/ 264
64. (1754) La Comédie contraire aux principes de la morale chrétienne « EXTRAIT Du Journal de Trevoux ; Mois d’Avril 1753. Art. XXXIX. » pp. 59-70

Après avoir fait éclater son zéle en Orateur Chrétien, notre Auteur reprend le ton d’un profond moraliste, & examine encore de plus près la nature de la Comédie : il recueille sur cette matiére les définitions des Docteurs les moins accusés de rigorisme, & il en conclut que, si on ouvroit une école, dont l’affiche annonçât les leçons qu’on donne & qu’on prend au théâtre, tous les Magistrats, & tous les Citoyens jaloux des moeurs publiques, s’uniroient pour la fermer, & pour en proscrire les maîtres pernicieux. […] On nous assure que cet Ouvrage, fruit d’un zèle & d’une science Apostolique, a suffi pour engager les Magistrats de Burgos à abatre le beau Théâtre de leur Ville, qui avoit couté vingt mille ducats.

65. (1665) Lettre sur les observations d’une comédie du sieur Molière intitulée Le Festin de Pierre « APOSTILLE » pp. 33-57

Il faut bien, en effet, qu’il ne soit pas coupable, puisqu’on lui permet de jouer sa pièce à la face du Louvre, dans la maison d’un prince chrétien et à la vue de tous nos sages magistrats, si zélés pour les intérêts de Dieu, et sous le règne du plus religieux monarque du monde. Certes, les amis de Molière devraient après cela trembler pour lui, s’il n’était pas innocent ; ces magistrats si zélés pour les intérêts de Dieu et ce religieux monarque le perdraient sans ressource, ou l’anéantiraient bientôt, s’il est permis de parler ainsi.

66. (1823) Instruction sur les spectacles « Chapitre premier. Origine des Spectacles. » pp. 1-14

Les magistrats s’en amusaient beaucoup ; mais, lorsqu’on eût osé les jouer eux-mêmes, ils trouvèrent que la plaisanterie passait les bornes ; ils défendirent ce genre de comédie. […] [NDE] La toga prætexta, bordée de pourpre, était portée par les magistrats et par d’autres citoyens romains.

67. (1726) Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat « Projet pour rendre les spectacles plus utiles à l’Etat » pp. 176-194

Que le Conseil établisse une compagnie de huit ou dix bons Citoyens connaisseurs, qui sous la direction du Magistrat de Police aient soin de rendre les spectacles plus utiles aux bonnes mœurs, c’est-à-dire, aux mœurs désirables dans la société ; le Roi nommera les quatre premiers, ces quatre nommeront le cinquième, les cinq nommeront le sixième, les six nommeront le septième, et ainsi de suite. […] Les spectacles peuvent donc être utiles et agréables, mais il faut qu’ils soient dirigés par une compagnie perpétuelle composée de gens habiles, et surtout de bons politiques sous les ordres du Magistrat de Police, et qu’ils tendent toujours à rendre dans la société la vertu respectable et aimable, les vices honteux et odieux, la vanité méprisable et ridicule ; je demande enfin pour Membres de cette compagnie des connaisseurs délicats, qui sentent combien les bonnes mœurs sont importantes pour augmenter le bonheur de la nation.

68. (1743) De la réformation du théâtre « De la réformation du théâtre — PLAN. DU THEATRE. et autres Règlements, Qui sont la suite de ce qu’on a déjà vu, page 106 de l’Ouvrage. » pp. 329-337

Les Acteurs de même seraient aussi placés ou pensionnés ; et quand aux fonds nécessaires pour ces pensions passagères, et même pour l’entretien du Bâtiment et les réparations du Théâtre dans la suite des temps, on les trouverait ou dans une Loterie, ou dans telle autre sorte d’imposition que les Magistrats jugeraient moins à charge au Peuple, ou plus aisée à lever.

