O toi, présent inestimable du Ciel, et le plus pur des dons de sa libéralité, jusques à quand de tristes Lois, une tyrannique Autorité t’imposeront-elles de dures entraves ? […] L’Abbé de Rancé6, embarrassé de ce reproche, ne pouvait comprendre « qu’une chose si mauvaise (il parlait de l’Opéra) fût appuyée d’une si grande autorité ». […] Il traite Molière d’Auteur pernicieux, lequel, dit-il, ne tend qu’à concilier du crédit et de l’autorité au crime, en décriant ceux qui s’y opposent, ou en apprenant aux jeunes gens l’art de tromper des parents chargés de leur conduite. […] Il est donc permis de venger son Père par soi-même, et de sa propre autorité ? […] Et que répondront à leur autorité et à leurs exemples ces hommes de sang, selon l’expression de l’Ecriture, je dirais presque ces bêtes féroces, comme les appelle M.
Après avoir acquis une sorte de célébrité et beaucoup de crédit à la cour et parmi le peuple, nos pèlerins parvinrent à s’ériger en société, sous le titre de confrères de la passion de Notre-Seigneur, et ils obtinrent non seulement l’approbation et la protection de l’autorité temporelle, mais encore la bienveillance et l’appui spécial du clergé séculier et régulier. […] L’autorité séculière se crut enfin obligée de mettre un terme à tant de désordres scandaleux, et, d’accord avec les lois canoniques, elle régla le sujet des pièces de théâtre, et ordonna que la scène théâtrale serait transportée hors des églises et placée dans des salles construites pour cet objet.
De l’inconséquence de quelques prêtres ignorants envers les Comédiens, et de leur fanatisme mis en opposition avec l’autorité du pape et avec la conduite éclairée du haut clergé et des ecclésiastiques sensés en France. […] C’est le cardinal de Richelieu, ce célèbre ministre d’état, prince de l’église apostolique et romaine, qui, en accueillant la troupe de bouffons qui venait se fixer à Paris, fit, aux comédiens qui voulaient s’y opposer, cette belle réponse, qu’il ne fallait jamais condamner personne sans l’entendre ; et il usa de son autorité pour faire recevoir cette troupe de bouffons à l’hôtel de Bourgogne.
Dans les circonstances où nous sommes, l’autorité arbitraire n’auroit point eu d’adversaire plus intrépide. […] Si je réclamois la liberté du Théâtre dans l’auguste Assemblée des Représentans de la Nation, ou si j’étois sûr de n’avoir pour Lecteurs que des hommes éclairés comme eux & soumis au seul empire de la raison, je n’invoquerois l’autorité d’aucune époque ni d’aucune Nation. […] Mais, me dira-t-on, les Représentans de la Nation ne pourroient-ils pas autoriser la censure par une loi écrite, & par conséquent, rendre légale l’autorité de tous ceux qui gênent la publication de la pensée ? […] c’est l’autorité arbitraire. […] C’est d’employer encore le galimathias inintelligible des défenseurs de l’autorité arbitraire ; c’est de proposer, comme le modèle d’une bonne constitution, ce monstrueux ordre de choses, ou des gens en place ordonnoient, défendoient ce qu’ils vouloient, sans alléguer d’autre motif de leur volonté ; que leur volonté ; ou dans leurs décisions, tous les agens subalternes de l’autorité, copioient, au moins pour le sens, la formule inhumaine & dérisoire, qui termine les Edits des Rois de France : Car tel est notre plaisir.
