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4. (1668) Idée des spectacles anciens et nouveaux « Idée des spectacles anciens et nouveavx. — Des anciens Spectacles. Livre premier. — Chapitre II. Des Naumachies. » pp. 100-111

Il fit un Pont sur deux rangs de Vaisseaux joints & liez ensemble depuis Baye jusqu’à Possole, si bien que ces deux Villes de la Campagne de Rome, separées par la Mer & par la Nature de trois mil six cent pas, se trouverent presque en un moment pour ainsi dire jointes & capables de commercer l’une avec l’autre, sans aucun autre secours de l’invention & de l’artifice. […] Il y eut toutefois quelque chose de singulier dans l’artifice du lieu, car l’eau fut aussi-tost détournée, & les mesmes troupes y combatirent un moment apres à pied sec. […] Vne pluye extraordinaire estant survenuë, non seulement il ne voulut point permetre aux combatans de cesser & de differer pour un moment : mais il empescha mesme le Peuple de sortir, les forçant à demeurer exposez au temps, & se faisant un nouveau plaisir de l’incommodité des Spectateurs.

5. (1759) L.-H. Dancourt, arlequin de Berlin, à M. J.-J. Rousseau, citoyen de Genève « CHAPITRE II. De la Tragédie. » pp. 65-91

Parmi tant de jeunes gens libertins, parmi tant de jeunes prodigues que nul respect humain, que ni devoir ni raison, ni les chagrins de leur famille ne peuvent rappeler au bien, soyez convaincu, Monsieur, qu’il n’en est pas un seul qui, voyant représenter cette pièce, ne partage au moins dans ce moment le repentir d’Euphémon fils, et qui ne soit alors du parti de la Vertu. […] Il n’aimait sûrement pas la Vertu et voilà tout à coup qu’on la lui fait aimer, et qu’on le force à pleurer pour elle : sondez son cœur dans ce moment, vous verrez qui des deux y triomphe, ou du Vice ou de la Vertu. […] Si je dis simplement à cet homme : « Phèdre est une Marâtre qui persécute cruellement le fils de son mari, jusqu’au moment qu’elle en devient éperdument amoureuse ; sa déclaration n’excite que l’indignation et l’horreur de la part d’Hippolyte ; la rage, la honte et la jalousie la portent à l’accuser auprès de Thésée du crime dont elle est coupable elle-même. […] C’est que ce n’est plus là le moment de l’équité. […] M. de Voltaire redoubla ses caresses, j’ignorai toujours la perfidie de mon lâche délateur, et je vis arriver le cruel moment du départ de M. de Voltaire pour la Prusse, sans qu’il m’eût témoigné le moindre ressentiment.

6. (1770) La Mimographe, ou Idées d’une honnête-femme pour la réformation du théâtre national « La Mimographe, ou Le Théâtre réformé. — Seconde partie. Notes. — [P] » pp. 441-443

[P] Parade, espèce de Farce, originairement préparée pour amuser le Peuple, & qui souvent fait rire, pour un moment, la meilleure compagnie. […] Mais tel est le fort de ces Parades satyriques, elles ne peuvent troubler ou séduire qu’un moment la Société, & la punition ou le mépris suit toujours de près les traits odieux lancés par l’envie.

7. (1767) Réflexions sur le théâtre, vol 6 « Réflexions sur le théâtre, vol 6 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE SIXIÈME. — CHAPITRE VIII. Sentimens de S. Chrisostome. » pp. 180-195

Venez-y donc goûter la divine parole ; un moment de mortification vous assurera une volupté pure, un moment de plaisir vous causeroit plusieurs jours d’amertume. Ici, comme dans toutes les passions, un plaisir d’un moment, & un regret éternel du vice, une peine d’un moment, & une éternité de délices dans la vertu : Vitium momentaneum habet voluptatem dolorem perpetum, virtus laborem omnem fructum œternum. […] Grand nombre y passent les jours entiers, ce qui cause dans leurs maison de grands désordres ; ils apprennent avec grand soin ce qu’ils y entendent dire ; & pour le malheur de leur ame leur mémoire trop fidele ne le leur rappelle que trop : tandis qu’ils ne peuvent sans impatience être un moment à l’Eglise.

8. (1765) Réflexions sur le théâtre, vol. 4 « CHAPITRE VIII. De la Folie. » pp. 163-179

C'est la doctrine constante, à tout moment répétée, de tous les théâtres. […] Tous les moments de la vie, tout ce que nous avons ne nous a été accordé que pour notre salut, tout jusqu'à une parole peut y nuire ou y contribuer, et augmenter la gloire ou la punition éternelle. […] Je ne parle pas des paroles licencieuses, des maximes pernicieuses, des emportements, des passions, des jurements, des médisances, des mensonges, des impiétés, des bouffonneries, des folies, dont les oreilles sont à tout moment frappées ; tout cela, bien plus qu'inutile, ne sera pas sans doute oublié dans le compte que vous avez a rendre. […] De là des danses de toute espèce, légères, graves, majestueuses, badines, bouffonnes, etc. qui peignent les mouvements de l'âme, des danses de Guerriers, de Bergers, de Paysans, de Furies, de Dieux, de Démons, de Cyclopes, d'Indiens, de Sauvages, de Mores, de Turcs, qui caractérisent les professions et les peuples ; de là ces mouvements compassés de la tête, des pieds, des bras, des mains, etc. qui tous doivent se réunir de concert pour former les traits du tableau ; de là tous les divers habits et parures analogues à ce qu'on veut représenter, mais qui tous élégants, dégagés, propres, conservent et rendent saillante la taille et la forme du corps, qu'ils laissent admirer ; de là cette souplesse moelleuse, cette mobilité coulante, cette marche gracieuse, cette symmétrie des pas, ces figures entrelaçées, cette espèce de labyrinthe où à tout moment on se perd et on se retrouve ; de là ces innombrables combinaisons de plusieurs danseurs qui se cherchent, se fuient, s'embarrassent, se dégagent, se parlent par gestes, varient à tous les moments la scène, mais qui dans tous leurs mouvements les plus compliqués, toujours soumis au coup d'archet, semblent n'agir que par la même impulsion.

9. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — [Introduction] » pp. 2-6

Il faisoit jouer une pièce intitulée, Dom Quichotte ; c’étoit le moment où Dom Quichote installe Sancho dans son Gouvernement. […] Moliere sur son âne attendit dans la coulisse le moment de son installation dans le gouvernement ; mais l’âne, qui se savoit pas son rôle, s’impatientoit dans la coulisse, & vouloit entrer en scène.

10. (1825) Encore des comédiens et du clergé « CHAPITRE VIII. Actes de fanatisme et avanies exercés par quelques prêtres, contre des Comédiens français. » pp. 141-148

Chacun, de toute part, exprimait son mécontentement ; on voyait la foule irritée grossir à vue d’œil, de moment en moment, et l’agitation générale faisait craindre de voir renouveler les désordres et les scènes scandaleuses que produisirent toujours les refus de sépulture.

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