69. (1768) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre onzieme « Réflexions morales, politiques, historiques, et littéraires, sur le théatre. — Chapitre V. Du Luxe des coëffures. » pp. 115-142

Elle fut inconnue à Rome dans les tems vertueux de la République, & même dans le régne des premiers Césars ; elle étoit si opposée aux mœurs romaines, & elle eût mal figuré avec la couronne de lauriers qu’ils se faisoient gloire de porter ; des cheveux poudres d’or n’ont pas l’air militaire, ni l’air Magistrat, de pareilles têtes au Sénat, à la tribune, à l’armée auroient fait pitié. La farine qui couvre les têtes des Officiers, des Magistrats, des Jurisconsultes françois, n’est pas moins ridicule ; ce ne fut que sous les Empereurs perdus de débauches, qui ne connoissoient point de décence que la poudre d’or fut connue. […] Qu’on parcoure toutes les histoires sacrées & profanes, Abraham, Isaac, Jacob, Joseph, Josué, David, les Prophêtes, les Apôtres, les Saints, les grands Hommes, Magistrats, Guerriers, Littérateurs, on n’en trouvera point qui se soient dégradé jusques-là, au contraire point de libertin, qui n’en ait fait une étude. […] C’est le revenant bon de leur chaste métier ; on a partagé cette tête creuse, on en a conservé le derriere, en le perfectionnant ; ce n’est plus qu’une calote ; elle avoit autrefois des cheveux empruntés, soit en peinture, ou en plâtre, ou réellement attachés, ce qui faisoit des chevelures blondes, noires, bouclées, frisées au gré de l’acteur, aussi-bien que les sourcils & la barbe, selon son goût ; on a conservé le derriere qu’on a rendu plus commode par des perruques à reseau, qu’on porte par-tout, aulieu que les anciens masques ne pouvoient servir que sur le théatre ; ils auroient été aussi incommodes que ridicules, par ce moyen, à peu de frais, & sans embarras, le vieillard rajeunit, la laide s’embellit, l’abbé, le magistrat se déguisent, la femme se travestit en homme, & l’homme en femme, on prend comme sur le théatre, les attributs du rôle qu’on veut jouer, & ce qui est très-commode, la moitié de la toilette se fait chez le baigneur, d’où l’on porte une très-belle tête toute faite, qu’on adapte au visage qu’on vient de fabriquer, ainsi se continue la comédie ; car la vie d’un joli homme, d’une jolie femme, n’est dans l’exacte vérité, qu’une comédie perpétuelle, où l’on joue les mœurs, la Réligion & le bon sens ; ces masques mobiles de la tête, font quelquefois sur le théatre & dans les piéces, les plus ridicules, le spectacle le plus comique, César qui étoit chauve, ne trouva d’autre coëffure pour cacher ce défaut, qu’une couronne de laurier.

70. (1632) Les Leçons exemplaires de M.I.P.C.E. « Livre III, Leçon X. LA COMEDIENNE CONVERTIE. » pp. 461-479

Et ces farces exécrables dont en France on fait un dessert de ciguë aux représentations tragiques et sérieuses, mériteraient sans doute une sévère punition du Magistrat parce que les mauvais propos et abominables que l’on y tient ne corrompent pas seulement les bonnes mœurs et n’apprennent pas seulement au peuple des mots de gueule, des traits de gausseries et des quolibets sales et déshonnêtes mais le porte à l’Imitation des friponneries et sottises qu’il voit représenter et qui par ses yeux (lesquels sont plus vifs que l’ouïe) passent dedans son cœur. […] Et davantage le Magistrat a tellement l’œil à ces ébats que ceux qui disent ou font des actions qui offensent la pudeur ou les bonnes mœurs sont sévèrement châtiés encore que par joyeuseté il y ait toujours quelque personnage destiné à donner du plaisir et à faire rire la compagnie soit par les points et les rencontres de ses mots, soit par ses grimaces, soit par ses sottises et badineries, mais toujours sans préjudice de l’honnêteté et de la modestie.

/ 264