Nos rois sont les protecteurs des saints canons ; ils sont en outre les ministres de Dieu sur la terre, et ils doivent employer toute leur autorité, toute leur surveillance pour que l’Eglise, commise à leurs soins, ne tombe pas dans l’anéantissement, par l’effet de la non-exécution des décrets des conciles de la part des ministres de la religion. Les procureurs du roi, les magistrats, les maires des communes qui sont les dépositaires partiels de l’autorité du prince, doivent être les premiers à informer avec zèle, respect et discrétion, les évêques et les ecclésiastiques supérieurs, de la négligence que ceux-ci ou les ecclésiastiques inférieurs apporteraient à la pratique des lois de la discipline de l’Eglise, et si la puissance séculière et ses délégués faisaient en cette matière l’usage de leurs droits, les ministres de la religion, qui s’écartent eux-mêmes des principes voulus et tracés par les conciles, ne montreraient pas autant de rigueur et quelquefois autant d’injustice à l’égard des autres fidèles. […] Nous lisons encore dans l’Histoire du droit canonique, 1 vol. in-12, pages 385 et 393, au chapitre de la puissance des rois comme protecteurs des canons ; « Que le prince temporel ne peut pas faire la discipline ecclésiastique, mais qu’il doit la maintenir ; « Que les puissances temporelles sont nécessaires dans l’Eglise, afin de suppléer par leur pouvoir à ce que l’étendue de la parole ne peut faire ; « Que le prince a la liberté de choisir, parmi les différents usages, ceux qui sont plus conformes au bien de son Etat ; qu’il peut rejeter tout à fait, ou modifier les décrets de discipline faits par des conciles, même généraux ; pag. 394 ; « Que les ecclésiastiques ont un double lien qui les soumet à l’autorité royale ; 1° leur qualité de citoyen qui les soumet à la puissance politique comme tous les autres sujets ; 2° leur qualité d’ecclésiastique qui les soumet au prince qui, comme protecteur des saints canons, doit veiller à leur exécution ; pages 400, 401 ; « Que cette même qualité de protecteur des saints canons donne droit au roi de veiller sur les mœurs des ecclésiastiques, afin de s’opposer au relâchement de la discipline de l’Eglise » ; pag. 402.
Les Théatres de société ne sont point scrupuleux, ils se croyent plus permis de faire imprimer des choses mauvaises que l’autorité publique a proscrites, de blesser la religion & les mœurs dans une chambre que sur le Théatre. […] L’état religieux n’est qu’un brigandage, & le Prince souffre cet affreux désordre dans tout son royaume, où il en est des milliers ; les parens sont des scélérats qui abusent de leur autorité pour immoler leurs enfans. […] Il est difficile de fixer les bornes de l’autorité paternelle sur l’établissement des enfans. […] Par cette seule raison la moitié de nos comédies doivent être proscrites ; elles le seroient à la Chine, où l’autorité paternelle est plus respectée. […] L’autorité paternelle, l’obéissance filiale, vont-elles jusque-là ?
Il est donc inutile d’avoir de nouveaux ministres, tant qu’il y aura des jacobinières jésuitiques et des clubs théocratiques, qui, à l’instar des affreux clubs jacobins de la révolution, neutralisaient et maîtrisaient despotiquement l’autorité légitime du gouvernement. […] Comment serait-il possible de poursuivre les prévarications des agents de l’autorité ? […] Combien de dilapidations excessives, combien de dépenses scandaleuses n’ont-elles pas été faites sous le couvert de l’autorité ministérielle, et avant d’être votées par les chambres ?
Lui seul, sans l’appareil de l’autorité civile, sans invoquer la terreur des peines qu’elle a droit d’infliger aux coupables, lui seul les ramènera tous à des sentiments de justice et de raison. […] En peignant dans les Horace la grandeur et les vertus d’Albe et de Rome, Corneille était-il inquiet de l’autorité du Monarque puissant qui gouvernait l’empire ? […] A Rome, du consentement tacite de tout le peuple, les décisions des jurisconsultes avaient toute la force et toute l’autorité des lois. […] Ce que les uns ne sauraient avoir par la force de la persuasion, les autres, aidés de la puissance de la loi, l’obtiennent par son autorité. […] Qu’on me dise donc si, abstraction faite de toute idée religieuse, l’autorité purement civile, n’a pas un grand intérêt à réprimer tout ce qui tend à avilir la véritable morale de l’évangile ?