C’est de ces lieux sinistres qu’il s’exhale sans cesse un air pestilentiel : Dont la seule vapeur fait perdre la raison. […] Un libertin peut quelquefois être un homme fort agréable en société ; mais il est rare qu’un débauché (& en conscience on ne peut pas donner un nom plus décent aux piliers des Trétaux) soit amusant & sociable, parce que le ver rongeur qui ne le quitte pas, imprime à ses discours, ainsi qu’à sa démarche & à ses gesses, je ne sais quel air froid, taciturne, & même farouche, qui glace & qui révolte. […] Un de mes amis m’a conté, qu’étant un jour chez N*** il survint dans la Loge séparée ou on l’avait placé, deux personnes qu’à leur extérieur imposant, à leur air fier, il prit d’abord pour deux Seigneurs des plus distingués de la Cour Ces deux petits Etres, qui n’avaient presque pas daigné faite attention à lui en entrant, s’humaniserent & l’admirent, enfin, à leur conversion Mon ami ne cessa d’avoir pour eux les égards & les distinctions que l’on a ordinairement pour les gens d’un certain rang.
Et il ajoute, que s’il avait à faire à quelque moins habile homme, ou à quelque faux dévot, qui pour se donner des airs de réformateur aurait la témérité de rejeter la doctrine de saint Thomas, comme opposée à la morale des Pères, et peu conforme en quelques endroits aux maximes les plus pures de la Religion, il n’aurait pas de peine à lui fermer la bouche, et à lui apprendre à porter à la doctrine de ce saint Docteur toute la vénération qu’elle mérite, et que les Conciles, les Souverains Pontifes, et tous les grands Hommes qui l’ont suivi, n’ont pu lui refuser. » Après ces magnifiques paroles, et quelques autorités bonnes ou mauvaises qu’il allègue en faveur de la doctrine de saint Thomas : « Lisez, je vous prie, avec attention, dit-il à son Ami, ce que ce grand Docteur enseigne de la Comédie dans la seconde partie de sa Somme, où il explique bien des choses que les personnes scrupuleuses devraient savoir pour assurer le repos à leur conscience. » Voilà donc saint Thomas travesti en Médecin qui guérit des scrupules, et qui va servir de truchement à notre Docteur. […] saint François de Sales prétend que des Spectacles et des poupées de dévotion sont capables de dissiper l’esprit chrétien et de réveiller l’esprit du monde ; et on croira qu’il a permis comme choses innocentes les Spectacles d’aujourd’hui, tout profanes qu’ils sont ; et où des poupées non pas de dévotion, mais des Poupées de licence bien animées et bien vives, paraissent avec les ajustements et tous les airs les plus mondains ? […] Le Cardinal de Richelieu avait cru que ces conditions était compatibles avec les divertissements qu’on cherche à la Comédie : mais l’expérience a fait voir le contraire ; la Scène depuis ce temps-là n’a point changé de face, on a représenté depuis comme auparavant des Pièces purement Comiques, on a joué des farces, on a dansé des ballets, les décorations ont été également pompeuses, les Acteurs et les Actrices ont paru avec les mêmes airs et les mêmes ajustements, les passions les plus vives et les plus piquantes, ont éclaté dans les Pièces les plus sérieuses ; et quand on pense dire son sentiment là-dessus, on répond que sans tout cela les Acteurs et les Spectateurs se morfondraient également au Théâtre, tant il est vrai que la Comédie sera toujours Comédie, et les Comédiens toujours Comédiens, c’est-à-dire, toujours infâmes.
Cet air d’adoration est si deplacé, cette attitude, cette proximité est une occasion si prochaine de mauvais regards & de libertés criminelles que la vertu ne se les permet, ni ne les laisse représenter.
Il me semble voir l’oiseau mouche, ces mouches brillantes qui dans une belle nuit remplissent l’air de feux voltigeans.
On voit de toutes parts accourir des comédiens, des danseurs, des danseuses, des musiciens, des instrumens ; s’ériger des théatres & des salles de bal, des joueurs de farces, & donner des ballets, se bâtir des vauxhall, & l’illustre Délégation s’occuper de cet établissement : &, pour lui donner un plus grand air d’importance, en faire une loi de l’Etat, le Prince Sultowski avoit d’abord exercé l’hospitalité, & logé généreulement les troupes dans son palais à Varsovie ; mais il crut devoir tirer parti de sa bienfaisance.
Ce goût de licence & de malignité est l’habit & l’air à la Françoise dont on charge ces ouvrages étrangers qu’on naturalise, & qui donne droit de se les approprier.
Là, dans le sein de la volupté, elles font au Sultan toutes les agaceries dont elles peuvent s’aviser pour le divertir, & dansent des danses lubriques, que le Mercure lui même appelle voluptueuses, sur des airs très-voluptueux.
Vous qui frédonnez un air nouveau dans les fonctions les plus sérieuses, une scene, une action indécente vous convient mieux.