La Grèce libre put voir avec satisfaction la fabuleuse histoire des familles de ses Rois qui s’étaient entredétruites, lorsqu’on représentait les Œdipe, les Agamemnon, les Atrée, les Eriphile : mais avec quels transports n’admira-t-elle pas, dans les Perses d’Eschyle, les Héros auxquels elle devait sa liberté ? […] Oui, loin que la Tragédie & la bonne Comédie ne puissent s’allier avec l’austérité Républicaine, ce n’est que dans les Etats, ou Républicains, ou libres sous un Monarque, qu’elles peuvent se montrer, la première avec une majesté, la seconde avec une liberté inconnues par-tout ailleurs. […] Je penserais même que les Romains, dont on aurait pu le dire avec autant d’aparence de raison, n’ont pas péri par la fureur des Spectacles, quoiqu’Auguste s’en soit servi pour assoupir leur liberté : c’est par l’extrême pauvreté des uns, & l’opulence excessive des autres que les Romains devinrent esclaves, & c’est aussi par-là probablement qu’Athènes a péri : le riche achète toujours le pauvre, & celui-ci aime mieux se vendre que de mourir de faim.
Les mauvais prêtres n’ignorent donc pas que la servitude et le manque d’instruction avilissent les hommes, abrutissent les peuples et les rendent tous malheureux : tandis qu’au contraire, la science, la raison, le bon sens et la liberté tempérée par les lois, corrigent nécessairement la nature humaine et rendent meilleures et plus heureuses toutes les classes de la société. […] On ne prétend pas dire qu’il faille exciter le peuple à se livrer malgré lui à l’étude des sciences ; mais il faut lui laisser la liberté de s’instruire, lui en faciliter les moyens plutôt que d’y mettre des entraves, et de pousser la petitesse jusqu’à persécuter cette précieuse et utile méthode de l’enseignement mutuel, que les aveugles partisans des jacobinières de Montrouge et de Saint-Acheul a, persécutent pour plaire à la puissance jésuitique. […] Ce conseil équivaut en quelque sorte à une déclaration hostile, faite contre la liberté et contre les droits les plus légitimes des peuples.
Oppresseur de la liberté, Bonaparte n’en caressa le fantôme que pour mieux déguiser son ambition démesurée. […] Le pouvoir absolu, ennemi irréconciliable de la liberté et des droits imprescriptibles et inaliénables des peuples, est nécessairement basé sur l’immoralité politique et se trouve dans un état perpétuel de fausseté et de mauvaise foi. […] S’il eut de grandes qualités, il n’aima jamais la liberté et versa inutilement des torrents de sang humain pour assouvir son ambition déréglée.
Ils ne les effacent jamais de leurs mémoires : ils agissent en conséquence, lorsqu’ils jouissent de leur liberté ; et les voilà corrompus, dans le cœur et dans l’esprit, pour le reste de leurs jours.
Benoît XIV nimoit beaucoup à se promener, il imagina d’aller tous les soirs aux quarante heures pour avoir occasion de sortir ; il n’a d’autre divertissement que d’aller passer le tems des chaleurs à Castel-Gandolfe, où il respire un meilleur ait, avec un peu plus de liberté. […] La loi Gabinia avoit confirmé cette défense, qui coitiones clandestinas in urbe conflavit, capitali pænâ mulctetur, & Plutarque en parle au long, & les condamne, parce que la nuit donne plus de liberté, & favorise le vice. […] L’indécence d’un tel changement de discipline inutile & dangereux, ne diminue pas l’indécence de toutes ces folies dans le Clergé ; mais ce sont deux liens de moins, par conséquent plus de liberté d’y aller, & l’espérence de l’impunité, puisque toutes les peines sont supprimées. […] Les Entrepreneurs du Vauxallh ne voyant plus le même empressement pour leur spectacle, imaginerent d’abord d’accorder aux hommes qui prendroient des billets d’entrée, la liberté d’y mener une Dame, gratts.
N’est-il pas bien singulier qu’un grand Philosophe qui ne veut point de vœux monastiques, qui crie contre les parens lorsqu’ils disposent de la vocation de leurs enfans & les destinent au clergé ou au cloitre, que ce grand philosophe abandonnant ses principes, dispose souverainement de la vocation de tous ses sujets, & les engage à la guerre sans liberté, sans réflexions, sans connoissance, & les force de servir quand il lui plait ? […] Selon un réglement très-sage de mon pere, chaque Capitaine doit avoir dans sa compagnie deux tiers d’étrangers, nous y gagnons des citoyens ; mais à la discipline des armes près, nous leur laissons une grande liberté, nous usons d’indulgence, ce qui les accoutume à nous. […] Voltaire a commencé par ses livres, son histoire, ses anecdotes ; il a rit agréablement, & se fait lire & goûter par sa gayeté & son coloris, avec une liberté qui a l’air de la bonne foi & de la vérité. […] L’esprit de liberté inséparable de leur principe ; la façon adroite de conserver leur avantage, & d’accuser leurs ennemis ; je me rappellois les actes quelquefois bizarres, mais pleins de vigueur des Parlemens d’Angleterre & de Paris ; je me décidois à sapper les fondemens de cette grande puissance, en la réduisant & le simplifiant autant que j’ai pu pour en être plus maître, on n’y est plus sûr de la couronne.
Je m’étonne que dans la multitude de recherches qu’a fait ce grand amateur de la danse, qui n’étoit pourtant pas grand danseur, il n’ait point parlé de la danse du sabbat ; il eût aisément trouvé dans les procès des Curés de Loudun & de Marseille, qu’on fit brûler, & dans tous les livres qui traitent des Sorciers & Magiciens, que dans le sabbat le diable donne le bal, que les sorciers & sorcieres dansent en rond, y font des pas de deux, de trois, des contredanses, des bourrées, des gigues ; que le diable est, comme de raison, le Roi du bal ; que malgré ses cornes & sa queue il se fait admirer par la légèreté de ses sauts, l’agilité de ses caprioles, la souplesse de ses membres, la finesse de ses pates, la justesse de son oreille, ainsi que les violons par la beauté de l’exécution ; que les plus malotrus sorciers & les plus vieilles sorciers, tout à coup changés par la vertu de sa baguette, s’y présentent de la meilleure grace, comme de vrais Adonis ; qu’on y sert des rafraîchissemens, & qu’on y prend toutes les libertés qu’on veut, sans que le diable s’en scandalise, comme l’on pense bien ; mais qu’aussi on en revient bien fatigué, lorsque le matin, à cheval sur un bâton, on retourne chez soi. […] Il est une ressemblance plus déplorable, le désordre qui y règne, les crimes qui s’y commettent, la liberté, ou plutôt la licence de faire sous le masque tout ce que la passion inspire. […] La jeunesse Grecque formoit des pas mesurés, & ne respiroit dans ses chants, ses mouvemens, ses attitudes, que la liberté, la joie, le plaisir, les transports de Bacchus. […] Batile, d’abord esclave, ensuite affranchi, donna dans une liberté effrénée de mœurs, dans une facilité extrême à se livrer aux parties de plaisir les plus libertines, dont la gaieté & la complaisance faisoit la joie, & à négocier tous les commerces galans des Seigneurs de Rome.