Le néologisme consiste 1. dans quelques termes de l’Art théâtral très-nécessaires, qu’elle explique par les circonlocutions synonymiques, la première fois qu’ils sont employés ; 2. dans quelques verbes substitués à des auxiliaires, trop multipliés dans notre langue ; 3. dans les mots formés soit du Grec, soit du Latin. L’Auteur, qui ne fait pas assez de ces deux langues pour être une Savante, mais suffisamment pour entendre parfaitement la sienne, a puisé sans scrupule dans le langage de l’ancienne Rome ; au lieu que c’est malgré elle, qu’elle s’est vue obligée de recourir au Grec ; & je sais qu’elle regarde comme autant de barbarismes, tous les termes que nous en avons empruntés.
Bien des gens prétendent que l’usage de ces termes de dévotion que l’Hypocrite emploie dans cette occasion, est une profanation blâmable que le Poète en fait : d’autres disent qu’on ne peut l’en accuser qu’avec injustice : parce que ce n’est pas lui qui parle, mais l’Acteur qu’il introduit : de sorte qu’on ne saurait lui imputer cela, non plus qu’on ne doit pas lui imputer toutes les impertinences qu’avancent les personnages ridicules des Comédies : qu’ainsi il faut voir l’effet que l’usage de ces termes de piété de l’Acteur peut faire sur le Spectateur, pour juger si cet usage est condamnable. […] Or c’est ce qui se trouve merveilleusement dans notre Hypocrite en cet endroit : car l’usage qu’il y fait des termes de piété est si horrible de soi, que quand le Poète aurait apporté autant d’art à diminuer cette horreur naturelle, qu’il en a apporté à la faire paraître dans toute sa force, il n’aurait pu empêcher que cela ne parût toujours fort odieux : de sorte que, cet obstacle levé, continuent-ils, l’usage de ces termes ne peut être regardé que de deux manières très innocentes, et de nulle conséquence dangereuse, l’une comme un voile vénérable et révéré que l’Hypocrite met au-devant de la chose qu’il dit, pour l’insinuer sans horreur, sous des termes qui énervent toute la première impression que cette chose pourrait faire dans l’esprit, de sa turpitude naturelle. […] Habitude qui leur est très utile, en ce que le peuple, que ces gens-là ont en vue, et sur qui les paroles peuvent tout, se préviendra toujours d’une opinion de sainteté et de vertu, pour les gens qu’il verra parler ce langage, comme si accoutumés aux choses spirituelles, et si peu à celles du monde, que pour traiter celles-ci ils sont contraints d’emprunter les termes de celle-là. […] Enfin, enflammé par tous ces petits commencements, par la présence d’une femme bien faite, qu’il adore, et qui le traite avec beaucoup de civilité, et par les douceurs attachées à la première découverte d’une passion amoureuse, il lui fait sa déclaration dans les termes ci-dessus examinés ; à quoi elle répond, que « bien qu’un tel aveu ait droit de la surprendre dans un homme aussi dévot que lui ». […] C’est que jamais il ne s’est frappé un plus rude coup contre tout ce qui s’appelle galanterie solide en termes honnêtes, que cette pièce ; et que si quelque chose est capable de mettre la fidélité des mariages à l’abri des artifices de ses corrupteurs, c’est assurément cette Comédie ; parce que les voies les plus ordinaires et les plus fortes par où on a coutume d’attaquer les femmes, y sont tournées en ridicule d’une manière si vive et si puissante, qu’on paraîtrait sans doute ridicule, quand on voudrait les employer après cela ; et par conséquent on ne réussirait pas.
Un homme d'honneur ne doit point regarder les Spectacles, et particulièrement ceux qui sont déshonnêtes, de peur que l'incontinence de sa vue ne soit un témoignage de l'impureté de son âme ; C'est avec raison que Périclès étant Préteur reprit Sophocle son collègue, en ces termes: Il faut qu'un Magistrat n'ait pas seulement les mains pures, mais les yeux même ; C'est pourquoi un homme à qui la puissance Royale donnait une grande licence, faisait cette prière à Dieu: Détournez mes yeux afin qu'ils ne regardent point la vanité; car il savait bien qu'il est certain que la vue cause une infinité de maux ; ce que le Prophète Jérémie déplore dans ses Lamentations ; Mes yeux, dit-il, ont ravi mon âme comme une proie.
Beauchâteau, qui savait que l’infortune donne à l’âme de l’élévation, ne se rebuta point ; à force de prières et de paroles respectueuses, il parvint à lui faire raconter qu’un désastreux procès l’avait réduite au point de manquer de tout, et que ne pouvant ni se résoudre à mendier, ni à retourner dans la chambre qu’elle avait louée, parce qu’il lui était impossible de payer le terme qu’elle devait à l’hôte, elle était décidée à se laisser mourir de faim dans l’église.
C’était peut-être une des raisons du silence des Apôtres, qui accoutumés à la simplicité de leurs pères et de leur pays, n’étaient point sollicités à reprendre en termes exprès dans leurs écrits, des pratiques qu’ils ne connaissaient pas dans leur nation : il leur suffisait d’établir les principes qui en donnaient du dégoût : les chrétiens savaient assez que leur religion était fondée sur la Judaïque, et qu’on ne souffrait point dans l’Eglise les plaisirs qui étaient bannis de la Synagogue : quoi qu’il en soit, c’est un grand exemple pour les chrétiens, que celui qu’on voit dans les Juifs ; et c’est une honte au peuple spirituel, de flatter les sens par des joies que le peuple charnel ne connaissait pas.
« Je veux bien, dit d’Aubignac, qu’en cet endroit, saint Thomas parle des histrions au sens des derniers siècles, et qu’il comprenne sous ce nom les acteurs des poèmes dramatiques ; Car, si l’on n’entendait par ce terme que les Mimes et les Farceurs, son autorité serait encore plus avantageuse aux autres, que l’on ne pourrait pas condamner contre la résolution de ce grand Théologien, qui serait favorable à ceux-là même que les Grecs méprisaient, que les Romains tenaient infâmes, et que jamais on ne leur doit comparer. »
Ciceron, ce grand orateur, qui connaissait si parfaitement le cœur humain et la nature des choses, s’exprime contre les théâtres en ces termes : « Ah !