Par une noble émulation une autre troupe d’Actionnaires, mais simples bourgeois, s’est formée à même temps, & pour s’étayer de l’autorité du Prince, lui a fait entendre qu’on avoit empiété sur ses droits.
C’est un habit long de couleur noire, d’une étoffe simple & modeste, des cheveux courts sans frisure & sans poudre avec une couronne, un petit collet dont la figure a varié, & pour les voyages un habit un peu moins long, de la même couleur & simplicité.
Ces lois, faites pour tous les états, ont une application naturelle aux Comédiens, soit par rapport à leur état et à leur personne, puisque étant dans la dernière classe, ils n’ont droit à aucune prérogative, et doivent être habillés de la manière la plus simple ; soit par l’abus qu’ils en font et qu’ils en font faire, personne ne porte plus loin les excès du luxe des habits, et par le goût et l’exemple rien n’est plus contagieux dans le public.
« Nous allons voir maintenant dans la ville de Mâcon en France, les jésuites peu satisfaits de simples paroles et déclamations séditieuses, se jouer publiquement des choses saintes, et faire éclater leur Passion, par une procession profane, qui avait moins pour but le divertissement du peuple, que la vaine satisfaction de se dresser à eux-mêmes un triomphe imaginaire sur le saint défenseur de la grâce, (S. […] Voici comme du Cange donne le refrain : « Hez sire âne car chantez, Belle bouche rechignez ; On aura du foin assez Et de l’avoine à planter. » Ce refrain me paraît plus moderne que celui de Sens, qui est aussi plus simple.
Cela est si vrai, que le Sénat de Melpomene & de Thalie ne se chargera pas d’une Piece sur la simple lecture : il faut qu’elle soit déclamée dans ce Sanhédrin, où l’on juge si elle peut être exposée au Public ou non, c’est-à-dire, si l’on a lieu d’espérer que les Spectateurs se sentiront fortement affectés des sentimens passionnés que le Poëte s’est proposé d’exciter. […] à l’utilité & à l’agrément de la vie présente, ou même à la simple curiosité. […] Se peut-il qu’un Livre à la fois si sublime & si simple, soit l’ouvrage des hommes ? […] « Une bonne conscience éteint le goût des plaisirs frivoles ; c’est le mécontentement de soi-même ; c’est le poids de l’oisiveté ; c’est l’oubli des goûts simples & naturels qui établissent la prétendue nécessité des Spectacles…. […] « Si dans la Comédie on donne un appareil plus simple à la Scene, & si l’on rapproche le ton du Théatre de celui du monde ; on ne corrige point pour cela les mœurs : on les peint ; & un laid visage ne paroît point laid à celui qui le porte.
La ville de Verone dont il a écrit au long l’histoire, idolâtroit son citoyen, entr’autre hommage, elle lui dressa une statue avec cette inscription simple, mais profonde, au Marquis Maffei vivant, elle est dans le goût de celle que Montpellier dressa au feu Roi, à Louis XIV après sa mort ; l’une & l’autre idée est également vive, la flatterie ne loue guere après la mort un Prince qu’on n’a plus intérêt de ménager, l’envie ne souffre guere qu’on loue pendant la vie un grand homme qui peut effacer ses rivaux, la vérité seule dicte ces éloges, Maffei eut la modestie de faire ôter la statue de la salle de l’Académie où on l’avoit placée, & où on la remise après sa mort, ce trait lui fait honneur, on doit, dit-on, en ériger une à Voltaire dans la salle du spectacle, avec la même inscription à Voltaire vivant, je doute qu’il la refuse, il y a même bien de l’apparence qu’il a mis une bonne somme dans la souscription que ses amis ont ouverte pour fournir aux frais.
Pour les mysteres qu’une dévotion simple & grossiere avoit établie, qu’un corps de confreres comédiens représentoit, outre que c’étoit un objet très-borné, un spectacle momentanée qui revenoit très-rarement, qui n’eût d’abord rien de mauvais, où l’histoire maussadement défigurée, ne pouvoit plaire à des gens d’esprit, ni par le ton de piété aux libertins ; d’ailleurs dès qu’on vit ce pitoyable spectacle dégénérer en licence, & confondre monstrueusement la Réligion & le vice : on n’eut point besoin de loix & de décisions, ils deviennent l’objet du mépris qu’ils méritent.