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5. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE IV. Suite des effets des Passions. » pp. 84-107

La joie la plus vive s'y déploie par toute sorte de ris, de chants et de danses. […] On y entend des cantiques pleins d'onction, accompagnés de la musique la plus brillante, tantôt vive et légère, tantôt grave et majestueuse, tantôt triste et lugubre, le plus souvent tendre et voluptueuse. […] Les cœurs les plus vifs, les plus sensibles, qui s'enflamment plus vivement et plus aisément, aiment et goûtent plus agréablement le spectacle : ils y devraient moins aller. […] L'imagination du spectateur est souvent froide, engourdie, distraite ; celle de l'Auteur, communément belle, vive, cultivée, a formé ce tableau vivant, et en anime tous les traits, pour frapper les yeux et le cœur. […] Vous protestez avoir une vive douleur de vous être rendu coupable, et vous faites vos délices de l'objet de votre repentir.

6. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VII. Des Duo, Trio & Quatuor. » pp. 329-339

On doit le préférer à l’Ariette tendre, parce qu’il est plus vif, & qu’il peut ranimer la Scène lorsqu’elle est sur le point de languir. […] « Il faut ne placer les Duo que dans des situations vives & touchantes ; n’y mettre qu’un Dialogue court, peu phrasé, formé d’interrogations, de réponses, d’èxclamations vives & courtes.

7. (1761) Epître sur les spectacles « Epître sur les spectacles » pp. 3-14

déjà tout finit, et la vive Camilleh Pour le séjour des Dieux abandonnant la Ville, Des trois Grâces suivie, et son fils dans les bras, Va priver les Mortels de ses riants appâts : Vénus toutefois prête à quitter sa toilette, Adressa ce discours à plus d’une Coquette : "Il n’est qu’un seul moyen de parer la Beauté, C’est l’Amour : ce miroir sans cesse consulté, Ne vous y trompez pas, apprend mal l’art de plaire, Le cœur conseille mieux dans l’amoureux mystère ; Belles qui m’écoutez, quand vous saurez aimer, Mon fils vous montrera comme on peut enflammer." […] Je reverrai Claironk maîtresse de la Scène En longs habits de deuil sous les traits de Chimène Contre un cher ennemi, tendre objet de ses pleurs, Craindre de décider par ses vives douleurs La Justice d’un Roi qui l’aime, et qui balance, Ou Camille en fureur respirant la vengeance, Contre les jours d’un frère en ses criminels vœux Soulever la Nature, et l’Enfer, et les Cieux ; D’un laurier tout sanglant lui reprocher la gloire, Et le forcer enfin à souiller sa victoire. […]  Et toi, qui dans ton jeu, des plus vives couleurs, Nuance, en t’amusant, le tableau de nos mœurs. […] Oui, dans ces temps féconds que tout Paris nous vante, Camargoz fut moins vive, et Salé moins brillante ; Ne pense pas, Lany, que dans les plus beaux jours, Ton air trop sérieux éloigne les amours ; Vénus ne voulant point rester seule à Cythère, En te cédant les sœurs, s’est réservé le frère ; Je connais la coquette ; elle aura craint tes jeux ; Mais, crois moi, cet enfant le plus malin des Dieux, Avec certain fripon, qu’on nomme le mystère, Pour t’aller retrouver, saura tromper sa mère.

8. (1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « La comédie contraire aux Principes de la Morale Chétienne. — XIV. La comédie considérée dans ses Spectateurs. » pp. 30-33

Il y a donc dans le cœur des Spectateurs un Théâtre secret, où chacun est Acteur & joue sa propre passion ; & c’est ce qui donne le vif & le piquant au Spectacle ; c’est ce qui y porte avec tant d’ardeur. […] Ainsi plus la Piéce sera travaillée, plus les Acteurs seront habiles dans leur art, & plus ces passions plairont, plus leur impression sera vive.

9. (1760) Critique d’un livre contre les spectacles « EXTRAIT DE QUELQUES PENSEES SAINES. Qui se rencontrent dans le livre de J.J. Rousseau contre le Théâtre, ou condamnation de son système par lui-même. » pp. 66-77

ne suffit pas que le peuple ait du pain, et vive dans sa condition. Il faut qu’il y vive agréablement, afin qu’il en remplisse mieux les devoirs, qu’il se tourmente moins pour en sortir, et que l’ordre public soit mieux établi : les bonnes mœurs tiennent plus qu’on ne pense, à ce que chacun se plaise dans son état. […] Tout cela formait une sensation très vive qu’on ne pouvait supporter de sang froid.

10. (1777) Des Spectacles « Des Spectacles. » pp. 75-92

Le Spectacle n’est plus un amusement vide, et oisif ; c’est un assemblage vif et séduisant de tout ce qui peut plaire, qui ne tend qu’à enchanter l’esprit et les sens par mille charmes, et à attendrir le cœur par tout ce que les passions ont de plus fin et de plus insinuant. […] Et comme ce sont des leçons flatteuses, auxquelles les acteurs donnent un merveilleux relief, quel progrès une passion vive et ardente, insinuée avec tant d’artifice, ne fait-elle pas dans un cœur où elle trouve déjà de si grandes dispositions ? […] De jeunes personnes qui se font un point d’honneur de plaire, et qui sont gagéesb pour exprimer de la manière la plus vive une passion ; des gens qui n’ont d’autre gloire que de se distinguer sur un théâtre, en inspirant la passion qu’ils expriment ; des voix douces et insinuantes, accompagnées de mille manières séduisantes, mêlées de paroles tendres, et de vers composés avec art, pour inspirer l’amour ; tout cet assemblage prodigieux de dispositions, et de choses, dont la moindre, prise séparément, est une tentation, ne sera tout au plus, au sentiment des mondains, qu’un amusement indifférent, un divertissement licite et innocent des gens du monde. […] un objet trop mondain vu par hasard, un mot trop libre dit sans dessein, une lecture peu modeste faite sans malice, mettent en danger la vertu la plus affermie, et sont très souvent des sources de réprobation : et tout ce que la passion a de plus vif et de plus empoisonné, tout ce que l’art de tenter a de plus fin et de plus poli ; un assemblage de tout ce qui peut séduire, ne sera ni une occasion prochaine de péché, ni un manifeste danger à des gens nourris, la plupart dans une criminelle mollesse, nourris même dans le péché !

11. (1769) De l’Art du Théâtre en général. Tome II « De l’Art du Théâtre. — Chapitre VI. Des Ariettes, & des autres parties du Chant théâtral à une seule voix. » pp. 297-328

L’Ariette est donc pour le Musicien un chant vif qui sort un peu du naturel. […] Son stile doit être vif, enjoué, folâtre ; le chant qu’on lui applique doit être gai, léger, & faire assez d’impression pour être retenu sans peine. […] L’oreille qui s’est faite à un chant vif & soutenu par l’harmonie, ne peut sans peine entendre ensuite un chant trop simple, qui lui paraît d’une froideur èxtrême. […] Le chant est une image de la parole ; mais il est plus vif, plus passionné que le discours ordinaire ; or suppose-t-on qu’un homme qui èxprime ses passions, oublie tout-à-coup les principes les plus connus de sa Langue ? […] Ce sera dans le monologue & dans les situations tranquilles que le Poète fournira au Musicien de ces airs vifs, brillans & à prétention.

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