’assure que loin d’avoir à s’en plaindre, il doit se féliciter comme des plus grands honneurs que le pere des Dieux & des hommes ait bien voulu partager sa femme avec lui, ce qui fait l’édifiant dénouement de la piéce, & montre que le comique payen bien plus sage que le chrétien enseigne une morale saine, par l’exemple de la chûte d’un jeune homme ; tandis que le chrétien enseigne la plus scandaleuse, par l’exemple des Dieux. […] Voilà, disoit-il aux mauvais Chrétiens, voilà vos modéles, votre Réligon, vos Dieux ; hæc exemplaria, hæc théologia, hæc doctrina vestra. Vous y ajoutez des Pantomimes, des Actrices, des Satyres ; & au lieu de rougir en voyant ces objets lascifs, vous les gardez avec soin, hæc intuentes non erubescitis : Mais je vous déclare que si vous voulez être Chrétiens, vous devez en abolir l’usage, les regards, l’entretien, jusqu’à la mémoire, usus, aspectus, etiam deponenda memoria.

363. (1775) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-septieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre V. Remarques Angloises. » pp. 133-170

C’est ainsi qu’on a fait des analyses de Bourdaloue, de Massillon & de Segaud, & qu’on trouve dans leurs sermons les regles de la morale chrétienne. […] Homere, Virgile, les poëtes païens le faisoient avec grace, c’étoit leur religion : mais chez le chrétien, Eugene, favori de Mars Malboroug & Bellone, Miladi & Junon, c’est un vrai délire. […] Pour prévenir l’innondation de galimathias, dont la grande nouvelle de la paix va ouvrir les écluses, nous enjoignons à tout écrivain de se souvenir qu’il est chrétien, & qu’il ne doit pas sacrifier l’Evangile à la poësie. […] Les Destinées n’auront aucune part à la mort de tant de milliers d’hommes tués à la guerre ; les Parques ne se mêleront point de couper le fil de leur vie, le systême chrétien des balles & de la poudre à canon y suffit. […] Des chrétiens, des hommes civilisés peuvent-ils le goûter ?

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