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27. (1759) Lettre à M. Gresset pp. 1-16

Quelles images plus fortes, plus intéressantes, souvent même sublimes de la perversité de nos mœurs et de nos usages, principalement dans le Temple de Thémis, où la plupart de ses Ministres assoupis sur leurs redoutables Tribunaux, laissent à leurs passions le privilége odieux de mettre les poids dans sa balance, et où le plus grand nombre de ses organes fait un trafic honteux et mercenaire de l’éclat de leur voix et de la subtilité de leurs sophismes, du faux et de la vérité, selon vos propres expressions ! […] Le Public relira avec la même satisfaction le voyage et les erreurs de ce nouvel Ulysse chanté dans votre charmante Iliade, aussi excellente dans le genre comique, que celle du Poète Grec dans l’Héroïque, et fort supérieure à son Poème insipide du Combat des Rats et des Grenouilles, dont le style languissant et froid ne saurait être comparé au style vif et enjoué de votre Héros, et dans le ton de la bonne plaisanterie, soutenu jusqu’au dernier vers. […] J’attends avec impatience la Critique que vous nous promettez d’un ridicule national, vicieux et très-commun : je croirais que ce serait l’Esprit Philosophique, si ce caractère était celui de notre Nation, chez laquelle le vrai Philosophe est fort rare, si l’on entend par ce mot ceux qui enseignent et qui pratiquent les maximes de la bonne morale, et si nous n’avions pas vu naître dans ce siècle l’abus scandaleux de ce titre respectable, et la plus fausse Philosophie. […] Quels regrets pour les vrais Chrétiens, qu’un génie d’une trempe aussi forte, et un si homme de bien, vive et meure victime des ténébres de l’erreur ! […] En finissant cette Lettre, je reçois le Journal de Trévoux, dont le principal Auteur est fort de mes amis, et s’est concilié l’estime générale des savants et des gens de bien par sa modestie, sa sagacité, son impartialité et son désintéressement : le cas qu’il fait de votre Lettre, l’a engagé à la déposer toute entière dans son Journal, comme un monument consacré à la Religion dont il est l’infatigable défenseur contre tous les Ecrivains qui osent l’attaquer.

28. (1769) Réflexions sur le théâtre, vol 8 « Réflexions sur le théâtre, vol 8 — RÉFLEXIONS. MORALES, POLITIQUES, HISTORIQUES, ET LITTÉRAIRES, SUR LE THÉATRE. LIVRE HUITIEME. — CHAPITRE II. Des Masques. » pp. 28-54

Elle étoit fort libre & fort indécente dans ses propos & dans son maintien. […] Allez, allez vous cacher ; M. le Dauphin vous trouve fort mal comme cela. […] Il se croyoit fort agréable. […] C’étoit un embarras pour les Acteurs, & l’exacte ressemblance étoit fort difficile. […] Tout l’art de Garrik y eût été fort inutile.

29. (1763) Réflexions sur le théâtre, vol. 1 « LIVRE PREMIER. CHAPITRE I. Le Clergé peut-il aller à la Comédie ? » pp. 10-27

La comédie est à plus forte raison interdite aux Ecclésiastiques en place. […] A plus forte raison des Religieux qui font une profession déclarée de régularité et d’éloignement du monde. […] Quelle est la vertu assez forte, assez éclairée pour se défendre de tant de pièges de toutes parts semés, et pour les démêler ? […] Si on ne sent pas l’indécence de ces ouvrages par de telles plumes, c’est une des plus fortes preuves du danger du théâtre. […]  896), décide fort rondement d’après Sanchez autre Jésuite, de Matrim.

30. (1773) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre treizieme « Réflexions morales, politiques, historiques,et littéraires, sur le théatre. — Chapitre III.  » pp. 75-112

Il avoit de la lecture & des connoissances, mais tout fort superficiel, & il vouloit étaler de l’érudition. […] Ce dessein bien exécuté a quelque chose de piquant ; mais il est devenu fort difficile, parce qu’il est aujourd’hui fort usé. […] de Malezieux homme d’un esprit fort onrné habile Mathématicien. […] Le public n’a pas tort, à cinq ou six pieces près, qui même ont bien des défauts, le Théatre de Moliere est fort peu de chose. […] C’est un instrument de musique monte sur des tons plus ou moins doux ou forts.

31. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — [Introduction] » pp. 2-6

 Mercier, Auteur fort connu, mais fort peu aimé des Comédiens, a tâché de se racommoder avec eux par un Eloge de Moliere, & je crain qu’il ne se brouille encore davantage. […] La peinture, la sculpture, la gravure ont transmis ses traits à la postérité ; mais n’ont pu lui présenter un beau visage : cet Arléquin étoit fort laid. […] Il étoit fort sensible au mépris & à la critique : plusieurs de ses pièces ne sont que des vengeances contre les censeurs.

32. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-huitieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. — Chapitre III. Suite de Mêlanges. » pp. 84-120

Scarron paya son Peintre par des vers burlesques, comme Moliere par des rimes fort plates. […] Nous avons parlé fort au long de la Danse, Liv.  […] Si le fait est vrai, ce qui est fort douteux, la perte est légere : Moliere n’étoit ni en état de traduire, ni d’entendre Lucrece. […] Elle avoit, il est vrai, d’autres amans dans le même-temps qui pouvoit y avoir part ; mais du moins la paternité étoit fort douteuse. […] Tout ceci n’est qu’une nouvelle attaque de la dévotion, qu’on veut ridiculiser, en rappellant & faisant triompher l’ancien Tartuffe aujourd’hui fort négligé, & y en ajoutant un nouveau, qu’on place dans un rang fort inférieur, & qui en affadit tout le sel.

33. (1776) Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme « Réflexions morales, politiques, historiques et littéraires sur le théatre. Livre dix-neuvieme. — Chapitre VIII. Du Clergé comédien. » pp. 176-212

Ses mots qui auroient été fort communs dans la bouche d’un autre, devenoient piquans & passoient pour des bons mots par le tour qu’il leur donnoit & l’air dont il les embélissoit. […] Ce qui est fort douteux : une tête si pleine de frivolité & de galanterie n’auroit jamais pu tenir contre l’ennui d’une éternelle solitude. […] Ces productions fort inférieures pour l’élégance du style aux poesies galantes & dramatiques de l’Abbé de Voisenon, ne sont ni plus ecclésiastiques, ni plus utiles. […] Les Scènes Angloises, Allemandes, Portugaises, Espagnoles, voyent fort peu d’Ecclesiastiques ; mais le Clergé Comédien fourmille en France, il est nombreux en Italie. […] Ce fut alors qu’il se livra au Théatre : occupation fort peu analogue à l’Office divin.

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